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Les éléments essentiels d’une pastorale renouvelée
professeur à l’université pontificale salésienne de Rome
Le titre de cette présentation semble tout à fait classique et même évident. En réalité, il rassemble et cherche à harmoniser des éléments qu’il faut sans cesse recomposer en une synthèse dynamique : ce qui est considéré comme l’essence même de la pastorale des vocations et ce qui en constitue la nouveauté : le « toujours » (semper) et le nouveau (novum) ou, si vous préférez, la théologie et la pastorale (ou la pédagogie) des vocations, ou bien encore les éléments architecturaux et les éléments herméneutiques.
Cette synthèse est en perpétuelle élaboration, car ses pôles eux-mêmes changent : la réflexion théologique sur l’essence de la vocation et sur l’Eglise comme événement vocationnel s’approfondit, en même temps que s’enrichit la pédagogie des parcours vocationnels.
Une telle synthèse, se référant à notre contexte européen, élaborée et discutée lors du Congrès européen de Rome en 1997, a été formulée avec conviction dans le document In verbo tuo (De nouvelles vocations pour une nouvelle Europe). Nous y ferons référence et elle sera le point de départ d’une analyse qui se servira d’une histoire et d’une expérience qui, bien que limitées dans le temps (six ans) présentent déjà des aspects originaux et inédits.
Les éléments essentiels
Le Saint Père lui-même demande, dans sa dernière encyclique de « mettre en œuvre tous les éléments d’une pastorale vocationnelle adaptée (1) ». Pour identifier correctement ces éléments, nous devons répondre à une double question, de méthode et de contenu.
Eléments architecturaux et herméneutiques
Les éléments constitutifs d’une réalité complexe comme la pastorale des vocations - comme nous le dit l’analyse épistémologique - sont de deux types : architecturaux et herméneutiques. Les premiers nous disent l’essence de l’objet en question, sa nature et sa structure fondamentale, ce qui le définit en lui-même et ce qui - en ce qui concerne la vocation et la pastorale des vocations - se traduit par la réflexion théologique. Les seconds représentent l’aspect dynamique et fonctionnel de la réalité vocationnelle, nous en offrant l’autre versant, celui de la dimension humaine. Ils nous aident à comprendre comment une personne accueille la proposition de la vocation, par quelles structures et quels mécanismes psychologiques passe la réponse à une telle proposition de Dieu, les peurs et les mécanismes de défense, les résistances et les espoirs de celui qui est appelé, mais aussi les difficultés et les chances présentées par l’environnement et la culture dominante.
Une telle analyse dépend des sciences humaines (de la pédagogie à la sociologie en passant par la psychologie), mais s’enracine dans la réflexion théologique qui la précède, dont elle assume les données et reconnaît le primat. Elle cherche seulement à donner son propre éclairage pour une meilleure compréhension du dialogue entre Dieu et l’être humain, le dialogue entre la liberté parfaite et une liberté imparfaite, afin de s’assurer que la réponse est toujours plus libre et plus responsable.
C’est seulement à travers une composition et une recomposition continuelles de ces éléments architecturaux et herméneutiques, en respectant les compétences de chacun, qu’il est possible d’identifier les éléments constitutifs d’une authentique pastorale des vocations et, par-dessus tout, de proposer une pédagogie des vocations appropriée, comme un « cercle herméneutique vocationnel », c’est-à-dire les lignes pédagogiques qui aideront les jeunes à vivre pleinement la conscience de leur vocation, en vue d’une réponse libre et responsable. Il me semble que, lorsque le Saint Père recommande de « mettre en œuvre tous les éléments constitutifs... », il se réfère à une analyse bien plus large, non seulement théologique, mais aussi pédagogique, comme nous avons tenté de la définir. C’est cette tâche que le document du congrès européen a cherché à mener à bien.
Ce qui suit me semble être les éléments constitutifs indiqués par le texte. Je les subdiviserai pour mieux en faire apparaître la logique.
Les sources
La pastorale des vocations exprime le mystère de Dieu, du Dieu qui appelle parce qu’il aime, du Créateur qui non seulement appelle sa créature à la vie, mais prend soin d’elle en l’appelant à chaque instant pour qu’elle se réalise selon son identité profonde. En conséquence, « la pastorale naît du mystère de l’Eglise et se met à son service (2). » « Une lecture proprement théologique de la vocation sacerdotale et de la pastorale qui la concerne ne peut se faire qu’à partir du mystère de l’Eglise, comme mysterium vocationis (3). » « La vocation constitue, en un sens, l’être profond de l’Eglise, avant même son action. Le nom de l’Eglise, Ecclesia, indique que sa nature est liée en profondeur à la vocation, parce que l’Eglise est vraiment “convocation”, assemblée des appelés (4) », des appelés qui deviennent appelants et ne remplissent pleinement leur vocation qu’en devenant eux-même médiateurs de l’appel de Dieu.
