Vocation et vocations


père Bernard PITAUD
provincial de Saint-Sulpice,responsable de l’IFEC

Il y a 40 ou 50 ans, l’annonce d’un congrès des vocations n’aurait suscité aucune question sur le sens de cette expression. On aurait tout de suite compris le mot « vocations » comme concernant exclusivement les vocations au ministère sacerdotal ou presbytéral (on aurait dit d’ailleurs simplement : vocations au « sacerdoce »), et les vocations à la vie religieuse. On n’aurait pas pensé, et pour cause, au diaconat permanent. On n’aurait pas pensé non plus à d’autres formes de la vie consacrée. Surtout, on n’aurait pas pensé à situer les vocations dites spécifiques au cœur de la vocation chrétienne, baptismale et de ses formes plus « ordinaires ».

Vous avez demandé des clarifications de vocabulaire. Or il suffit d’avoir prononcé les quelques phrases qui précèdent pour que toute le monde s’aperçoive que l’utilisation des mots ne va pas, en effet, de soi : on parle de vocations spécifiques ; spécifiques de quoi et par rapport à quoi ? Je viens d’évoquer des formes plus « ordinaires » de la vocation baptismale, mais ce mot « ordinaire » peut être perçu de manière péjorative. Saint Paul ne présente-t-il pas la vie chrétienne comme un don tout à fait extraordinaire. Et des gens mariés protestent quand ils entendent parler du don « radical » que font à Dieu et à l’Eglise les prêtres et les religieux. Ils demandent à juste titre : le don que nous nous faisons l’un à l’autre dans le mariage n’est-il pas aussi radical ? Le mariage chrétien serait-il plus facile que le célibat choisi pour le Royaume ?

On peut toujours contester les mots et nous devons être prudents dans l’emploi que nous en faisons. En même temps, notre désir de préciser le vocabulaire est parfois trop insistant, trop immédiat. Dans toute période de changement, le vocabulaire met du temps à se préciser et à se fixer. Ce qui est imprécis, c’est la réalité elle-même dans la mesure où elle est en mouvement. Cela nous invite, lorsque nous réfléchissons entre nous sur la réalité pastorale, à chercher des formulations sur lesquelles nous nous mettons d’accord et qui nous donnent des références communes pour avancer dans la réflexion.

Mais que nous le voulions ou non, certains mots déborderont toujours la réalité que nous voulons lui faire exprimer ; ainsi quand nous parlons de « la vie consacrée », le mot « consécration » échappe aux contenus précis que nous lui assignons habituellement : en effet la vie baptismale est déjà une consécration ; et on peut dire aussi que les prêtres sont consacrés par l’ordination. Il nous faudra donc toujours apporter des déterminations supplémentaires pour préciser ce que nous voulons dire.

Cette entrée en matière suggère déjà le caractère complexe de ce dont nous parlons : un vocabulaire en mouvement pour une réalité elle-même en mouvement, que nous essayons de comprendre de notre mieux, pour exercer un discernement et ainsi favoriser une évolution qui s’accomplisse le plus possible selon le dessein de Dieu.

J’ai divisé cet exposé en deux parties : la foi interrogée et l’Eglise recomposée. Pourquoi la première partie sur « la foi interrogée » ? Parce qu’on ne peut pas parler des vocations sans évoquer le contexte dans lequel s’inscrit aujourd’hui l’appel. Et ce contexte, c’est celui de la situation de la foi dans notre société. S’il y a crise des vocations aujourd’hui, c’est peut-être parce qu’il y a une autre crise, plus profonde, qui est celle de l’être chrétien.

I - La foi interrogée

Qu’est-ce qui a changé, depuis quelques décennies, et particulièrement depuis le concile Vatican II, dans notre vision de la vocation et des vocations ? C’est surtout la reconnaissance que la vie chrétienne elle-même, en tant que telle, est placée sous le signe de l’appel. Cela n’aurait pas dû être une découverte, si nous avions été des lecteurs familiers des lettres de Paul, de Pierre, de Jean, de Jude, qui nous rappellent à l’envi que nous sommes des appelés. Nous les compagnons de l’Agneau de l’Apocalypse, nous sommes « les appelés, les choisis, les fidèles ».

