Quelques clés de convictions


Armand ATHIAS *

Introduction -

" Quelques clés !". Voilà ce qui m’est demandé de présenter pour ouvrir l’esprit des éventuels lecteurs de cet article aux convictions qui m’animent quant à " l’existence du ministère des prêtres " (en espérant que ces convictions ne sont pas trop éloignées de celles de l’Eglise, sinon il faudra vite que les évêques trouvent un autre Supérieur au séminaire de Besançon !).

"Quelques clés !". Ce ne sont pas celles du serrurier que je voudrais employer car les témoignages qui précèdent et qui suivent cet article montrent à l’évidence que les portes ne sont pas fermées et que passe un grand courant d’air évangélique sur notre monde. Je voudrais vous inviter plutôt à vous tourner du côté du musicien pour essayer de déchiffrer une partition : celle de la vie de l’Eglise. En quelles clés sont inscrites les diverses notes (rassemblées dans les livres de théologie, dans l’histoire de l’Eglise, dans la vie concrète des prêtres et des évêques comme dans la liturgie) qui constituent la partie à jouer par le ministère ordonné dans l’ensemble de cet immense Prélude au Royaume qu’est la communauté chrétienne ?
Comment, en effet, pourrions-nous trouver une harmonie sans essayer de lire tout cela à partir des clés mises au début des différentes lignes mélodiques ? Evidemment, il faudra mettre ici ou là quelques bémols..., mais la musique en vaut la peine et le monde a tant besoin d’entendre un peu cette hymne !
C’est à travers le texte
(1) qui donne le ton à la formation des futurs prêtres depuis l’Assemblée plénière des évêques de 1983 que j’évoquerai ces clés de convictions. Pour faire bref, j’appellerai ce texte "La Ratio des séminaires" ou même simplement "la Ratio". Il sert actuellement de référence constante aux quelques trente séminaires et groupes de formation en France, et. à n’en pas douter, il sonorisera l’existence du ministère des prêtres dans le siècle à venir, avec la répercussion inévitable qu’il entraînera sur la vie des communautés chrétiennes de demain. Qu’au moins les deux premières pages lues ensemble nous permettent de vérifier si nos convictions sont bien au diapason de l’Eglise !

1 - Dans une Eglise missionnaire

"L’Eglise, appelée et rassemblée par Dieu dans l’Esprit Saint, est tout entière envoyée dans le monde pour annoncer aux hommes l’Evangile du Christ. Le ministère ordonné n’existe que pour servir la vie et la mission de cette Eglise.
Ainsi donc, former des prêtres, c’est les préparer à accomplir en vérité et avec générosité, sous la conduite de l’Esprit du Christ, le ministère qui leur sera confié. C’est pourquoi il est nécessaire que le sens du ministère presbytéral soit clairement perçu, avec ce qu’il implique pour ceux qui en sont investis."
Telle est l’introduction de la Ratio qui, d’entrée de jeu, accorde l’existence du ministère des prêtres à l’Eglise, sa vie et sa mission. Il y a même un "ne... que" exclusif : sans référence à la vie et à la mission de l’Eglise envoyée dans le monde pour annoncer aux hommes l’Evangile du Christ, le ministère ordonné n’a plus aucun sens. Toute la Ratio vibre de cette note-là parce que toute la vie et toute la mission des prêtres ne trouvent leur justesse que dans cette dimension ecclésiale, c’est-à-dire missionnaire.

Parler du ministère presbytéral, c’est d’abord et avant tout se redire l’Eglise. C’est se rappeler "le mystère, le dessein bienveillant, la volonté de Dieu : que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (Ep 1, 9 - 1 Tim. 2, 4). C’est se rappeler d’abord et avant tout que Dieu, non seulement a un projet sur l’homme, mais beaucoup plus encore que l’Homme est le projet de Dieu depuis le premier jour : "Faisons l’Homme" made in Jésus-Christ !