Définition
La pastorale des vocations est, d’une manière particulière, une activité d’évangélisation, ordonnée à l’annonce du Christ. C’est dans l’appel de l’Eglise à communiquer la foi qu’est enracinée sa théologie. Nous pouvons donc la définir comme l’annonce de la foi et du salut en termes d’appel (de Dieu) et de réponse (de l’homme). L’appel résonne comme un don adressé au croyant et sollicite une réponse qui le rend responsable du salut, pour lui-même et les autres. Cela concerne en premier lieu l’Eglise universelle mais s’applique tout spécialement à chaque communauté chrétienne et à la proclamation de la Bonne Nouvelle (catéchisme, célébrations, homélies, sacrements, initiatives pastorales) qui, si elle n’est pas vocationnelle, n’est pas une annonce chrétienne du salut.
Principes pastoraux
Selon la réflexion du document lui-même, les principes de la pastorale des vocations s’inspirent des valeurs et de la vision de l’Eglise qui suivent (5).
• Une fois la dimension vocationnelle de l’Eglise mise en évidence, on comprend que la pastorale des vocations n’est pas un élément accessoire ou secondaire, tendant simplement au recrutement d’agents pastoraux, ni un moment isolé ou sectoriel, déterminé par une situation ecclésiale d’urgence, mais plutôt une activité liée à l’être de l’Eglise et donc aussi « intimement insérée dans la pastorale générale de chaque Eglise (6) ».
• Toute vocation chrétienne vient de Dieu, mais arrive à l’Eglise et passe toujours par sa médiation. L’Eglise (ecclesia), qui par nature est vocation, est en même temps « génératrice et éducatrice de vocations (7) ». Par conséquent, « la pastorale des vocations a comme sujet actif, comme protagoniste, la communauté ecclésiale comme telle, dans ses diverses expressions : de l’Eglise universelle à l’Eglise particulière et, analogiquement, de celle-ci à la paroisse et à tous les membres du peuple de Dieu (8). » Tous les membres de l’Eglise, sans exception, ont la grâce et la responsabilité des vocations. Seule une collaboration universelle développera une action efficace au point de vue vocationnel.
• « L’Eglise particulière découvre sa dimension existentielle et terrestre dans la vocation de tous ses membres à la communion, au témoignage, à la mission, au service de Dieu et des frères... Par conséquent, elle respectera et encouragera la diversité des charismes et des ministères, donc des différentes vocations, qui sont des manifestations de l’unique Esprit. » C’est dans ce même sens que va le récent document Novo millenio ineunte (9) : « A côté du ministère ordonné, d’autres ministères, institués ou simplement reconnus, peuvent fleurir au bénéfice de toute la communauté, la soutenant dans ses multiples besoins : de la catéchèse à l’animation liturgique, de l’éducation des jeunes aux expressions les plus diverses de la charité. A n’en pas douter, il faut réaliser un généreux effort pour la promotion des vocations au sacerdoce et des vocations à une consécration spéciale. [...] Il faudra découvrir toujours mieux la vocation qui est propre aux laïcs, appelés comme tels à “chercher le Royaume de Dieu en gérant les affaires temporelles et en les ordonnant selon Dieu (10)”, et aussi à assumer “leur part de la mission [...] dans l’Eglise et dans le monde [...] par leurs activités en vue d’assurer l’évangélisation et la sanctification des hommes (11)”. »
• Le pilier de toute la pastorale des vocations est la prière commandée par le Sauveur (Mt 9, 38). Elle engage non seulement les individus mais aussi les communautés ecclésiales tout entières (12). « Nous devons adresser une prière instante au Maître de la moisson, pour qu’il envoie des ouvriers dans son Eglise, afin de faire face aux urgences de la nouvelle évangélisation (13). » Mais l’authentique prière pour les vocations, il est bon de le rappeler, ne mérite ce nom et ne devient efficace que lorsqu’elle crée une cohérence de vie avant tout chez le priant lui-même, et s’associe, dans le reste de la communauté croyante, à l’annonce explicite et à la catéchèse adéquate, pour favoriser chez ceux qui sont appelés au sacerdoce et à la vie consacrée, comme à toute autre vocation chrétienne, une réponse libre, disponible et généreuse, qui permette à la grâce de la vocation d’opérer (14).
Les conséquences opératoires
Il est maintenant possible de rassembler quelques aspects plus pratiques et pédagogiques qui découlent directement de l’analyse théorique et des principes déjà esquissés (15).
La pastorale des vocations est la perspective originelle de toute pastorale
La pastorale est par essence vocationnelle, car elle est par nature orientée vers le discernement vocationnel. Et non seulement en vue d’un choix de vie fondamental, mais de tous les choix disséminés au long de l’existence. De plus, « chaque vocation est une aube nouvelle », la réponse de chaque matin à un appel chaque jour nouveau (16) ; la pastorale tend à reconnaître l’appel et à formuler la réponse.
