"Bouge ta vie" avec l’Année Diaconale


Jean-Luc Pradels
secrétaire général de l’Année Diaconale
(Strasbourg)

L’année diaconale est une proposition de volontariat adressée à tous les jeunes européens, une année de service (diaconat) de dix à douze mois, une année au service des autres. Cette initiative est née, il y a cinquante ans, dans le cadre de la diaconie allemande près de Nuremberg. Un pasteur eut l’idée de proposer aux jeunes une année professionnelle non rémunérée, ce qui est devenu une habitude en Allemagne.

Cette année, trois mille cinq cents jeunes font cette expérience, dont cinq cents à l’étranger. L’idée s’est répandue en Europe et, aujourd’hui, quatorze pays européens ainsi que les États-Unis composent un réseau informel qui va se doter prochainement de statuts associatifs.

En 2003-2004, ce sont soixante-dix jeunes étrangers qui ont fait leur année diaconale en France :

• certains viennent par un réseau d’Église,
• d’autres avec le programme jeunesse européen financé par la Commission Européenne,
• d’autres enfin au titre du service militaire qui existe encore en Allemagne.

Les lieux du service sont des lieux institutionnels : maisons pour personnes âgées, pour personnes handicapées, activités auprès des jeunes, paroisses... Ce projet ouvert, à l’origine, aux jeunes protestants, accueille aujourd’hui tous les jeunes quelle que soit leur religion. Aucune compétence particulière, professionnelle ou autre n’est exigée. On demande au jeune :

• d’être motivé,
• d’être prêt à partir de chez lui,
• de rendre service (il ne s’agit pas de tourisme).

Le but premier est de prendre une année de sa vie à ne rien faire d’autre que de penser aux autres. Les jeunes sont nourris, logés et ils reçoivent un peu d’argent de poche. On veille à bien les accompagner :

• un tuteur sur place qui l’accompagne tout au long de l’année,
• des compagnons de route (deux week-ends par an et par région),
• le secrétariat à Strasbourg gère les revendications des jeunes.

Il faut les faire passer du « Moi j’ai droit... moi je veux... » à « L’autre a envie de... » Ils ont besoin de temps pour parler entre eux, pour faire la fête.

Un temps pour soi :

• un temps pour soi après le bac et avant les grandes études ; pour faire le point, réfléchir sur le sens de sa vie, sur son engagement citoyen ;
• un temps pour les autres : cf. plus haut, le service ;
• un temps pour Dieu : un thème biblique est proposé tout au long de l’année. Un personnage de la Bible : Elie, Joseph fils de Jacob... permet une inculturation biblique et une actualisation dans des narrations.

Trois paroisses en France ont des projets avec des jeunes (Grenoble, Castres et Mazamet).

Des volontaires et des directeurs témoignent

Voilà cinq mois que je suis en Angleterre et quel chemin ! J’ai envie de bien faire et de donner le meilleur de moi-même à ces enfants. Cette expérience est ce dont j’avais besoin et je crois que j’ai appris beaucoup et même grandi. Je repartirai mûri dans ma tête.

Emmanuel, volontaire français au Royaume Uni

Je voulais changer ma vie, voir ce que cela m’apporterait d’aller dans un endroit complètement inconnu.

Séverine, volontaire française aux USA

Ce n’est pas facile : au service on a surtout des malades qui ont le sida ou le cancer... J’ai appris à aimer la vie, à voir la chance que j’ai d’être en bonne santé. L’année prochaine je vais commencer des études de médecine.

Jacolien, volontaire néerlandaise dans une clinique en France

Ce temps de service est un défi de chaque jour. A chaque rencontre il faut s’adapter et trouver son équilibre, ne pas avoir peur de se « jeter à l’eau », savoir partager ses opinions et ses croyances dans la tolérance et la patience ; savoir régler les conflits dans l’harmonie. En découvrant la vie de ces gens je me découvre également ; c’est un échange permanent.

Rachel, volontaire française au Royaume Uni

En tant que responsable d’un établissement pour enfants, je souhaite la présence dans notre équipe de bénévoles... Les bénévoles et les volontaires de l’Année Diaconale nous apportent un bol de fraîcheur, de non-conformisme, de nécessaire remise en question. Cette proximité, cet exemple de dévouement au sein de l’équipe brise nos réflexes conventionnés. La présence des bénévoles et des volontaires en particulier nous apporte une dimension morale nécessaire et conforte ce qui nous reste du « label » d’œuvre chrétienne. Il nous semble que le mutualisme du professionnel et du volontaire crée une synergie efficace dont bénéficiera l’enfant. Le jeune volontaire ne repartira pas les mains vides : il aura eu le sentiment d’avoir réalisé un service utile à quelqu’un. L’équipe lui aura donné un début de formation professionnelle. Les enfants lui auront appris le français. Le jeune, les enfants et l’équipe, chacun aura donné à l’autre et reçu de l’autre.

Un directeur d’établissement pour enfants

Dans notre établissement pour personnes handicapées, les volontaires sont un apport complémentaire pour la prise en charge quotidienne, l’animation, la mobilité des résidents, et une stimulation de notre créativité, une préservation de la notion d’aléatoire (nous les avons, ou pas), un rappel de la notion de bien vouloir, de service et donc de contrat moral, dans un environnement régi par le contrat de travail.

Un directeur d’établissement pour personnes handicapées