Un groupe de filles en recherche


Voici quelques échos du cheminement d’un groupe de filles en recherche. Ce cheminement n’a pas la prétention d’être un modèle du genre, mais il constitue un partage intéressant de ce qui a été réalisé dans un diocèse. De plus, ce texte n’est-il pas une invitation à faire connaître vous aussi, au C.N.V., telle ou telle expérience ?

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I - QUI SONT CES FILLES ?

Parmi elles :

7 institutrices
1 éducatrice spécialisée
2 infirmières
2 employées de bureau
1 étudiante
8 ont vécu un peu dans une école apostolique,
9 sont d’origine rurale
2 sont d’origine ouvrière

4 font, ou ont fait du M.R.J.C.
3 sont engagées ou ont été engagées, dans l’A.C.E.
2 cherchent à s’engager dans la J.O.C.
1 appartient à une équipe liturgique
1 fait du M.E.J.
3 appartiennent à des groupes de prière (cellule de Taizé - Foyer de Charité - Renouveau charismatique).
2 sont en relation avec une communauté religieuse.

Ces filles se rencontrent depuis une ou plusieurs années, et se connaissent. Elles ont entre 20 et 25 ans.

II - COMMENT SE SITUENT-ELLES PAR RAPPORT A LEUR PROJET ?

Toutes parlent d’un "APPEL" perçu étant jeunes. L’une exprime même le regret de l’avoir eu si jeune : "j’aurais préféré l’avoir eu au bout d’une recherche !!"

1) Deux traversent une crise de révolte, de rejet, car elles viennent de prendre conscience que jusque-là, elles avaient tout construit sur ce "projet lointain", sans tenir compte de leur vie.

- "Jusque là, j’ai essayé de répondre par volonté à un appel que j’avais cru discerner, jeune, sans tenir compte de ma vie".

- "Tout ce que j’ai fait jusque-là, (refus de proposition de mariage entre autre) était axé sur un avenir lointain".

- "Je me cloisonnais à cause de ce "fameux projet", et je pensais trouver aux week—ends de recherche une solution toute faite".

Elles sentent cependant qu’elles ont à vivre "avec" ce projet, - qu’elles ne peuvent repartir à zéro :
"Un certain temps, d’autres posaient le projet pour moi... Ce que les autres disaient, je le ressentais ; mais je ne voulais pas me l’avouer".

2) La plupart sont libérées, .- déculpabilisées - face à leur projet. Elles seront religieuses, disent-elles, un jour... Mais quand ??

- "Ce qui compte, c’est de vivre aujourd’hui l’engagement, à notre niveau"

- "J’ai compris que la question "Mariage - vie religieuse" n’était pas essentielle.

- "Je no me préoccupe pas de l’Avenir. J’essaie de vivre l’Aujourd’hui".

- "Il ne faut pas vouloir aller trop vite".

- "Il ne faut pas vouloir toujours vivre avec les mêmes qui ont les mêmes aspirations".

3) Deux cependant sont impatientes et ont du mal à comprendre que des adultes leur demandent d’attendre :

- "Je vois des camarades qui se marient... Pourquoi n’entrerais-je pas en postulat et noviciat ? ... Je ne veux pas rester au carrefour toute ma vie".

4) Elles sentent qu’il y a des moments où il faut accepter de choisir... qu’il y a des seuils à franchir.... .

L’une exprime sa décision d’entrer en période de formation à Noël :
"L’an dernier, j’ai vu assez clairement que j’avais à être religieuse... Maintenant, il me semble inutile d’attendre ..."•

Autre remarque importante exprimée par un membre du groupe : le risque d’être trop sûr de-soi : "Dieu m’a appris à être plus pauvre devant mon projet".

III - CE QU’ELLES PENSENT DES WEEK-ENDS ?

Se regrouper au nom d’un projet de vie religieuse semble nécessaire aux filles :

- pour ne pas se sentir seules dans leur recherche,

- au moins temporairement, pour arriver a exprimer ce projet : "tout ce que les autres disaient de mon projet, je le ressentais, mais toute seule, je n’aurais pu le dire, ni même me le dire". "Je ne me sens pas à l’aise pour parler de ma recherche dans le M.R.J.C. "

Une autre : "ça ne me gène pas de dire que je fais du M.R.J.C. Il m’est moins facile de dire que je fais du M.E.J. Il m’est encore moins facile de dire que je viens au groupe de recherche. Ces trois appartenances ne rentrent pas dans ma vie de la même façon".