Or être appelé suppose un mouvement, un déplacement, du moins pour celui qui répond à l’appel : l’apôtre Pierre nous dit que nous sommes appelés « des ténèbres à son admirable lumière » (1 P 2, 9). Et Paul, dans la lettre aux Romains, souligne que nous sommes appelés d’entre les juifs ou d’entre les païens. Dans les régions où la foi chrétienne est depuis longtemps le lot commun, il est plus difficile, d’un point de vue psychologique, de mesurer d’où nous venons. Là où la non-croyance, l’indifférence, sont marginales, on est moins sensible au caractère inouï du don qui est communiqué. Par contre, les catéchumènes ou les « recom­mençants » expérimentent l’éblouissement de la foi. Ils savent d’où ils viennent : « J’avais été et je reste éblouie » disait Madeleine Delbrêl quelques semaines avant sa mort. Rien n’est plus contraire à la foi que d’être des habitués de la foi.

C’est peut-être parce que nous étions des habitués de la foi que notre foi a pu être ébranlée lorsqu’il est apparu qu’être chrétien n’était plus le fruit automatique de la transmission d’un héritage, mais le fait d’une réponse personnelle à un témoignage. Et ni le témoignage ni la réponse n’allaient de soi parce qu’il n’allait pas de soi d’être chrétien. Cela relevait d’un choix. Et comme ce choix est vital et exigeant, il fallait qu’il soit provoqué par la prise de conscience que le message chrétien est de l’ordre d’une bonne nouvelle pour ce monde précis dans lequel nous sommes.

Cette prise de conscience est sans doute plus difficile lorsque la foi est vivement questionnée : la mise en cause de la foi peut avoir des effets délétères. Mais elle peut au contraire stimuler la foi : « Milieu athée, circonstance favorable à notre propre conversion », c’est le sous-titre que Madeleine Delbrêl - que je viens déjà de citer - donnait à la dernière conférence qu’elle prononça en septembre 1964 devant des étudiants parisiens. Ce qui advient à la foi chrétienne aujourd’hui nous invite tous à redécouvrir avec des yeux neufs la nouveauté de l’Evangile pour notre monde.

1. Une attitude positive devant le réel à vivre

Cela suppose de faire nôtre toute une série d’attitudes, et d’abord de nous situer positivement devant le réel qui nous est donné à vivre. Or souvent, nous sommes d’abord sensibles à la perte que constitue la situation d’aujourd’hui par rapport à celle d’hier. Nous risquons non pas tant peut-être de regretter le passé, (nous savons ce qu’il portait d’ambigu), que d’être ébranlés par ce qui meurt plus qu’éveillés par ce qui naît ; nous risquons d’être découragés par la difficulté de l’annonce de la foi aujourd’hui. Car c’est souvent que nous sommes en face du « nous t’entendrons là-dessus une autre fois » auquel se heurtait saint Paul dans sa rencontre avec les Athéniens.

Ce que nous regrettons, c’est moins en effet le passé comme tel que la facilité au moins apparente avec laquelle la foi pouvait se dire ; le langage de la foi faisait partie du langage immédiatement disponible, il était tissé dans la trame de nos relations quotidiennes. Aujourd’hui, il apparaît comme étrange et c’est nous qui sommes des étrangers ; il n’est pas facile d’accepter sa condition d’étranger, surtout lorsqu’on est convaincu que la foi à laquelle on adhère est un facteur d’humanisation de ce monde. On vient témoigner d’une figure d’humanité que les autres récusent. C’est encore plus difficile quand on appartient à une région comme la nôtre ; il faut beaucoup de courage et un peu d’humour pour accepter de devenir un étranger chez soi. Mais en même temps, nous savons bien que toutes les tentatives pour adapter la foi, au sens de la modeler sur les opinions courantes, ne servent qu’à la diluer un peu plus.

