Appeler des jeunes : le SIJEL


Claude Devred
Aumônier des jeunes équipes liturgiques,
diocèse de Cambrai

Si on demandait à un jeune : « Pourquoi as-tu choisi de devenir servant d’autel dans ta paroisse ? », sans doute répondrait-il : « Un prêtre, un copain, un catéchiste m’a appelé(e) et j’ai accepté de “venir et de voir”. » Peut-être un peu plus tard, ajouterait-il : « En m’approchant de l’autel, en participant plus activement à la célébration… j’ai découvert que Celui que je servais, c’était le Christ lui même. » Quelques temps après, surtout s’il a fait partie d’une équipe de servants bien accompagnée, il complèterait sa réflexion et dirait volontiers : « En approfondissant… je me suis rendu compte que j’avais ma place dans l’Eglise dont je suis membre actif depuis mon baptême. »
Tant de jeunes pensent que l’Eglise, c’est les autres, le Pape, les évêques, les prêtres… Tant de jeunes pensent que l’Eglise, c’est ailleurs, autre chose que notre vie. Combien de fois, nous, accompagnateurs, n’avons nous pas dit, Parole de Dieu à l’appui : « L’Eglise, c’est toi… toi avec les autres. Comme disciple du Christ, tu es appelé à trouver place dans l’Eglise. Si tu ne t’impliques pas dans ta paroisse, dans ton aumônerie, dans ton mouvement, il manquera quelqu’un et tu appauvriras l’Eglise. »
C’est vrai que pour tout chrétien, s’il veut trouver sa place dans l’Eglise, tout se joue dans l’appel qu’il reçoit ! Cet appel, c’est le Christ qui le lui adresse… C’est vrai que tout servant d’autel, qui veut trouver sa place dans l’Eglise, doit entrer en prière, en rencontre d’amour avec le Christ, se tenir en état d’accueil, de disponibilité pour que l’appel puisse être entendu, reçu et que le service soit vécu. Oui, le service de l’autel est déjà une réponse.

A l’occasion de leur rassemblement national à Lourdes, organisé cet été dernier par le Service Interdiocésain des Jeunes Equipes Liturgiques, le pape Jean-Paul II adressait un message aux servants d’autel : « Le Pape rend grâce pour le beau service que les servants d’autel accomplissent dans l’Eglise et qui leur permet d’être proches du grand mystère de l’Eucharistie, étroitement unis à la prière liturgique de l’Eglise… En approfondissant avec l’aide des prêtres, des diacres et du SIJEL, le sens de la liturgie et en faisant de l’Evangile leur lecture habituelle, ils découvriront comment le Christ leur parle et les appelle à Lui pour faire de leur vie quelque chose de grand et de beau. Qu’ils se laissent guider par l’Esprit Saint, afin de discerner leur vocation et leur mission dans l’Eglise et d’être chaque jour des témoins joyeux et actifs du salut et des annonciateurs de l’espérance ! »
Et le Père Maurice de Germiny, évêque accompagnateur du SIJEL au nom de la Commission épiscopale de la liturgie de rajouter : « Je demande aux servants et servantes d’autel de ne pas garder pour eux la joie que leur donne leur service liturgique. Par votre enthousiasme et votre foi, appelez les autres jeunes de votre âge : vos communautés ont besoin de vous… »
Cet appel au service n’est-il pas le début d’un autre appel ? La proximité de l’autel, signe du Christ, peut susciter en vous un appel au don total comme prêtres, religieux, religieuses, missionnaires : « La moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux, priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson » (Mt 9, 38).

A travers ces messages nous nous rendons bien compte qu’on ne peut dissocier la vie de servant d’autel de la vie de chrétien dans le monde au quotidien… Avec le Pape, toujours auprès des jeunes servants à Rome en août 2001, après le jubilé de l’an 2000, nous approfondissons et donnons sens à cette joie de servir…
« Même si, chers servants d’autel, vous ne portez plus le vêtement baptismal, vous avez revêtu celui de servants. C’est le Christ que vous avez revêtu. Vous êtes beaucoup plus que de simples “aides aux prêtres”. Vous êtes surtout des serviteurs de Jésus-Christ, de l’éternel Souverain Prêtre… Vous êtes appelés à être des amis de Jésus. Efforcez-vous de cultiver et d’approfondir cette amitié avec Lui… Votre service ne peut être limité à l’intérieur d’une église. Il doit rayonner dans votre vie de chaque jour : à l’école, en famille… car celui qui veut servir Jésus-Christ à l’intérieur d’une église doit être partout un témoin… Comme il serait beau que certains d’entre vous puissent découvrir la vocation du sacerdoce et, pour ceux qui voudront s’unir dans le mariage, le service de l’autel enseigne qu’une union authentique doit toujours inclure la disponibilité au service réciproque et gratuit. » (Au cours du rassemblement national du SIJEL à Rome en août 2001.)