C’est pour cela que l’Eglise est. "Il a donné certains comme apôtres, d’autres comme prophètes..., d’autres comme pasteurs..., afin de mettre les saints en état d’accomplir 1e ministère pour bâtir le corps du Christ... pour parvenir ensemble... à l’état d’adultes, à la taille du Christ dans sa plénitude" (Ep 4, ll-13). L’humanité est enceinte de l’Homme véritable et l’Eglise est donnée au monde pour être le signe véritable, sensible et efficace de cette réalité extraordinaire, signe qui réalise et qui annonce, signe qui annonce et qui réalise !

Etre prêtres c’est participer d’une manière qu’il nous faudra définir maintenant, à cette mission de l’Eglise : rendre neuve l’humanité elle-même selon l’expression de Paul VI (Evangélisation n° 18). Etre prêtres, c’est faire partie de cette Eglise, petit bout du monde qui a la prétention de dire qu’en Jésus elle a entrevu ce que ça voulait dire "vivre en homme" et qu’elle en a fait l’expérience : il n’y a rien de plus humanisant que de vivre à la Jésus-Christ ! d’accepter d’être fils dans le Fils !

C’est en partant de là que les prêtres seront fidèles à l’encouragement que leur lançait Jean-Paul II lors de son voyage en France : "Gardez le souci apostolique, missionnaire, qui est si vif chez la plupart des prêtres français !"(2).

II - Des Evêques et des prêtres...

Avec la Ratio des Séminaires, il faut désormais éviter de définir LE prêtre, mais parler DES prêtres ou du MINISTERE ORDONNE. Ce n’est pas tant en effet, la personne individuelle qui est prêtre que la personne ordonnée située dans un corps : le presbyterium. C’est ENSEMBLE que les prêtres et les évêques sont le ministère ordonné.

Il y a là un point d’attention pour aujourd’hui qui doit rester très concret.
Spontanément nous pensons "le prêtre". Or, à une époque où, par exemple, les prêtres de moins de 40 ans vont peu à peu se retrouver moins du 10 % de l’ensemble du clergé, cette redécouverte théologique du coude à coude entre les prêtres, et en particulier entre les jeunes prêtres, est capitale. A être peu et avoir tant de casquettes à se mettre sur la tête, il y a de quoi avoir peur de mourir d’asphyxie... sauf... sauf si les jeunes et les moins jeunes prêtres se souviennent qu’ils n’ont pas à porter tout seuls tout le ministère ordonné. Ce n’est pas moi, prêtre, qui ai un service à rendre à l’Eglise diocésaine. C’est le presbyterium qui a un service à rendre à l’Eglise diocésaine... et moi, dedans !
Cela entraîne concrètement la nécessité d’une vie communautaire. La formation l’exige comme une "dimension essentielle de la préparation au ministère presbytéral". La vie pastorale l’exige et l’exigera encore davantage, même si les modalités pourront être très variables.

Pour Vatican II, il n’y a plus de prêtre, seul responsable devant Dieu de l’âme des ouailles qui vivent à l’ombre du coq du clocher ! La mise en place de la concélébration a depuis longtemps déjà transposé au plan rituel et liturgique l’esprit de cette (re)découverte du dernier Concile. Il est vrai que la liturgie est toujours signe eschatologique... Mais l’eschatologie chrétienne doit toujours comporter une part de "déjà-là" !!

III - Sacrements du Christ

"Dans l’Eglise, peuple de Dieu tout entier sacerdotal, uni aux évêques, les prêtres signifient la place du Christ ; ils rappellent à l’Eglise qu’elle naît et reçoit sa vie de la Pâque de son Seigneur. Dans l’ordination, "par l’onction de l’Esprit Saint, marqués d’un caractère particulier, ils sont configurés au Christ Prêtre".Ils deviennent ainsi sacrements du Christ pasteur de son Eglise. Ils sont rendus capables d’agir au nom du Christ en personne en tant qu’il est la tête de l’Eglise."

