Le chemin parcouru


Ces pages ne résoudront pas tout. On pose parfois des questions qui soulèvent tous les problèmes agités aujourd’hui dans l’Eglise (1). Nous nous limitons à un essai concis pour dire à propose des foyers et séminaires de jeunes :

- d’où venons-nous ?

- où en sommes-nous ?

- vers où pouvons-nous avancer ?

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I - LE CHEMIN PARCOURU

Rappelons le bilan réalisé en 1968 par Gérard Artaud. Dans sa thèse soutenue en juin à l’Ecole des Hautes Etudes de Paris, il décrivait l’évolution depuis 1938. Il constatait : "la disparition d’une institution dont le but était d’initier les enfants dès le jeune âge à la fonction cléricale, et l’apparition d’une institution nouvelle qui, pour éviter toute équivoque, a tendance à renoncer au titre de séminaire et se définit comme un service des jeunes en recherche de vocation". (2)

. Depuis lors, plusieurs événements du monde et de l’Eglise ont infléchi la trajectoire de la "nouvelle institution". Les événements de 1968 relayés par la crise économique ont renforcé la critique des modèles reçus et ruiné bien des projets. Aujourd’hui, peu de jeunes ont un projet d’avenir. G. Artaud précisait que le "jeune en recherche" est celui qui a la claire perception d’un projet d’avenir sacerdotal ou religieux, si bien qu’il lui semble impossible de rester disponible à l’appel du Seigneur, sans prendre en considération cet appel qu’il croit pressentir (3). En 1976, cette catégorie de jeunes est devenue minoritaire dans les foyers et séminaires.

. En juillet 1971, à Metz, les services de Vocation français ont vécu une importante session sur le thème "Réalités humaines et vocations". Les foyers et séminaires qui, peu ou prou, avaient déjà pratiqué des méthodes de l’Action Catholique, ont été invités à une attention particulière aux réalités humaines et aux enracinements, tels que les comprend l’Action Catholique spécialisée.

On cherche comment les jeunes du Foyer-Séminaire appartiennent à un milieu déterminé, on privilégie leur participation à des équipes de JIC, de JOC ou de MRJC à l’extérieur. La maison devient centrifuge. Ailleurs, la présence parmi les autres jeunes s’affirme au niveau des aumôneries de scolaires ou dans les Maisons de Jeunes et de la Culture. Les foyers-séminaires ont pris conscience d’une responsabilité collective dans l’évangélisation du monde des jeunes.

. Dans ce contexte, la rencontre des foyers-séminaires à Fontenay, en juillet 1972, sera tâtonnante : quelle peut être notre place, si les jeunes n’expriment plus de projets, si notre rôle est largement dépendant de mouvements de jeunes que nous ne contrôlons pas, qui nous contestent parfois. Ne sommes-nous pas sans objet et sans moyens ? Peu à peu pourtant, dans la vie de l’Eglise et dans celle des jeunes, des perspectives neuves vont apparaître.

. En octobre 1973, l’Assemblée des évêques à Lourdes conduit une réflexion qui aboutit au document "Tous responsables". Dès lors, le souci des appels au ministère presbytéral ne peut être isolé de celui des autres vocations. Le foyer-séminaire devient, avec bonne conscience, un lieu où l’on cherche comment se mettre maintenant et plus tard au service de l’Evangile, chacun selon sa vocation... Cette voie facilite aussi la prise de responsabilité par des laïcs éducateurs et parents : ils sont, eux aussi, chargés de l’éveil et du soutien de toutes les vocations...

. Enfin, si les prêtres, les familles ne sont pas toujours favorables aux foyers et séminaires, il n’est plus rare qu’un responsable de maison s’entende dire :

- "Je veux entrer au Foyer

- Pourquoi ?

- Parce qu’il y a une "communauté".

L’anonymat et les conformismes sociaux sont devenus insupportables pour les jeunes. Accueillir des solitudes ne correspond pas à la finalité première de nos maisons, mais l’Eglise, elle, a vocation pour être communauté. Quand on peut proposer une communauté réunie au nom de Jésus-Christ, c’est une expérience d’Eglise que l’on offre avec sa fécondité pour maintenant et plus tard. Faut-il ajouter que la "ruée vers l’âme" (4) qui revalorise les voyages intérieurs, l’aventure de la prière, apporte au foyer ses ambiguïtés et son dynamisme ?

Cette évolution récente, accélérée même, a transformé nos maisons et leur environnement. Tentons de faire le point.

Quatre facteurs infléchissent donc notre trajectoire :
- L’évolution des projets vers un profil indéfini,
- la prise de conscience des réalités humaines collectives et extra-scolaires,
- la découverte que la mission de l’Eglise est l’affaire de tous (les prêtres bâtissent l’Eglise de concert avec d’autres).
- La faim de communautés pour la construction de soi et pour expérimenter l’Eglise.

On a senti la radicalité des changements provoqués par ces incidences. On les retrouvera à la fin comme des options qui engagent l’avenir.



NOTES --------------------------

(1) C’est une telle somme des difficultés et des ignorances qu’on pourrait tirer des carrefours de notre session de Bièvres. [ Retour au Texte ]

(2) VOCATION n° 245 (janvier 1969) a publié l’essentiel de la thèse de G. Artaud. [ Retour au Texte ]

(3) idem, page 105. [ Retour au Texte ]

(4) - Une expression de Louis Pauwels. [ Retour au Texte ]