Discours aux évêques des provinces de Rennes et Rouen


Les visites ”ad limina” sont l’occasion pour les évêques, tous les cinq ans, de faire le point sur leur diocèse et de le confronter au regard du Pape. A l’issue de la rencontre, le Pape remet aux évêques un discours dans lequel il aborde une question de la vie de l’Eglise. Dans son discours aux évêques des provinces de Rennes et Rouen, Jean-Paul II parle des vocations sacerdotales, de la formation des prêtres, de l’engagement des jeunes et du rôle des services diocésains des vocations.

Jean-Paul II

Chers Frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,

1. Je suis heureux de vous accueillir, Evêques et Administrateur diocésain, venus des provinces de Rennes et de Rouen, de cette région de l’Ouest de la France que j’ai eu l’occasion de visiter à deux reprises, en me rendant à Lisieux, à Saint-Laurent sur Sèvre et à Sainte-Anne d’Auray. Soyez les bienvenus au terme de votre visite ad limina, temps de rencontre et de travail avec les Dicastères de la Curie romaine, et également moment de ressourcement spirituel, par la prière auprès des tombes des Apôtres et par la célébration de la communion entre vous et avec le Successeur de Pierre. Je remercie Mgr Saint-Macary, Archevêque de Rennes, pour la présentation qu’il m’a faite de vos diocèses et des mutations importantes que vous connaissez dans la vie des communautés chrétiennes comme dans les formes d’exercice du ministère des prêtres. A mon tour, je souhaite vous entretenir d’une question qui me tient beaucoup à cœur comme à tous les évêques du monde entier, la question des vocations sacerdotales et de la formation des prêtres.

2. Depuis de nombreuses années maintenant, votre pays connaît une grave crise des vocations, une sorte de traversée du désert qui constitue une véritable épreuve dans la foi pour les pasteurs comme pour les fidèles et dont vos rapports quinquennaux se font largement l’écho. En trente ans, on a assisté à un lent effritement des effectifs qui semble s’être même accentué ces dernières années. Dans le même temps, bien des réflexions ont été engagées pour essayer d’analyser les causes de ce phénomène et pour y porter remède. De nombreuses initiatives ont été prises dans les diocèses de France pour réveiller la pastorale des vocations, pour susciter une nouvelle prise de conscience dans les communautés chrétiennes, pour interpeller les jeunes, pour rappeler la responsabilité des prêtres dans l’appel, pour adapter les lieux de formation et assurer davantage leur solidité. Assurément, ces efforts multiples n’ont pas encore donné tous leurs fruits et la crise est toujours là, inquiétante dans ses conséquences proches et durables sur la vitalité des paroisses et des diocèses de France. Plutôt que de céder au découragement devant cette situation, je vous exhorte à relever le défi, avec une ferme espérance, pour construire l’avenir de vos Eglises. Dans cette démarche, soyez assurés de la proximité spirituelle et des encouragements du Successeur de Pierre.

