La vie communautaire... dans un Foyer-Séminaire


Daniel BOICHOT,
prêtre du diocèse de NANCY,
responsable du Foyer-séminaire St François d’Assise de NANCY
et membre de l’atelier "Foyers-séminaires/S.N.V."

Dans les Foyers-séminaires, la vie communautaire ne vise pas seulement à répondre au désir des jeunes de vivre ensemble. Elle correspond aussi à une volonté institutionnelle pour permettre une maturation et un discernement. Lieu de passage, le Foyer-séminaire doit constituer un tremplin pour une vocation qui va se réaliser ailleurs, et plus tard...

"Vous avez dit communauté !". Dans le parcours des Foyers-séminaires, c’est un déclic habituel chez les jeunes. On vibre à cette appellation : COMMUNAUTE, sans doute la réalité qui tranche le plus avec celle des petits séminaires d’autrefois...

Un désir des Jeunes

C’est une requête habituelle chez le jeune qui se présente : il veut réfléchir à son avenir au service des autres et de l’Eglise ; il porte une "petite idée" d’être prêtre ; il veut, vivre en communauté pour être, avec d’autres comme lui, et pour vérifier sa vocation.

Il exprime aussi parfois un rêve communautaire, un échafaudage mystique de la vie en communauté que le garçon croit pouvoir escalader sans préparation ! Les entretiens que nous avons avec lui avant son entrée au Foyer-séminaire consistent souvent, sur ce domaine, à démystifier : la vie communautaire est très porteuse et stimulante, sûrement, mais elle est tout autant rugueuse et rabotante !

Une volonté de l’institution

La communauté est voulue par l’institution, non pas d’abord comme un moyen pédagogique, mais comme un lieu de vie, même si ce lieu de vie sera provisoire (deux ou trois ans).

Le garçon y acquiert et y conforte une CAPACITE A LA RELATION :

- elle se vérifie dans le partage des biens personnels et la participation au respect des biens communautaires, et dans le partage de la vie de chacun dans un climat d’écoute ;

- elle progresse dans l’effort de délicatesse à déployer tous azimuts ;

- elle se noue dans la confiance qui s’établit au long de l’année entre les jeunes et avec les éducateurs, dans la responsabilité et le volontariat.

Le jeune croit entrer en septembre dans une communauté toute faite. Il s’aperçoit vite que ce n’est qu’une collectivité à laquelle il est appelé à participer de bon cœur, précisément pour qu’elle devienne une communauté. On n’en profite jamais autant que quand on lui apporte beaucoup.

Par une complicité stimulante en ce qui concerne la vie de groupe, le travail scolaire et universitaire, la prise en charge des services, l’insertion dans le monde des jeunes..., les membres de la communauté donnent une dimension altruiste à leur vie, tremplin pour une dimension ecclésiale.

Une motivation pour rester

Il est frappant de constater aussi combien la vie de la communauté est le point commun aux motivations pour rester au Foyer-séminaire. Tantôt plutôt "coton", tantôt plutôt "exigence", c’est le domaine dans lequel les jeunes peuvent vivre entre eux un marchepied vers la vie adulte. Ils aiment les joies et ils combattent les rugosités de cette vie ensemble.

Au départ, le bilan est moins positif en direction spirituelle qu’au bilan de fin d’année en communauté, où ils expriment différentes positions :

"J’ai découvert l’autre par la discussion."

"Le fait de vivre en communauté confronté à des expériences différentes de la mienne a été formateur."

"Aux messes de communauté, je ressentais un partage et une unité."

"Différentes choses m’ont marqué : l’ouverture et la confiance selon les moments : grande en équipe de vie, plus petite à table."

"J’ai découvert l’accompagnement spirituel : il y a eu des compléments apportés dans ma réflexion sur le pourquoi de la vie."

"Une difficulté que j’ai eue : c’est aller vers les autres. On a du mal à aller dans la chambre des autres, à faire un pas."

Une difficulté

Reste que le désir de vie communautaire exprimé à l’entrée ne résout pas tout. Souvent, nous recevons des jeunes qui sont peut-être plus personnels, moins prompts au service, ayant peu le sens de l’effort.

Nous avons de plus en plus de mal à les "dégrossir" humainement : tant pour l’apprentissage à balayer, la qualité à mettre dans les discussions à table, la correction en collectivité, que pour l’attention portée aux autres. Est-ce dû à l’influence de l’individualisme ambiant ? Cela pose en tout cas question...

La vie communautaire et les exigences imposées par l’équipe animatrice les aident à compter avec les autres dans la vie : c’est là le point le plus visible de leur maturation humaine.

Des risques à dénoncer

Si la communauté reste un lieu privilégié pour la recherche vocationnelle, elle n’en est pas pour autant l’unique moyen. En ce sens, plusieurs risques sont à dénoncer :

- Croire que la communauté est le seul moyen de discernement avant une entrée en premier cycle ou en noviciat.
Ce n’est pas un passage obligé, même si nous avons à vérifier une certaine capacité à expérimenter la vie commune. D’autres instances comme le Service Diocésain des Vocations peuvent accomplir également cette mission.

- Croire que la communauté est le seul lieu d’éducation.
Nous nous inscrivons en effet dans un maillage éducatif plus large dont les parents constituent d’abord la pierre d’angle. Mais qui a été tissé aussi par la catéchèse, le mouvement, la paroisse, l’aumônerie ou l’école..

- Croire enfin que la communauté est le seul but à atteindre, un objectif à suivre pour lui-même.
Or, ce n’est qu’un moyen parmi d’autres pour mieux s’ouvrir aux appels du Christ et envisager comment il est possible d’y répondre. Signe de l’Eglise, la communauté doit renvoyer aussi à d’autres communautés, d’autres lieux d’Eglise, d’autres appels.

En dépit du risque toujours présent de constituer un lieu "cocon-coton", la dimension communautaire apporte beaucoup au projet du Foyer-séminaire dans son souci d’être un espace de structuration humaine et chrétienne.