Deux livres importants pour travailler avec les jeunes


"AUMONERIES DE L’ENSEIGNEMENT PUBLIC"
Pierre BOURDONCLE et Pierre MOITEL dossier libre, aux éditions du cerf.

Trois millions de jeunes fréquentent aujourd’hui l’enseignement secondaire "public" en France. 11 % d’entre eux - soit quelques 300.000 viennent peu ou prou dans les aumôneries.

En octobre 1978, les deux prêtres qui sont actuellement secrétaires nationaux de l’Aumônerie, ont publié un dossier à la fois simple et complet qui fait le point sur cette réalité. Un chapitre suggestif décrit les grandes mutations de cette institution napoléonienne. Aujourd’hui, elle est assurée par quelques 20.000 laïcs et 2.400 prêtres. Ce livre explique les motifs et les modalités de cette "révolution silencieuse".

Quel est l’intérêt de cet ouvrage pour les animateurs des services de vocations ? J’en soulignerai deux :

- Comprendre
On s’interroge souvent sur ce que font et disent les jeunes lycéens.
Telle initiative de leurs aumôniers suscite parfois des polémiques. A lire ces pages, on apprend à porter un regard fraternel et même admiratif sur l’immense effort de reconversion entrepris par les prêtres et les associations de parents (F.N.A.P.E.C.). Reconnaissons dans les aumôneries un lieu de croissance de l’Eglise d’aujourd’hui.

- Se rendre attentif à une seconde "source" de vocation
L’effort actuel des aumôneries vise à "aider" les lycéens à advenir comme sujets ayant "une colonne vertébrale" et une pensée personnelle, à se définir chacun comme sujet différent des autres et, si possible, à se mettre en marche comme croyants vers une recherche jamais terminée sur une route dont on ne voit pas le terme" (page 90).

Cet effort est largement celui de laïcs - adultes et jeunes - qui prennent des responsabilités. Ce qu’il nous faut donc chercher avec ces équipes, c’est comment une responsabilité temporaire peut être lieu d’éveil à une responsabilité plus durable (ministères) ou même à un engagement définitif (ordination ou consécration). Avouons que nous l’ignorons largement. L’éveil se fait d’ordinaire à partir d’une expérience spirituelle. Pourrait-il se réaliser aussi à partir d’une exercice de responsabilités ? A quelles conditions ? C’est l’une des questions fondamentales qui divisent la pastorale des vocations depuis 15 ans...

Cette recherche suppose des contacts, des dialogues entre SDV et aumôneries. Ce "dossier libre" donne une base de départ.

Je termine cependant par un regret : près de 500 religieux et religieuses travaillent dans les aumôneries. Sauf erreur de lecture, ils n’ont droit qu’à une note "administrative" page 40. Les communautés croyantes ne seront complètes que si ces témoins y sont reconnus comme "sujets différents des autres".

Claude CUGNASSE

"DEMAIN EST DEJA AUJOURD’HUI"
Pierre MOITEL - Le Centurion

Ce livre est une somme et un outil de travail.
Il rassemble de nombreuses données contenues dans des ouvrages spécialisés sur les jeunes d’aujourd’hui, la linguistique, l’ethnologie et la futurologie. Cette synthèse est toujours concrète, illustrée d’exemples simples, souvent empruntés au monde des lycéens que l’auteur connaît bien.
Ce livre est écrit pour ceux qui veulent comprendre les jeunes et le monde qui advient peu à peu autour de nous. Aussi il se termine par sept questionnaires qui voudraient permettre à chacun de vérifier les conclusions proposées, de réaliser sa propre synthèse, autant que possible en travail de groupe.

A tous ces titres, cet ouvrage est précieux. A Angers en 1975, quand le congrès des Services des vocations a été consacré à l’incroyance, nous avons pressenti l’importance des décalages culturels. Nous balbutions encore dans cc domaine et pourtant, n’y a-t-il pas là l’une des grandes difficultés pour l’éveil aujourd’hui ? Il faut lire ce livre. L’auteur lui-même voudrait que l’on reste libre par rapport à certaines conclusions. Pour ma part, je trouve fort optimiste le tableau de "demain" qui est proposé page 63, et les chemins de la foi décrits dans le chapitre 5 me semblent à la fois excellents et trop courts. Ils décrivent une partie de ce qu’il faut faire et de ce qu’il ne faut plus faire. Bien. Mais la foi est une réalité complexe.
dont nous n’avons pas l’initiative. Pierre MOITEL le sait si bien "qu’il plaide pour un espace en blanc (page 164) où Dieu pourrait se révéler par ses chemins à lui que nous ne contrôlerons jamais. On peut comprendre ainsi plusieurs des chemins proposés. Je regrette cependant que cette dimension ne soit pas plus explicitement développée. Au-delà des barrières culturelles, il y a le mystère des personnes, celle du Dieu-Esprit, et celle de chacun de nous.
Il échappe aux analyses, il s’ouvre parfois dans la nuit, la prière en est la clef ...

Ces réserves clairement exprimées, si vous ne lisez un 1979 qu’un seul livre de "culture", lisez celui-là.

Claude CUGNASSE