2. La foi fragile et sûre

Je ne dis pas qu’il faut se réjouir de cette situation ; des expressions comme : « Nous sommes peu nombreux, mais nous sommes des convaincus », cachent parfois des désirs de pureté qui ne sont pas eux-mêmes très purs. Je dis qu’il faut accueillir ce réel et ne pas s’étonner de la fragilité de la foi en ce monde. C’est un des paradoxes de la foi qu’elle peut être fragile et solide en même temps, sans cesse mise en question et sans cesse reçue de Dieu ; ce qui suppose une attitude d’humilité profonde, dans la conscience de notre propre faiblesse et en même temps du don inouï que Dieu nous fait au long des jours. Telle est, me semble-t-il, la condition de la foi en ce monde. Si nous la vivons ainsi, nous échapperons au triomphalisme qui produit les dérives sectaires, mais nous échapperons aussi au complexe de l’étranger qui refuse son étrangeté, l’assurance qui nous est donnée ne vient pas de nous mais d’un autre, un autre que le monde n’a pas reconnu mais qui lui est pourtant, nous le croyons, plus présent et plus intime à lui-même que lui-même, pour laisser retentir ici l’écho de la parole de quelqu’un qui avait beaucoup lutté avant d’accepter de recevoir la foi.

En quoi cela concerne-t-il la question des vocations ? Tout simplement parce que celle-ci se pose au cœur d’un dialogue, celui que nous avons avec les jeunes. Il est donc essentiel que nous soyons bien ajustés dans notre attitude de foi si nous voulons que ce dialogue soit bien vécu, si nous voulons accueillir les questions et les doutes des jeunes et être en même temps à leurs yeux des témoins de la foi, constituer pour eux les repères dont ils ont besoin, c’est-à-dire des hommes et des femmes dont l’humanité est épanouie par la foi. Car l’Evangile devient crédible à ces deux conditions : qu’il ne cherche pas à s’imposer comme une évidence méprisante d’une part, et d’autre part qu’il ouvre chez les croyants un espace où l’être humain à la fois se dépasse lui-même dans la rencontre de Dieu et s’inscrit dans la réalité du monde qu’il contribue à modifier.

Dans cette perspective, notre liberté par rapport au passé que nous avons pu vivre, l’accueil de la réalité qui nous est aujourd’hui donnée, seront facteurs de liberté pour les jeunes qui, eux, n’ont pas connu cette foi inscrite dans la vie sociale dans laquelle ont baigné les générations qui les précèdent.

Ensuite, ces jeunes demandent à être accueillis dans leur diversité étonnante et qui prend sans cesse des formes nouvelles. Diversité marquée par une recherche d’identité parfois éperdue, qui les fait passer par des expériences multiples, parcourir des itinéraires dont la cohérence est difficile à saisir, se crisper aussi de temps en temps sur des formes religieuses qui nous étonnent. Il faut aujourd’hui à un jeune, nous le savons bien, beaucoup de temps pour trouver cette liberté intérieure qui va lui permettre de se donner vraiment. Et s’il ne trouve pas chez les adultes que nous pensons être l’écoute et la patience, sa quête d’identité ou bien deviendra encore plus anarchique ou bien se durcira dans des modèles qui ressembleront plus à des carapaces qu’à des colonnes vertébrales. Et seule la foi humble, la foi qui sait se recevoir comme un don, seule cette foi humble, patiente et forte en même temps, est capable d’être attrayante.

3. La foi comme défi

Le chrétien n’a pas à craindre son étrangeté en ce monde. La différence qu’il pose, et qu’il ne peut pas ne pas poser s’il veut être fidèle à l’Evangile, n’est pas un retrait, une mise à l’écart, elle est une question, elle est un défi. On parle souvent du défi comme étant celui que notre société pose à l’Evangile. On dit alors que notre foi doit relever les défis de ce monde. C’est vrai que nous sommes sans cesse interrogés ; c’est d’ailleurs un des ressorts de la foi que de pouvoir s’exprimer et se vivre de manière neuve à chaque étape de l’histoire, c’est une preuve de la nouveauté toujours renaissante de la Résurrection ; devant l’interrogation, la foi fait preuve de sa fécondité ; mais parfois nous nous sentons même accusés : Le christianisme en accusation, c’est, vous le savez, le titre d’un ouvrage, fort intelligent au demeurant. Mais celui qui se voit mis en jugement devant un tribunal risque de se sentir coupable quelque part, et celui qui se revêt d’une mentalité d’assiégé sera bientôt vaincu. Le christianisme propose aussi à la société un défi.

