Lettre d'information

Guérir - Sauver : quel rapport ?

large que guérir. Ce terme couvre toute l’existence humaine, puisqu’il peut même permettre de sortir du désir immédiat. Il ne rejette pas la guérison physique possible, mais la dépasse jusqu’à renoncer à guérir de guérir. Nous connaissons bien l’attitude des lépreux de l’Evangile de Luc (Luc 17, 11 - 19). Il nous y est dit que les dix hommes sont guéris par Jésus de leur lèpre, mais qu’un seul vient le remercier. Or, ce seul-là peut être dit véritablement sauvé, sauvé de sa "centration" sur lui-même. On peut comprendre que les dix aient été heureux de voir cette gangrène les quitter, mais les neuf qui n’ont rien dit sont restés dans l’événement immédiat d’une guérison qu’ils espéraient bien sûr de tous leurs voeux, sans percevoir qu’ils devaient leur nouvelle situation, à un autre qu’eux-mêmes, Jésus, et par lui à Dieu, leur Créateur. Ils sont retés imperméables à l’ouverture qui leur était faite de pouvoir découvrir le sens profond de leur propre existence. Celui qui devrait pousser tout humain à comprendre que la guérison par excellence, le véritable salut humain provoque à se détacher du bien-être immédiat, afin de goûter à l’essentiel pour l’homme, sinon la reconnaissance de sa filiation vis-à-vis de celui qui lui a donné de vivre ?

Or, ce n’est que lorsque l’on peut pointer dans sa vie, au jour le jour, les moments lumineux dont on ne se sent pas propriétaire et que l’on attribue à une origine qui ne nous appartient pas, que l’on peut reconnaître le salut véritable, même si la guérison corporelle tarde à venir, voir n’est plus pensable. Comme l’exprime le guide pastoral Des sacrements pour les malades, "Le salut véritable ne consisterait-il pas dans une sortie de le seule guérison physique pour accéder à la découverte d’une autre relation, celle qui ferait découvrir la relation de tout homme avec Dieu son Père par le Christ... Le salut, c’est un peu la guérison portée à son comble de la part d’un Autre au travers même de la mort acceptée, et ce non seulement pour soi et pour son entourage, mais aussi pour tous les hommes".

Ainsi comprise, la guérison ne peut plus être seulement retour à la case départ, ni simplement retrouvailles avec la santé antérieure. La santé s’est déplacée, elle s’est inventée une manière d’être nouvelle. Elle accepte, assume les réalités concrètes de crise, tant avec soi-même, avec son corps, qu’avec les autres (certaines relations sont définitivement coupées, spécialement professionnelles), qu’avec Dieu lui-même si la révolte s’est immiscée dans notre histoire. Elle ne les nie pas, elles sont bien là , parfois lancinantes au quotidien, mais elle a ouvert un champ de donation de sens à la nouvelle existence, elle s’est transformée en maturation, en enrichissement, seconde naissance en quelque sorte, puisque entrée dans un univers nouveau. Maladie et guérison, possible ou non, deviennent dès lors des lieux

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