3. En France, les séminaires ont une longue histoire et une riche expérience. La dernière Visite apostolique, réalisée dans tous les instituts de formation de votre pays, a montré qu’ils étaient dans l’ensemble des instruments sûrs et bien adaptés, pour aider les jeunes qui entendent un appel du Seigneur à discerner sa volonté, et pour en faire des pasteurs disponibles et compétents. Ils demeurent donc à la disposition des évêques comme l’outil essentiel et nécessaire de la formation des candidats au sacerdoce (cf. Pastores dabo vobis, n° 60). Ayez donc à cœur de maintenir, avec toute votre vigilance de pasteurs, la qualité de ces maisons de formation, en particulier par le choix des formateurs qui assurent sous votre responsabilité ce ministère, et en veillant à l’application de la Ratio institutionis, votée par votre Conférence épiscopale et approuvée par la Congrégation pour l’Education catholique en 1998 !
Le Code de Droit canonique prévoit qu’il y ait dans chaque diocèse un séminaire pour la formation des futurs prêtres (can. 237). Evidemment, les conditions pastorales actuelles ne vous permettent pas d’envisager que cela soit possible partout, ni même souhaitable : en effet, comme le montre l’expérience, le regroupement des forces est souvent nécessaire et il peut donner aussi un réel dynamisme. Mais le législateur, dans sa sagesse, a voulu montrer le lien profond et intrinsèque qui existe entre l’Eglise diocésaine et la formation des prêtres. En ordonnant pour le service des communautés chrétiennes des hommes qui font don de leur vie entière et qui auront la charge d’agir au nom du Christ, l’évêque diocésain assure la vie de l’Eglise dans la vérité et la continuité de son mystère, elle qui est le Corps du Christ, « le signe et l’instrument de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (Lumen gentium, n° 1). Comment, dès lors, l’Eglise diocésaine pourrait-elle se désintéresser de la formation de ses futurs pasteurs ? Voilà pourquoi il importe que le séminaire soit une institution stable, repérable et reconnue dans le diocèse, apparaissant toujours comme le séminaire du diocèse, même si ce séminaire, qui accueille des candidats venus de plusieurs diocèses, est implanté dans un autre diocèse. Tout en laissant à ceux qui en ont la responsabilité leur tâche de discernement, l’évêque doit veiller à être présent à la vie du séminaire en le visitant, lui-même ou son délégué, et en rencontrant régulièrement les formateurs et les séminaristes. Il invitera ces derniers à s’enraciner progressivement dans les réalités de leur diocèse, par les stages qui s’imposent, surtout quand, pour des raisons légitimes liées aux études, les lieux de formation sont éloignés du diocèse.
Dans cet esprit, une concertation entre les évêques de France pourrait être d’une grande utilité, afin de réfléchir ensemble, et avec les formateurs responsables, à la question de la répartition des séminaires, de façon à ce qu’ils ne soient pas trop éloignés des diocèses qui leur confient leurs candidats. Les provinces nouvelles, créées tout récemment pour un meilleur service de votre action pastorale, ne pourraient-elles pas constituer un cadre de référence, permettant aux évêques de mettre en commun leurs forces pastorales disponibles pour une meilleure formation des candidats au sacerdoce ?
Il convient, en outre, de ne pas oublier que la mission des prê­tres s’exprime sacramentellement et humainement dans la solidarité d’un même presbyterium, uni autour de l’évêque, et que la formation commune des prêtres d’un même diocèse, ou d’une même province, dans un même séminaire est certainement propice à susciter l’esprit d’unité, si nécessaire pour aider l’évêque à mettre en œuvre ses décisions pastorales et également pour permettre aux prêtres de vivre dans le soutien mutuel et fraternel un ministère qui est souvent difficile.
4. Comme je l’avais souligné dans l’Exhortation apostolique Pastores dabo vobis (cf. n° 43-59), je veux rappeler la complémentarité essentielle des quatre dimensions de la formation, humaine, spirituelle, intellectuelle et pastorale, que le séminaire, « communauté éducative en cheminement » (ibid., n° 60), dispense avec progressivité au long des années de la formation. L’attention aux difficultés spécifiques des jeunes d’aujourd’hui, notamment dans le domaine de la vie familiale et de la maturité affective, ainsi que la prise en compte de l’environnement social, caractérisé par le relativisme généralisé des « valeurs » diffusées dans les médias, par la banalisation de la sexualité, mais également par les scandales qui lui sont liés, commandent d’être particulièrement attentifs à la formation humaine, affective et morale des candidats. J’encourage les équipes des séminaires à poursuivre leur travail de formation et de discernement dans ce domaine, en relation avec des spécialistes compétents, afin de permettre aux jeunes qu’ils accueillent de toujours connaître clairement les exigences objectives de la vie sacerdotale et de faire la lumière sur leur propre vie, afin d’estimer à sa juste valeur le don du célibat et de se préparer à le vivre généreusement dans la chasteté, comme un don d’amour offert au Seigneur et à ceux qui leur seront confiés. Je compte sur vous, qui êtes les premiers responsables de la formation des prêtres dans vos diocèses, pour veiller avec attention et rigueur à cette dimension. « Voici l’homme » (Jn 19, 5), affirmait Pilate, de manière prophétique, en présentant Jésus à la foule : dans la formation humaine et affective des candidats au sacerdoce, comme d’ailleurs dans toutes les autres dimensions de leur formation, c’est bien le Christ, Verbe incarné et homme nouveau et parfait, qu’il s’agit de chercher et de contempler, c’est lui qu’il convient de prendre pour modèle (cf. 1 Co 11, 1) afin de l’imiter en toutes choses, pour devenir prêtre, en son nom.

