LES LENDEMAINS DE FRANCHEVILLE


Yvon BODIN *

Les responsables diocésains du Service des Vocations viennent donc de vivre avec bonheur la session de FRANCHEVILLE dont ce numéro fait largement écho.

Dans la foulée de cette session, le Service National a envisagé de relancer hardiment les diocèses dans cette direction de l’appel au ministère des prêtres diocésains. Il a envisagé deux ans de travail et un Congrès national pour recueillir cet effort.

Evêques consultés, ce projet a été soumis aux délégués régionaux du Service. En leur nom, au nom de l’équipe nationale, je viens vous entretenir de ce projet. Je voudrais préciser trois choses :

  • L’esprit qui doit inspirer une telle entreprise : "DES CONVICTIONS DIRECTRICES"
  • Les besoins et les attentes qui la commandent : "LES LECONS DE FRANCHEVILLE"
  • Le chantier qui va s’ouvrir : "TRAJECTOIRE VERS UN CONGRES".

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I - DES CONVICTIONS DIRECTRICES

Nous l’avons dit bien des fois, le Service des Vocations doit courageusement servir la cause qui lui a été confiée, l’éveil et l’accompagnement des vocations particulières, vie religieuse, missions, ministère ordonné. Cette mission délicate doit être présidée par la préoccupation constante de faire oeuvre d’Eglise et non pas de simple recrutement. Les réflexions qui suivent sont toutes inspirées par ce souci de l’édification de l’Eglise, selon toutes ses composantes et avec tous ses bâtisseurs.

l - Une pastorale menée en Eglise et au service de l’Eglise

La fondation, la croissance et la mission de l’Eglise sont les ressorts de la pastorale des vocations. La pastorale des vocations est donc une préoccupation permanente commune, c’est l’affaire de tous, on travaille tous ensemble : concertation et communion sont la condition de l’authenticité d’une telle pastorale.

  • - Pastorale DIVERSIFIEE : car il s’agit de servir la liberté de l’Esprit, et l’Esprit emprunte des voies différentes. Il serait absurde d’oublier les originalités propres de la vie religieuse et du ministère ordonné et donc les originalités propres de l’appel à la vie religieuse et de l’appel au ministère ordonné.
    Il serait absurde de gommer le souci des évêques pour la relève des ministres nécessaires à la vie des diocèses, et celui des responsables religieux pour la continuité de leurs instituts..
    Toute captation ou monopolisation en ce sens serait erreur théologique et mauvaise action.

  • - Mais aussi, pastorale COMMUNE : si on y va comme on est, on y va ensemble. Le danger serait l’éclatement d’une grande dynamique d’Eglise en des pastorales parallèles et concurrentes.
    Le danger pour chacun est de cultiver l’angoisse de la pénurie, de reprendre ses billes et de partir, chacun de son côté, d’un pied léger, dans le passé le plus révolu d’un recrutement individuel et portatif.

    Ce qui est en question, c’est de faire oeuvre d’Eglise. Hors de cette coordination des forces appelantes de l’Eglise, c’est la visée de communion qui s’estompe. C’est ainsi qu’on enchaîne l’Esprit.

    Au contraire, ce que nous voulons c’est aider des tas de gens à travailler à l’éveil des vocations particulières et à leur accompagnement.
    Assurer cette pastorale concertée, c’est déjà dire et signifier quelque chose de l’Eglise.

2 - Une attention plus vigoureuse à la réalité du monde des jeunes

L’objet de notre pastorale - éveil, accompagnement, discernement - est un objet imposé, mais l’inspiration de cette pastorale est toujours à ressaisir. Et là, surgit une question considérable : notre service est-il adapté aux vocations d’aujourd’hui ?

L’observation nous oblige à dire avec honnêteté et humilité que des jeunes empruntent souvent d’autres circuits que les nôtres, sans doute parce qu’ils y trouvent des propositions qu’il resterait à discerner ; ou bien que nous sommes à court et sans réponse en présence de candidatures d’un type nouveau. Il s’agit notamment d’hommes et de femmes qui viennent de la pleine sécularité, de la pleine modernité, de gens qui sont dans la mouvance de l’univers de la culture naissante, mais que travaille l’Evangile.

Face à ces adultes, sommes-nous à même d’accueillir ? Qu’avons-nous à offrir ?
Sommes-nous au carrefour des déplacements évangéliques ?