La pastorale des vocations est la vocation de la pastorale aujourd’hui
En ce sens, on peut dire qu’il faut « vocationnaliser » toute la pastorale, ou faire en sorte que chaque expression de la pastorale manifeste d’une façon claire et sans équivoque un projet ou un don de Dieu fait à la personne et stimule chez elle une volonté de réponse et d’implication personnelle. Ou bien la pastorale chrétienne conduit à cette confrontation avec Dieu, avec tout ce que cela implique en termes de tension, de lutte, parfois de fuite, mais aussi de paix et de joie liées à l’accueil du don, ou alors elle ne mérite pas ce nom.
Cela se manifeste aujourd’hui d’une façon toute particulière, au point de pouvoir affirmer que la pastorale des vocations est la vocation de la pastorale : elle en constitue peut-être l’objectif principal, comme un défi pour la foi des Eglises d’Europe. La vocation est l’affaire la plus sérieuse de la pastorale contemporaine.
Alors, si la pastorale en général est « appelée » à relever ce défi, et si c’est ce qu’on attend d’elle aujourd’hui, elle doit être probablement plus courageuse et franche, plus explicite pour aller au centre et au cœur du message-proposition, dirigée vers la personne plus que vers le groupe, avec des implications plus concrètes et non pas seulement de vagues rappels à une foi abstraite et éloignée de la vie.
Ce devra sans doute être aussi une pastorale plus pro-vocante que consolante ; capable, en tout cas, de transmettre le sens dramatique de la vie de l’homme, appelé à faire quelque chose que personne ne pourra faire à sa place.
La pastorale des vocations est graduelle et convergente
Il existe différentes sortes d’appels chez l’homme, tout au long de sa vie : appel à la vie, avant tout, puis à l’amour, à la responsabilité du don, puis à la foi, à suivre Jésus, au témoignage particulier de sa foi, à être père ou mère, et à un service particulier pour l’Eglise ou pour la société. Ceux qui tiennent compte, en premier lieu, de ce riche ensemble de valeurs et de significations humaines et chrétiennes d’où naît le sens de la vocation de la vie et de tout vivant font de l’animation de vocations. Car ces valeurs permettent d’ouvrir la vie à de nombreuses possibilités de vocations, convergeant ensuite vers un choix personnel définitif.
En d’autres termes, une pastorale des vocations correcte exige que les choses se fassent graduellement, en partant des valeurs fondamentales et universelles (le bien extraordinaire de la vie) et des vérités qui sont telles pour tous (la vie est un bien reçu qui tend par nature à devenir bien donné), pour passer ensuite à une spécification progressive, toujours plus personnelle et concrète, croyante et révélée, de l’appel (17).
Sur un plan plus précisément pédagogique, il est important tout d’abord d’inculquer le sens de la vie et de la gratitude pour celle-ci ; pour transmettre ensuite cette attitude fondamentale de responsabilité à l’égard de l’existence, et qui demande par nature une réponse de la part de chacun dans la ligne de la gratuité. Ce n’est qu’à ce moment-là qu’une proposition forte et radicale (comme devrait toujours l’être la vocation chrétienne) devient possible, comme celle de se consacrer à Dieu dans la vie sacerdotale ou consacrée.
La pastorale des vocations est à la fois générale et spécifique
« En somme, la pastorale des vocations part nécessairement d’une vaste idée de la vocation (et d’un appel adressé à tous en vue de celle-ci), pour se restreindre et se préciser selon l’appel de chacun. En ce sens, la pastorale des vocations est d’abord générale, puis spécifique, respectant un ordre qu’il ne semble pas raisonnable d’inverser et qui déconseille, en général, de proposer immédiatement une vocation particulière, sans aucune catéchèse progressive. D’un autre côté, toujours en vertu de cet ordre, la pastorale des vocations ne se limite pas à souligner de façon globale le sens de l’existence, mais conduit à une implication personnelle dans un choix précis. Il n’y a pas de séparation, ni encore moins de contraste, entre un appel qui souligne les valeurs communes et fondatrices de l’existence et un appel à servir le Seigneur “selon la mesure de la grâce reçue”. L’animateur des vocations, chaque éducateur dans la foi, ne doit pas craindre de proposer des choix courageux et de don total, bien que difficiles et non conformes à la mentalité du siècle.
Enseigner en profondeur les valeurs de la vie, par exemple, signifie proposer (et apprendre à proposer) un cheminement qui débouche naturellement sur la volonté de suivre le Christ et qui peut conduire au choix d’une sequela typique de l’apôtre, du prêtre ou du (de la) religieuse, du moine qui abandonne le monde, ou du laïc consacré dans le monde.
