Laïques consacrées, religieuses et prêtres en SDV


- Session Nationale 1er - 3 juillet 1978 -

Issy-les-Moulineaux, premiers jours de juillet, 85 personnes an session, dans le cadre austère mais très accueillant du séminaire St-Sulpice.

Prêtres, religieuses et laïques consacrées, ayant une expérience de collaboration en équipe de S.D.V., venaient faire le point.

Après quelques années d’expérience (les équipes diversifiées sont de plus en plus nombreuses), il s’agissait de prendre conscience ensemble de la diversité des situations, à partir d’histoires différentes.

Il était bon de se dire les questions posées dans cette collaboration au sein des équipes ou pour la reconnaissance de chacun, de chacune, par d’autres instances diocésaines.

Il était meilleur encore de découvrir ensemble toutes les richesses qu’avait produites le travail commun entre personnes de vocations différentes, tant pour leur propre vocation que pour la pastorale des vocations elle-même.

Cette session avait été souhaitée par l’équipe qui se réunit régulièrement au C.N.V. pour la pastorale des vocations féminines. Les religieuses, membres d’instituts séculiers et prêtres qui en font partie avaient perçu sur la terrain le besoin d’une telle rencontre.

Pas de conférences magistrales. Même les interventions les plus importantes furent de l’ordre du témoignage, un observateur nous aidant à ressaisir en conclusion les principales découvertes ou questions.

Les notes qui suivent retiennent l’essentiel des différentes interventions sans prétendre en rendre compte de façon exhaustive. Telle qu’elles sont, elles peuvent aider à poursuivre la route, dont cette session aura marqué une étape importante.

Sr François GRANGIER, Gérard MUCHERY

Note - I N V E N T A I R E . . . ?

A partir de réponses à quelques questions, Armand ATHIAS a tenté de faire un inventaire des "équipes diversifiées". A vrai dire, ce ne fut qu’un sondage. Intéressant, ce regard ne pouvait prétendre à une rigueur scientifique. Nous en relevons quelques traits, simplement pour faire réagir et inciter à poursuivre la recherche.

- Presque tous les diocèses présents à la session avaient répondu :
soit 25 réponses. Mais c’est trop peu par rapport à ce qui se met en place peu à peu dans les diocèses de France.

- Les équipes actuelles (fruit de quelques recherches antérieures) sont nées vers 1975-77.

- Le passage d’un prêtre seul à une "Équipe diversifiée" se fait :

      • ou bien par intégration de ce qui existait déjà séparément,
      • ou bien par nominations successives des différents membres,
      • ou bien par création de toutes pièces d’une équipe (cela peut se faire à condition que quelque chose soit déjà vécu par chacun des membres).

- 9 équipes sur 25 n’ont pas de laïcs.

- Les Instituts séculiers sont présents dans 8 équipes.

- Dans l’ensemble, la place des prêtres est encore prépondérante.


TEMOIGNAGES

I - UNE RELIGIEUSE DE VIE "APOSTOLIQUE"

o Marie-Reine, religieuse de Nevers, originaire d’une petite ville du Sud-Ouest, fille unique d’une famille de classe moyenne (indifférente à la religion), élevée "par hasard" dans l’enseignement catholique.
Depuis seize ans à Toulouse dans un second cycle mixte. D’abord enseignante, ensuite cadre éducatif puis responsable de l’animation spirituelle.

- "En 1969, pour préparer le colloque national, il y eut une réunion pour les religieuses s’intéressant aux jeunes en recherche, j’y suis allée... et les membres du comité des religieuses m’ont si bien convaincue que j’y suis encore.
On m’a dit : "vous savez, cela ne vous prendra pas de temps, il suffit de porter le souci des vocations"... Je le crois profondément, mais je suis sûre que lorsqu’on a entrevu les problèmes d’un service diocésain ou régional, on ne peut se contenter d’en porter le souci au niveau des idées ni même du coeur. Cela vous bouscule et vous mobilise toute entière. C’est une expérience personnelle."

o Le S.D.V, de Toulouse en 1978 :

