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Les Instituts séculiers et les jeunes
C.N.I.S.,
Conférence Nationale des Instituts Séculiers
Si l’appel au sacerdoce, à la vie religieuse est, aujourd’hui en France, une question préoccupante, elle l’est aussi en ce qui concerne les Instituts Séculiers. Ceci pour au moins deux raisons majeures :
Le mode de vie que proposent les Instituts séculiers ne semble pas aller dans le sens de ce que recherchent en général les jeunes qui pensent être appelés à une consécration,
Les Instituts séculiers sont très mal connus dans l’Eglise.
I - Ce que paraissent chercher les Jeunes et ce que proposent les Instituts Séculiers
Disons d’abord qu’il est rare, aujourd’hui en France, que l’on pense à un Institut séculier avant 25 ans. Et c’est fort sage. C’est vers la trentaine, voire plus tard que se pose la question. Pour les moins de 30 ans, pour ces adolescents qui n’en finissent pas de mûrir, selon Tony ANATRELLA, attentes et propositions n’ont pas beaucoup de chances de se rencontrer...
La dernière étude du Service National des Vocations (VICHY - Mai 1989) et nos propres constats permettent de préciser quelque peu où se situent les difficultés. Nous en retiendrons cinq :
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Les jeunes ont un grand besoin de se retrouver dans des groupes porteurs des groupes chauds, des "cocons".
Ce n’est pas ce que nous offrons. Même si nos rencontres sont fraternelles, chaleureuses, si une grande communion nous unit pour assurer notre mission, nous n’en vivons pas moins une solitude décapante dont il nous faut faire l’apprentissage et une autonomie parfois difficile à gérer.
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Les jeunes ont un grand besoin de repères, de signes auxquels ils puissent s’accrocher, de modèles auxquels s’identifier.
Nous, nous avons à leur offrir la vie ordinaire de tout laïc, dans un quotidien généralement peu glorieux.
Et pourtant là, nous avons un formidable modèle à proposer en la personne de Jésus de Nazareth. Mais la difficulté est grande car il faudrait que les jeunes puissent retrouver en nous un petit peu du modèle proposé...
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Les jeunes ont peur de l’engagement : peur de quitter les études pour entrer dans la vie professionnelle, peur de quitter la famille, de s’engager pour le long terme dans une vie de couple. Le militantisme est en baisse...
Les jeunes ont, en général, peur de l’avenir qui leur paraît incertain, fermé. Alors ils donnent la priorité au présent et essayent d’obtenir tout ce qu’ils peuvent tout de suite.
Et nous, nous leur proposons un engagement dans la durée, avec tous les aléas et les incertitudes de la vie à gérer dans le travail, la santé, le logement...
Et nous leur proposons en plus la discrétion, voire l’anonymat dans une consécration qui cependant prend tout entier le membre d’un Institut séculier.
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Les jeunes, en majorité, ont une grande générosité. Ils l’investissent prioritairement dans des actions caritatives ponctuelles.
En France, les jeunes chrétiens, dans l’ensemble, quand ils s’engagent préfèrent un service ecclésial où le terrain paraît plus sûr que dans les structures du monde.
Nous, "notre tâche première est la mise en oeuvre de toutes les possibilités chrétiennes et évangéliques cachées mais déjà présentes et actives dans les choses du monde..., le monde vaste et compliqué de la politique, du social, de l’économie, mais également de la culture, des sciences et des arts, de la vie internationale, des mass média"
(Paul VI au Congrès Mondial des I.S. à ROME, 1976).
Le champ de notre apostolat est mouvant, conflictuel, incertain... Avant de voir un résultat, il faut généralement un long travail souterrain avec des hommes et des femmes souvent bien loin de l’Eglise...
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Aujourd’hui, les jeunes sont presque spontanément citoyens du monde. Leur besoin de découverte, entre autres, trouve dans les médias, les voyages de plus en plus faciles, de quoi alimenter leur curiosité, leur besoin d’évasion, leur sensibilité.
Nous, même si la jeune génération s’inscrit tout à fait dans cet esprit, c’est d’abord la où nous sommes que nous devons profondément nous enraciner. C’est cet espace-là, souvent petit, qui nous est donné prioritairement à transformer, évangéliser.
Et c’est à partir de là qu’il nous faut aussi essayer de découvrir, de rejoindre, de comprendre les autres, de devenir catholiques "frères universels".
II - Les Instituts séculiers sont mal connus dans l’Eglise
Comment pouvons-nous proposer notre vocation à des jeunes ? C’est assez simple à résumer :
Si les services d’Eglise chargés de la pastorale des vocations, si les prêtres, les évêques à l’occasion de la Journée des Vocations, par exemple, ne proposent pas les Instituts séculiers comme une vocation importante pour l’Eglise et pour le monde, nous les Instituts séculiers n’avons que très peu de moyens pour le faire.
Prenons un exemple : une congrégation religieuse, un groupe charismatique, la Mission de France, un mouvement d’Action Catholique..., ont toute possibilité d’organiser des rencontres de jeunes ou même simplement d’être un lieu de passage, d’accueil...
Ni l’Institut séculier en tant que tel, ni les Instituts séculiers regroupés en Région ou en Conférence internationale, ne peuvent faire ce genre de proposition.
Les membres seuls, à titre personnel, peuvent et devraient être "appelants". A condition qu’ils acceptent de dire et de "rendre compte de l’espérance qui les fait vivre".
Que reste-t-il aux Instituts séculiers pour se dire ?
Des publications : livres, revues, brochures, au moment de la Journée des Vocations, par exemple.
Des témoignages, des interviews à Radio Notre Dame, Radio Fourvière, dans quelques radios locales.
Des rassemblements inter-Instituts séculiers, diocésains ou régionaux, où sont invités des membres des Services Diocésains des Vocations, l’évêque...
Notre participation à des initiatives prises par un Service Diocésain des Vocations, le Service National des Vocations, par exemple notre présence au Pavillon des Vocations à LOURDES...
Mais cela suffit-il, si les responsables de l’Eglise méconnaissent les Instituts séculiers et leur mission ? Quelles autres propositions pouvons-nous faire ? Devrions-nous réfléchir autrement à cette question ? C’est un problème...
Les jeunes aiment les défis. Si nous ne savons pas leur en proposer, ils en inventent.
Notre vocation est un défi et notre mission devrait donner envie à des cœurs audacieux de se lancer dans cette aventure spirituelle originale.
Mais pour cela deux conditions au moins sont nécessaires :
La première, c’est que nous osions sortir de notre discrétion pour témoigner de ce que nous vivons. Et que, dans les lieux où se réfléchit et s’élabore la pastorale des vocations, nous soyons présents comme partenaires compétents.
La seconde condition c’est que l’Eglise connaisse bien notre vocation. Que les responsables de la pastorale des vocations y croient ; qu’ils croient que là où nous situe notre consécration, à cette surface de contact Monde <——> Eglise où nous nous trouvons, nous avons à jouer un rôle important dans l’évangélisation du monde aujourd’hui.