Projet éducatif, chemin vocationnel


François Pennec
frère des Écoles chrétiennes
et une équipe lasallienne

 

Le réseau lasallien d’établissements catholiques d’enseignement tire son nom de saint Jean-Baptiste de La Salle, fondateur des Frères des Écoles chrétiennes. En France, la congrégation exerce sa mission ecclésiale de tutelle dans 150 lieux, rejoignant 103 000 élèves avec 13 000 laïcs enseignants, cadres éducatifs et personnels administratifs et de service 1.

Ce qui fonde aujourd’hui son action éducative est formulé dans un texte de référence dénommé Projet Éducatif Lasallien (PEL) dont la rédaction – collective comme le veut la tradition lasallienne – est revue régulièrement pour répondre à un contexte bien différent des temps de fondation. Ce texte dit la vocation des établissements et des services d’animation du réseau lasallien.

 

Le projet éducatif lasallien

Un projet enraciné dans une histoire

Quand en 1679, à Reims, le chanoine de La Salle s’intéresse au démarrage des écoles gratuites pour les garçons de la rue, il est bien loin d’imaginer qu’il s’apprête à fonder une communauté vouée à l’éducation. C’est son observation attentive des besoins qui le mène à comprendre que « les écoles naissantes ne produisaient pas tout le fruit qu’on en avait espéré, parce que chaque maître suivait son génie particulier ». En mai 1686, ils prennent le nom de « frères » des écoles chrétiennes, confirmant ainsi que « frères entr’eux, ils se doivent des témoignages réciproques d’une amitié tendre, mais spirituelle ; et devant se regarder comme les frères aînés de ceux qui viennent recevoir leurs leçons, ils doivent exercer ce ministère de charité avec un cœur charitable 2 ».

Le 21 novembre 1691, à Paris, en pleine crise de sa fondation, Jean-Baptiste de La Salle prononce avec deux frères un vœu d’association dans le but de promouvoir l’établissement de la « Société des Écoles chrétiennes ». C’est un acte d’espérance qui dit combien « sa cause est celle des pauvres 3 ». Le 6 juin 1694, l’association de Jean-Baptiste de La Salle et de douze frères pour tenir « ensemble et par association » les écoles gratuites devient réalité grâce au vœu perpétuel qu’ils prononcent.

La Conduite des Écoles ou le projet éducatif des origines

La pédagogie novatrice que développe cette nouvelle fondation est le fruit de nombreux partages entre les premiers frères. Ensemble, ils expérimentent puis formulent leurs intuitions. Ils réforment l’école. C’est à partir de ce travail communautaire que le fondateur écrira la Conduite des Écoles en 1705. On peut le considérer comme le premier projet éducatif lasallien. Il confirme que « les enfants sont devenus vraiment le centre d’intérêt des éducateurs 4 ».

Trois dimensions de ce projet éducatif nous intéressent particulièrement : le projet éducatif est vocationnel pour les jeunes d’abord, parce qu’il cherche à éduquer toute la personne ; pour les éducateurs ensuite parce qu’il leur propose de vivre leur métier comme une vocation ; pour l’institution elle-même enfin parce qu’elle l’invite à former une communauté d’associés pour une mission au service de l’Évangile.

 

Offrir « la liberté de construire sa propre identité en relation avec le Dieu de Jésus-Christ 5 »

