Etre prêtres... demain ?
C’est en J.O.C. que notre désir d’être prêtre est né. C’est un cheminement de plusieurs années... J’ai découvert la J.O.C. dans un lycée technique... Au bout d’un an, j’ai pris une responsabilité... qui m’a permis de me mouiller dans mon comité d’action comme jociste... C’est à partir de ce moment où j’avais des copains auprès de qui je me disais jociste et avec lesquels j’agissais, que j’ai commencé à voir l’aumônier pour réfléchir à ma vie et j’ai débuté un carnet de militant où je reprenais la vie des copains....
Tout ce que je vivais avec ces copains là et avec les autres, tous les liens que j’avais, l’action que l’on menait ensemble, tout cela je le reprenais... Après... j’ai commencé à travailler et à vivre dans un foyer de jeunes travailleurs et j’ai commencé à être responsable fédéral... Et c’est là pour la première fois que j’ai pensé à devenir prêtre. Je regardais ma vie, les choix que j’avais faits, les copains qui cheminaient avec moi, je ressentais un appel profond en moi pour être vraiment disponible aux jeunes du monde ouvrier et disponible au Christ, qui devenait mon idéal, ma raison de vivre, et qui est dans la vie des copains. Je me sentais plus responsable de bâtir l’Eglise en jeunesse ouvrière... Mon action en J.O.C. est à la base de mon désir d’être prêtre... Avec les copains qui se sont transformés sur la boîte, qui adhèrent au syndicat, qui lisent J.O., qui interpellent d’autres copains, en eux je vois le Christ qui permet ces transformations... A la base, c’est le Christ qui me permet d’aller vers les autres. C’est lui qui me pousse vers eux. J’ai tout abandonné (ma promotion...) pour être avec eux, car le Christ me proposait quelque chose de formidable :. vivre avec les copains l’amour, la bonne nouvelle qu’il annonce !"
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Ainsi s’exprime Patrick, 20 ans, électricien dans une "grasse boîte". Son témoignage n’est pas unique. On pourrait le multiplier par cent. C’est en effet le nombre de jeunes du monde ouvrier qui, dans cette année 72-73, ont exprimé le désir de rechercher par rapport au sacerdoce, en lien avec le Mouvement.
C’est du moins ceux qui se sont signalés auprès des aumôniers d’"Eveil et Recherche" que la J.O.C. a .mis, en place sur chaque région. Quatre-vingt-seize gars avaient fait cette démarche entre septembre et janvier. C’est dire que, malgré tous les troubles et les incertitudes, le Christ continue d’appeler des hommes, des jeunes à servir leurs frères dans le sacerdoce ministériel. Aujourd’hui, des jeunes travailleurs accueillent cet appel et acceptent d’y réfléchir sérieusement.
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I - DES INQUIETUDES A ACCUEILLIR
Il est sûr que leur recherche s’accompagne d’hésitations, de questions, d’inquiétudes. Il arrive qu’elles soient exprimées ou suggérées par les aumôniers plutôt que par les gars eux—mêmes. Ceci dans un souci d’honnêteté et de loyauté, afin qu’ils puissent avancer dans leur réflexion, bien conscients des problèmes qu’ils auront à affronter et mieux armés pour y répondre.
L’engagement au célibat ne peut pas se faire à la légère..
L’incertitude par rapport aux "ministères" et à "la condition sacerdotale" dans l’avenir éveille des craintes.
La difficulté à comprendre et à situer l’efficacité et l’utilité du sacerdoce ministériel est assez profondément ressentie par des militants formés pour, vivre un engagement "efficace".
Autant de questions qu’il nous faut accueillir, auxquelles il nous faut être attentifs. C’est une recherche que nous devons poursuivre sérieusement avec les gars... Mais toutes ces craintes, ces incertitudes, ces difficultés doivent-elles nous paralyser dans la réalisation de notre mission qui consiste aussi à appeler, à susciter le sacerdoce pour que se réalise totalement la fondation de l’Eglise en classe ouvrière ?
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II - DES CONVICTIONS A RENOUVELER
L’appel du Christ est permanent. Aujourd’hui, comme toujours. Dieu appelle dans son peuples des hommes à être prêtres. La J.O.C. en fait la constatation et l’expérience, plus spécialement depuis ces dernières années. N’avons-nous pas à être attentifs aux appels que le Seigneur continue d’adresser ? N’avons-nous pas parfois à transmettre cet appel ? Nous sommes "témoins et serviteurs"’ de l’appel que le Christ adresse aux hommes : n’avons-nous pas à les aider à discerner quelle forme leur réponse doit prendre à cet appel ?
Aujourd’hui, des gars sont capables de tout donner pour suivre le Christ, parce qu’ils ont découvert son Amour inouï. Nous avons à les aider à être lucides pour que leur réponse ne soit pas que l’enthousiasme de quelques années généreuses... Mais laissons-nous renouveler nous-mêmes dans, cet Amour personnel du Seigneur, qui a saisi tout notre être, et qui veut aujourd’hui, peut-être par notre médiation, "saisir" aussi tel ou tel jeune travailleur.