Le premier accord de la Ratio nous indique d’entrée de jeu la tonalité de tout ce qui suivra : le ministère des prêtres est situé dans une perspective sacramentelle... Ils sont sacrements dans une Eglise sacrement !

Le ministère des prêtres n’est donc pas défini comme un pouvoir, comme une tâche à accomplir. Il n’est pas défini par les fonctions de l’annonce de la Parole, de la célébration des sacrements ou du rassemblement de l’humanité en Jésus-Christ... mais son pouvoir, sa tâche, ses triples fonctions n’auront de sens que dans l’ordre SACRAMENTEL... dans l’ordre de la SIGNIFICATION !

La présence des prêtres, dans le Peuple de Dieu, est de signifier quelque chose, ou plutôt Quelqu’un : "la place du Christ". Ils rappellent à l’Eglise que le Mystère Pascal est à l’origine de tout ce qu’elle vit et a à vivre. Le presbyterium est donné à l’Eglise pour que s’allume de temps en temps un clignotant : "Attention, Eglise de Jésus-Christ, tu n’as pas à travailler à ton propre compte... Si tu veux vivre, RECOIS cette vie du Christ Ressuscité !".Et cela, c’est ESSENTIEL ! Comment une Eglise peut-elle VIVRE sans se rattacher au Mystère Pascal ? Les prêtres, par leur présence, "rappellent", signifient sensiblement, humainement et efficacement cet Autre au nom duquel la communauté "se construira dans l’amour" (Ep 4, 16). Il ne peut y avoir d’Eglise sans prêtres, à cause de cela.

Il en est ainsi depuis les apôtres eux-mêmes. Il s’agit bien d’une vocation apostolique qui n’est pas facultative pour l’Eglise ! Il ne peut y avoir de Vie ecclésiale sans cette référence aux témoignages des apôtres qui n’ont cessé de proclamer : "C’est bien vrai : le Seigneur est ressuscité, et il est apparu à Simon" (Luc 24, 34). Aussi, dans un diocèse, célébrer .des ordinations, imposer les mains à des jeunes hommes, ce n’est pas mettre quelqu’un en avant, en reconnaissant la générosité dont il ferait preuve, c’est l’Eglise qui reconnaît que se tisse une nouvelle fois ce lien apostolique ! C’est l’Eglise qui exprime sacramentellement la conscience qu’elle a de ce lien : elle se sait "convoquée" avant d’être convoquante, évangélisée avant d’être évangélisatrice.

Le ministère ordonné rappelle par des hommes que la communauté n’est pas la propre source de ce qu’elle vit..., qu’elle ne peut donc pas disposer à son gré de la Parole, des Sacrements, de la Mission. Si elle peut le faire, ce ne peut être qu’en référence à un Autre. D’où le rôle de vigilance et de discernement qui revient au ministère ordonné. En effet, il s’agit d’un rappel incessant : la foi de cette communauté chrétienne est-elle "apostolique", conforme à l’enseignement des apôtres ?

C’est aussi dans cette perspective sacramentelle que s’enracine le ministère de "présidence" des prêtres. En effet, les prêtres rappellent par leur présence que c’est le Christ qui "préside" le rassemblement. Quelle difficulté n’y a-t-il pas là pour ceux qui doivent remplir ce service dans la communauté chrétienne ? Il n’est pas si facile d’être le signe que "Dieu se donne" et tellement tentant de donner Dieu ! Il n’est pas si facile d’annoncer la Parole comme une Parole venant d’ailleurs et tellement tentant d’ajouter son grain de sel comme "Parole d’Evangile" ! Il est tellement tentant de manipuler les sacrements ou de travailler à la mission comme si on menait sa propre entreprise !