C’est l’attention à toute la personne du jeune qui fonde le caractère vocationnel du PEL. Ainsi, les attitudes éducatives lasalliennes s’inscrivent dans une relation de personne à personne qui privilégie : « un regard personnalisé considérant chacun comme un être unique, digne de respect et d’amour ; un regard bienveillant caractérisé par la douceur, la cordialité et la compréhension ; un regard éducatif exigeant toujours lucide et réaliste, mais en même temps encourageant ; un regard d’espérance qui valorise le jeune et l’aide à avoir confiance en lui, dans les autres et en Dieu 6 ».
C’est bien au cœur de cette relation éducative que doivent pouvoir s’unifier toutes les dimensions de la vocation humaine : une identité en relations, un projet professionnel, des choix d’engagements, une vie spirituelle, un état de vie… « En articulant enseignement, inscription sociale de la personne et projet d’une vie réussie selon l’Évangile, cette démarche construit la figure de l’homme capable, responsable de son devenir 7. » Ainsi, dans l’école, tous les lieux, toutes les personnes, tous les projets, intellectuels et physiques, « sacrés » et « profanes » concourent à cette même entreprise : que chaque jeune soit rendu capable d’un choix libre d’existence au service des autres. En cela, la pastorale est une dimension du PEL qui doit irriguer tout l’acte éducatif. Elle n’est pas un plus de l’école catholique qui se résumerait à des temps et des propositions spécifiques, aussi nécessaires soient-elles. « Quand le conseil de direction aborde la pastorale, le pédagogique et l’éducatif entrent en débat : en effet, le champ de la transmission et la relation éducative comportent une dimension pastorale réelle ; et la pastorale elle-même comporte des enjeux éducatifs et pédagogiques spécifiques 8. »

Faire grandir toute la personne

Ainsi, dans son essence même, parce qu’il fait grandir toute la personne, parce qu’il est humanisant et donc appelant, l’acte éducatif est pleinement vocationnel. C’est ce que rappelle frère André-Pierre Gauthier : « Le premier appel qu’entend un jeune est un appel à quitter l’enfance, l’âge de l’emprunt, pour réaliser un itinéraire de liberté et de responsabilité qui le conduit à l’âge adulte, l’âge de l’empreinte que l’on laisse. Une éducation réussie, c’est d’abord une éducation qui permet au jeune d’avoir envie de prendre sa place dans la transmission, de s’inscrire dans une dialectique vivante : je transmettrai un jour, autrement, voire mieux, ce que j’ai reçu.
Or, le temps de l’éducation, et principalement le temps de la classe, est celui d’une rencontre tout à fait étonnante : le jeune est mis en face de celui ou de celle qu’il sera et dont la simple présence l’appelle à croître. L’adulte, là, fait autorité par sa parole, son savoir, son expérience. Il fait autorité en donnant ce qu’il sait et ce qu’il est, il sait mettre les mots sur le vivre, il sait entendre les balbutiements du petit de primaire, les revendications hâtives du collégien, les approximations conceptuelles du lycéen… Cette stabilité de l’adulte (dans la majorité des cas) permet la mobilité du jeune, ses transformations déséquilibrantes, ses aspirations successives et parfois désordonnées.
Ainsi l’acte éducatif est vocationnel car Dieu appelle à un ministère ou à une consécration religieuse, de la même façon qu’il appelle à tout engagement, celui ou celle qui a la maturité pour répondre, c’est-à-dire pour s’engager dans une marche libre et responsable. En ce sens la pastorale des vocations sera une pastorale de la mise en route et de l’accompagnement du chemin, pour le plus grand nombre. »


Grandir avec et pour les autres

Dès la fondation, l’école lasallienne est une école de l’enseignement simultané. En rassemblant des pairs (les jeunes) dans une communauté temporaire de vie avec d’autres pairs (adultes), tous probablement bien différents de la fratrie ou des parents, l’école par l’« immersion scolaire est déjà don d’une identité possible, à distance des cadres et valeurs de la famille, mais aussi de ceux et celles de la société qui – sauf pour les adultes qui embrassent une vocation éducative – renforce plutôt les barrières entre les âges. À tout cela, deux conditions : que l’école favorise les liens :
• entre les jeunes par les occasions qu’ils ont de se découvrir et de réaliser des projets communs,
• avec des adultes, qui ne réduisent pas ces derniers à la matière qu’ils enseignent ou à la fonction qu’ils exercent.
L’école est alors vocationnelle, car elle inscrit la rencontre dans une réalité plurielle, et donne ainsi la possibilité, voire l’envie, de se distinguer grâce à une émulation vivifiante pour la personne et pour le groupe : me distinguer de mes pairs et distinguer ce qui peut, dans le concert des adultes, m’offrir ma place unique (métier, talent, responsabilité, leadership…).
Ainsi l’institution scolaire est vocationnelle car Dieu appelle à un ministère ou à une consécration religieuse, de la même façon qu’il appelle à tout engagement de service, celui ou celle qui est capable de se savoir différent sans se croire meilleur, fidèle à ce qu’il est, et heureux que l’autre soit fidèle à ce qu’il est, autrement. »


