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Dans une aumônerie de lycée
Ce serait plutôt aumônerie et vocation ! Pourquoi ? Parce que notre travail dépasse le cadre de la catéchèse proprement dite et s’inscrit dans toute une vie de groupe.
A quoi ressemble cette rencontre de plus d’une centaine de gars et de filles de tous les âges (6émes aux terminales) et de tous les milieux ?
L’aumônerie est en principe à l’intérieur du lycée (lycée avec C.E.S. : 1 800 élèves). Il y a aussi prise en charge partielle d’un autre C.E.S.
proche.
En réalité, toutes les activités sont à l’extérieur du lycée, c’est-à-dire les rencontres hebdomadaires de réflexion chrétienne, les temps forts qui vont de la soirée-débat à la réco. Le Foyer est ouvert deux heures chaque soir et le samedi ; il veut être autre chose qu’une salle self-service ou un acheminement vers l’A.C. (JOC et ACE).
Il s’agit de rencontres multiples et diversifiées, car dans le milieu hétérogène d’une aumônerie, il nous a semblé nécessaire d’éviter deux écueils :
celui de privilégier un groupe, une classe, un milieu par rapport aux autres,
celui du nivellement et ... du nivellement par le bas. Tout le monde pareil, c’est sûrement plus facile, mais ce n’est pas respecter celui qui est en face de moi et qui est unique...
Ajoutons dans cette rapide présentation quelque chose d’important, de vital même : un groupe d’animateurs jeunes et adultes prennent en charge l’aumônerie sur le plan réflexion et administration mais aussi et surtout pour l’animation spirituelle, la pédagogie, la prospective.
Regardons à travers le travail à l’aumônerie ce qui chez les jeunes de 6éme-5ème paraît comme attente et ouverture à propos de la vocation en général et des vocations en particulier. . .
Il y a difficulté à envisager cette recherche "au microscope", car toute l’action se situe sur les deux cycles, au long des années de rencontres, et donc se limiter, c’est tronquer.
Depuis tout à l’heure, il est question d’"aumônerie". C’est encore une mauvaise expression car notre propos qui explique nos choix, c’est d’être, c’est de devenir la Communauté catholique du lycée.
Notre but : aider les jeunes à bâtir leur vie humaine et chrétienne.
Nous sommes persuadés que leur permettre de rencontrer Jésus-Christ c’est leur donner le moyen d’être pleinement hommes et femmes et d’oeuvrer efficacement dans la construction d’un monde plus humain et plus juste.
Nous sommes aussi intimement persuadés que leur permettre de rencontrer Jésus-Christ, c’est la raison pour laquelle nous sommes là.
Une question se pose : "dans cette aumônerie, dans ce groupe, parlet-on des vocations ?"
Réponse : un peu "des" vocations, beaucoup de "la" vocation.
Les jeunes que nous rencontrons, ce sont ceux de la 6ème aux Terminales et le problème se posera de façon différente pour Benoît, Claudine, Mireille... Aujourd’hui essayons de nous limiter aux 6ème-5ème.
CE QUE NOUS VOYONS CHEZ EUX
1) Quelques questions spontanées sur nous, sur notre vocation personnelle.
Cela ne va pas loin ( il se trouve que les aumôniers sont religieux et religieuse)
- A quoi ça sert que tu sois soeur ?
- Pourquoi P. est-il obligé d’être là pour la messe ? Tu y es, ça suffit.
- Ma mère, elle n’est pas soeur, et pourtant elle fait la catéchisme.
2) Ensuite une certaine indifférence par rapport à ce qui pour nous est spécifique de notre choix de vie, ce qui est "notre" expérience. Et cela rejoint, nous semble-t-il, le climat général sur ce plan, c’est-à-dire une certaine soif d’engagement, de recherche, d’exigence de participation à la vie d’une Eglise mais d’une Eglise que l’on bâtit.
Même 10 ou 12 ans, ce mouvement est très sensible et culminera au moment des temps forts ou de l’Eucharistie ou de la prière spontanée. La prise en charge devient du jour en jour plus effective.
S’il n’y avait pas danger de projeter nos propres façons de voir et de nous exprimer, on pourrait dire que les jeunes qui sont avec nous ne cherchent pas à connaître ou à comprendre les ministères dans l’Eglise.
- Ils en "inventent" d’autres. Ils ne cherchent pas à connaître comment d’autres ont vu leur don au Seigneur.
- Ils vivent cette avancée. Ce n’est pas notre expérience qui est importante pour eux, c’est ce qu’ils vivent aujourd’hui.
Il est peut-être important de souligner ce point qui change la présentation que nous avons à faire de l’essentiel de notre vie.