Les prêtres diocésains n’ont pas à chercher trop loin leur spiritualité. Vivre la béatitude des pauvres commence pour eux par le continuel dépouillement d’eux-mêmes pour que l’Autre soit ! "Il faut que Lui grandisse"... "Ce n’est pas nous que nous prêchons, mais le Christ Jésus notre Seigneur Nous ne sommes, nous, que vos serviteurs pour 1’Amour de Jésus" (Jn 3, 30 ; 2 Co 4, 5).

IV - Sacrements du Christ Pasteur et Tête de l’Eglise...

Mais, tous les chrétiens ne sont-ils pas eux aussi, de par leur baptême, des "signifiants" puisque l’Eglise elle-même est Sacrement ? Oui, tous dans l’Eglise sont invités à signifier quelque chose du visage du Christ. Le "quelque chose" qu’il revient aux prêtres de signifier vis-à-vis de leurs frères chrétiens, c’est que le Christ est PASTEUR et TETE de l’Eglise...

Les prêtres n’ont pas à être d’abord des militants, des priants, des religieux, des charismatiques, des engagés, etc. Leur mission est d’être pasteurs en tant que signes du Christ Pasteur ! Ce sont les "pasteurs qui doivent être militants, priants, religieux, etc. "Le souci pastoral" (rappellera sans cesse la Ratio) doit imprégner absolument toute la formation". "La formation apostolique et pastorale est 1’objectif ultime de toute 1a formation. Tous les aspects de celle-ci doivent y concourir !" (Ratio pp.1932).

La spiritualité du prêtre n’est pas à chercher d’abord même dans des familles spirituelles très fortes. Elle est à chercher dans cette "charité pastorale" dont parle Vatican II (cf. ainsi P.O., 13).

"Au cours de 1’histoire de 1’Eg1ise et aujourd’hui encore, les tentations de renouveler le presbytérat à partir de 1a vie religieuse qui a sa vocation propre, se sont avérées insuffisantes. Mais si, dans notre ministère et par lui, nous laissons agir en nous 1a puissance de 1’Esprit-Saint, 11 saura bien jour après jour, susciter dans nos gestes et nos paroles 1a figure fascinante de 1’unique pasteur" (3).
Alors, regarder le Christ Pasteur, c’est se mettre :

- AU SERVICE d’UNE EGLISE CHARGEE d’ANNONCER l’EVANGILE A TOUTE CHREATURE, comme le Pasteur qui n’oublie pas parfois de quitter ses 99 brebis pour aller chercher celle qui s’est perdue...

- AU SERVICE d’UNE EGLISE APPELEE A PREPARER LE RASSEMBLEMENT DE l’HUMANITE EN JESUS-CHRIST, comme le Pasteur qui connaît ses brebis et que ses brebis connaissent : il n’y a qu’un seul troupeau et qu’un seul Pasteur.

- AU SERVICE d’UNE EGLISE QUI CELEBRE ET QUI PRIE, comme le Pasteur qui connaît "1’ordre reçu du Père" (Jn 10, 18), qui donne sa vie de lui-même.

Ces "services d’Eglise", triple objectif de la formation au ministère presbytéral, sont tous consonants profondément avec l’accord essentiel d’un ministère ordonné "sacrement du Christ Pasteur". Cette image plutôt johannique du Christ Pasteur est à compléter par l’image plutôt paulinienne du Christ Tête du Corps. Là encore, il ne faut pas s’y méprendre. Ce n’est pas d’abord "l’autorité" qui est soulignée par le mot "tête", mais le lieu d’où vient la vie : "La tête de qui 1e corps tout entier coordonné et bien uni..., réalise sa propre croissance pour se construire lui-même dans l’amour" (Ep 4, 16).