L’horizon est sans doute moins clair que nous le souhaiterions. La route qui s’ouvre aujourd’hui à ceux que le Seigneur appelle à son service n’est pas sans obstacles et sans dangers. Mais faut-il pour autant les empêcher de prendre la route ? Ils attendent plutôt de nous que nous les accompagnions dans leur cheminement.
La dernière rencontre des aumôniers d’ "Eveil et Recherche" qui regroupait vingt prêtres, représentant les différentes régions de France, a permis de souligner certains aspects de cet "éveil et de cet accompagnement".
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III - DES OCCASIONS A NE PAS MANQUER
Le fait de poser la question du sacerdoce à un militant se situe dans le "prolongement de ce que la J.O.C. peut demander à un gars pour le service de la jeunesse ouvrière". D’ailleurs, le Mouvement n’hésite pas à proposer explicitement aux militants de regarder en face cette question (Equipe ouvrière de février 1973 page "à l’écoute du Christ", cahiers pour l’action de mars 1973).
Ce n’est pas une question qui viendrait se surajouter. C’est la volonté d’être fidèle jusqu’au bout à la mission de faire naître et grandir l’Eglise en classe ouvrière.
Forts de cette conviction, il nous faut être attentifs aux multiples occasions qui se présentent aux jocistes de pouvoir poser la question de leur vocation profonde.
Nous avons relevé :
Les. temps forts que sont les récos, les retraites de militants dans "lesquelles ils peuvent être amenés à découvrir toutes les dimensions de leur mission et de leur vocation.
Les révisions de vie sur les choix proposés par le Mouvement notamment, pour les aînés . (Equipe ouvrière, octobre-novembre 72).
L’appel à de nouvelles responsabilités (locale, fédérale ou nationale) qui est une invitation à une plus grande disponibilité et à un plus grand engagement.
La préparation de telle ou telle célébration dans des journées d’étude ou des sessions de militants.
La reprise régulière du carnet de militant, la rencontre personnelle avec l’aumônier. La question de la vocation profonde peut surgir à l’occasion de tel événement marquant de la vie professionnelle ou familiale, d’un temps fort de la vie du Mouvement (rassemblement) ou d’une action particulièrement intensive dans le combat ouvrier.’
La présence ou la rencontre d’un copain déjà en G.F.O. qui peut être une interpellation à laquelle nous devons être attentifs.
Et une multitude d’autres occasions... à travers lesquelles le Seigneur peut dire à tel militant : "Toi, suis-moi !" (Jn 21, 22).
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IV - UNE RESPONSABILITE QUI NOUS CONCERNE TOUS
- Il est évident que cette "interpellation" suppose, pour être vraie, une qualité de vie en J.O.C. Elle a plus de chance d’être perçue, accueillie, soutenue dans une fédé ou une équipe qui propose aux militants les exigences que comporte toute vie apostolique (récos, révisions de vie qui vont "jusqu’au bout"). Et cela n’est pas forcément réservé aux fédés les plus organisées, aux équipes les plus structurées.
- Par ailleurs, notre propre témoignage de prêtres apparaît déterminant pour beaucoup de ceux qui se sont mis en recherche ces dernières années. Le fait que les militants soient amenés à côtoyer leurs aumôniers, a apprécier sa façon d’être "serviteur" de la jeunesse ouvrière n’est pas étranger à l’appel qu’ils peuvent ressentir. Ils ont, dans le Mouvement, la possibilité d’expérimenter pour eux-mêmes "l’utilité" du sacerdoce de leur aumônier. C’est une dimension de notre témoignage dont nous devons être conscients. Cela nous provoque peut-être à nous interroger entre aumôniers sur la façon dont notre sacerdoce est engagé dans tout ce que nous propose de vivre la J.O.C.
- Pour ceux d’entre nous qui sont aumôniers d’A.C.O. ou d’A.C.E., il nous a semblé bon de ne pas limiter aux jeunes seulement notre attention à ces appels que le Seigneur peut adresser. De jeunes adultes en A.C.O. peuvent être amenés à se poser la question du sacerdoce. Quelques-uns se sont signalés déjà et ont commencé une recherche.
Nous devons également rester attentifs aux enfants et aux adolescents pour leur permettre d’exprimer leur désir et surtout pour les aider à le mûrir dans leur vie avec les autres, dans leur engagement apostolique à leur taille.
- Enfin, n’oublions pas que le Seigneur a consacré du temps à prier pour ceux qu’il allait appeler comme apôtres (Lc 6, 12). Et à la vue des foules écrasées et sans guides, il a d’abord demandé à ses disciples de prier "le Maître d’envoyer des ouvriers à sa moisson". Notre regard sur la jeunesse ouvrière et notre volonté de "coopérer"à son salut doivent nous provoquer aussi à unir notre prière à celle du Christ pour que surgissent des hommes qui participent, par le service du sacerdoce ministériel, à la libération collective de la classe ouvrière. ( l )
Pierre GIRON
(aumônier national de la J.O.C.)
NOTES -------------------
( 1 ) Article paru dans « la lettre aux aumôniers » de Mai 73. [ Retour au Texte ]