4. Les formes du défi

Sous quelles formes se présente ce défi ? Il y en a beaucoup. J’en évoque trois ou quatre particulièrement, seulement pour proposer l’ouverture de quelques champs de réflexion qui mériteraient d’être explorés.

a) Le premier concerne le rapport de la personne et du groupe dans une société où la personne est seule habilitée à dire le sens de ce qu’elle entreprend et où elle est devenue la mesure unique de ses actes, quitte à négocier avec ses voisins pour éviter au moins de leur nuire, la foi chrétienne tient ensemble la valorisation de la personne et son appartenance à un corps. Pour nous chrétiens, il n’est pas contradictoire d’être pleinement nous-mêmes et d’être membres d’un corps. Nous allons même jusqu’à croire que nous ne sommes pleinement nous-mêmes qu’en étant membres d’un corps, avec ce que cela comporte d’ouverture à l’autre et d’acceptation que l’autre intervienne dans ma vie, au nom d’un Autre. Nous faisons le pari que nous pouvons faire partie d’un corps sans être dépersonnalisés, mais au contraire en étant pleinement nous-mêmes. Et notre foi en un Dieu Trinité n’est pas étrangère à cette conception de la personne.

b) Pour comprendre cela plus profondément, il faut poser une deuxième forme de défi, celui de la liberté trouvée dans l’accomplissement de la volonté d’un autre, qui est Dieu. Ceci n’est possible que si la volonté de Dieu va dans le sens de notre bonheur, de notre véritable vocation, que nous résistons à reconnaître. Nous résistons à croire que notre vocation consiste à aimer, à servir, et que nous ne pouvons vraiment nous accomplir comme personnes que dans le service de l’autre, sans réserve, dans l’oubli de nous-mêmes de plus en plus total. Ce n’est pas un petit paradoxe dont saint Paul nous a faits les témoins quand il nous a dit, dans la lettre aux Galates : « Frères, c’est à la liberté que vous avez été appelés, mais que cette liberté ne tourne pas en prétexte pour la chair ; mais par la charité, mettez-vous au service les uns des autres » (Ga 5, 13). La liberté évangélique consiste donc à aimer et à servir, et Jésus-Christ en est le parfait exemplaire. Il n’est donc pas contradictoire de faire la volonté de Dieu et de s’accomplir soi-même. Il n’est pas sûr que nous mesurions à sa juste mesure le caractère violent de ces paroles, à toutes les époques de l’histoire et aujourd’hui particulièrement ; Madeleine Delbrêl disait que la foi est « un état violent ». Mais cette violence, au cœur d’une civilisation marquée par le plaisir, voire « la tyrannie du plaisir », pour reprendre le titre d’un ouvrage récent, vient aussi rejoindre une générosité, une capacité de don, qui s’exprime parfois sous forme de révolte, mais qui est latente, nous le savons bien, dans les jeunes générations.

Tout cela n’est sans doute pas sans importance pour l’appel aux vocations dites spécifiques et pour l’accompagnement de ces vocations.

Les jeunes en effet baignent dans une civilisation marquée par le libéralisme et l’individualisme, et cela ne facilite pas leur engagement au sein d’un corps ; cependant, ils ne sont pas sans vivre de fortes solidarités qui d’ailleurs parfois aliènent leur liberté. Il y a là tout un champ de réflexion possible, et aussi tout un champ d’expérimentation. Or l’Eglise ne manque pas d’expérience pour permettre aux personnes, dans des pratiques concrètes de vie et de réflexion en équipe, en groupe, en conseil, d’être elles-mêmes en vivant une vraie solidarité de corps. La pratique du discernement spirituel va aussi bien sûr dans ce sens. Nous savons éduquer à cette manière de vivre le rapport personne-groupe. Et nos pratiques ont un enjeu considérable, y compris sur le plan social. Ici, la vie en Eglise ne peut se séparer de ses enjeux missionnaires. Témoins du Christ, nous sommes aussi témoins d’une certaine manière de vivre ensemble que nous proposons à l’humanité. Il est clair que l’éducation à la vie en Eglise fait partie de la culture des vocations, puisque s’orienter sur un chemin vocationnel c’est chercher et trouver sa place dans l’Eglise.

J’ouvre ici simplement une parenthèse qui peut permettre d’expliquer certaines difficultés à s’engager, difficultés qu’il faut mettre au jour et dont il faut bien accepter de discuter. N’oublions pas que le statut social des vocations que nous appelons spécifiques renforce la visibilité de l’appartenance à l’Eglise : un chrétien est visible, un religieux, une religieuse, un prêtre sont plus « visibles » ; ce dernier est même responsable de la cohésion du corps, et cela peut faire peur. Il peut apparaître plus facile de témoigner du Christ comme laïc que d’être, par son statut social même, un signe particulièrement visible de l’Eglise.