5. Vos Eglises diocésaines sont engagées dans un profond travail d’adaptation aux réalités nouvelles, comme les réaménagements pastoraux, la diminution rapide du nombre des prêtres et l’accès aux responsabilités pastorales de nombreux fidèles laïcs, évolutions sensibles dont il convient évidemment de tenir compte pour la préparation des futurs prêtres, afin de rendre leur formation toujours plus solide et mieux adaptée. Cependant, pour mener à bien cette mission difficile et essentielle de la formation des prêtres et pour dépasser la situation de crise actuelle, il faut assurément aller plus loin et plus en profondeur (cf. Novo millennio ineunte, n° 1). L’Eglise doit pour cela être soucieuse d’une certaine stabilité dans ses institutions et découvrir toujours davantage la richesse qui la constitue dans la complémentarité des diverses vocations de ses membres. Elle doit surtout estimer à sa juste valeur le ministère des prêtres, en comprenant qu’il est indispensable à sa propre vie, puisqu’il lui assure la permanence de la présence du Christ, dans la fidélité à l’annonce et à l’enseignement de sa Parole, dans le don précieux des Sacrements qui la font vivre, spécialement l’Eucharistie et la Réconciliation, et dans le service de l’autorité au nom du Seigneur et à sa manière. C’est dans un nouvel approfondissement de la vie chrétienne, par le renouvellement intérieur de la vie de foi de tous, pasteurs et fidèles, et par le rayonnement missionnaire des communautés chrétiennes, que pourront surgir, chez les jeunes, de nouvelles vocations pour l’Eglise.

6. A cet égard, il importe que l’Eglise, qui appelle les jeunes à servir le Christ, apparaisse à leurs yeux, comme aux yeux des familles, sereine et confiante : « Venez, et vous verrez ! » ( Jn 1, 39). Pour cela, il est essentiel que ceux qui sont chargés de la formation au ministère presbytéral se sentent soutenus par leur évêque et par l’Eglise : l’équipe des formateurs, choisie et mandatée par l’évêque, ou collégialement par les évêques responsables, a besoin de cette confiance pour exercer sa mission auprès des jeunes qui lui sont confiés, comme auprès des prêtres et des laïcs engagés dans la pastorale des vocations. Il convient aussi que les jeunes eux-mêmes qui envisagent de devenir prêtres puissent identifier le séminaire de leur diocèse comme le lieu normal où ils doivent se former au sacerdoce pour le service de l’Eglise diocésaine, dans une obéissance confiante à l’évêque et sans poser d’exigence particulière sur le lieu de leur formation. Je tiens à rappeler également que l’accueil des candidats venant d’un autre diocèse doit être fait avec discernement et qu’il doit toujours obéir aux dispositions canoniques et pastorales en vigueur (can. 241-242), rappelées par l’Instruction sur l’admission au séminaire de candidats provenant d’autres diocèses ou d’autres familles religieuses. A cette fin, il apparaît souhaitable que les Evêques de France puissent échanger sereinement, dans le cadre de la Conférence épiscopale, sur les questions liées à la formation des prêtres, sans revenir sur le travail déjà accompli et acquis, afin de manifester toujours davantage devant l’ensemble des fidèles une unité de vues sans laquelle leurs efforts risquent de manquer de souffle. Nous devons toujours nous rappeler la prière instante du Seigneur, demandant à son Père que ses disciples « soient un, pour que le monde croie » (Jn 17, 21), et nous devons nous employer à vivre entre nous les exigences d’une communion sans cesse à construire, à vérifier et à reprendre, pour rendre toujours plus évidente l’unité du Corps du Christ.

