"La naissance, l’approfondissement d’une vocation sacerdotale ou religieuse est d’abord une épreuve de la foi"


Le C.D.V. de Coutances a présenté au Conseil presbytéral du diocèse les résultats de sa recherche. Elle a surtout pour point de départ des groupes de garçons en recherche de vocation ; mais des prêtres et des religieuses, en contact avec des jeunes filles en recherche de vie religieuse, y souscrivent pleinement. Toute notre recherche comme celle du conseil presbytéral, doit donc porter souci à la fois des vocations masculines et féminines dont le Peuple de Dieu a besoin.

Si on écoute les jeunes du diocèse en recherche ou en approfondissement de vocation (second cycle dans le secondaire, ou même en premier cycle du grand séminaire), on saisit que les problèmes qui se posent à eux sont tout d’abord, comme pour tous les autres jeunes, des problèmes de foi.

Un bon nombre d’entre eux pourraient souscrire à cette réflexion : "Quand ma vie de foi est bien en place, je n’ai pas d’hésitations pour ma vocation ; mes hésitations sont avant tout des problèmes de ma foi !"

I-COMMENT LEURS QUESTIONS SE PRESENTENT-ELLES ?

Remarques :

  1. Nous avons regroupé leurs questions en quatre parties ; l’ordre adopté n’est pas indifférent ; il est d’importance dégressive ; notons pourtant que plus le jeune avance dans son cheminement, plus les questions 3 et 4 prennent de l’importance.
  2. Leurs questions peuvent nous étonner ! Nous avons à les écouter et à les accueillir comme telles : elles sont sérieuses et. vraie ce sont celles d’adolescents et de jeunes qui ont leur façon propre de "sentir".

a) Des jeunes hésitent :"Cela vaut-il la peine d’engager sa vie dans cette voie ?" - Derrière cela : "Qu’est-Jésus-Christ ? Peut-on lui consacrer une vie d’homme ?" "Jésus-Christ est-il réponse valable pour les hommes, le monde d’aujourd’hui ?" - Ils ont besoin de "sentir" leur foi en Jésus-Christ, et une foi traduite "valablement" dans des actes.

b) "Que devient ma liberté d’homme dans tout cela ? Suis-je en train de l’aliéner par un choix définitif ?"

Les jeunes hésitent devant un choix définitif, comme le font leurs camarades devant d’autres choix humains (peu d’intérêt pour la valeur de "fidélité"). D’où la longueur du cheminement : ce sont alors des désirs et prévisions d’études, de stages (avec aussi le désir d’une qualification humaine valable ou d’une présence au monde).

C’est là que se pose aussi le problème du célibat : pour beaucoup, il fait problème, donne le vertige, arrête ou est subi... plus qu’accepté consciemment !

c) Problème de l’Eglise :"Est-elle valable pour le monde d’aujourd’hui ?" "Est-elle par ailleurs en mesure d’accueillir ma recherche, ma démarche telle que je la vis, mes "exigences" sur ma situation future ?"

d) "Quel est le sens aujourd’hui d’une vocation particulière dans l’Eglise ? Qu’est-ce qu’un prêtre ? Une vocation consacrée ?"

La vocation est saisie davantage en prolongement d’une vocation humaine et ecclésiale plutôt qu’en rupture ou en opposition.
"Le prêtre est-il un chrétien comme les autres, quelque chose d’autre, ou simplement un chrétien et quelque chose de plus ?" (groupe de jeunes du 2e cycle). La plupart refusent l’image du prêtre dans son statut actuel, mais ne vont pas pour autant dans le sens des contestations courantes : ils le veulent témoin du Christ, homme de foi, donné tout entier au monde, pauvre, joyeux, tout entier consacré à un ministère spirituel.

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Cette épreuve de leur foi est donc signe de difficultés, d’hésitations ; mais elle est aussi porteuse de chance et de recherche positive ; on note que des jeunes, en s’affermissant dans une recherche de vocation, affermissent en même temps leur foi.

II - CONDITIONS DE PROGRESSION D’UNE VOCATION

l) Les jeunes en recherche ou en cheminement de vocation vivent très fort leur attachement à Jésus-Christ : besoin de récos, de réflexion spirituelle, de partage d’évangile... -"Dans mon mouvement apostolique, on ne parle pas assez de Jésus-Christ." - Importance donnée par eux - sans fermeture à l’apostolat - aux mouvements d’approfondissement spirituel.

2) Ils vivent aussi très fort leur appartenance au monde, surtout celui des jeunes qui est le leur. Ils se sentent partie prenante, ils ne veulent pas en être coupés : ils se veulent avant tout des jeunes de leur âge. Refus :, du "petit" ou "grand" séminariste déjà "cléricalisé", mis à part dans sa paroisse (avec laquelle parfois ils ont peu de contacts). Souci aussi souvent de rester du monde sociologique dont ils sont originaires.

C’est au coeur de ce monde qu’ils perçoivent des appels de leurs frères ; au coeur de ces appels, ils reconnaissent, si nous les y aidons, le Seigneur qui leur fait signe. - "Il y a vocation, parce qu’il y a partage de la vie de nos frères". (Jeunes second cycle).