Ils ne cherchent pas de "modèles" et donc ce n’est pas en termes d’appel "A SUIVRE" un chemin ou quelqu’un qu’il faut parler, cela tombe à côté. Mais dans une recherche de maturité intérieure, de découverte de soi, leur proposer de devenir ce qu’ils doivent être.
Ils ne cherchent pas de "modèles" tout faits, mais ils ont besoin d’un adulte, c’est-à-dire quelqu’un qui s’assume. Ils veulent quelqu’un de solide en face d’eux. Ils refusent l’adulte faible qui ne sait pas ce qu’il est et ce qu’il veut. Ils récusent le fixisme des structures, ils exigent la solidité chez leur interlocuteur.
Ce qu’ils veulent, c’est se découvrir dans le dialogue. Et cette découverte de soi est première condition d’un cheminement vocationnel, car cet effort d’approfondissement sous le regard de Dieu, c’est la seule façon de découvrir "sa" vocation. "La vocation, on ne l’a pas ; la vocation, c’est quelque chose que l’on est" (Didier Piveteau).
CE QUE NOUS ESSAYONS
A) Dans toutes nos rencontres, une question est reprise inlassablement sous diverses formes :
- QUI EST JESUS-CHRIST POUR TOI ? RENCONTRE
- QUE TE DEMANDE-T-IL ? APPEL
(en jargon ecclésial : quelle est ta vocation ? Quelle est ta vocation humaine, chrétienne, spécifique ?)
Et les lignes de force de notre pédagogie en ce domaine sont résumées dans ces notes prises auprès du responsable du séminaire 1er cycle de Toulouse, la P. LACHIEZE REY
IL FAUT DISTINGUER POUR Y VOIR CLAIR :
- vocation humaine inscrite au coeur de l’homme créé par Dieu,
- vocation chrétienne par laquelle nous reconnaissons le salut donné dans le Christ,
- vocations spécifiques (prêtre religieux...) Elles ne sont pas un au-delà de la vocation chrétienne ; elles y trouvent un enracinement et leur raison d’être.
1) VOCATION HUMAINE : on n’a pas la vocation comme on a un billet de 100 F. Elle est du domaine de l’être et non du domaine de l’avoir. Elle s’identifie avec une histoire, elle s’incarne en lui donnant un sens. Prendre conscience de sa vocation, c’est découvrir le sens de sa vie, le principe unifiant de toutes les facettes de la vie, la place des autres dans sa vie comme un appel à sortir de soi pour, avec eux, construire quelque chose : elle est engagement de la liberté humaine.
2) VOCATION CHRETIENNE : elle est caractérisée par une PAROLE.
- Une Parole à accueillir au sein de mon existence, une parole absolue, une parole qui s’adresse à moi sans venir de moi, qui me demandera une rupture : CONVERSION.
- Une Parole créatrice, elle me fait vivre autre chose, elle me fait renaître dans un peuple qui a mission. C’est la raison pour laquelle ma vocation est enracinée dans mon baptême : JE SUIS ENVOYE DANS LE MOMENT OU JE CROIS.
- Une Parole qui est quelqu’un : le Seigneur Jésus. De même que dans toute vie humaine, l’amour n’est pas une valeur mais la reconnaissance de personnes qui envahissent ma vie, la saisissent, la Parole n’est pas un principe mais une Personne à découvrir dans ma vie. La vocation chrétienne n’est pas un acquis, aussi je dois la vivre sans cesse :
je fais cela : | pourquoi ? Comment ? | |
qu’est-ce que cela signifie | pour moi ? | |
" " " "
|
pour les autres ? | |
" " " "
|
pour Dieu ? |
3) VOCATIONS SPECIFIQUES : elles se situent et se reconnaissent dans la dimension ministérielle de l’Eglise. Les vocations spécifiques sont proposées par l’Eglise. Dans un monde en mutation, dans une Eglise en mutation, elles prennent des formes nouvelles mais elles restent une proposition venant du l’Eglise.
Et conjointement à notre recherche, à cette interrogation fondamentale par rapport à Jésus-Christ que nous essayons de répercuter dans toute notre action, nous voulons vivre de lui, nous voulons bâtir ensemble cette cellule d’Eglise que veut être notre communauté avec ce que cela demande de prière, de rassemblement autour de la Parole et du Corps du Christ (Eucharistie hebdomadaire), avec la créativité, la gratuité, la joie de nous sentir tous responsables de ce que nous vivons.
Communauté = cellule d’Eglise ! Est-ce l’Eglise traditionnelle ?