D’un autre côté, proposer de suivre le Christ de façon précise comme objectif de vie exige, par nature, une attention et une formation préalables pour acquérir les valeurs élémentaires de la vie, de la foi, de la gratitude-gratuité et de l’imitation du Christ requises de tout chrétien. Il en résulte une stratégie vocationnelle théologiquement mieux fondée et aussi plus efficace sur le plan pédagogique. Certains craignent que l’élargissement de l’idée de vocation puisse nuire à la promotion spécifique des vocations au sacerdoce et à la vie consacrée ; en réalité, c’est exactement le contraire » car elle la prépare et la rend plus logique au plan théologique, et plus efficace au plan psycho-pédagogique. Séparer la proposition de la vocation sacerdotale ou religieuse de la proposition de la vocation de tous est une idée et une pratique démodée, qui n’a eu que des résultats négatifs et a gaspillé une énergie précieuse. Cette idée doit être abandonnée.
« Le caractère graduel de l’annonce de la vocation permet, en effet, de passer de l’objectif au subjectif et du général au particulier, sans anticiper ni brûler les étapes des propositions, mais en les faisant converger entre elles et vers la proposition décisive pour la personne, qu’il faudra indiquer au moment opportun et mesurer attentivement, selon un rythme qui tienne compte du destinataire en question. Concrètement, plus on forme le jeune à passer naturellement de la gratitude pour le don reçu de la vie à la gratuité du bien donné, plus il sera possible de lui proposer de se donner totalement à Dieu comme résultat naturel et, pour certains, inéluctable. »
La pastorale des vocations est universelle et permanente
« Il s’agit d’une double universalité : en référence aux personnes auxquelles elle s’adresse et en référence à l’âge de la vie auquel elle est faite. Avant tout, la pastorale des vocations ne connaît pas de frontières. Elle ne s’adresse pas seulement à quelques personnes privilégiées ou qui ont déjà fait une option de foi, ni même uniquement à ceux de la part de qui il semble licite de s’attendre à une réponse positive, mais elle est adressée à tous, précisément parce qu’elle est fondée sur les valeurs élémentaires de l’existence. Ce n’est pas une pastorale d’élite, mais populaire ; ce n’est pas une récompense pour les plus méritants, mais une grâce et un don de Dieu pour chaque personne, car tout vivant est appelé par Dieu. Elle ne doit pas non plus être conçue comme une chose que seuls certains pourraient comprendre ou estimer intéressante pour leur vie, car tout être humain est inévitablement désireux de se connaître et de connaître le sens de la vie et sa place dans l’histoire.
En outre, ce n’est pas une proposition qui est faite une seule fois dans la vie (à l’enseigne du « à prendre ou à laisser ») et qui est retirée, dans la pratique, après un refus de la part du destinataire. Elle doit être, au contraire, comme une sollicitation continuelle, faite de différentes façons, en la proposant avec une intelligence qui ne se rend pas devant un désintéressement initial, qui souvent n’est qu’apparent ou défensif.
Il faut également corriger l’idée que la pastorale des vocations est exclusivement une pastorale de la jeunesse, car à tout âge de la vie résonne une invitation du Seigneur à Le suivre ; et ce n’est qu’au moment de la mort qu’une vocation pourra être considérée comme complètement réalisée. Bien plus, la mort est l’appel par excellence, de même qu’il y a un appel dans la vieillesse, lors du passage d’une saison de la vie à une autre, dans les situations de crise, la maladie. [...] En ce sens la pastorale des vocations est liée à la formation permanente de la personne, et elle est elle-même permanente. “Toute la vie et chaque vie sont une réponse (18).” »
La pastorale des vocations est personnelle et communautaire
« Du point de vue de l’animation des vocations, il est urgent aujourd’hui de passer d’une pastorale des vocations gérée par un agent pastoral seul à une pastorale toujours plus conçue comme une action communautaire, de toute la communauté sous ses diverses expressions : groupes, mouvements, paroisses, diocèses, instituts religieux et séculiers...
L’Eglise est davantage appelée à être entièrement vocationnelle : en son sein « chaque évangélisateur doit prendre conscience qu’il devient une “lampe” pour les vocations, capable de susciter une expérience religieuse qui conduise les enfants, les adolescents, les jeunes et les adultes à un contact personnel avec le Christ, à une rencontre où se révèlent les vocations spécifiques (19). »
De la même façon, le destinataire de la pastorale des vocations est encore toute l’Eglise. Si c’est toute la communauté ecclésiale qui appelle, c’est encore toute la communauté ecclésiale qui est appelée, sans aucune exception. Le pôle émetteur et le pôle récepteur s’identifient en quelque sorte à l’intérieur des diverses articulations ministérielles du tissu ecclésial.