7. Pour préparer l’avenir avec espérance, l’Eglise doit poursuivre et amplifier son action en faveur des vocations et en direction des jeunes : ces derniers seront l’Eglise de l’avenir, et les prêtres de demain. En rendant grâce pour leur enthousiasme, si expressif dans les grands rassemblements comme celui des Journées mondiales de la Jeunesse ou dans ceux que vous organisez dans vos diocèses, mais aussi pour la générosité avec laquelle ils savent s’engager au service de causes sociales et humanitaires, il convient de les aider à répondre, plus nombreux qu’ils ne le font aujourd’hui, aux appels particuliers que le Seigneur ne manque pas de leur adresser. Si les difficultés des jeunes d’aujourd’hui à répondre à cet appel sont multiples, il semble qu’on puisse discerner trois raisons majeures. La première difficulté est la crainte de l’engagement à long terme, parce qu’on a peur de prendre des risques sur un avenir incertain et qu’on vit dans un monde changeant où l’intérêt semble fugitif, lié essentiellement à la satisfaction de l’instant. C’est certainement un frein essentiel à la disponibilité des jeunes, qu’on ne pourra surmonter qu’en leur donnant confiance dans une perspective à la mesure de l’espérance chrétienne. C’est tout l’enjeu du travail éducatif qui est assuré d’abord par la famille et par l’école, et qui s’accomplit également à travers les diverses propositions pastorales pour les jeunes : je pense particulièrement aux mouvements de jeunes, comme le scoutisme, aux aumôneries, aux divers lieux d’accueil qui leur sont proposés, où ils peuvent apprendre à faire confiance aux adultes, à la société, à l’Eglise, aux autres jeunes et à eux-mêmes. La deuxième difficulté concerne la proposition du ministère sacerdotal lui-même. En effet, depuis plusieurs générations, le ministère des prêtres a considérablement évolué dans ses formes ; il a parfois été ébranlé dans les convictions mêmes de bien des prêtres concernant leur propre identité ; il a été souvent dévalué aux yeux de l’opinion. Aujourd’hui, les contours de ce ministère peuvent sembler encore flous, difficilement repérables par les jeunes et manquant de stabilité. Il importe donc de soutenir le ministère ordonné, de lui donner toute sa place dans l’Eglise, dans un esprit de communion qui respecte les différences et leur vraie complémentarité, et non pas dans un esprit de concurrence dommageable avec le laïcat. La troisième difficulté, la plus fondamentale, concerne le rapport des jeunes avec le Seigneur lui-même. Leur connaissance du Christ est souvent superficielle et relative, au milieu de propositions religieuses multiples, alors que le désir d’être prêtre se nourrit essentiellement de l’intimité avec le Seigneur, dans un dialogue vraiment personnel, puisqu’il s’exprime d’abord comme le désir d’être avec lui (cf. Mc 3, 14). Il est clair que tout ce qui peut favoriser chez les enfants et chez les jeunes une découverte authentique de la personne de Jésus et de la relation vivante avec lui, qui s’exprime dans la vie sacramentelle, dans la prière et dans le service des frères, sera bénéfique à l’éveil des vocations. Qu’il s’agisse d’écoles de prière pour les enfants, de récollections ou de veillées de prière pour les jeunes, mais aussi de propositions de formation théologique et spirituelle adaptées aux jeunes, il y a là comme un terreau fertile et nécessaire, où l’appel de Dieu pourra germer jusqu’à porter du fruit. Veillez donc à ce que les divers services spécialisés qui concourent dans une étroite collaboration à nourrir la vie diocésaine, la pastorale familiale, la catéchèse, la pastorale des jeunes, soient ouverts généreusement à cette perspective des vocations, qui donne sens à leur action, grâce notamment aux interpellations et aux propositions des Services diocésains des Vocations, chargés de faire entendre à l’Eglise diocésaine, dans ses différentes composantes, l’appel du Seigneur aux vocations particulières de prêtres et de diacres, mais aussi de vocations à la vie consacrée.

8. Au terme de ces réflexions, que j’ai voulu partager avec vous pour vous manifester mon souci et mon soutien dans une situation difficile, qui constitue une épreuve pour beaucoup, je voudrais évoquer tous ceux et celles qui sont adonnés à cette mission : les membres du Service national des Vocations et des Services diocésains des Vocations, les responsables de la Pastorale des Jeunes, et surtout les équipes de formateurs des séminaires. Malgré la diminution du nombre des prêtres et l’accumulation des tâches qui leur incombent, veillez à donner assez de disponibilité à ceux que vous chargez de ces responsabilités pastorales, pour leur permettre de les assumer avec joie et assurance, et aussi avec efficacité. Je rends grâce avec vous pour le témoignage de fidélité des prêtres. Assurez-les tous de ma proximité spirituelle et de mes encouragements dans leur engagement généreux. Le Pape prie chaque jour pour que le don du sacerdoce ne manque pas à l’Eglise et pour que les séminaristes réalisent le don merveilleux que le Seigneur leur a fait de les appeler à son service. En les confiant tous à l’intercession maternelle de la Vierge Marie, je vous assure de ma sollicitude pastorale pour vos Eglises diocésaines. A tous, j’accorde de grand cœur une affectueuse Bénédiction apostolique, que j’étends aux prêtres, aux diacres, aux personnes consacrées et à tous les fidèles laïcs de vos diocèses.


Seigneur, avec toi
nous irons au désert...