Evidemment, nous soulevons là des problèmes dont nous connaissons bien la complexité, mais nous ne manquons pas de moyens pour les appréhender. Les services de vocations sont pour cela des lieux privilégiés, parce que vous vous situez exactement à la charnière d’une réflexion plus théorique et d’une réflexion pédagogique ; la réflexion théorique à cause de la formation que vous avez reçue ; la réflexion pédagogique parce que vous êtes en contact avec le terrain. J’ai envie de vous dire : ne sous-estimez pas vos possibilités. La tâche qui vous est confiée est une tâche de longue haleine. Elle suppose un investissement à long terme. Les fruits à venir ne seront pas l’effet de recettes découvertes par hasard, ils seront le produit d’un travail où vous aurez su engager avec vous les communautés chrétiennes avec toute leur expérience.

J’ai parlé déjà à plusieurs reprises des moyens dont nous disposons. Je pense entre autres aux procédures d’initiation à la vie chrétienne dont les jeunes sont avides aujourd’hui, car ils ont besoin non seulement de savoirs mais de savoir-faire ; savoir-faire dans le domaine de la prière, savoir-faire dans le domaine du discernement personnel, savoir-faire dans le domaine de l’écoute mutuelle pour chercher et trouver ensemble la volonté de Dieu. Les jeunes veulent apprendre non seulement par leurs facultés intellectuelles, mais ils veulent apprendre à entrer en relation avec Dieu par l’expérience. Et encore une fois nous ne manquons pas d’expérience.

c) Je reviens à ce que je disais tout à l’heure sur la liberté comme don de soi, avec ce paradoxe que l’expérience de cette liberté passe par l’accomplissement de la volonté d’un Autre, qui d’ailleurs ne fait que tenir fermement devant moi ma vocation véritable, ce pour quoi j’ai été créé, ce à quoi j’ai été appelé. Ici, nous voyons bien que nous touchons à des questions extrêmement délicates aujourd’hui, entre autres, celle du rôle de la loi, de l’interdit ; avec cette interrogation qui nous est renvoyée : comment faire pour que les exigences de l’Evangile soient exprimées et perçues comme des appels à vivre et à faire vivre et non pas comme des négations mortifères. Je n’y insiste pas parce que nous savons tous l’importance de cette dimension dans le dialogue avec des jeunes et la difficulté qu’elle représente : nous ne pouvons pas échapper à la phase de contradiction ou même de révolte, tant certaines exigences viennent contrecarrer violemment une culture de l’être soi et de l’être bien dont les aspects narcissiques ne nous échappent pas. L’altérité n’est pas facile à affronter aujourd’hui. Mais la rencontre de l’autre avec tout ce que cela suppose d’acceptation de mise en question de moi-même est possible à vivre à condition que s’établisse la confiance.

Et là, je viens de prononcer un mot-clef, et d’ouvrir le champ d’un autre défi. Notre monde est dur. On ne donne pas sa confiance spontanément ; on exige souvent que l’autre ait fait ses preuves. Mais pour marcher avec quelqu’un dans la confiance, il faut commencer par accepter les limites de l’autre et croire qu’il porte en lui des possibilités qu’il n’exprimera que grâce à la confiance qui lui est faite ; il faut aussi être capable de lui pardonner et de se laisser pardonner par lui. Il faut enfin accepter de changer sous les questions de l’autre ; si je veux construire quelque chose avec d’autres, je ne peux pas purement et simplement rester sur mes positions et conserver intactes toutes mes attitudes. Nous savons combien ces remarques très simples sont pourtant essentielles dans la vie des couples, dans la vie des groupes, et combien elles sont souvent mises à mal. Le lien social est à base de confiance, de dialogue. Et là aussi l’Eglise n’est pas sans expérience ; elle dispose en particulier de la merveilleuse expérience du pardon, du ministère de la réconciliation, plus large que le sacrement mais qui l’inclut, et dont nous n’exploitons sans doute pas toutes les possibilités.