Tout cela demande évidemment aux prêtres un attachement à Jésus-Christ qui soit vital. Comment être signes de Quelqu’un que l’on ne "pratique" pas (avec toute la portée eucharistique de ce terme), avec qui on ne dialoguerait pas, qu’on ne connaîtrait pas.. ? "Parmi les objectifs essentiels de la formation théologique des futurs prêtres, il convient de souligner avant tout la connaissance de l’intelligence de la révélation divine dont le centre est Jésus-Christ et son Mystère" (Ratio des Etudes, p. 37).

A l’heure où l’on n’entre plus guère dans les séminaires par souci de promotion sociale et personnelle, la fidélité à Jésus-Christ devient peut-être plus naturelle. Qui oserait s’en plaindre ?

V - Coopérateurs des Evêques...

"En vertu de l’institution divine, les évêques unis au Pape succèdent aux Apôtres comme pasteurs de l’Eglise. Leur responsabilité est tout entière centrée sur la construction du corps du Christ, Les prêtres participent à cette responsabilité : "coopérateurs avisés de l’ordre épiscopal", ils "constituent, avec leur évêque, un seul presbyterium aux fonctions diverses". Au sein de l’Eglise particulière, en communion avec tous les autres membres de l’Eglise, c’est comme collaborateurs des évêques qu’ils exercent donc leur ministère propre."

La responsabilité de la construction du Corps du Christ est le centre du ministère épiscopal. Les prêtres sont participants de cette responsabilité. Telle est aussi la (re)découverte de Vatican II : situer le ministère des prêtres dans une perspective de "coopération avisée" (L.G. 28) vis-à-vis de ce ministère épiscopal. Pour caricaturer, on pourrait dire qu’il nous faut passer de l’image pré conciliaire de l’évêque super prêtre, à l’image post conciliaire du prêtre mini-évêque.., ou plutôt, il nous faut venir à la vision de l’évêque ET des prêtres qui "constituent un seul presbyterium aux fonctions diverses" (L.G. 28).

Cet aspect de la théologie de Vatican II a bien du mal à se mettre en place. Ce n’est peut-être pas étonnant que la Ratio de 1983 insiste plus lourdement encore que celle de 1975 sur ce sujet. Il y a toujours dans le clergé une tendance à faire de l’évêque le bouc émissaire de ses propres problèmes, comme il y a parfois toujours chez tel ou tel évêque, une tendance à ne voir les prêtres que comme de "simples exécutants" et non comme des "collaborateurs" ou des "coopérateurs". Il faut du temps pour qu’un Concile s’applique !
Mais il faudra que cet esprit "presbytéral" se mette en place dans sa référence épiscopale. l’esprit de clocher (voire de clocheton) qui n’est pas propre aux prêtres de paroisse doit s’ouvrir à une réalité-diocèse !

VI- Prêtres au service du peuple de Dieu pour l’annonce de l’Evangile

"C’est pour servir l’Eglise, peuple de Dieu, que des hommes sont appelés, choisis et ordonnés au ministère de prêtres. Ils ne sont pas retranchés de ce peuple ; ils demeurent chrétiens avec leurs frères, membres de la communauté mais, devenus prêtres pour eux, ils reçoivent la charge de les aider à vivre leur vocation pour que l’Eglise accomplisse sa mission parmi les hommes. C’est pourquoi ils portent en priorité la charge de l’annonce de l’Evangile aux hommes de ce temps. Par leur ministère, par l’accomplissement des tâches qui leur sont confiées, par le témoignage de leur vie et par leur prière, ils servent l’Eglise pour qu’elle réponde mieux à l’attente de son Seigneur et devienne chaque jour davantage l’Eglise du Christ au milieu du monde."

Nous revoilà dans l’esprit de l’introduction ! La relation des prêtres et de l’Eglise est de nouveau soulignée, mais cette fois avec cette précision : cette relation est d’abord de l’ordre du SERVICE. C’est en vue de ce service que des hommes (avec ce que ça veut dire comme enracinement humain, ecclésial et comme maturité spirituelle) sont appelés, choisis (et donc parfois non-choisis, si cet aspect du service ne semble pas spontané ou vécu) et ordonnés... Il est bien que les prêtres soient d’abord ordonnés diacres : leur ministère de présidence, d’unité devra toujours se vivre sur fond de service. Pardon, frères chrétiens de ne pas toujours le vivre ainsi.