Or c’est bien ce que Jésus lui même nous dit : « Je ne suis pas venu pour être servi, mais pour servir. » Jésus pour réaliser sa mission, s’est voulu d’abord serviteur. A travers tous ces messages, une idée force revient. Pour savoir ce que veut le Christ, il faut le fréquenter, connaître ce qui est important pour Lui, ce qu’il veut révéler au monde… C’est en ouvrant le Livre pour écouter sa Parole, comme on le fait à chaque messe, qu’on peut entendre le Seigneur qui nous parle… La Parole de Dieu lue, écoutée, expliquée, partagée et célébrée, nous fait devenir familiers de Dieu. Mais savoir ce que le Christ nous dit n’est pas suffisant. Pour découvrir la place que le Christ lui propose dans l’Eglise, pour discerner la vocation qui est la sienne, il faut que chaque servant s’entraîne à vivre comme le Christ… Pour vivre comme le Christ, il faut en parler ensemble.
En vivant comme et avec le Christ : l’accueil, le partage, le pardon et la réconciliation, on progresse dans la foi et on devient capable de comprendre ce qu’il veut et ce qu’il attend de chacun… Non seulement vivre comme et avec Jésus, mais aussi vivre de Lui : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » La prière est le temps où le servant vit avec Jésus. Personne ne peut découvrir à quoi le Christ l’appelle s’il ne ménage pas, dans sa journée, un temps de silence et de prière.
Vous aurez remarqué que le servant est d’abord un jeune avec d’autres, comme d’autres… Il ne faut pas l’enfermer dans l’église et en faire un sacristain… Il fait partie d’un service d’Eglise qui veut l’aider à vivre au cœur du monde, en lien avec d’autres jeunes en aumôneries ou services qui, comme lui, dans la diversité, vivent leur foi et veulent la vivre ensemble, en équipes.
Donner sens aux gestes liturgiques, aux signes qu’ils posent, les amène à donner sens à leur vie, à leur place dans l’Eglise et dans le monde. C’est au cœur d’une Eglise qui les accueille, qui les accompagne, qui les porte, que l’appel à la vocation – quelle qu’elle soit – pourra être entendu et susciter une réponse. Oui, ces jeunes ont déjà entendu l’appel que le Christ leur adressait. Ils ont senti monter en eux le désir de devenir servants d’autel, de participer activement aux rencontres et aux rassemblements des chrétiens. Mais le chemin n’est pas fini. Le Christ a encore plein de projets pour eux. Quand ils éprouvent d’autres désirs, ils ressentent d’autres appels, qu’ils trouvent toujours quelqu’un à qui ils oseront en parler en confiance !

Chers servants, servantes, n’étouffez pas en vous la voix qui vous invite à devenir prêtre, religieux ou religieuse, père ou mère de famille, baptisés engagés dans la vie professionnelle où vous pourrez servir les autres avec amour et humilité. « Je suis la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta Parole » disait Marie à l’envoyé de Dieu, l’ange Gabriel. Servants, servantes, à la suite de Marie, méditez la Parole de Dieu, mettez-la en œuvre dans vos vies. Vous n’êtes pas de passage dans l’Eglise, vous êtes les mem­bres actifs de l’Eglise, vous êtes intégrés à la construction de l’Eglise. C’est l’appel du Christ, c’est votre vocation. N’hésitez pas, Il ne déçoit jamais.

Pour conclure, servants et servantes d’autel, vivez en acte et en vérité le chant composé pour notre premier pélé des servants à Lourdes en 2003 : « Jésus vivant, ta jeune Eglise vient en chantant auprès de Toi, dans son désir de te servir, entends sa joie, Alléluia ! »