  • Deux prêtres, dont le responsable diocésain,
    - l’un plus spécialement chargé du secteur rural
    - l’autre travaille à la coordination dans les milieux scolaires et universitaires.
  • Un religieux, frère missionnaire des campagnes, animateur des groupes de recherche.
  • Un père blanc, responsable de la diaspora
    . Quatre religieuses :
    - l’une en milieu hospitalier (nombreux contacts) assure "le lien" des religieuses avec le S.D.V.
    - Une autre, aumônier de lycée, s’occupe de divers groupes de jeunes ;
    - une troisième, dans un centre de documentation catéchétique et pastorale,
    - Marie-Reine.
  • Un membre d’institut séculier féminin
  • Une auxiliaire de l’Apostolat
    (pas de laïc depuis deux ans)

"ma vocation personnelle"

- "En ce qui concerne ma vocation personnelle, la pastorale des vocations m’a mobilisée toute entière. J’ai vu l’urgence de la tâche à accomplir : faire se rencontrer des jeunes qui portaient en elles une recherche, jeunes qui se trouvaient isolées et ne savaient comment approfondir leurs questions. J’ai compris progressivement que c’était à nous, adultes, d’organiser des équipes de réflexion, des week-ends, des retraites, que ce n’était pas l’affaire d’une seule mais que tous nous devions nous sentir concernés.
Alors, au SDV, j’ai été plus particulièrement chargée de cette tranche d’activités, avant que je ne le sois sur le plan régional."

Marie-Reine, au-delà des tâches à réaliser, a été "provoquée de plus en plus". Tout d’abord pour vivre à fond sa vocation de soeur de Nevers. Plus loin encore, tout en se sentant très partie prenante de sa congrégation.

- "... j’ai découvert ma vocation personnelle. Mon regard intérieur s’est affiné, mon être élargi à la dimension universelle, ecclésiale. Plus j’étais fidèle à mon être de femme, de consacrée, plus je sentais l’appel à vivre cette vocation : éveiller, susciter, faire naître et grandir les vocations."

Ce sont alors de nouvelles dimensions qui s’accentuent.

- dans la vie professionnelle, où l’attention à la personne des jeunes, à leur vocation à partir de ce qu’ils sont prend le pas sur les principes, les idées aussi généreuses soient-elles,

- dans la vie communautaire, en y étant témoin du cette préoccupation,

- dans la vie de prière, nourrie de cette même attention aux autres.

Une mission commune au S D V

Comment la collaboration au sein de l’équipe est-elle vécue ?

"Je crois que l’important, est d’abord d’être soi, que chacun se sente à l’aise à sa place et reconnaisse la place de l’autre. Il n’y a pas d’engagement possible, ni valable autrement. Il me semble qu’il faut un effort continu pour se connaître, et se connaître en relation (à Dieu, aux autres). Peut-être est-ce encore plus sensible dans ce groupe à projet pastoral ?
Au sein du S.D.V., nous vivons une réelle co-responsabilité. Chacun est plus particulièrement chargé d’un secteur d’activités et lorsque nous nous retrouvons, nous découvrons toute la richesse de la diversité. En plus des responsabilités personnelles, nous travaillons par ateliers :

- l’atelier de liaison s’occupe davantage de lancer des
soirées de prière, de réflexion à l’occasion de la journée mondiale des vocations, de sensibiliser les prêtres, les communautés, les laïcs... d’organiser des week-ends trimestriels, régionaux de formation, des mini-sessions d’initiation... d’écrire un petit feuillet rendant compte des activités.

- l’atelier "catéchèse et vocations" retrouve en ce moment un regain de vie, un travail a été amorcé cette année avec les catéchistes des 11-13 ans.

- l’atelier "jeunes un recherche" est composé d’une dizaine de religieuses de congrégations différentes, d’un membre d’ institut séculier, d’une auxiliaire de l’apostolat, d’un religieux-prêtre. Arrivant d’horizons divers, nous nous sommes interrogés sur le monde des jeunes, nous avons essayé de prospecter la région au niveau des groupes informels, nous avons commencé à entrer en contact avec les mouvements d’Action Catholique, nous avons réfléchi sur les critères de discernement pour l’acceptation des jeunes en congrégation ou en institut, nous avons proposé lors d’une réunion de supérieures majeures la mise en place de groupes inter noviciats.