On devine les conséquences de cette dimension de la confiance sur notre pratique de l’appel, en particulier dans l’accompagnement des vocations, mais aussi en ce qui concerne la fidélité et l’engagement définitif, aussi bien dans le mariage que dans la vie consacrée ou le ministère diaconal ou presbytéral. Il n’y a pas de fidélité sans confiance, il n’y a pas d’engagement sans confiance, non pas comme on dit parfois la confiance en l’avenir (ce qui pourrait être simplement une forme d’optimisme humain) mais la confiance en quelqu’un dont je sais qu’il ne me manquera pas et qu’il est le premier à me faire confiance et à être fidèle.

Cette confiance et cette fidélité de Dieu sont médiatisées pour ceux qui s’engagent par une communauté chrétienne, par une congrégation, par un presbyterium, par un conjoint et un entourage familial et amical pour le mariage. Cette expérience de confiance et de fidélité est nécessaire pour un engagement. Et là encore, nos pratiques ecclésiales sont à la fois sollicitées et interrogées.

En soulignant ces différents points, je cherche à exprimer une vérité très simple : la foi se traduit dans des manières d’être ensemble, dans des savoir être, des savoir-faire, des savoir construire ensemble. C’est dans la mesure où elle les met en œuvre d’une manière qui sert vraiment l’humanité que des personnes, et particulièrement des jeunes, trouveront le goût de consacrer leur vie pour ce service.

J’ai essayé de montrer, dans cette première partie de l’exposé, que les questions auxquelles sont confrontées aujourd’hui les vocations dites spécifiques ne sont pas autres que celles auxquelles est confrontée la vocation chrétienne elle-même. J’ai souligné entre autres la condition de foi dans notre société non pas comme des assiégés, mais comme des gens qui ne manquent ni d’expérience, ni de savoir-faire, ni de propositions, et dont la foi est capable d’interroger ce monde, à condition de vivre cette foi humblement, dans la conscience du don inouï qui nous est fait.

 

II - L’Eglise recomposée

Je voudrais maintenant aborder une autre dimension de notre réalité, parler plutôt du point de vue de ce qui se passe dans l’Eglise. Mais ce n’est pas autre chose dont je vais parler, car il s’agit toujours de la manière dont l’Eglise s’articule avec le monde.

Lorsque des gens s’adressent à l’Eglise aujourd’hui pour un mariage, un baptême, une sépulture, ils découvrent un visage de l’Eglise très différent de celui qu’ils auraient rencontré il y a seulement dix ans. Ils se trouvent souvent devant des interlocuteurs laïcs qui exercent à leur égard certaines des fonctions que les prêtres exerçaient autrefois. Ceux-ci interviennent à un autre titre, d’une manière d’ailleurs diversifiée, ce qui peut être assez troublant, car cela manifeste les tâtonnements à travers lesquels les prêtres essaient de trouver peu à peu une nouvelle manière de se situer et d’exercer leur ministère propre. Nous sommes là devant un changement considérable ; considérable pour les gens de l’extérieur, il ne l’est pas moins pour les prêtres et pour les laïcs eux-mêmes ; ces derniers ne rendent plus service aux prêtres, comme c’était le cas autrefois, ils exercent des responsabilités qui leur reviennent normalement ou qui leur sont confiées au titre de leur baptême et de leur confirmation. Même si les fonctions qu’ils remplissent ont besoin d’être régulées, même si leurs aptitudes ont besoin d’être discernées (ce qui vaut pour toute fonction dans l’Eglise), ce n’est plus par concession à leur bonne volonté qu’ils sont invités à prendre des responsabilités dans l’Eglise, mais simplement parce qu’ils sont chrétiens. Ceci est un acquis sur lequel on ne reviendra pas. Un partenariat entre prêtres et laïcs s’est désormais établi et qui durera. Même lorsqu’ils remplissent des tâches de suppléance, c’est bien à une réelle participation à l’exercice de la charge pastorale qu’ils sont appelés (même si c’est de manière limitée et déterminée dans le temps).