Si donc il y a service, il ne peut y avoir séparation. Comment servir si on est "retranché du peuple" que l’on veut servir ? Au contraire, voilà que la Ratio donne aux prêtres la charge (et c’est lourd parfois) d’aider les chrétiens "à vivre leur vocation pour que l’Eglise accomplisse sa mission parmi les hommes". Les prêtres doivent aider les religieuses à vivre leur vie religieuse, les laïcs à vivre leur vie de laïcs... et tant pis si, pour un temps, telle dame ne peut pas participer à la réunion des catéchistes, ou telle religieuse à la rencontre du conseil pastoral ! La tentation est toujours grande "d’utiliser" au lieu de servir..., voire d’utiliser les uns pour servir les autres !

Quelle énorme difficulté pour les prêtres que d’être des moyeux de roues, c’est-à-dire de transmettre un mouvement venu d’ailleurs à des rayons devant nécessairement partir en sens inverse ! Il n’y a pas de roues sans rayons partant en directions opposées, le principal étant simplement qu’ils soient tous bien reliés au moyeu et le moyeu à eux...
C’est dans cette coresponsabilité" que l’humanité tout entière avancera vers le Royaume.

Conclusion

" Il est essentiel que les candidats au presbytérat soient conscients du ministère auquel ils se préparent. Prêtres, ils auront à collaborer avec les évêques pour que l’Eglise s’édifie comme peuple de Dieu, corps du Christ et temple de l’Esprit, en étant eux-mêmes au service de la foi apostolique, des sacrements, de la communion et de la mission. La formation devra les aider à comprendre et à vivre dans cet esprit le ministère presbytéral."

Il est essentiel aussi que les chrétiens de toute vocation sachent cela pour qu’ils aident les prêtres à être prêtres. Qu’on ne les enferme pas dans un rôle d’employés spécialisés pour pompes religieuses ou funèbres !

Evidemment, cet article qui tire à sa fin n’a pas tout dit. La Ratio comporte 36 pages et nous n’en avons commenté que deux. De plus, ce qui a été dit "concerne tous les prêtres, spécialement ceux qui exercent une charge pastorale ; en ce qui concerne les prêtres religieux, on fera les adaptations qui s’imposent" (P.O. 1).

Ce que nous avons dit peut cependant permettre de décoder le reste. Telles étaient les clés mises en début de partition. La musique se fait peut-être plus moderne. L’Organiste n’a peut-être plus guère envie de jouer de grandes toccatas triomphantes sur le grand clavier. Il préfère peut-être d’autres timbres et d’autres harmoniques. L’essentiel réside dans le fait que les tuyaux de l’orgue soient bien accordés entre eux, tout en donnant chacun sa note la plus juste possible.
Mais de toutes façons, il y a quelque chose de sûr, la Soufflerie est encore en excellent état de marche !

Notes :--------------------------

1 - Le texte auquel je me référerai sera le texte paru aux Editions du Centurion, dans la collection "Documents d’Eglise", sous le titre "LA FORMATION AU MINISTERE PRESBYTERAL", avec préface du Père Lucien DALOZ, Président de la Commission épiscopale du Clergé et des Séminaires, et Archevêque de Besançon. [ Retour au Texte ]

2 - Documentation Catholique n°1788 du 15/06/1980, p. 559. [ Retour au Texte ]

3 - Cardinal MARTY, Doc. Cath. n° 1874 du 20/05/1984, p. 534. [ Retour au Texte ]


* Le Père Armand ATHIAS est supérieur du Séminaire inter diocésain de BESANCON [ Retour au Texte ]