Au niveau des groupes de recherche, nous travaillons en équipe, nous sommes quatre : un membre d’institut séculier, une auxiliaire de l’apostolat, un religieux-prêtre et moi-même. Cela suppose une reconnaissance mutuelle, au niveau des vocations, des mentalités, des relations entre hommes et femmes. Dès le départ, j’ai voulu que nous formions une équipe mixte. Il me semblait important que les jeunes puissent faire référence à des personnes de vocations différentes. Nous vivons en complémentarité, partageant avec les jeunes ce que nous sommes dans les relations vraies, fraternelles et amicales. Nous accompagnons les jeunes ensemble chacun avec son originalité et sa spécificité, sans supériorité de l’un par rapport à l’autre. Quelquefois, il y a des tensions, mais elles sont positives dans la mesure où nous essayons d’en clarifier les causes. Par le partage et la prière, nous approfondissons nos vocations respectives et apportons une meilleure aide aux jeunes, dans une recherche de vérité de plus en plus grande.

Notre équipe S.D.V. se voudrait un lieu de réflexion, de propositions, de pistes de recherche, d’informations, être le moteur de cette diversité. Nous sommes en lien les uns avec les autres, nous ne prenons pas de décision importante sans en référer à l’ensemble. Nous vivons quelquefois les lenteurs du groupe ou de certains membres, mais cela oblige les autres à se modérer, à vivre la patience ou au contraire à "pousser" pour que les choses avancent. Sans cesse nous sommes renvoyés à Jésus-Christ qui fait l’unité de notre vie, nous accueillons ce qui se présente... événements, questionnements, nous efforçant de réaliser de notre mieux ce service d’Eglise.

Cela ne peut se vivre sans imagination, elle naît des besoins ou les précède... La créativité ne doit pas faire défaut... récemment, nous avons décidé d’établir des "ponts" entre groupes informels, groupes de prière et groupes de recherche... ce qui ne semble pas évident, au premier abord. Nous essayons d’intéresser les laïcs à cette pastorale, de jeunes couples commencent à trouver leur place dans les week-ends de réflexion ou la retraite des jeunes".

Cela ne va pas sans courage (il faut parfois lutter avec acharnement pour que ce soit compris), ni sans gratuité, afin de s’efforcer d’être à l’heure de Dieu. Et puis, ce ne sont pas les idées personnelles qui doivent triompher. C’est ensemble que l’on essaie de faire avancer le Royaume de Dieu.

"Je peux dire ici toute la joie que j’ai eue d’oeuvrer avec l’équipe diversifiée qui forme le S.D.V. toulousain et ses prolongements. Nos relations sont simples et vraies, nous avons appris à collaborer, harmonisant nos façons de penser

- les hommes ayant plus l’esprit de synthèse que nous - et nous, plus l’esprit d’analyse. Les uns étant plus en prise directe avec tel ou tel milieu, les autres le vivant davantage au niveau de la prière. Au début, nous avons eu à faire notre place respectivement. Chacun ayant l’habitude de travailler avec des personnes du même sexe, il a fallu trouver un terrain d’entente, une méthode où les femmes ne soient pas trop passives et les hommes trop directifs. La complémentarité a été bonne, une réelle amitié nous unit.
Nous avons appris à nous connaître avec nos spécificités, nos charismes propres. J’ai senti que j’avais ma place de femme et de religieuse. J’ai reçu beaucoup de ce travail en commun, je crois aussi avoir donné le meilleur de moi-même. Ayant à exprimer chacun qui nous étions pour un bon fonctionnement du S.D.V., service ecclésial, nous avons été renvoyés à notre vocation dans ses sources profondes.
Plus je m’enfonçais dans la compréhension de qui j’étais, de ma vocation religieuse, ma vocation propre de soeur de Nevers, ma vocation personnelle, plus je me sentais apte à comprendre celle des autres : prêtres-religieux-religieuses-laïcs. Les différences m’apparaissaient comme les facettes d’un joyau et ma vocation ecclésiale se fortifiait. Je percevais aussi toute l’importance que cela avait pour les jeunes ou moins jeunes que je rencontrais. Je ne pouvais envisager ce service des vocations comme une "petite boutique". C’était un service d’Eglise que nous accomplissions ensemble, tant pis pour les critiques, les attaques...

