M.R.J.C.et jeunes en recherche, étapes d’un cheminement


Ce texte relate la recherche et l’action du M.R.J.C. de Bretagne par rapport aux jeunes du monde rural qui se posent la question du sacerdoce ou de la vie religieuse.
On découvrira dans ces pages :
Comment un mouvement de jeunes a été progressivement sensibilisé à ce problème ;
quels modes d’action il emploie pour accompagner les jeunes en recherche ;
quelles sont ses interrogations par rapport au cheminement de ces jeunes ;
comment cette question devient peu à peu une préoccupation du mouvement.
Si d’autres expériences de ce genre en monde rural existaient, nous serions heureux de les connaître.
Merci d’avance.

1 - En ce qui concerne la Bretagne, ce travail a commencé dans le Finistère en janvier 1969. Pourquoi et comment ?

Plusieurs éléments sont intervenus :

  • Le fait d’un certain nombre d’aumôniers, dans leur travail quotidien au mouvement, ont rencontré des gars et des filles qui leur ont fait part de cette question : "Je me demande si le Seigneur ne m’appelle pas au sacerdoce ou à la vie religieuse ; mais je ne voudrais pas être contraint de passer par ces grosses "boîtes" où vous avez été ; et puis, je voudrais rester solidaire du milieu rural".
  • L’interpellation venue du directeur du Centre diocésain des vocations.
  • La diminution rapide des jeunes aumôniers dans le mouvement.
  • L’intervention progressive de religieuses dans les équipes M.R.J.C.
  • Une réflexion au niveau départemental et zones sur l’Eglise : Qu’est-ce que l’Eglise ? - Comment la vivons-nous ? - Quelle est sa mission ? - Les différents ministères dans l’Eglise.

2 - Cette prise de conscience se précise peu à peu ; une rencontre entre les responsables départementaux M.R.J.C., les deux aumôniers diocésains, les deux responsables du Centre des vocations et une religieuse travaillant au mouvement, sera l’occasion de mettre en route un certain nombre de choses :

a) Deux rencontres au niveau départemental pour les responsables et aumôniers des zones. Voici les questions étudiées :

  • A travers la vie, l’action des jeunes et des aumôniers dans le mouvement, par delà la technique et la diversification des situations, avons-nous conscience de bâtir l’Eglise de Jésus-Christ ? Citez des faits concrets.
    Nous le sommes-nous explicité à nous-mêmes et l’avons-nous explicité avec les jeunes ?
  • Dans cette prise de conscience, avons-nous senti la diversité et la complémentarité des fonctions dans l’Eglise ?
  • L’expérience d’une responsabilité dans le M.R.J.C. a-t-elle amené militants ou militantes que nous connaissons à se poser la question d’une vocation sacerdotale ou religieuse ?
    Comment ont-ils ou ont-elles exprimé cette question ? Comment avons-nous réagi ? Comment avons-nous repris et prolongé la question ?

b) Une rencontre départementale pour prêtres et religieuses en contact avec des gars et des filles se posant cette question. Nous nous sommes retrouvés à 18 personnes : on a su ainsi que, au moins 22 jeunes du Finistère (11 gars - 11 filles) originaires du rural, vivaient avec cette interrogation. On a partagé longuement les expériences et on a précisé les points à creuser.

c) Ils ont été étudiées lors d’une session de deux jours pour aumôniers.

d) On décide d’organiser un premier week-end pour les jeunes en recherche et qui souhaitent se rencontrer ; de nombreuses invitations sont diffusées auprès des responsables, des aumôniers, des religieuses.

Ce week-end est préparé et animé par deux responsables départementaux, une fille se posant la question (le gars s’étant récusé au dernier moment) et un aumônier : 7 jeunes y participèrent : 1 gars - 6 filles.
Chacun raconte "son histoire" ; comment cette question avait surgi chez lui, comment elle s’était développée - Quel projet de vie chacun avait pour aujourd’hui et pour demain.
Pour la plupart, ce partage fut une véritable libération ; mais aussi une étape importante, car pour la première fois, il avait fallu faire part aux parents, aux copains de la question qu’on portait.
On se mit d’accord pour se retrouver tous les deux mois avant les vacances ; programme prévu : partage du carnet de militant et approfondissement de certains points de notre vie.

3 - Août 1970 - Le Bureau régional M.R.J.C. se retrouve pendant une semaine pour préparer tout 1s travail de l’année ; entre autres choses au programme : comment le M.R.J.C. aide-t-il les militants y s’interroger sur ce point et comment soutient-il ceux qui se posent la question.
A cause d’un certain nombre de demandes, on décide d’étendre l’expérience du Finistère à l’ensemble de la région. Par ailleurs, dans le partage plus précis des responsabilités, trois membres du Bureau régional sont chargés de ce travail : un gars, une fille, un aumônier.