Il nous faut inventer dans l’attention au monde nouveau des jeunes, accueillir avec amour et, bien sûr, discernement, cet ailleurs et cet autrement des jeunes.

3 - Un effort renouvelé en direction de l’Eveil

Cette remarque est une insistance particulièrement commune au Service National et aux Régionaux.
La cible de cet objectif est le monde des adolescents, et un univers à retrouver : celui de la pré-adolescence.
Pousser une pastorale de l’éveil qui soit :

  • Eveil au primat de Dieu, à l’enjeu de l’existence, au pari évangélique à la suite du Christ, dans un monde paganisé.
  • Eveil à l’expérience spirituelle de la rencontre du Christ autour de l’Evangile, de la prière et de l’Eucharistie.
  • Eveil à l’expérience de l’Eglise comme communauté de frères et communauté de service de tous les frères.

4 - Des équipes diocésaines crédibles et valables

Il faut se réjouir du chemin considérable parcouru ces dernières années : le Service des Vocations toujours mieux coordonné par un responsable soigneusement désigné, a de plus en plus le souci de démultiplier sa présence aux secteurs de la pastorale par des relais et des antennes, de spécifier son travail par la collaboration de gens représentatifs de la diversité des vocations.

Il faut accentuer encore cette crédibilité du service par la qualité de ce qu’il représente concrètement dans chaque diocèse. Notre attention est attirée sur :

  • SA COMPOSITION : il faut y retrouver notamment une présence de représentants de la Vie Religieuse, dûment mandatés et reconnus, et à ce propos plus précisément, une présence masculine.

  • SA COMPETENCE : il nous faut promouvoir la formation des formateurs, c’est-à-dire une réelle initiation dès le séminaire, et présentement une formation au discernement.

  • SON FONCTIONNEMENT  : le Service diocésain doit être très en lien avec l’évêque et ses collaborateurs : Si le travail du S.D.V. pour l’éveil, l’accompagnement et le discernement est un travail qu’il doit assumer en propre, ce n’en est pas moins un travail appelé à être toujours mieux épaulé et concerté avec ceux qui sont les mieux situés et qualifiés dans le diocèse, pour un repérage et le discernement des jeunes appelables.
    Il doit être également très en lien avec les Instituts de vie religieuse, dans le sens d’une concertation confiante, honnête et servante.

  • SES PROPOSITIONS :
    • Celles concernant l’ACCUEIL : la mise en place de lieux et de temps initiatiques qui puissent assurer la reconnaissance des personnes, donner une parole qui structure la foi, procurer la rencontre de témoins.
    • Celles concernant l’ACCOMPAGNEMENT : il est parfois si léger. Il nous faut présenter des propositions qui assurent progression et avancée, d’une année sur l’autre ; qui assure un accompagnement personnel et non seulement de groupe ; qui offre des temps forts suffisamment consistants et nombreux.

5 - Une insertion plus large des laïcs dans nos services

Cette insertion demande à être promue avec équilibre et intelligence ecclésiale, mais aussi avec décision et fermeté. Il s’agit de dire par là quelque chose de l’appel, de restituer plus largement l’initiative de l’éveil et de l’interpellation dans le Peuple de Dieu, de réaliser, plus et mieux, ce que l’on voulait dire quand on disait que "le Service Diocésain des Vocations est une chaîne d’appelants".

II- LES LEÇONS DE FRANCHEVILLE

Il s’est passé trois choses importantes dans cette session :

  • Une RE-FONDATION du ministère de prêtre diocésain
  • l’INTERIORISATION qu’en ont fait les participants
  • l’IMPULSION PASTORALE qui en est sortie.

l - Re-fondation

  • Par la redécouverte et sa mise en valeur que le ministère de prêtre diocésain est un chemin de sainteté.
    C’est un ministère qui correspond à une fonction et à une tâche, mais il ne se réduit pas à une fonction, la mission est commandée par une mystique.

  • Par la redécouverte ou mise en valeur de l’appartenance à une Eglise diocésaine, par l’importance d’avoir à valoriser l’histoire, les visages, les colorations d’une église diocésaine.
    Au total, 1e diocèse est pour nous prêtres, notamment, un espace spiritue1. Re-fondation donc !

