Prier à la manière de Jésus


François CLERET,
prêtre, responsable du SDV du diocèse de LE MANS

Prier pour les vocations, c’est une nécessité vitale pour notre Eglise et c’est aussi un appel de Jésus lui-même dans l’Evangile : "Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson"
(Mt 9-38)

Qui de nous n’a pas sincèrement prié le Seigneur "d’envoyer des ouvriers" ? Reconnaissons que les résultats ne sont pas à la hauteur de nos attentes. Dieu serait-il devenu sourd à nos prières ? Et pourtant, dans l’Evangile, le propriétaire de la vigne ne sort-il pas à tout heure pour embaucher des ouvriers ? (Mt 20,1-7).

Alors, nous qui souffrons aujourd’hui du manque de prêtres, ne devrait-il pas suffire de demander à Dieu de nous envoyer des prêtres ? Je crains que cette manière d’envisager la prière ne soit trop rapide et superficielle. Il nous faut prier Dieu, oui ! Mais à la manière de Jésus. Sa prière jaillit du cœur de son activité apostolique.

- Suivre le Christ

L’Evangile de Matthieu nous décrit l’activité inlassable de Jésus. On le voit parcourir villes et villages, rencontrer les gens, enseigner dans les synagogues, guérir ceux qui souffrent. Habité profondément par le souci de sa mission, il n’a qu’un désir : révéler aux hommes de quel amour Dieu les aime, jusqu’où va la passion de Dieu pour l’homme. Cette passion de l’homme, Jésus la vit en se faisant l’un de nous, proche de tous, spécialement des petits. Jésus connaît les hommes et les femmes de son temps. Il partage leur vie. Il sait leurs détresses et leurs désirs aussi. Pour eux, il se dépense sans compter.

Prier pour les vocations, ce sera demander à l’Esprit Saint de susciter en nous le regard d’amour du Christ sur ce monde.

- Le regard de Jésus

Jour après jour, en accomplissant son ministère de salut, Jésus va rencontrer les foules. Et, nous précise l’évangile, il va se laisser saisir et émouvoir par ces hommes et ces femmes qui sont comme des brebis sans bergers. Foules perdues et sans personne pour les guider. C’est en contemplant la réalité de ce monde que Jésus est saisi de pitié. On est loin d’un regard de commisération paternaliste. Jésus regarde avec le cœur, nous révélant ainsi la manière dont Dieu regarde, depuis toujours. "J’ai vu, j’ai vu la misère de mon peuple gui est en Egypte. J’ai entendu son cri devant ses oppresseurs..." (Ex 3,7).

C’est bien à cause de ce qu’il voit et entend que Jésus va plus loin, qu’il se donne inlassablement, qu’il va se livrer totalement. Pour l’heure, il voit les besoins et la tâche à accomplir.

"La moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux"

Notre prière pour les vocations, elle sera à l’image de celle de Jésus, le cri que nous ferons monter vers Dieu à la vue de ceux qui sont aujourd’hui abattus, prostrés, comme des foules sans bergers.

- Alors, priez !

Du plus profond de lui-même jaillit l’invitation pressante à la prière. "Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson". Prière véritable de celui qui laboure le terrain apostolique et qui ressent l’urgence de la tâche à accomplir. La moisson est abondante, prometteuse. Il y a de quoi faire, de quoi entreprendre pour répondre aux appels qui montent de la vie des hommes. Oui, il est urgent que soient embauchés des ouvriers et des ouvrières.

Alors, priez !

Mais, à la manière du Christ, d’une prière qui engage et qui s’élève des appels de ce monde où il est immergé. L’évangile nous rapporte quelques-uns de ces moments intenses où Jésus se retire au désert alors qu’il est en pleine mission ou qu’il s’apprête à faire des choix décisifs. A la suite de la folle journée de Capharnaüm où Jésus avait enseigné dans la synagogue et guéri de nombreux malades, il se rend au petit matin dans un endroit désert. "Et là, il priait" (Mc 1,35)

- Une prière au Père

Car la prière de Jésus s’adresse au Père. Et ses disciples sont invités à faire de même. "Priez donc le maître de la moisson...". La moisson a un maître qui est le Père. Jésus, l’Envoyé du Père, invite ses disciples à orienter leur prière vers le Père, source de vie, créateur et maître de toutes choses. Quand les disciples vinrent rendre compte à Jésus de leur première mission, celui-ci exulta sous l’action de l’Esprit Saint et dit : "Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout petits" (Lc 10, 21).

Une authentique prière pour les vocations s’enracine dans la contemplation du dessein de salut reçu du Père, accompli par le Fils, accueilli dans l’Esprit répandu en ce monde. La prière est trinitaire. "Comme le Père m’a envoyé, à mon tour, je vous envoie" (Jn 20-21).

Entrer dans la prière du Christ, c’est, à sa suite, recevoir mission d’un Autre et se remettre dans une disponibilité confiante entre les mains du Père. "Non pas comme je veux, mais comme tu veux" (Mt 26, 39).

C’est sans doute la condition essentielle pour que notre prière pour les vocations soit exaucée. "Tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l’accordera".