3) Ils sont donc en général -et doivent être sans doute, pour que leur vocation grandisse "bien" - des jeunes bien insérés dans leur vocation humaine et chrétienne.

4) Ils acceptent et demandent un long temps de cheminement pour bien "s’enraciner" et surtout dans le respect de leur liberté. Il ne s’agit pas, bien sûr, de violenter celle-ci ; mais faisons attention qu’ils ne le ressentent même pas ainsi. Il s’agit de les aider à orienter leur liberté dans le sens d’un engagement humain et chrétien de don total. - D’où l’importance de l’éducation de leur liberté (se libérer pour être totalement disponible si un appel est perçu). Importance aussi de- ce temps de cheminement pour une initiation à une relation humaine vraie.

Ce temps de cheminement appelle un soutien ; il existe sous forme d’équipes propres a des jeunes en cheminement ; ils les acceptent, et même les demandent, si ces. équipes ne les "enferment" pas dans leur projet de vocation, mais les soutiennent dans ce projet et dans leur réflexion ; c’est alors un complément intéressant à cet enracinement humain et chrétien qu’ils ont par ailleurs et où mûrit leur projet de vocation.

Chaque trimestre, un week-end de réflexion a lieu au plan diocésain pour les garçons du second cycle ; des équipes existent dans deux collèges et à l’université. - La commission diocésaine des religieuses pour les vocations prévoit la rencontre de jeunes filles en projet de vocation.

III - QUESTIONS QUE SE POSE LE C.D.V.

1) Le mystère (qui appelle respect et attention) de toute vocation personnelle, - et donc de toute vocation spécifique - est-il assez étudié, considéré, intégré à l’action pastorale, à la vie de l’Eglise selon l’enseignement de Vatican II ?

2) Importance des communautés de jeunes en foyers, dans les paroisses, les collèges, les aumôneries.
Sont-elles reconnues valablement, écoutées, aidées, dans la communauté plus large de l’Eglise locale ?

- sont-elles vraiment des communautés de foi et des communautés apostoliques, où la foi des jeunes se clarifie peu à peu, se nourrit et se vit dans un engagement humain et apostolique ?"

3) Importance qu’au sein de ces communautés se fasse une réflexion sur la vocation en général et sur les vocations particulières.

4) Comment faire pour que ce souci soit porté par tout le Peuple de Dieu : prêtres, religieuses et laïcs ? Comment aller vers une naissance de groupes de réflexion à ce niveau (il en existe un dans une zone du diocèse) ?

5) Un monde culturel nouveau est en train de naître (place des sciences humaines, travail de groupe, sécularisation). Il marque profondément des consciences de jeunes. Quelle est la répercussion de cela sur les .vocations ?

IV - QUESTIONS QUE LE C.D.V. POSE AUX PRETRES DU DIOCESE :

1) Quand nous sommes en contact avec des jeunes qui approfondissent leur foi, s’engagent au service de leurs frères dans l’apostolat, savons-nous les aider à saisir en cela une réponse à un appel actuel de Jésus-Christ ? Les rencontres pastorales (personnelles ou collectives) sont -elles annonce, "événements", de Jésus-Christ Ressuscité ? Quelles réponses les participants sont-ils amenés à donner, ou tout au moins quelles questions se posent-ils ?
La question de la vocation, du sens à donner à leur vie leur est-elle suffisamment posée ? Pouvons-nous, prêtres, leur faire entendre cet appel dans un climat de totale liberté ?

2) Les mouvements, les communautés de jeunes et d’adultes réalisent-ils leur responsabilité en ce sens : faire surgir les vocations dont ils ont besoin, orienter la liberté et la générosité des jeunes vers le don total au service du Christ et du Peuple de Dieu ? Comment les aider à réaliser cette responsabilité ?

3 ) Comment analyser en vérité nos difficultés ou hésitations actuelles face au problème des vocations ?

a) il y a le problème des vocations de jeunes "marginaux" (mal insérés dans le monde !).
b) N’y a-t-il pas transposition sur les jeunes de nos propres difficultés, déconvenues, hésitations : pour nous aussi, le problème des vocations (la nôtre, celle des jeunes) est une épreuve de notre foi ; acceptons-nous de le reconnaître ? et de réagir ?
La vertu d’espérance est a développer chez les jeunes, inquiets et interrogateurs. Sommes-nous nous-mêmes des hommes d’espérance, non par naïveté, mais avec réalisme ?
c) Il reste pourtant un problème : certains ont peur d’entraîner les jeunes dans une impasse et gardent une attitude de silence devant des jeunes qui parlent de vocation.

  • Pensons-nous que l’Eglise est capable d’accueillir les questions des jeunes et qu’elle a un rôle à jouer pour aider les jeunes. à saisir le sens profond et les exigences de leur vocation ? En tout état de cause, que faisons-nous pour cela ?
  • Connaissons-nous les recherches actuelles, les structures d’accueil des vocations, ou gardons-nous une image d’autrefois qui ne correspondrait plus aux besoins d’aujourd’hui ?

Le C.D.V. de Coutances.