Je crois vraiment que c’est parce que nous sommes un peu arrivés à cette reconnaissance mutuelle, que chacun a pu être lui-même en vérité et donner le meilleur.

Dans la modalité, je dirais que ce service des vocations est davantage un engagement de la personne, qu’une tâche à accomplir. C’est une tâcha à vivre selon ce que l’on est, selon sa vocation.

En CONCLUSION

je retiendrais comme important dans ce que nous avons vécu :

-  l’unité de vie, chacun a été renvoyé au plus profond de lui-même ;

- la vie relationnelle qui s’est située au-delà des tâches à accomplir, au niveau de nos vocations spécifiques ;

- la confortation réciproque ;

- la complémentarité (hommes-femmes, prêtres-religieux, religieuses-laïcs).

-  le partage des responsabilités dans l’estime profonde et la confiance mutuelle.

II - UNE MONIALE

o Claude, carmélite, depuis 20 ans, ouverte à l’Eglise universelle, avec des missionnaires aux quatre coins du monde. Mais dans l’Eglise locale, chaque monastère est encore un peu une île (liturgie immuable, pas beaucoup d’accueil).
Venue d’une paroisse parisienne et de l’Action Catholique, branchée sur la "famille" du Père de Foucauld, liée d’amitié avec des membres d’autres familles religieuses, elle a soif d’une vie d’Eglise.

- "Je plonge. . . "

o Dix années passent. Crise de 68, y compris en communauté. Chargée du noviciat en 70. En 71, une responsable lui demande de la remplacer à une réunion au C.N.V. (avec le Père VENNIN). En 1972, ce fut Bièvres...

"Là, j’ai vraiment l’impression de débarquer de ma planète... sur une autre planète inconnue avec son expérience, son vocabulaire : la pastorale des vocations.
Au Carmel, les vocations, ça tombe du ciel, ou bien on prie pour que Dieu donne de saints prêtres à son Eglise, c’est tout !
En juin 1972, le service des moniales me délègue à l’équipe du C.N.V, pour voir ce qu’il y aurait à découvrir et à faire pour les moniales dans cette pastorale."

o Une équipe voit le jour en 1974.

- "Les conséquences sur ma vie personnelle et communautaire"

- attention plus grande aux diversités des vocations monastiques pour les représenter honnêtement...

- dans l’équipe du C.N.V., attention aux différentes vocations et à leur évolution dans notre temps ;

- en même temps, perception plus vive de nos différences et de nos complémentarités, et peut-être encore plus de notre appel commun : quand on prie et travaille ensemble au C.N.V., je ne me sens pas "la contemplative" du groupe.
Nous le sommes ensemble, de même que nous vivons chacun la "Mission" à notre façon. C’était déjà une conviction profonde mais c’est une joie que l’expérience de la pastorale des vocations l’ait confirmée.

- sensibilité plus vive à notre complémentarité dans l’Eglise. Désir de la partager en communauté : cela nous invite à des contacts plus fraternels avec des religieuses, des prêtres.

- découverte vivante de la vocation séculière à travers Colette. Son groupe a rencontré aussi la communauté.

- conviction pratique qu’on ne peut suffire à l’accompagnement des jeunes qui passent dans nos monastères et qu’il faut être en contact (pas seulement épistolaire) avec d’autres accompagnateurs.

- exigence d’un choix renouvelé de ma vocation (c’est plus personnel). Cela m’est dur de sortir de mon trou, cela m’a été, une fois, dur d’y rentrer. La participation d’une moniale à la pastorale des vocations ma paraît une chose délicate. On ne va pas au désert parce qu’on n’aime pas l’apostolat, les contacts, la joie d’être ensemble... et s’enfouir au désert est un travail de longue haleine jamais acquis. Bien sûr, ce n’est pas un absolu, il faut savoir en sortir, être libre, sans peur... mais il faut savoir que la plongée n’est pas facile et que c’est notre mission première. Le travail pastoral peut être occasionnel, mais il n’est pas dans le droit fil de notre vocation, au moins pour le carmel.