En même temps, cependant, c’est l’individu qui doit se faire l’interprète de la proposition de vocation, c’est le croyant qui, en vertu de sa foi, doit en quelque sorte prendre en charge la vocation de l’autre » et être pour lui - dans le respect de sa vocation propre - un frère qui appelle ou qui accompagne sur le chemin du discernement.
« Le ministère de l’appel à la vocation ne revient donc pas seulement aux prêtres ou aux personnes consacrées, mais à tout croyant, aux parents, aux catéchistes et aux éducateurs », chacun selon son rôle dans la communauté chrétienne.
S’il est vrai que l’appel doit être adressé à tous, il est tout aussi vrai cependant que ce même appel doit être personnalisé, adressé à une personne précise, à sa conscience, à l’intérieur d’une relation tout à fait personnelle. Il existe un moment dans la dynamique vocationnelle où la proposition est faite de personne à personne et a besoin de tout le climat particulier que seule la relation individuelle peut garantir.
La pastorale des vocations est la perspective unitaire et de synthèse de la pastorale
Le point de départ est aussi le point d’arrivée. Ainsi la pastorale des vocations se pose en catégorie unificatrice de la pastorale en général, destination naturelle de toute peine, lieu d’abordage des diverses dimensions, presque comme une sorte d’élément de vérification de la pastorale authentique.
Répétons-le : si la pastorale n’arrive pas à « transpercer le cœur » et à placer l’auditeur face à la question stratégique (« que dois-je faire ? »), ce n’est pas une pastorale chrétienne, mais une hypothèse de travail inoffensive.
En conséquence, la pastorale des vocations se situe et doit se situer en rapport avec toutes les autres dimensions, par exemple avec la dimension familiale et culturelle, liturgique et sacramentelle, avec la catéchèse et le cheminement de foi dans le catéchuménat ; avec les différents groupes d’animation et de formation chrétiens (non seulement avec les enfants et les jeunes, mais avec les parents, les fiancés, les malades et les personnes âgées...) et de mouvement (du mouvement pour la vie aux diverses initiatives de solidarité sociale).
Chaque secteur de la pastorale entre en dialogue avec les autres : pensons à l’importance que pourrait avoir une pastorale vocationnelle et familiale qui éduquerait progressivement les parents à être les premiers animateurs-éducateurs des vocations. Ou aux bienfaits que pourrait présenter une pastorale des vocations parmi les malades, qui ne les invite pas seulement à offrir leurs souffrances pour les vocations sacerdotales, mais qui les aide à vivre l’événement de la maladie, avec toute la charge de mystère qu’elle contient, comme vocation personnelle, que le malade-croyant a le « devoir » de vivre pour et dans l’Eglise et le « droit » d’être aidé à vivre dans l’Eglise.
Ce lien facilite le dynamisme pastoral car, de fait, il lui est congénital : les vocations, comme les charismes, se cherchent entre eux, s’éclairent réciproquement, sont complémentaires les uns des autres. En revanche, isolés ils deviennent incompréhensibles ; de même que celui qui reste enfermé dans son secteur de spécialisation ne fait pas une pastorale d’Eglise.
En définitive, la pastorale des vocations requiert beaucoup d’attention, mais elle offre en échange une dimension destinée à rendre vraie et authentique l’initiative pastorale de chaque secteur. La vocation est le cœur battant de la pastorale unitaire !
Les objectifs
Je crois que ce qui a été exposé, spécialement dans les deux derniers paragraphes, montre de manière précise les principes constitutifs essentiels de la pastorale des vocations, faisant ressortir à la fois l’aspect théologique et l’aspect pédagogique. Mais je crois que nous pourrions dire quelque chose de plus à propos des objectifs vers lesquels se tourne cette conception de la pastorale des vocations et - tout en les respectant - les confronter à la situation historico-culturelle actuelle que nous vivons sur le vieux continent.
L’objectif était clair et il l’est toujours : créer une culture vocationnelle. C’est dans ce sens que le Saint Père adressait une requête précise aux participants au congrès, dans laquelle il exprimait son espérance d’une « nouvelle culture vocationnelle, chez les jeunes et dans les familles », face à une culture dominée par l’image de la personne sans vocation, de l’européen qui a perdu le contrôle de sa vie et qui ne sait pas où il va et que conduit un « triste quadrige ». C’est par cette expression que l’on exprime les divers éléments d’une certaine culture anthropologique actuelle :
• affaiblissement de la pensée (incapable d’horizons métaphysiques) ;
• baisse des valeurs (rejet de l’engagement et du sacrifice, esprit inspiré par une logique mercantile) ;
• engagement à court terme (fermé à des expressions comme « pour toujours » et où triomphe le « ne jamais dire jamais ») ;
• religiosité vague et hautement subjective (jusqu’au « bricolage » des nouveaux mouvements religieux).