Comprendre sa vie comme responsabilité

Par des propositions successives et graduelles, qui rejoignent chacun dans son itinéraire, l’école lasallienne « vit le projet de proposer à tous l’Évangile comme chemin possible d’une existence réussie. Elle offre à chacun la liberté de construire sa propre identité en relation avec le Dieu de Jésus-Christ 9 ». Ainsi, l’école lasallienne, « moyen de salut » selon l’expression de saint Jean-Baptiste de La Salle, veut certes aider à la formation du jugement qui « constitue une véritable éducation au choix 10 » mais, dans le même mouvement, promeut quelques valeurs fondamentales :
• la liberté et l’autonomie en « aidant chacun à acquérir une notion juste de la liberté ; donnant des occasions d’exercer et d’éduquer cette liberté dans la vie de la classe et de l’école » ;
• la responsabilité « pour permettre aux jeunes de s’assumer, de comprendre et accepter leur propre histoire » ; « en sollicitant, selon leur âge, pour l’animation et l’action » à condition de les écouter et de les prendre au sérieux « dans les charges qui leur sont confiées » et qui les rendent acteurs d’un avenir à construire ;
• le respect de la dignité de toute personne ;
• la civilité qui consiste, pour saint Jean-Baptiste de La Salle à regarder les autres « comme les enfants de Dieu et les frères de Jésus-Christ » et adopter en conséquence attitudes, codes et convenances qui permettent de tisser des liens, dans et hors de l’école ;
• l’amour de soi et des autres : « en leur faisant confiance et en les aimant, l’éducateur chrétien transmet aux jeunes l’amour que Dieu leur porte 11 ».

Une pastorale plurielle, au risque de la liberté de chacun

La pastorale des jeunes du réseau lasallien développe ses propositions par l’éducation à la foi, à la fraternité et au service, de diverses manières. Rassemblements, actions de service auprès des plus jeunes ou des défavorisés, chantiers de solidarité, rencontres interculturelles, célébrations, catéchèse et vie sacramentelle sont autant d’étapes qui permettent à un jeune de tracer son itinéraire. Ainsi, le PEL appelle l’école lasallienne à « offrir la possibilité à tous les jeunes de parcourir une certaine étape et aux volontaires de s’engager dans une démarche évangélique 12 ».
Naturellement, la mise en œuvre de ce projet éducatif dans toutes ses dimensions et dans sa référence au fondateur, saint Jean-Baptiste de La Salle, permet à plusieurs de se laisser interpeller par les besoins des plus pauvres et/ou d’entendre « l’appel pour le service de l’Église dans des vocations spécifiques 13 ».

 

Enseignants et éducateurs découvrent et répondent à leur vocation d’éducateur chrétien

Le PEL ne serait rien s’il n’était porté par des éducateurs qui progressivement, d’appel en appel, comprennent leur métier comme le moyen de vivre leur vocation de chrétien à la manière de saint Jean-Baptiste de La Salle.
« Notre projet met des adultes en route, en relecture, en engagements. Les jeunes ont besoin de voir des adultes fixés et non figés.
Notre projet met des adultes en présence, en parole, en écoute. Les jeunes ont besoin de vivre au côté d’adultes vivants, en mains tendues, en dialogue offert, en patience attentive.
Notre projet met des adultes en attitude de témoins de Jésus-Christ. Les jeunes ont besoin d’hommes et de femmes qui disent et vivent un projet orienté, et qui, sans tout savoir du mystère légitime de la vie et de la mort, en savent assez de l’entre-deux pour que l’origine et le terme trouvent cohérence.
Notre projet met des adultes en désir de don gratuit. Une fois, plus peut-être, une parole de pardon ou un geste de compassion laissera dans la classe ou sur la cour un signe-sacrement de la présence de Dieu.
Dans cette interrogation que le jeune portera : “Pourquoi a-t-il/elle agi ainsi ?”, l’appel, comme une des réponses possibles, pourra se faire entendre : “Pourquoi pas à mon tour maintenant ?”
Alors de commencement en commencement, la fragile lumière du “pourquoi moi ?” pourra devenir clarté brillante du “au nom du Père, au service de mes frères”. Et toute l’histoire aura peut-être commencé en étudiant Rimbaud… »