- o Claude achève son mandat. Elle va passer la main à une autre moniale.

- "Je suis heureuse de cette expérience d’un service d’Eglise plein d’espérance. J’ai certainement été modifiée, élargie par ce travail fait ensemble, et je suis renvoyée plus que jamais à ma vocation du grain de blé enfoui en terre. C’est que j’ai encore vu une autre conviction confirmée au C.N.V. : c’est l’authenticité de la vie de chacun, de la vie de nos communautés qui peut seulement être un appel, un lieu de discernement et de formation pour les jeunes qui cherchent. Je crois vraiment qu’on ne peut être utile les uns aux autres dans cette pastorale qu’en étant humblement et courageusement ce que l’on est, et rien que ça . . .

III UN PRETRE

" Jean n’était pas trop mécontent lorsque son évêque lui a demandé d’assumer la responsabilité du S.D.V. : "vous ferez ça très bien !" Pas mécontent après neuf années passées dans un petit séminaire où les effectifs avaient fondu ...

Déjà là, il y avait eu collaboration entre prêtres-religieux-religieuses et laïcs. Mais l’approfondissement de la foi et les répercussions sur la vie étaient envisagées en fonction des enfants.
Il y avait de longs palabres sur le projet éducatif..., moins de partage sur la vie personnelle.

Au S.D.V., le climat est différent : témoin ce qu’il exprime au sujet de sa collaboration avec une religieuse membre de l’équipe :

"Sr Colette ne me connaissait pas et réciproquement.
D’où un temps "d’apprivoisement mutuel" (Saint-Exupéry). Mais assez vite la collaboration est devenue très simple (organisation de rencontres pour jeunes - sensibilisation des adultes - contacts individuels...) Nous nous rejoignions sur les interrogations au sujet du S.D.V .., sur son évolution aussi. Cette collaboration toute simple a fait naître une estime réciproque et je crois que c’est quelque chose comme ça, l’amitié vraie. Humainement, c’est dynamisant et équilibrant. D’ailleurs la spontanéité est de règle. Si pour Colette, je suis "le chef du SDV", je n’oublie pas de lui rappeler qu’elle est "l’ancienne" : c’est de bonne guerre (moi 3 ans de SDV et elle, 7).

Je dis aujourd’hui sans hésiter que cette collaboration avec Sr Colette a été l’occasion d’un REDEMARRAGE pour ma Foi. A travers le PARTAGE de ce que nous avons de plus profond en commun dans nos vies, j’ai fait une REDECOUVERTE :
arrivant au S.D.V. au moment où "ça foutait l’camp de partout !" je découvrais tout à coup que malgré cela je n’étais pas seul à croire...

- que Dieu appelle encore aujourd’hui (respect et espérance)

- que son appel peut être entendu par des JEUNES, des ADULTES et même par des ENFANTS (ce qui à l’époque était plutôt mal reçu...)

- que avec d’AUTRES, on pouvait encore poser des actes en ce sens : il se trouvait encore quelques personnes "motivées" ici ou là pour envisager la question des "APPELS DE DIEU, aujourd’hui". Le problème était de les aider à se RENCONTRER.

 

Ce travail en collaboration avec sr Colette m’a aussi aidé à comprendre un peu mieux ce qu’est la VIE RELIGIEUSE en profondeur. Si elle était là, elle dirait sûrement que j’ai encore beaucoup à découvrir ! ... Mais ce que je veux dire, c’est que les exigences de cette vie religieuse consacrée m’apparaissent un peu plus clairement : à la voir vivre, je me dis : "l’esprit d’OBEISSANCE, c’est pas des mots... c’est exigeant... c’est difficile à vivre... NE RIEN AVOIR A SOI.., je ne m’y vois pas... toujours tenir compte des autres et être joyeux quand même.. . "Faut l’faire !"...
Se dire pour une femme qu’elle pourrait être maman : c’est dur à vivre à certains jours j’imagine, et je vois mieux la grandeur du DON TOTAL !...