Il est facile de voir combien cette culture peut finir par devenir anti-vocationnelle. Peut-être pas directement mais en tout cas, ces quatre éléments sont comme des roues conduisant la voiture loin d’une logique vocationnelle. Cela donne l’impression d’une voiture sans conducteur, comme si l’homme qui émerge d’un tel projet était un « homme sans vocation ».
Le Cardinal Ruini dit très justement que la question des vocations aux ministères ordonnés et à la vie religieuse n’est pas un problème qui relève de l’Eglise seule, mais qu’il met en cause la vision que les hommes et les femmes d’aujourd’hui ont de leur propre existence. Ce qui doit d’abord nous préoccuper, selon le président de la conférence épiscopale italienne, ce n’est pas tant la raréfaction des vocations que le climat culturel - dans lequel nous vivons tous - qui provoque une crise du concept même de vocation. En cela, il fait écho à la stratégie de la nouvelle évangélisation qui est au cœur du pontificat actuel, dans laquelle la cause de l’Evangile est étroitement liée à la cause de l’homme et où les valeurs évangéliques sont celles de la promotion de l’homme.
A cette culture, qui est contre l’homme et son bonheur, s’oppose la culture vocationnelle, qui doit être proposée selon des modalités de foi, intelligentes et appropriées.
Le cercle herméneutique de la vocation
Il s’agit d’élaborer une proposition vocationnelle éclairée et éclairante, respectant certaines étapes et portant courageusement le discours jusqu’en ses ultimes conséquences, mais sans brûler les étapes ni croire qu’elle émergera d’elle-même.
C’est la problématique du cercle herméneutique vocationnel (qui reprend un peu la distinction suggérée au début de notre réflexion). L’appel à une vocation n’est proposé de manière valide et ne peut solliciter la réponse qu’à l’intérieur d’un cadre précis qui respecte ses différentes composantes et cherche à créer une culture vocationnelle. Concrètement, ce cadre :
- naît, avant tout, d’une tentative de créer une culture vocationnelle à l’intérieur de l’Eglise, c’est-à-dire de montrer la vocation (spécialement la vocation à une consécration particulière) comme composante essentielle et habituelle de la vie chrétienne, de l’accueil du salut, de la définition de l’identité personnelle et d’envisager le présent et l’avenir de chaque croyant. C’est « vocationnaliser » la pastorale, faire que le projet pastoral de l’Eglise, au niveau général et local, non seulement accueille une certaine sensibilité vocationnelle (dont certains pourraient déjà se satisfaire) mais finisse par être lui-même projet vocationnel, profondément animé, en toutes ses articulations, par la logique vocationnelle.
- cherche à atteindre et formuler l’aspect anthropologique du concept de vocation - avec ses implications de soif de vérité et de bonheur, de désir de se réaliser soi-même - comme un ensemble de valeurs bien spécifiques, lié à une culture de la vie et de l’ouverture à la vie, du sens de la vie et de la mort. Ces valeurs sont liées au « sens de l’inachevé chez l’homme et en même temps de son ouverture à la transcendance, sa disponibilité à se laisser appeler par un autre (ou un Autre) et ainsi qu’au mystère et à la capacité à rêver et à désirer en grand (20) ;
- signifie qu’il faut avoir le courage d’introduire les valeurs vocationnelles (les valeurs et les attitudes vocationnelles) à l’intérieur de la culture contemporaine et du langage ordinaire, comme une bonne semence devant pénétrer la mentalité générale, résistant au choc de la pensée séculière. Il s’agit, en somme, « d’exporter » la logique vocationnelle, de l’exprimer en un langage accessible aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui, capable de les secouer et de les interpeller, de leur faire comprendre que la vie de chacun est vocation, que l’homme est vocation ; de proposer une foi qui est sagesse de vie qui interpelle et provoque la conscience humaine, appelant chacun à une attitude libre et responsable devant la vie et le sens de la vie comme un bien reçu qui tend, par nature, à devenir un bien donné, qui amorce une logique universelle de vocation qui concerne chacun.
- Tout cela peut devenir un « terrain commun où la conscience croyante est confrontée à la conscience laïque... un véritable terrain pour la nouvelle évangélisation », où la conscience chrétienne donne un côté salutairement provoquant à la situation et la culture environnantes (nous voyons les effets positifs de la crise des vocations sur la théologie et la pédagogie des vocations) et a quelque chose de significatif à offrir pour la naissance d’un nouveau modèle d’humanité pour l’Europe du troisième millénaire.
- Par-dessus tout, la culture vocationnelle permet la création d’un climat général extrêmement favorable sur le plan vocationnel : d’un côté, elle permet de toucher tous et chacun et de l’autre, elle ouvre la voie à la proposition spécifiquement chrétienne du son de soi ; elle permet ainsi de parvenir à une proposition vocationnelle explicite et spécifique, radicale et courageuse, à laquelle les jeunes sont disposés de manière plus positive. La proposition vocationnelle devient une proposition propédeutique à la foi : elle fait advenir un chemin de croyant.