Là encore, la figure du fondateur est forte et les formations proposées par le réseau ont permis à nombre d’enseignants, éducateurs, personnels, prêtres… de découvrir des écrits, une histoire, une tradition éducative et spirituelle trois fois centenaire et de se laisser interpeller dans leurs pratiques. Marie-Pierre, enseignante en collège fait la relecture de son expérience au Centre lasallien français (CLF) : « Pendant deux ans, au fil des sessions du CLF, et au-delà de la connaissance de Jean-Baptiste de La Salle et du Projet éducatif lasallien, je me suis laissée interpeller par les intervenants, frères et laïcs. Petit à petit, j’ai découvert que mon métier était une mission au service de tous et particulièrement des plus pauvres. Avec d’autres enseignants et personnels, j’ai réfléchi aux attentes des jeunes et questionné notre réponse de lasalliens, en référence à l’Évangile. »

Formations et rassemblements régionaux et nationaux dans le réseau sont autant d’occasions de redire aux éducateurs lasalliens ce que Jean-Baptiste de La Salle exprimait aux frères dans sa méditation pour la fête de sainte Marguerite, reine d’Ecosse : « Regardez les enfants dont Dieu vous a chargés comme les enfants de Dieu même 15. » Ainsi, le fondateur exprime en une formule l’essentiel de la vocation d’éducateur chrétien et de la spiritualité lasallienne : la relation éducative est « une relation singulière et personnelle […] qui implique des relations avec Dieu et la compréhension de son dessein divin pour ces enfants-là, afin de contribuer à l’accomplir 16 ». Car, c’est « dans l’accomplissement de nos tâches professionnelles, éducatives, qui sont d’abord constituées de relations humaines (avec les jeunes, avec les parents, avec les collègues…), que nous rencontrons Dieu. Parce que c’est là que lui-même nous a envoyés, nous pouvons faire et vivre l’expérience de Dieu qui est propre à notre métier d’éducateur 17 ». « L’école, lieu de transmission et d’acquisition de savoirs et savoir-faire profanes, devient moyen de salut, grâce à des laïcs, eux-mêmes ministres de ce salut. S’anticipent deux évolutions qui ont bouleversé le lien entre modernité et christianisme :
• la valorisation de la vocation terrestre de l’homme dont l’agir responsable devient chemin d’humanisation et de sanctification ;
• la valorisation de la vocation baptismale qui confère une identité chrétienne et enracine dans la dynamique de l’appel et de la réponse.
L’école se présente, à la croisée de cet itinéraire de croissance en humanité et en vie chrétienne, comme un lieu unique d’échanges entre l’Évangile et la société 18. »


Si tous les personnels des établissements lasalliens ne sont pas en mesure d’entrer dans un tel « dessein », tous peuvent trouver leur place dans la réalisation du PEL.
Enfin, l’école lasallienne est le lieu possible d’un témoignage de la complémentarité des vocations de laïcs et de consacrés : « Le dialogue quotidien comme l’échange avec les éducateurs, laïcs et personnes consacrées, qui offrent un témoignage joyeux de leur propre appel, orientera avec plus de facilité le jeune en formation à considérer sa vie comme une vocation, comme un chemin à vivre ensemble, accueillant les signes par lesquels Dieu conduit à la plénitude de l’existence 19. »