A travers les échanges que nous avons eus, je pense que nous sommes arrivés à plus de clarté dans nos diverses vocations, plus de respect et d’estime aussi. Il m’est arrivé de me dire avec sr Colette : "je ne me vois pas vivre ce que tu vis en vie religieuse... je ne suis pas fait pour ça !
Mais dans le même temps, je m’interroge : que fais-tu de ton temps ? ... Comment utilises-tu ce que tu as : voiture ?
magnéto ? Appareil photo ? Est-ce pour toi ou pour le service des autres ?... C’est l’occasion de rectifier ! ...

Finalement, si différentes qu’elles soient, nous sommes quand même heureux de savoir que nos vocations se rejoignent au terme : JESUS-CHRIST à dire aux autres avec ce que nous sommes, non pas l’un à la place de l’autre, mais chacun bien à sa place dans l’Eglise. Etre prêtre en 1978, être religieuse en 1978, ce ne sont pas deux voies parallèles qui ne se rencontreraient qu’à l’infini. Pour nous, c’est le même chemin partagé ensemble vers Jésus-Christ où chacun garde son caractère propre. Comme tout chemin, il est parsemé de cailloux sur lesquels on bute parfois, mais les cailloux du chemin ne doivent pas nous faire oublier les fleurs qui le bordent."

Au cours de l’échange, la communauté de Soeur Colette a été bien située comme l’un des lieux où est vécu ce qui venait d’être exprimé.

IV - UNE LAIQUE CONSACREE EN INSTITUT SECULIER

Voilà bientôt 25 ans, Colette découvrait enfin ce qu’elle cherchait depuis longtemps : une forme de vie consacrée en pleine solidarité de vie avec son entourage. "Cela n’existe pas" lui avait dit le prêtre qui l’accompagnait ...

Il ignorait l’existence et la reconnaissance officielle en 1947 des Instituts séculiers ; on pouvait désormais se consacrer sans réserve à Dieu et vivre les Béatitudes en plein monde, sous un mode séculier sans que l’on y voit une forme déguisée de vie religieuse (ce qui demande une certaine discrétion).

Depuis quelques années, Colette fait partie d’une équipe au C.N.V., plus spécialement chargée des vocations à la vie consacrée.
Depuis un an, elle participe aux activités du Service des Vocations de son diocèse ; en particulier pour l’accueil et l’accompagnement des jeunes, en équipe de recherche.

Aujourd’hui, elle peut témoigner, sans équivoque par rapport à la vie religieuse. C’est un événement pour la pastorale des vocations.
C’est un événement pour l’Eglise où la diversité des vocations devient de plus en plus significative.

Son témoignage :

1. "Comment cela m’a permis de rentrer en relation avec d’autres vocations.

"En venant à l’équipe nationale des vocations, j’étais surtout motivée par une meilleure connaissance dans l’Eglise de cette forme de vocation nouvelle et originale, mais je craignais un peu cette participation.

Dans cette grande mosaïque constituée par les Congrégations religieuses, Moniales et Instituts de Vie Contemplative, je me demandais comment trouver notre place, faire comprendre notre originalité et ne pas perdre l’anonymat qui est l’un des moyens pour nous de vivre "enfouies" au milieu du monde, comme le "levain dans la pâte".

Je crois pouvoir dire que dans un premier temps, nous nous sommes beaucoup écoutées et avons pris conscience de nos différences, dans le respect et l’estime mutuels.

Une profonde amitié s’est créée entre nous et dans cette ambiance, mon regard a changé en profondeur et s’est élargi.

J’ai mieux découvert toute la richesse et la complémentarité de nos différentes vocations dans leur diversité : vie religieuse active, vie monastique, contemplative, laïque consacrée ; et je reprendrais volontiers pour exprimer ce que je ressens en profondeur une réflexion du Père MARTELET :

"L’Esprit-Saint est assez vigoureux pour enrichir l’Eglise d’une nouvelle forme de consécration, sans faire périr les autres, qui ont porté et peuvent encore porter tant de fruits. C’est en se différenciant profondément l’un de l’autre sur la base d’une commune consécration, que la vie religieuse et les I.S, enrichiront l’Eglise d’un amour authentique du Christ et d’un service spécifique des hommes."