- Concrètement, le congrès européen a retenu que la création de cette culture est la méthode la plus efficace pour affronter correctement la crise des vocations à la prêtrise et à la vie religieuse ; cette méthode part de loin, pour rendre la proposition des vocations spécifiques plus efficace et convaincante et l’étendre au-delà de ses limites actuelles.
C’est seulement ainsi que se ferme le cercle et que la proposition vocationnelle devient crédible et effective, dans l’intérêt de chaque être humain personnellement appelé, de la société, dans laquelle chacun choisit sa place pour le bien de tous, dans une logique communautaire et pour le bien de l’Eglise, qui s’enrichit ainsi de nouveaux dons et de nouvelles vocations.
Il est intéressant que le récent congrès nord-américain des vocations (le troisième au niveau continental) ait épousé en substance la thèse du congrès européen, allant jusqu’à indiquer dans le sous-titre du document l’intention explicite de créer une « culture vocationnelle (21) ». Finalement, que serait une pastorale qui ne cultiverait pas la liberté de se sentir appelé par Dieu et de faire naître de nouveaux éléments de vie ?
L’objectif reste toujours valable, surtout si nous regardons autour de nous et observons de plus près la situation culturelle dans laquelle nous vivons. D’un côté, nous trouvons la confirmation de l’urgence de créer cette culture vocationnelle, de l’autre nous pouvons rassembler des suggestions pour préciser les moyens pédagogiques d’une pastorale des vocations dans l’Europe d’aujourd’hui et rendre ces objectifs plus accessibles.
L’Europe aujourd’hui
Pour ne pas nous engager dans une discussion qui irait au-delà de nos buts, je proposerai seulement un repère, qui me semble significatif pour montrer le type de culture qui prévaut aujourd’hui sur le vieux continent : l’événement du projet de la future constitution européenne. Ce projet, nous le savons, ne reconnaît nullement les racines chrétiennes qui apparaissent cependant comme une réalité historique incontournable. Soyons clair : je ne parle ni de la question technique ni de l’opportunité politique d’une telle reconnaissance, mais simplement de la signification de cette opposition tenace qui semble venir de haut. Elle prend sens avec notre thème : les racines (point de départ) ont un rapport avec les fruits (point d’arrivée). Si les racines sont exclues, il n’est plus possible de penser en terme d’évolution dans une direction donnée. Deux conséquences en découlent pour nous,
L’urgence d’une culture vocationnelle
C’est pourquoi, comme nous l’avons déjà indiqué, cette attitude nous aide à comprendre combien nous sommes loin d’une certaine culture, d’une certaine idée de l’homme qui vient à la vie parce qu’appelé, appelé par une volonté bonne qui l’a préféré à la non-existence, appelé et donc aimé et important pour Quelqu’un ; loin de l’idée de la vie comme quelque chose d’absolument précieux, unique, singulier, exceptionnel, bien reçu qui tend, par nature, à devenir bien donné, de la vie bien dépensée seulement dans la reconnaissance et l’ouverture à la gratuité. Il est nécessaire de mettre toute notre énergie dans ce projet culturel (comme l’appelle l’Eglise italienne, par une coïncidence significative), ce projet de culture vocationnelle. Il devient alors cercle herméneutique vocationnel, c’est-à-dire modalité précise de proposition et d’accompagnement des vocations.
Nous pourrions peut-être nous poser cette question inquiétante et dérangeante : sommes-nous sûrs qu’il y a une authentique culture vocationnelle dans l’Eglise ? Ou la vocation n’est-elle, pour beaucoup, qu’un choix fait à vingt ans et maintenant tout au plus observé fidèlement pour son propre salut ? Sommes-nous sûrs que chacun, dans l’Eglise, se sent appelé à être celui qui appelle, ou bien l’animation vocationnelle ne reste-t-elle pas, pour beaucoup, une responsabilité qui relève de ceux qui en ont reçu la charge et non de tous ? L’animation vocationnelle est-elle pensée aujourd’hui comme un chemin éducatif à la lumière de l’Evangile, qui aide le croyant à découvrir son projet de vie jusqu’aux choix les plus radicaux, ou tend-elle simplement et immédiatement à envoyer des vocations au séminaire ?
Alors, au lieu de nous lamenter sur cette « vieille » Europe qui, pour des raisons étranges, ne veut pas reconnaître ses racines, nous devrions peut-être nous demander si nous travaillons vraiment à faire naître « de nouvelles vocations pour une nouvelle Europe ».
La spécificité de l’appel au ministère ordonné et à la vie religieuse
D’un autre côté, la situation vocationnelle que nous vivons dans notre vieille Europe nous aide peut-être à comprendre qu’à l’intérieur du cercle herméneutique proposé, le passage de la création d’une culture de la vocation à la proposition de la vocation n’est pas spontané et ne va pas de soi.