Encore : "Le mouvement ne m’a pas tellement aidé parce qu’on n’a peut-être pas assez pris le temps de prier... On ne s’est pas assez entr’aidées à rencontrer Jésus-Christ".
"Les Mouvements d’Action Catholique ne vont pas assez loin dans l’approfondissement de la foi".

- Elles tiennent pourtant à préciser que "ce n’est pas parce qu’elles ont été déçues des Mouvements", qu’elles viennent au groupe de recherche. L’une regrette de ne pouvoir matériellement en faire partie. Une autre : "Le Mouvement me permet de m’ouvrir aux autres". Une autre : "Je ressens fortement le besoin de m’engager dans une action, pour que ma foi ne soit pas dans les idées, mais que j’en témoigne". L’une d’elles fait le lien entre son engagement de maintenant, et celui qu’elle fera plus tard dans la vie religieuse : "Je trouve que si je ne suis pas engagée maintenant, je ne m’engagerai pas plus tard dans la vie religieuse".
Ou encore : "je ne veux pas mettre de coupure entre mon engagement dans le Mouvement et ma Recherche".

IV - ELLES ENVISAGENT LES WEEK-ENDS

- comme un lieu où se réalise l’"Unité de leur vie" - où se "fait le lien entre ce que je vis maintenant, et ce que je voudrais vivre plus tard".

- comme un lieu de réflexion et de prière où on approfondit sa Foi - où l’on apprend à rencontrer et reconnaître Jésus-Christ, - où on s’entraîne à le voir concrètement dans la vie de chaque jour : "Pourquoi je vis dans l’Eglise ? Qu’est—ce que je vis dans l’Eglise ? etc.

- comme un lieu de partage, mais pas de "n’importe quoi" - "Ne pas se contenter de l’humain, de l’ "horizontal", mais aller ou fond de notre vie, d’où le besoin d’un climat de liberté."

- comme un lieu d’interpellation - de remise en cause : "on se bouscule les unes les autres en relisant notre vie face à Jésus-Christ".

- comme un lieu de "maturation" qui aide à prendre une décision : "tant que je n’avais pas pris une décision, les rencontres du groupe m’apportaient beaucoup".

Elles ne veulent surtout pas que les week-ends soient une fin, mais qu’ils les renvoient à la Mission.

V - QUELQUES CONDITIONS EMISES PAR LE GROUPE :

- que le groupe vive assez "longtemps", d’où la stabilité des équipes : "il faut se bien connaître pour vivre et partager ensemble".

- que les filles se retrouvent par niveau, ou au moins par affinité.

- qu’au cours des rencontres, chacune puisse être écoutée : "respecter pour chacune son cheminement" - "Prendre chacune là où elle en est".

- Il ne faut pas "vouloir apporter à tout prix au groupe ; il faut aussi accepter de recevoir".

- Qu’il y ait un adulte à suivre le groupe.

- Il ne faut pas vouloir tout trouver ici : il y a les mouvements, les lieux de réflexion théologique, ou de formation biblique ; ce n’est pas notre but.

- Bien situer le rôle et l’importance des mouvements dans la recherche, et surtout ne pas les rejeter. Dans un regard superficiel du mouvement, on perçoit une méconnaissance - par les Jeunes - de ce que le mouvement peut apporter. Il leur faudrait pour cela aller au bout des exigences du mouvement.

- Sans vouloir superposer les différentes exigences perçues (mouvement et réflexion sur l’action menée - vie de prière - recherche théologique et biblique - recherche "vie religieuse"), il est difficile de tout vivre en même temps.

Les week-ends semblent devoir être pour certaines le "Lieu d’Unité" de leur vie, et des interrogations qu’elles portent vis-à-vis de leur projet.

P. Paul RESTIF - Sr Marie-Thérèse LENDORMY
(S.D.V. de Rennes)