Lettre d'information

Du baptistère à l’autel

Une tradition longue et ferme La chose est désormais bien connue : le baptême est un sacrement de l’initiation chrétienne. On peut dégager de cette dernière notion deux intérêts majeurs. Le premier réside en ce qu’elle nous requiert de comprendre les trois sacrements qui la composent comme formant un « ensemble », donc comme « faisant système » ; en d’autres termes, chaque élément ne trouve sa pertinence que de son rapport aux deux autres. Le baptême n’est donc théologiquement pensable que moyennant son « achèvement » par le « sceau spirituel » de la confirmation et son aboutissement dans la communion au Corps et Sang du Seigneur. Le second intérêt vient de ce que le triple geste initiatique peut être aisément présenté, de ce point de vue, comme formant un seul « sacramentum ». Il est même juste théologiquement de dire alors qu’il n’existe qu’un seul sacramentum fondamental : celui par lequel chacun devient membre du « Corps du Christ » et pierre vivante du « Temple du Saint-Esprit » ; les autres sacrements ne viennent pas ajouter une grâce qui manquerait cet unique ensemble sacramentel mais soit en constituer la reprise après échec (réconciliation, onction des malades), soit en manifester le chemin concret de « vérification » au long de la vie (ordination, mariage).

Saint Augustin a exprimé avec une force inégalée, dans plusieurs sermons adressés à des néophytes, la dynamique qui relie les trois gestes sacramentels de l’initiation : « engrangés » au moment de l’entrée en catéchuménat, leur dit-il, vous avez, tout au long de celui-ci, été « moulus par les jeûnes et les exorcismes » ; alors, vous êtes venus à la « fontaine baptismale » pour y être « imbibés d’eau » et devenir ainsi une seule pâte, puis vous avez été « cuits au feu de l’Espri t », et « vous êtes devenus le pain du Seigneur. » C’est alors qu’il ajoute la formule devenue aujourd’hui célèbre : « Soyez donc ce que vous voyez, et recevez ce que vous êtes » (Sermons 227 et 272). Du baptême à l’eucharistie, c’est un unique processus qui se déroule par étapes : il s’agit de devenir pleinement les membres du corps ecclésial du Christ en participant à son corps eucharistique. Par ailleurs, le même Augustin, rapprochant Jn 6, 53 (« Si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’Homme, vous n’aurez pas la vie en vous ») de Jn 3,5 (« Nul, s’il ne naît d’eau et d’Esprit, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu »), estimait que la réception de l’eucharistie était aussi nécessaire au salut que celle du baptême. En tout cas, même lorsque l’onction de la confirmation sera séparée du baptême en Occident, on continuera de donner la communion aux bébés (une goutte de vin consacré) sitôt leur baptême. Il faudra attendre Florus de Lyon, au IXe siècle, pour que l’on commence à justifier théologiquement la séparation de l’eucharistie par rapport au

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