Il y a un lien théologique évident entre l’adhésion de foi et l’interrogation sur le projet que Dieu a pour chacun, tout comme il y a un lien évident entre l’éducation à la découverte de la vie comme un bien reçu et la décision de donner sa vie pour les autres ; mais tout cela peut être laissé à une sorte de progression naturelle que l’individu entreprend sans guide ni encouragement. Vocation signifie aussi pro-vocation, surtout si l’on parle de vocation au ministère presbytéral et à la vie religieuse. Et l’art de montrer un parcours vocationnel, ouvert à la fois au projet de Dieu et à la soif de vérité et de bonheur de chacun, qui concilie proposition et sollicitation, don et engagement, action de Dieu et réponse de l’homme, reste à trouver.
C’est une chose de respecter - comme nous l’avons déjà dit en citant le document du congrès européen - les étapes de la proposition, partant de la grammaire fondamentale de vie (la vie est un bien reçu qui tend par nature à devenir un bien donné) pour rejoindre progressivement la proposition du don radical, c’en est une autre de prétendre mettre en route le mécanisme avec l’illusion qu’il arrivera inévitablement à destination. Rien n’est garanti dans l’animation vocationnelle. Encore moins dans la culture anti-vocationnelle qui est la nôtre aujourd’hui.
Il est probablement vrai que la clarté de la proposition a diminué, ainsi que le courage de proposer l’idéal de la prêtrise ou de la vie relieuse ; ou alors il est possible que cet appel soit encore fait dans des cercles fermés, au petit nombre, seulement à l’ombre du clocher, parmi les servants d’autel et les fils de bonne famille, là où il y a un espoir d’obtenir une réponse positive et qu’il soit retiré dès que l’interlocuteur exprime un manque d’intérêt. Nous n’avons pas encore le courage de semer la bonne graine de la vocation partout, à tout moment et en tous comme le projet de Dieu qui demande le maximum. C’est probablement parce que la proposition se fait encore hors du cercle herméneutique vocationnel, de sa logique propre et de son articulation concrète qu’elle est faible et inefficace.
D’un autre côté, comme nous le dit le document, la pastorale des vocations « doit être probablement plus courageuse et franche, plus explicite pour aller au centre et au cœur du message-proposition, dirigée vers la personne plus que vers le groupe, avec des implications plus concrètes et non pas seulement de vagues rappels à une foi abstraite et éloignée de la vie. Ce devra sans doute être aussi une pastorale plus pro-vocante que consolante ; capable, en tout cas, de transmettre le sens dramatique de la vie de l’homme, appelé à faire quelque chose que personne ne pourra faire à sa place(22). »
Notes
1 - Ecclesia de Eucharistia, n° 32. [ Retour au Texte ]
2 - Document final du 2e Congrès international (1981), n° 5. [ Retour au Texte ]
3 - L’expression provient de l’exhortation apostolique Pastores dabo vobis, n° 34. Dans ce même document sont bien décrits les motifs qui lient intrinsèquement la pastorale des vocations à l’Eglise. [ Retour au Texte ]
4 - Ibid. [ Retour au Texte ]
5 - Cf. De nouvelles vocations pour une nouvelle Europe, document final du Congrès européen des vocations, Rome, 1997, n° 25 § a-e. [ Retour au Texte ]
6 - Pastores dabo vobis, n° 34. [ Retour au Texte ]
7 - Id., n° 35. [ Retour au Texte ]
8 - Id., n° 41. [ Retour au Texte ]
9 - Novo millenio ineunte, n° 46. [ Retour au Texte ]
10 - Lumen Gentium, n° 31. [ Retour au Texte ]
11 - Apostolicam actuositatem, n° 2. [ Retour au Texte ]
12 - Novo millenio ineunte, n° 38. [ Retour au Texte ]
13 - Vita consecrata, n°64. [ Retour au Texte ]
14 - Id. [ Retour au Texte ]
15 - Cf. In Verbo tuo, n° 26. [ Retour au Texte ]
16 - Id., n° 26 a. [ Retour au Texte ]
17 - Novo millenio ineunte recommande « une réflexion plus attentive sur les valeurs essentielles de la vie » pour susciter une authentique réponse à l’appel (n° 46). [ Retour au Texte ]
18 - Proposition 4. [ Retour au Texte ]
19 - Proposition 13. [ Retour au Texte ]
20 - In Verbo tuo, n° 13 b. [ Retour au Texte ]
21 - Conversion, discernement, mission. Vers une culture vocationnelle en Amérique du Nord, document final du congrès nord-américain, 2002. [ Retour au Texte ]
22 - In Verbo tuo, n° 26 b. [ Retour au Texte ]