Non ! Mais un lieu de recherche pour l’animation spirituelle du peuple de Dieu, un creuset où chaque jeune, même celui de 6ème, devient chaque jour davantage un peu plus conscient de l’appel à la rencontre du Christ...
Et cet appel, cette rencontre se feront surtout à partir du témoignage de gens profondément engagés dans la construction d’un monde meilleur et qui rendent compte de leur foi, de gens qui vivent en pleine pâte humaine l’amitié du Christ et viennent la dire simplement devant les jeunes au long de l’année ou dans des temps forts.
Les témoins vivants de Jésus-Christ sont les médiateurs indispensables (et non les modèles) pour que l’interrogation se pose. ET TOI ?
Rencontre de Jésus-Christ. Ecoute de Jésus-Christ à travers la Parole, à travers mes frères, c’est le leitmotiv de ce que nous faisons.
C’est notre "pastorale des vocations". C’est oeuvrer pour que naisse dans le peuple de Dieu d’authentiques ouvriers de l’Evangile qui, chacun selon leurs vocations personnelles répondent OUI au SI TU VEUX du Christ.
Nous parlons un peu des vocations !
Nous parlons beaucoup et même toujours de la vocation ... ! Celle de devenir pleinement homme, pour être pleinement chrétien.
COMMENT FAISONS-NOUS ?
Quelques moyens cités-parmi d’autres ...
1) En 6ème :
- choix d’un programme axé sur Jésus-Christ.
- réflexion et approfondissement avec les catéchistes.
- temps forts ou relais trimestriel où nous approfondissons cette connaissance du Christ.
- proposition d’une avancée soit en participant à des rencontres ACE soit dans un mouvement spirituel (MEJ).
- révision de vie en groupe restreint avec catéchiste en particulier au moment du Carême.
- "Le" question avec des témoins : table ronde ou projection.
En 5ème :
- travail à partir des questions que se posent les jeunes en essayant d’y apporter un éclairage de foi. Tout le monde peut parler. Les jeunes peuvent exprimer leur opinion mais nous aussi. Avons-nous toujours le courage de dire notre foi sur des sujets qui semblent au premier abord ne rien avoir à faire avec Jésus-Christ ?
- utilisation ponctuelle de certains outils proposés par divers SDV (en particulier ceux de Midi Pyrénées) Fiche 16 R et 16 D.
- réco. Un exemple : la dernière réco le mois dernier portait sur le thème "réussir sa vie". Pourquoi ? Pour qui ? Pour quoi ?
- dossiers proposés sur des gens qui ont su donner une réponse à l’appel du Seigneur. Celui qui accroche le plus semble être Abraham.
2) N’oublions pas la recherche régulière avec les animateurs, en particulier avec les animateurs jeunes, sur la prise en charge par tous les membres de là communauté.
Cette éducation à la prise de responsabilité effective dans le peuple de Dieu est pour nous un authentique cheminement dans un projet vocationnel, une marche vers la mise en exercice d’un sacerdoce que tout baptisé possède et qui lui demande d’être celui par qui le monde "verra" Jésus-Christ.
Cette méthode n’est peut-être pas la bonne. Ella n’a pas été adoptée par nous pour avoir des vocations. Elle est la suite logique de notre réflexion commune et existe, parce que nous avons voulu vivre nos convictions.
Elle a de plus la chance (mais n’est-ce pas parce qu’elle est dans la vérité) de converger avec la recherche de vocation des jeunes :
- en leur permettant de rechercher le sens de la vie dans une expérience de vie communautaire et de coresponsabilité,
- en leur posant la question du sens de leur vie tout au long de leur réflexion et non comme quelque chose de plaqué,
- en développant, nous l’espérons, la conscience d’une vocation personnelle qui soit traduction "unique" de l’appel que la Christ lance à tous les hommes.
En conclusion, une dernière question que nous avons à nous poser sans cesse et sans laquelle notre travail auprès des jeunes, l’interrogation que nous voulons susciter, resteront lettre morte.
- Sommes-nous, adultes, responsables de l’animation, éducateurs de jeunes, sommes-nous nous-mêmes en "état de vocation", comme le disait la Père VENNIN ?
- Sommes-nous convaincus que c’est chaque jour que retentit pour nous l’appel du Christ, que notre vocation c’est être fidèle à percevoir ces appels de Dieu ?
- Sommes-nous en marche vers, sommes-nous dans un chemin, essayant de répondre, de vivre plus ou moins parfaitement un OUI à un appel qui n’est jamais complètement et définitivement perçu ?
Nous sommes les premiers à avoir besoin d’être "catéchisés".
Elisabeth LAFITTE
Lycée Berthelot (Toulouse)