Seigneur, nous voudrions te rendre grâce pour ce temps passé au désert.
Tu nous as fait quitter notre quotidien, nos habitudes, nos repères
Pour nous montrer des paysages étendus à l’infini,
Magnifiques dans les dunes
Plus austères dans les pierres
Verdoyants dans les palmeraies après la pluie

- paysages à l’image de nos vies -
Nous avons pu aussi contempler la voûte céleste.
Tu nous as fait goûter les fruits et les mets de ce pays,
et nous avons bu ensemble le thé à la menthe.

Nous avons été accueillis par les enfants dans les villages
Nous nous sommes ouverts à une autre civilisation
Nous avons entendu au loin l’appel à la prière du muezzin

- nous étions en période de ramadan -

Nous avons pu goûter le silence de ces grandes étendues,
nous retrouver nous-mêmes, nous taire et surtout écouter,
comme le prophète Elie au Mont Horeb a écouté Dieu.
Car tu te trouves, Seigneur, non pas dans le fracas destructeur
des tremblements de terre ou des ouragans,
mais dans le murmure de la brise légère,
et tu nous offres ta présence qui donne vie et confiance.

Dans la marche en silence,
nous avons mieux compris ces paroles de Mère Teresa :
« Plus nous nous recevons dans le silence de la prière,
plus nous nous donnerons dans notre vie active ».
Nous avons pu ainsi laisser résonner en nous la Parole de Dieu.
Chaque jour, la connaissance de Charles de Foucauld
nous a montré que se tourner vers le Christ
peut changer radicalement une vie.

Partir de plusieurs lycées pouvait sembler un pari un peu fou :
au départ, nous étions juxtaposés, les uns à côté des autres,
et nous avons peu à peu constitué un groupe, une communauté.
Comme avec les Hébreux,
tu nous as constitués au désert comme un peuple.
Rassemblés sur les nattes,
nous avons apprécié les repas pris tous ensemble.
Dans les carrefours, nous avons appris à mieux nous écouter,
à échanger nos idées.

Même s’il n’y avait pas forcément d’affinité au départ,
nous avons pu construire quelque chose ensemble.
Nous sommes même allés plus loin dans le partage,
à cause de ces différences, et une confiance mutuelle a grandi.
Vivre avec d’autres chrétiens a fortifié notre foi.

La vie fraternelle a été le test de la qualité de notre relation à Dieu.
Il y a eu des moments éprouvants
Sous la pluie, avec des tentes trempées, ou malades,
et dans l’attente d’un 4x4 pour remonter sur Marrakech
Or, paradoxalement, c’est dans ces moments de crise
que les liens se sont resserrés, qu’une solidarité a pu grandir,
comme dit le psaume lu un matin :
« Tu n’abandonnes pas tes serviteurs dans l’épreuve. »

Il ne suffisait pas de tout quitter,
mais de chercher aussi la source, l’essentiel dans nos vies.
Nous avons pu mesurer le prix de l’eau,
l’importance d’aller à la source pour boire une eau pure.
Nous avons goûté à des textes qui désaltèrent vraiment
notre soif de Dieu, de sa Parole, de son amour.
La Bible nous paraît plus proche
lorsque nous reprenons ces paroles :
« Dieu, tu es mon Dieu,
je te cherche dès l’aube,
mon âme a soif de toi
après toi languit ma chair,
terre aride, altérée, sans eau. »

Comme avec la Samaritaine,
tu t’es adressé mystérieusement à chacun :
« Si tu savais le don de Dieu,
c’est toi qui lui aurais demandé
et il t’aurait donné de l’eau vive.
L’eau que je lui donnerai deviendra en lui
source jaillissante pour la vie éternelle. »

Nous te rendons grâce, Seigneur,
pour ces messes en plein air,
vécues comme une grande ouverture.
Par l’Eucharistie, nous recevons la force d’aimer :
« Un des désirs les plus intimes de notre être est d’aimer.
Sans amour, notre vie trouverait-elle un sens ?
En nous laissant atteindre par l’amour de Dieu,
notre vie s’ouvre aux autres. »

Il nous est encore difficile de percevoir vraiment
ce que tu as fait pour nous,
nous avons besoin de temps pour méditer ce qui a été vécu,
pour réentendre ce que tu as pu murmurer à chacun dans le secret,
dans cette aventure intérieure à laquelle tu nous invites.

Des jeunes de Bobigny (Seinte Saint-Denis)