2 - Intériorisation

Le partage de vie proposé aux responsables S.D.V. sur leur propre manière de vivre leur sacerdoce, a permis, au-delà des discours, d’aller au coeur même de ce qui les faisait vivre. Ce partage gratuit fut un temps fort de communion fraternelle et, pour certains, ce moment de lumière et d’espérance où le mot "passion" reprenait son double sens : ce qui crucifie mais aussi ce qui fait vivre.

3 - Impulsion pastorale

Cette session a permis de saisir

  • L’ACTUALITE, l’OPPORTUNITE de notre mission de Services Diocésains des Vocations
    • Parce que "les vocations" c’est une question qu’on se pose à nouveau, que des laïcs commencent à se poser et des prêtres à se re-poser
    • Parce que "les vocations" c’est une question à propos, ou à cause, de laquelle on fait déjà bien des choses sur le terrain.

  • L’ENJEU de notre travail : contribuer à édifier une Eglise qui soit sacramentelle, une Eglise qui se reçoit de son Seigneur, où les baptisés ont besoin de ministres pour être ce qu’ils sont.

  • LE BON PROFIL DES S.D.V.
    • non pas quelqu’un mais une chaîne d’appelants
    • non pas un Service isolé, mais un service en lien avec, articulé et articulant, responsabilisant les gens à leur place.

Autant de dynamiques qui "embauchaient" les S.D.V. !

III-TRAJECTOIRE VERS UN CONGRES

1 - Une Conscience commune des responsables S.D.V. a été acquise à FRANCHEVILLE :

  • L’hypothèse d’une relance en direction du ministère de prêtre diocésain est une hypothèse plausible
  • Nous en mesurons la complexité et les difficultés,
  • mais nous en voyons l’enjeu et la nécessité,
  • Nous sommes décidés à faire quelque chose dans ce sens.

2 - Un CONGRES national a été dès lors envisagé par le service National des Vocations pour :

LA PENTECOTE 1987
les 6 - 7 et 8 Juin

sur le thème de :

L’APPEL AU MINISTERE DU PRETRE DIOCESAIN

3 - La PREPARATION de ce Congrès nous semble devoir être prise en considération bien avant l’événement lui-même, quelle que soit l’importance que représentent un tel rassemblement et son message.

La montée vers le Congrès est un chantier ouvert, de première importance : Il s’agit d’engager une dynamique, d’ouvrir une route, d’aller vers quelque chose, en mettant beaucoup de gens au travail avec nous. Nous envisageons deux ans de préparation, deux ans d’efforts durant lesquels toutes les forces vives des diocèses seront invitées à lancer loin le filet de l’appel.

Ce sont ces gens qui auront travaillé en ce sens et se seront embauchés à cette tâche de l’appel autour et au-delà de l’équipe diocésaine : laïcs, religieux, religieuses, prêtres, qui seront invités au Congrès, comme à la moisson après les semailles.

4 - Les deux prochaines Journées Mondiales de prière pour les Vocations (J.M.V. 1986 et 1987) seront les temps forts de cette préparation, comme deux vitesses à passer avant d’arriver au terme.

  • LA J.M.V. 1986 sera centrée sur une redécouverte du sens du ministère du prêtre, à travers ce que chacun vit dans son service de l’Eglise : ce qu’induit du ministère presbytéral l’exercice d’une coresponsabilité de laïcs, de religieux, religieuses dans la catéchèse, dans une préparation au baptême, dans l’animation d’un Mouvement...

    Pour aider à cette réflexion et redécouverte du sens, pour aider nos Eglises à se remettre dans l’attente de ses ministres, des instruments de travail et des pistes de parcours seront donnés aux S.D.V. avant Janvier prochain, sous la forme d’un dossier susceptible de nourrir et inspirer l’action : repères théologiques, fiches pédagogiques, questionnaires, suggestions liturgiques, témoignages…

  • LA J.M.V. 1987 sera centrée sur une véritable relance de l’appel par le repérage de tout ce qui se fait et se vit sur le terrain, et une incitation à accentuer concrètement les réalisations.
    Un nouveau dossier sortira à l’automne 1986 pour soutenir ces initiatives.

 

Lendemains de FRANCHEVILLE ? On aurait pu en envisager de plus confortables, ceux-ci nous paraissent nécessaires et nous les abordons avec sérénité.

* Le Père Yvon BODIN est responsable du Service National des Vocations [ Retour au Texte ]