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Le Congrès de Lisieux : Table ronde sur les vocations
Congrès Missionnaire de Lisieux
Jean DANTONEL *
Il se passe toujours beaucoup de choses au cours d’un Congrès, surtout lorsque, comme à Lisieux, tous les diocèses et pratiquement tous les Mouvements sont présents et ont la possibilité de s’y exprimer, soit dans les stands du Forum, soit au cours des échanges en tables rondes.
Je n’ai pas l’intention de donner ici un compte-rendu de tout le Congrès. Je voudrais simplement donner un écho de ce qui s’est dit à l’une des tables rondes, sur le thème "Vocations".
Il est intéressant de relever la diversité des intervenants à cette table ronde : un prêtre et un séminariste diocésains, un prêtre, un séminariste et une religieuse missionnaires, un diacre permanent et son épouse, une responsable de l’A.C.E. et un membre des Communautés Chrétiennes de Formation. L’animateur était un permanent national du Scoutisme.
Il ne s’agissait donc pas de spécialistes, mais de personnes ayant une variété de situations et d’expériences. Et ceci a bien contribué à la richesse de l’échange. Quant aux participants, ils étaient surtout des adultes engagés soit dans l’animation missionnaire, soit dans la pastorale des vocations.
Il y avait peu de jeunes à cette table ronde et, bien sûr, on peut le regretter.
Pour lancer le débat, un des intervenants a rappelé brièvement quelques questions et convictions relatives à l’appel à la mission :
- Faut-il encore partir en mission aujourd’hui ?
- Quelles motivations peut-on avoir pour un départ ?
- N’est-il pas nécessaire que l’universalité de l’Eglise soit en tout temps réalisée et manifestée ?
Inévitablement, le débat s’est engagé dans plusieurs directions.
Sans doute a-t-il touché davantage aux motivations pour un départ ou à la réalité même de la mission qu’à une pastorale des vocations missionnaires. Mais plusieurs points m’ont semblé ressortir plus nettement de la discussion.
Une suite du Christ
Tout d’abord,, plusieurs interventions ont souligné
LA NECESSITE d’UN ENRACINEMENT DE LA VOCATION MISSIONNAIRE DANS UNE RENCONTRE DU CHRIST ET DANS LA PRIERE
Il est intéressant de constater l’insistance sur cet aspect fondamental. C’est en effet reconnaître dans la vocation missionnaire autre chose qu’un "faire", qu’une tâche à accomplir. Elle apparaît d’abord et avant tout comme une suite du Christ, une orientation de vie.
L’un ou l’autre a aussi souligné la dimension ecclésiale de la mission : le missionnaire n’est pas un isolé et son témoignage est communautaire. C’est effectivement en communauté que certains vivent leur présence en mission.
Un échange entre Eglises
Autre aspect abordé, principalement par les questions des participants :
L’ECHANCE ENTRE EGLISES.
Que peut apporter le missionnaire à son Eglise d’origine ? Le moment n’est-il pas venu, pour nos chrétientés plus anciennes, de recevoir des missionnaires venant des jeunes Eglises ? Ces questions débordaient quelque peu le thème du débat ; elles apportent pourtant un certain éclairage sur la vocation missionnaire, montrant bien que quitter son pays, ou son Eglise d’origine, ne doit pas être une fuite. S’il reste relié à la communauté qui l’envoie, le missionnaire pourra aider cette communauté à vivre quelque chose de sa propre expérience : un approfondissement de sa vie chrétienne, un élargissement de sa foi à la dimension universelle de l’Eglise, une capacité à mieux se recentrer sur l’essentiel et à replacer les divers problèmes dans un contexte plus large. .
Quant à l’envoi de missionnaires issus de jeunes Eglises vers d’autres pays, ceci se réalise déjà en plusieurs endroits. Mais il ne s’agit pas là de faire appel à d’autres pour répondre à nos propres besoins, ou pour assurer certaines tâches. Il y a, en cela, une manifestation plus explicite de l’universalité de l’Eglise et aussi un signe plus clair que les jeunes Eglises parviennent à une réelle maturité dans la foi.
Qui va partir ?
Touchant plus directement la pastorale des vocations, on faisait remarquer que L’EVEIL à UNE VOCATION MISSIONNAIRE EST AVANT TOUT UNE TACHE d’EGLISE.