 

L’école reçoit une mission à vivre « ensemble et par association »

En fidélité à saint Jean-Baptiste de La Salle, le PEL affirme que « l’éducation est toujours une œuvre collective 20 ».
C’est une marque essentielle de l’école telle que saint Jean-Baptiste de La Salle la conçoit à la fin du xviie siècle. La formule « ensemble et par association » résume ce rapport de l’éducation à la communauté. « Ensemble » désigne la pratique locale d’une communauté où les éducateurs « partagent ce qu’ils découvrent et ce qu’ils inventent dans le concret de leur action éducative quotidienne comme dans leur effort pour donner un style évangélique à leur pédagogie. […] Le nouveau style de relation entre éducateurs et éduqués, à base de familiarité simple, de “douceur et d’affabilité”, amène les frères à des transformations pédagogiques significatives dans leurs écoles. Ces changements ne naissent pas de théories, mais de besoins perçus chez les jeunes grâce aux contacts directs des frères avec eux. Chaque semaine, dans chaque communauté, les frères mettent en commun leurs découvertes et cherchent ensemble comment améliorer la marche de leur école 21 ». Le terme association, lui, s’applique à l’Institut, c’est-à-dire à ce que nous appellerions aujourd’hui un « réseau » de communautés éducatives. « Régulièrement, le fondateur réunit tous ses disciples. Chaque frère, chaque communauté locale apporte aux autres le fruit de ses trouvailles, de ses interrogations, voire de ses innovations souvent modestes, mais toujours réalistes. Et les partages élargis dans ces réunions de l’association affermissent, relancent dans la communion d’un même esprit, les réalisations locales qui auront leur coloration originale 22. »
C’est cette dynamique vitale de communion pour la mission – nous disons Association dans le langage lasallien – que le PEL propose de vivre aux communautés éducatives et aux éducateurs laïcs qui les composent en très grande majorité : « Développer la collaboration active entre les maîtres pour un meilleur service des enfants […] doit être aussi une préoccupation première […] qui nécessite à la fois une volonté commune, de la patience et de la persévérance, tant est grande la tentation d’individualisme ou de repli sur soi 23. » C’est ce que vit, dans l’exercice de sa mission de chef d’établissement, Claire Gombault : « J’ai toujours vécu mon métier comme une vocation. Et pourtant, avant de rejoindre les lasalliens, je me sentais bien seule dans ma fonction de chef d’établissement. Aujourd’hui, je bénéficie de la force d’un réseau : rassemblements, rencontres, partages, échange… voulus par les frères qui nous font vivre cet esprit fraternel dans une grande connivence. Le mot “réseau” a une réalité et on le vit dans les visites de tutelle, les assemblées de chefs d’établissements… Mais plus véritablement encore, le fait de faire réseau me rappelle sans cesse que je ne peux pas me suffire à moi-même, qu’il me faut nourrir ma mission. Le PEL, les formations, l’accompagnement de la tutelle… m’obligent à sortir du quotidien, à prendre du recul, à réévaluer nos projets d’équipes, à me laisser dynamiser par des appels et des orientations nationales. Cette culture commune, ce charisme partagé, me donnent cette chance de pouvoir dire : “Cela, je ne sais pas le faire, qui peut m’aider ?” et c’est une chance pour l’établissement dont j’ai la responsabilité. Je suis nourrie par cette dimension d’association. »

