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Les jubés dans l’histoire

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Les jubés dans l’histoire

La proclamation de la Parole in eminenti est une constante dans les églises chrétiennes. Depuis l’Antiquité tardive, depuis le moment où le culte devient libre, puis officiel, les grandes basiliques chrétiennes disposent de dispositifs particuliers destinés à proclamer les lectures. Il s’agissait d’ambons placés à l’entrée du sanctuaire, entre celui-ci et le chœur des chantres. La monumentalité de ces pupitres apparaît encore à la basilique Saint-Clément de Rome et dans les beaux fragments conservés dans les églises de Ravenne.

Vue depuis le jubé du chœur de la cathédrale Saint Cécile d’Albi. © Photographie : M. Escourbiac

Cependant, l’évolution des églises chrétiennes au Moyen-Âge eut des conséquences paradoxales. A la fin du XIIe siècle, la réforme grégorienne a triomphé. Elle impose désormais que clercs et laïcs, évêques et chanoines, cohabitent dans seul édifice unique : la cathédrale monumentale remplace les ensembles cathédraux comportant plusieurs lieux de culte. Certaines abbatiales sont reconstruites de façon tout aussi imposante. Afin de disposer du calme nécessaire pour réciter les offices au chœur et s’isoler de la foule des fidèles et des passants, les chanoines font réaliser, dès les premières décennies du XIIIe siècle, des clôtures, dont on sait qu’elles étaient censées les isoler du bruit et des « courants d’air ». On ne dispose pas de textes du XIIIe siècle évoquant directement cette naissance, mais, aux XVIIe et XVIIIe siècle, des liturgistes ont pu reconstituer le processus de leur élaboration.

Jubé Limoges Jubé de la cathédrale, Limoges / © Philippe Rivière. 2009. Région Limousin. Service de l’Inventaire et du patrimoine Culturel.

La nécessité de clore le chœur sur sa face ouest, celle qui regardait vers la nef, lançait un véritable défi. Il s’agissait d’établir une clôture de plusieurs mètres de haut qui intégrât les fonctions incombant aux ambons qu’elles allaient remplacer. C’est cette fonction de « tribune évangélique » qui a donné son nom au jubé. Après avoir été bénis par le célébrant au son de la phrase « jube Domine, benedicere… », le sous-diacre montait à la tribune pour proclamer l’Épître, puis le diacre pour proclamer l’Évangile. La proclamation elle-même variait selon les églises. Certaines cathédrales comportaient deux, trois, quatre, voire cinq pupitres sur leur jubé. Dans certaines d’entre elle, l’Évangile était proclamé depuis le nord, dans d’autre, vers le nord. Mêmes variation pour l’Epître du côté sud. Mais les liturgies gallicanes étant une somme de particularismes, à Sens, on lisait l’Évangile au sud et l’Épître au nord, car c’est au sud que se trouvait adossée la stalle des archevêques. Le jubé de Sens était d’ailleurs très particulier : il était « en deux corps »

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