Un appel en amène un autre et c’est ainsi que j’ai accepté de participer au Service des Vocations de mon diocèse.

A présent, je me sens mobilisée pour toutes les vocations et non plus seulement pour la vocation de laïque consacrée. Je suis convaincue que c’est un service que nous rendons à toute l’Eglise en offrant aux jeunes en recherche de vocation, tout un éventail où ils pourront choisir la voie qui répond le mieux à leur appel profond.

A travers les échanges, les rencontres, j’ai pu raffermir aussi la conviction que j’avais déjà : l’Esprit-Saint continue à appeler aujourd’hui et cela m’a apporté toute une espérance nouvelle.

Cela m’a permis aussi d’approfondir davantage ma propre vocation, d’être plus attentive à ce qui en faisait son originalité, dans le même appel d’amour du Christ. Témoin pour d’autres de cette vocation, il me fallait la vivre de mieux en mieux, si je voulais qu’elle soit SIGNE."

2. "Comment l’équipe a vécu la réciprocité et qu’est-ce que cela a apporté aux uns et aux autres ?

"Tant au plan de l’équipe du Centre National des Vocations, que dans le S.D.V., nous avons été très attentifs à découvrir l’originalité de nos différentes vocations et à se reconnaître différents.

Cette reconnaissance nous a amenés à en tenir compte dans toutes les initiatives mises en place.

- sur un plan national :

  • dans les sessions organisées, pour une meilleure connaissance de toutes les vocations
  • une plaquette faite en commun avec le C.N.V, et les I.S. pour
  • faire connaître dans l’Eglise les I.S.

- sur un plan diocésain :

  • groupe de recherche : différents témoins apportent la diversité des vocations ;
  • exposition sur les vocations pendant le Carême, où plusieurs panneaux montrent les différentes vocations existantes dans l’Eglise et plus spécialement dans le diocèse,
  • rencontre de Moniales en décembre, où un témoignage d’un membre d’I.S, leur a été présenté,
  • rencontre fin mai sur un plan régional : prêtres, religieuses, laïques consacrées, une mère de famille, se rencontraient pour mieux saisir l’originalité de cette vocation en institut séculier,
  • présence de responsables du S.D.V. (prêtre, religieuse) aux réunions régionales inter-instituts séculiers ;
  • l’équipe diversifiée du S.D.V. (prêtres, religieuse, mère de famille, institut séculier) porte vraiment le souci de toutes les vocations et s’entre aide à vivre leur propre appel.

- Au niveau des Instituts Séculiers sur le plan national, régional, et au niveau de mon propre Institut

Une information se fait sur toutes les vocations ; il y a moins de méfiance vis-à-vis de la vie religieuse. On se reconnaît de plus en plus dans nos différences et dans nos complémentarités.

Bien sûr, les difficultés existent : on risque d’être connues comme laïques consacrées et cela poserait des problèmes dans notre milieu habituel de vie, où de par vocation, nous devons être "enfouies" avec les autres hommes, comme tout chrétien.

C’est pourquoi nous devons pouvoir compter sur la discrétion des membres de l’équipe des vocations, pour le respect de notre originalité. Et je pense que notre mission au niveau du S.D.V, doit se faire avec l’accord de tout le groupe de l’I.S, et des autres I.S. ; nous sommes en quelque sorte leurs déléguées, nous ne devons pas en faire notre affaire personnelle. Tous doivent se sentir partie prenante dans cette mission d’Eglise."

V- NICOLE MERE DE FAMILLE

Il est toujours délicat d’inviter une seule mère du famille, témoin du laïcat, à une session dont les participants, prêtres, religieuses ou laïcs ont tous choisi le célibat soit pour la vie consacrée, soit pour le ministère. Ne va-t-elle pas être considérée comme "otage" dont la présence aurait pour but de rassurer les organisateurs quant à leurs convictions sur les équipes diversifiées ?