De l’engagement simple et quotidien à celui plus existentiel, le projet lasallien offre à chacun d’entrer dans ce processus d’association. Cela peut aller, pour les laïcs, jusqu’à un engagement public dans la mission lasallienne d’éducation. Une large réflexion est en cours sur ces thèmes. Un appel explicite a été lancé par le chapitre provincial de 2002 : « Les frères capitulants et les laïcs réunis au chapitre du district de France […] considèrent qu’il est aujourd’hui “d’une très grande nécessité” de s’associer entre frères et laïcs pour répondre à l’appel de Dieu et à son dessein de salut pour les jeunes. Ils décident la création d’une Association Frères et Laïcs qui fait partie intégrante du district de France 24. »
Le projet éducatif redit à chaque école lasallienne que sa mission est une mission d’Eglise vécue « dans l’esprit d’une mission partagée 25 ». En ce sens, la dernière assemblée de la mission éducative lasallienne de 2006 confirme et prolonge cet appel adressé à toutes les œuvres du réseau en confirmant que « le chef d’établissement et son conseil de direction portent communautairement la responsabilité de la mise en œuvre du PEL dans toutes ses dimensions 26 ».

 

Conclusion

En actualisant le charisme lasallien pour aujourd’hui, le PEL est vivant et se déploie, sous l’impulsion de l’Esprit depuis plus de trois cents ans à travers les chapitres, assemblées, commissions, instances du réseau lasallien, au service de l’Église et du monde de l’éducation. Essentiellement communautaire, il suscite, en réponse aux besoins des jeunes, des vocations de frères et de laïcs qui vivront « l’association pour le service éducatif des pauvres », permettant à des milliers de jeunes de se mettre debout et de vivre pleinement leur humanité parce que « la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant » (saint Irénée).
Appeler des jeunes et des éducateurs à entrer dans ce processus d’association suppose de développer au sein des établissements scolaires une pastorale de l’itinéraire qui cherche à rejoindre chacun là où il en est de son engagement et de sa vie de foi, et trace des chemins possibles d’engagement au service des plus pauvres. Un chantier est en cours au sein de l’Équipe nationale de pastorale du réseau lasallien pour construire des outils à destination des enseignants et animateurs en pastorale des établissements.
Mais, nous ne partons pas de rien et depuis plus de vingt ans de nombreux laïcs sont en chemin et prêts aujourd’hui à chercher avec les frères les nouvelles formes de vie communautaire qui soutiendront le développement de la mission lasallienne d’éducation aujourd’hui, concrétisant cette vocation donnée à l’institution scolaire.
Car c’est bien là que réside l’avenir du charisme lasallien en Église : que des communautés vivantes et missionnaires, de frères et de laïcs, relaient l’appel du Christ à le suivre dans le ministère de l’éducation chrétienne à la manière de Jean-Baptiste de la Salle, pour que les jeunes « aient la vie et l’aient en abondance 27 ! »

 

Notes


1 - Avec 5 500 frères, l’Institut est présent à travers le monde dans 82 pays. Avec 80 000 collaborateurs laïcs, il rejoint 1 300 000 élèves et étudiants de tous âges.
2 - Blain, Cahier lassalien 7, p. 240-241.
3 - Projet éducatif lasallien (PEL), édition 99/2000, prologue.
4 - Ibid.
5 - PEL, p. 29.
6 - PEL, p. 13.
7 - Nos convictions pour Cahier Lasallienune proposition pastorale, Association La Salle, 2005.
8 - Ibid.
8 - PEL, p. 29.
10 - PEL, p. 31.
11 - PEL, p. 27.
12 - PEL, p. 31.
13 - PEL, p. 31.
14 - Service éducatif des missions internationales lasalliennes.
15 - Méditation 133, 2e point.
16 - Frère Jean-Louis Schneider, Les sources de la pédagogie chrétienne, Anthologie de textes de Jean-Baptiste de La Salle, Éd. Salvator, Paris, 2007.
17 - Ibid.
18 - Nos convictions pour une proposition pastorale, Association La Salle, 2005.
19 - Congrégation pour l’éducation catholique, Éduquer ensemble dans l’école catholique, 41, septembre 2007.
20 - PEL, p. 19.
21 - PEL, prologue.
22 - PEL, prologue.
23 - PEL, p. 19.
24 - Actes du chapitre de district de Lorient, 2001-2002.
25 - PEL, p. 23.
26 - Actes de l’assemblée de mission éducative lasallienne, La Motte Servolex, juillet 2006.
27 - Jn 10, 10.