4 - Septembre 70- Un premier week-end régional a lieu ; de nombreuses invitations sont lancées dans tous les secteurs (cf. texte ci-contre). On se retrouve à 25 : 4 animateurs et 21 jeunes, dont seulement 5 gars.
Dans un tour de table, chacun dit les raisons de sa présence à la rencontre et les grandes lignes de son cheminement.
Ensuite, on bâtit ensemble notre "code" et notre programme.

Pour participer à l’équipe, il faut remplir certaines exigences :

  • être du milieu rural ;
  • s’être posé ou se poser la question du sacerdoce ou de la vie religieuse et pas seulement vouloir approfondir sa vie chrétienne : cela, on doit pouvoir le faire dans toute équipe du mouvement !
  • être engagé ou s’engager dans le M.R.J.C.
  • accepter les conditions de vie de l’équipe, c’est-à-dire :
    • faire son carnet de militant : comment essayer de lire les signes du Seigneur, si on ne lit pas sa vie, et comment la lire, si on ne l’écrit pas ?
    • participer à 5 week-ends dans l’année ; chacun de ceux-ci comportera deux aspects :
      • le partage du carnet,
      • l’approfondissement d’un certain nombre de points importants pour notre vie : tels l’Eglise, la prière, les sacrements, le mariage, le célibat, etc.
    • cette série de rencontres devant se terminer par un temps plus long de rencontre, où un certain choix pourra déjà se faire ;
      • sortir de l’équipe recherche parce qu’on pense, après avoir senti loyalement que ce n’est pas au sacerdoce ou à la vie religieuse que le Seigneur vous appelle.
      • continuer dans l’équipe parce qu’on ne voit pas clair ;
      • rentrer déjà dans une équipe formation.
  • Tout ce travail se réalisera en mixte puisque c’est ce qui se fait habituellement dans le mouvement.
  • Par ailleurs, comme nous sommes trop nombreux, on prend la décision de se subdiviser en 3 équipes (partage plus facile et distances moindres) mais on se retrouvera tous deux fois dans l’année.
  • Si quelqu’un d’autre se manifestait en cours d’année, il ne serait pas intégré immédiatement, mais seulement au début de l’année suivante.

5 - Où en sommes-nous aujourd’hui ?

  • Les trois équipes se sont retrouvées régulièrement, mais on constate que c’est exigeant pour tous : autant pour les jeunes que pour les animateurs qui ne voient pas toujours très clair.
  • Tous et toutes n’ont pas un engagement de même densité et cela pose parfois des problèmes.
  • Au début de juillet 71, une fois que chaque équipe a eu son temps fort pour un certain choix, on s’est retrouvé pour faire le point et le bilan. A la suite de ce week-end bilan, deux groupes ont été constitués : l’un de formation avec 5 filles, l’autre de recherche avec 5 jeunes. Les autres arrêtent la recherche déjà entreprise, soit définitivement, soit de façon temporaire.
  • Peu à peu, ce problème devient une préoccupation du mouvement : à chaque bilan du Bureau régional, la question est abordée, une nouvelle campagne de sensibilisation a été faite aux sessions de lancement à la région et dans les zones. Par ailleurs, on a l’impression (mais on peut se tromper) que le tabou (prêtre ou bonne soeur) disparaît chez les jeunes du mouvement.
  • Depuis que ce travail est en route, on est à la fois sollicité et aidé par d’autres instances : centre diocésain des vocations, séminaires, et certaines congrégations religieuses ; les prêtres des paroisses et les religieuses regardent cette recherche (quand elle est connue ! ) avec sympathie et circonspection !
  • Nous souhaitons vivement rentrer en relation avec d’autres groupes du rural qui cherchent dans le même sens : créer du neuf, ce n’est pas facile, d’autant plus que les gars et les filles n’ont pas devant eux le type de prêtre ou de religieuse qu’ils souhaitent devenir : on sait ce qu’on ne veut pas, mais on ne voit pas bien ce qu’on veut. Ne faudrait-il pas rechercher les vrais besoins de l’Eglise locale, y répondre par de nouveaux ministères, redonner à la communauté sa responsabilité dans la pastorale des vocations ? Cette insécurité, cette difficulté, ces interrogations doivent probablement faire partie du programme !

André GALL
aumônier du M.R.J.C. à QUIMPER