Ceci implique qu’il ne peut être question de faire simplement du "recrutement", en vue d’assurer une continuité des instituts missionnaires. C’est d’abord l’Eglise elle-même qui est appelée à vivre la Mission. Une vocation missionnaire doit donc être vécue en Eglise, et l’appel à la mission est une responsabilité de toute l’Eglise. Le Seigneur continue d’appeler pour l’annonce de l’Evangile aux nations.
Cet appel peut se faire par des chemins nouveaux ; mais il se fait toujours par nous, les baptisés. L’éveil à la vocation missionnaire dépend de tout baptisé, du renouveau du tissu ecclésial et du renouveau de l’évangélisation. ’
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A travers ce qui s’est dit dans le débat, il me reste principalement deux impressions qui me semblent l’une et l’autre exprimer une évolution dans la façon d’aborder, et de comprendre, la vocation missionnaire.
D’abord, j’ai senti comme l’expression de DEUX LANGAGES DIFFERENTS.
Les uns s’exprimaient en termes de besoins, de tâches à remplir ; les autres parlaient plutôt en référence à l’être chrétien. On a longtemps eu tendance à parler de la mission en l’assimilant plus ou moins au travail de développement. Ceci est peu apparu au cours de la table ronde. Mais il était encore souvent question de comprendre le missionnaire comme celui qui part pour réaliser tel ou tel travail précis dans un pays donné, pour répondre à tel ou tel besoin précis d’une Eglise ou d’un pays. Voir la mission seulement sous cet aspect ne peut pas suffire à exprimer ce qu’est une vocation missionnaire.
Par contre, plusieurs participants présentaient davantage la vocation missionnaire comme une suite du Christ, voyant son fondement dans une conviction personnelle de foi et dans une rencontre de Dieu. On a même parlé d’un "débordement de l’être chrétien". Je crois qu’il était bon d’entendre exprimer ainsi clairement le fondement spirituel de l’engagement missionnaire. Situer la vocation missionnaire à ce niveau c’est s’ouvrir à une meilleure compréhension de ce qu’elle est vraiment.
C’est aussi le moyen de répondre à l’objection souvent entendue : "pourquoi partir puisqu’il y a des prêtres et des laïcs autochtones ?"
L’autre élément que j’aimerais souligner ici c’est l’IDENTITE DE LA VOCATION MISSIONNAIRE COMME VOCATION SPECIFIQUE.
Il y a certainement bien des façons de servir la mission de l’Eglise, et tout baptisé est appelé à ce service de la Mission, soit immédiatement dans le milieu même où il vit, soit en donnant une partie de son temps pour participer au témoignage missionnaire de l’Eglise en d’autres pays ou en d’autres cultures.
Mais si l’on peut parler de la vocation missionnaire comme "vocation spécifique", au même titre que la vocation au ministère presbytéral ou à la vie religieuse, c’est que des hommes et des femmes sont appelés à se consacrer totalement, à engager toute leur vie, pour signifier et réaliser dans leur être même l’universalité de l’Evangile et de l’Eglise, l’universalité du Salut en Jésus-Christ qui s’adresse à tout homme, quelle que soit sa race ou sa culture. Là encore, il s’agit de tout autre chose que d’un appel à réaliser une tâche. C’est un appel à être, par toute sa vie, signe et manifestation de la tendresse de Dieu qui s’adresse à tout homme.
D’autres choses encore ont été dites au cours de cette table ronde.
On a parlé, par exemple, du lien entre les missionnaires et les communautés contemplatives pour souligner d’une part, l’importance de l’implantation de communautés contemplatives dans les jeunes Eglises et, d’autre part, le soutien que reçoivent les missionnaires de la prière des contemplatifs.
Je regrette un peu que la méthode choisie pour mener les discussions n’aient pas permis davantage la libre expression des participants.
Les échanges auraient sans doute été plus riches et ]es participants eux-mêmes auraient pu être plus actifs. Mais il fallait évidemment tenir compte de la largeur des groupes et des impératifs de l’horaire.
Quoiqu’il en soit, .j’ai été heureux de constater une convergence entre cet échange et la phrase qui avait été retenue par le stand "Vocations" :
"La Mission c’est se savoir aimé de Dieu et avoir envie de le dire".
Et je souhaite que ceux qui ont participé à notre table ronde en soient repartis avec cette conviction.
* Jean DANTONEL, des Missions Etrangères de Paris, est membre de l’équipe nationale du S.N.V. [ Retour au Texte ]