En fait, Nicole a très bien compris que l’on ne peut faire tout à la fois. Elle a voulu simplement être parmi nous le rappel de cette ouverture à la diversité des vocations à laquelle nos équipes sont invitées. Au moment où les hommes-prêtres et les femmes-consacrées faisaient le point de leur collaboration, sa présence et son témoignage les empêchaient de se replier sur eux-mêmes.

Il y a eu ce qu’elle a dit ; il y avait ce qu’elle aurait voulu dire. Les notes suivantes tiennent compte de l’un et de l’autre.

"Je suis un peu seule de mon espèce. . . , volontaire désignée. . .
Mais il y a quelque chose de commun entre nous : nous sommes tous nés laïcs et sommes entrés comme tels dans l’Eglise.

"De nos enfants, aucun n’a actuellement un projet de vie sacerdotale ou religieuse.
"Ma participation à l’équipe du S.D.V. de Nancy, la reconnaissance que j’y ai faite de la vocation des autres m’a permis de vivre en profondeur ma propre vocation, plus spécialement au moment de la mort de notre fils aîné, dans l’accueil de cette mort et dans la montée spirituelle que cela nous a appelés à faire.

"Au S.D.V., j’apporte la vie, la mienne et celle de mes relations. Et il me renvoie à la vie. J’y trouve dynamisme et espérance.

"Nous sommes tous responsables de la vocation des autres, celle de nos propres enfants, celle des jeunes que l’on aide à grandir. Nous les rencontrons particulièrement en catéchèse, depuis les plus petits jusqu’aux aînés (la catéchèse nous donne au moins autant que nous ne donnons nous-mêmes ; cela nous confirme et nous fait progresser dans ce que nous sommes).

"En équipe diversifiée, nous sommes amenés à entrer en relations avec d’autres formes de vocation :

- les prêtres, hommes connus et aimés et soutenus ; nous en avons besoin ; nous ne pouvons pas vivre un certain dynamisme chrétien sans eux ;

- les religieuses : nous connaissons en profondeur certaines communautés grâce à ma présence comme Parent d’élèves de l’Enseignement Catholique ;

- Au S.D.V., j’ai aussi découvert les Instituts Séculiers grâce à la présence d’un de leurs membres.

"Il est important de découvrir l’homme, de tenir compte de son enracinement humain. Cet enracinement humain commence au niveau de la famille. C’est là que se vit d’abord la disponibilité , l’attention, l’accueil. C’est dans la famille que commencent à "naître" les enfants. Pour que naisse une vocation, il faut prendre l’histoire à ses débuts. La vocation commence là : vivre avec les autres.

"Notre souci premier est d’aider les jeunes à devenir des hommes, des femmes : Nous préparons le terrain. Cela demande du temps, une grande attention. Souvent, nous vivons à l’image de la Vierge, nous gardons fidèlement bien ces choses dans notre coeur.

"Il faut penser à la prière. C’est à ce niveau là que les chemins se préparent... Les chemins du Seigneur ne sont pas toujours ceux que nous avons prévus.
Un beau jour, nous nous voyons "embarqués" dans la Pastorale des Vocations. On ne sait pas exactement où ça nous mène. Et puis, on est de plus en plus "impliqué" : tout compte : ce que l’on est, ce que l’on fait : baptisée, mariée, mère de famille, en relation avec quantité de jeunes ou moins jeunes, personnes très différentes, très enracinées dans le monde et aimant le monde.

C’est là que doit s’épanouir notre vocation de laïc : répondre à un appel à travers toute notre vie. Notre vocation, c’est de vivre dans la ligne de notre baptême qui doit prendre toute la vie, tout l’être. C’est un appel à servir.

"Quand on parle de S.D.V., de Service Diocésain des Vocations, je pense tout de suite à ce qu’est le SERVICE. Un service suppose disponibilité et attention."

. . . c’est tout un programme !

  • Marie-Reine, religieuse
  • Claude, moniale
  • Jean, prêtre
  • Colette, Institut Séculier
  • Nicole, mère de famille