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Avons-nous encore besoin de prêtres ?
Cyprien BEZELGUES *
C’est comme religieux non prêtre que je m’exprimerai sur la question des vocations à la prêtrise, aujourd’hui. Je le ferai en répondant aux questions que l’on peut se poser.
Une relance à propos des vocations se fait jour. Est-elle opportune, nécessaire ?
En d’autres termes : Avons-nous encore besoin de prêtres ?
Pour moi, la réponse est évidente. C’est la vie de l’Eglise et des hommes de demain qui est en jeu. Certes, un manque de curés peut provoquer les chrétiens à se prendre en charge, à s’organiser pour assurer certains services, à prendre encore davantage conscience de leur mission de chrétiens. Mais qui va réguler les rapports entre eux, coordonner les différents services, finalement qui va lier la communauté ?
Ici, en Seine & Marne, il y a de plus en plus de paroisses, et même de secteurs, sans prêtres résidants. Des structures se mettent en place dans lesquelles les laïcs eux-mêmes s’organisent et assurent un certain nombre de rôles, tenus autrefois par le prêtre : la préparation aux sacrements, la catéchèse, la gestion financière, etc.
Cette prise de conscience et ces engagements de laïcs m’apparaissent très positifs, c’est une avancée dans l’Eglise. Mais la communauté n’est pas forcément construite pour autant. Qu’est-ce qui va la construire et la nouer pour qu’elle devienne communauté chrétienne, c’est-à-dire une communauté fraternelle ? Et s’il n’y a pas de communauté fraternelle, comment l’Evangile pourra-t-il être annoncé en vérité dans cette région ?
Certes, il ne s’agit pas de retourner au statut de curé, Président Directeur Général, mais il s’agit, à mon sens, de trouver ou de retrouver la vraie place du prêtre dans l’Eglise, dans son rôle de rassembleur du Peuple de Dieu et de Pasteur des communautés chrétiennes.
Il y a en effet une Mission irremplaçable à remplir aujourd’hui : celle d’être signe du Christ pour tant d’hommes et de femmes pour qui la vie n’a plus de sens, et qui cherchent une lumière et des guides. Certes, il n’est pas besoin d’être prêtre pour cela. Tous les chrétiens sont appelés à cette mission, mais le prêtre le fera d’une manière particulière et irremplaçable en étant le témoin du Christ qui pardonne, guérit, nourrit son peuple par l’annonce de la Bonne Nouvelle et le partage du Pain.
Quelles difficultés va-t-on rencontrer dans cette relance au ministère des prêtres ?
Une difficulté, je dirais plutôt une cause du peu de vocations à la prêtrise, c’est, je crois, le manque de vie et de foi des communautés chrétiennes, c’est-à-dire de chacun de nous.
Nous ne prenons pas suffisamment de temps pour écouter la Parole et pour prier. Pour moi, c’est la cause principale du peu de vocations. Il y a aussi l’environnement avec toutes ses séductions, mais je crois que la Parole de Dieu, la prière, les sacrements, sont toujours donnés pour que le feu apporté par le Christ continue à enflammer les coeurs et les rende disponibles pour annoncer l’Evangile de l’Amour. Dieu, qui aime toujours les hommes, continue à appeler car il a besoin de bouches pour parler à son Peuple, de mains pour le nourrir, de coeurs pour l’aimer et pardonner.
Une autre cause me parait évidente : c’est la faillite de l’éducation aujourd’hui. Les jeunes ont grandi sans points de repères suffisants pour ancrer leur vie dans la réalité quotidienne et pour l’enraciner dans la confiance et l’Amour. Comment pourraient-ils s’engager dans ces conditions ?
Je signalerai enfin, comme difficulté, la solitude dans laquelle se trouve souvent le prêtre séculier. Il y a certainement quelque chose à trouver pour que le prêtre puisse vivre une vie normale et épanouissante.
Quelles chances sont peut-être aussi offertes ?
Il y en a beaucoup. Je les vois surtout à travers le renouveau spirituel qui se fait jour, aujourd’hui. Beaucoup d’idoles tombent. Le chemin s’ouvre pour une recherche plus intérieure, plus fondamentale. Des hommes, des femmes, des jeunes se réunissent pour écouter la Parole, pour prier, pour vivre une vie fraternelle. Un nouveau style d’Eglise est en train de naître, plus orienté vers la fraternité.
Des chances, j’en vois aussi dans le fait que la question des vocations revient à la conscience de nombreux prêtres, éducateurs et parents. On commence à en parler. Certains, même, osent poser la question à tel ou tel jeune. Pour cette prise de conscience, je signalerai le travail fait dans et par les Services des Vocations. Leur vitalité, leur dynamisme sont une chance pour les vocations.
Je signalerai enfin que des jeunes, de plus en plus nombreux sont en recherche de Vérité ; beaucoup se posent la question de leur rôle et donc de leur vocation dans ce monde perturbé et en crise.
Quelles initiatives je prends dans cette relance ?
Tout d’abord j’y travaille par la prière. Pour moi c’est capital et premier pour la bonne raison que la mission du prêtre ne peut être que la mission même du Christ. Je dois donc entrer dans la prière du Christ à son Père :
Que ton Règne vienne, que la Bonne Nouvelle de l’Amour du Père soit annoncée et vécue aujourd’hui.
Initiative aussi par ma participation au Service Diocésain des Vocations et à ses activités telles que journées d’éveil et de discernement de vocations pour les jeunes du diocèse.
Initiative encore à travers l’accueil qui se fait dans notre maison où je suis amené parfois à témoigner de ma vocation et, à partir de là, à parler de toutes les vocations à des jeunes qui viennent pour se recueillir.
* Frère Cyprien BEZELGUES est Frère Missionnaire des Campagnes à La HOUSSAYE-en-BRIE en Seine et Marne. [ Retour au Texte ]