Mais tout de suite, il faut compléter ce tableau trop sommaire. A côté des prêtres, il y a désormais des diacres permanents ; ministère complètement nouveau, puisqu’il n’était plus exercé dans l’Eglise catholique romaine depuis des siècles ; ministère particulier puisqu’il s’accommode aussi bien d’un statut de célibataire que d’un statut d’homme marié ; d’un statut de permanent d’Eglise que d’un statut professionnel ordinaire (ce qui aux yeux de certains fait toujours classer les diacres parmi les laïcs ; cette erreur montre bien comment on identifie souvent le ministère et le statut). Les gens qui sont peu au courant de nos fonctionnements ecclésiaux s’y retrouvent difficilement. Les diacres eux-mêmes ont de la peine à se frayer un chemin entre des laïcs très actifs et des prêtres qui leur reconnaissent plus ou moins une place dans le dispositif pastoral. Au moins le diaconat a cette chance pour son évolution positive que l’Eglise se préoccupe d’appeler nominalement des hommes chez lesquels on reconnaît des aptitudes pour ce ministère. Le diaconat se développe donc avec assez de bonheur, mais aussi avec un certain flou quant aux fonctions des diacres, en tout cas des différences d’appréciation selon les diocèses et selon les pays.

Et il y a aussi les différentes formes de vie consacrée : instituts séculiers, laïcs consacrés sous une forme plus personnelle (ce qui ne veut pas dire non ecclésiale), religieux et religieuses. Limitons-nous, par manque de temps, à cette dernière forme de vie. Nous voici également devant un univers en pleine évolution : nous trouvons des religieuses pleinement engagées dans la vie pastorale et qui exercent des ministères laïcs, d’autres qui vivent une présence communautaire discrète dont on n’évalue pas à sa juste mesure l’importance, en particulier dans les milieux populaires. A mon avis, la diminution considérable, inévitable à moyen terme, en raison de la crise des vocations, du nombre de ces petites communautés disséminées dans les banlieues, va constituer une perte considérable ; pour le témoignage que l’Eglise porte au Christ dans les milieux très éloignés d’elle, et aussi pour les communautés humaines pour lesquelles cette présence est un facteur important de lien social. La crise des vocations dans les congrégations religieuses me paraît sur ce plan largement aussi lourde de conséquences que la crise des vocations presbytérales, même s’il ne faut pas minimiser l’importance de celle-ci. La discrétion de ces petites communautés fait qu’on prend hélas trop facilement son parti de leur disparition. On ne peut que souhaiter que des jeunes femmes soient davantage interpellées par la vie parfois héroïque de ces religieuses souvent âgées, qui acceptent de vivre, dans des conditions difficiles, une présence ouverte à toute détresse et à toute différence culturelle et religieuse.

Quoi qu’il en soit, nous sommes dans un paysage en pleine restructuration, auquel il faut d’ailleurs ajouter les communautés nouvelles, qui sont des associations de fidèles, dont les membres peuvent avoir différents statuts.

Il faudra des années pour parvenir à une certaine stabilité des rôles, des fonctionnements et du vocabulaire. Il ne faut pas s’étonner du flou relatif dans lequel nous sommes aujourd’hui plongés. Nous constatons que, peu à peu, le paysage prend une forme plus nette. Il convient sans doute qu’au cœur de toute cette évolution, nous gardions quelques idées claires et quelques orientations suffisamment larges pour ne pas bloquer les avancées encore à venir. Essayons d’en définir quelques-unes.

1. Une manière nouvelle de vivre l’Evangile

Tout d’abord, il convient, me semble-t-il, de se rappeler que les réorganisations pastorales ne constituent pas le terme de la réflexion sur l’évangélisation de notre société. Qu’elles aient été effectuées de manière plus systématique ou qu’elles cherchent à se définir de façon plus pragmatique, elles étaient et elles sont nécessaires ; elles vont faciliter et elles facilitent déjà une meilleure répartition des forces pastorales, une meilleure visibilité ecclésiale, une meilleure adaptation à l’évolution du tissu rural et urbain.

Mais nous savons bien que l’objectif n’est pas de reprendre les mêmes pratiques en les vivant à un échelon géographique supérieur. Il s’agit de trouver des manières nouvelles de vivre et d’annoncer l’Evangile. Je voudrais sur ce point rappeler simplement l’insistance du concile Vatican Il, dans le décret Presbyterorum Ordinis, sur le discernement des signes des temps que les prêtres sont invités à effectuer avec les laïcs. Il me semble que, dans les communautés chrétiennes, d’une manière qui sera à trouver en fonction des lieux et des possibilités, nous aurons à promouvoir une réflexion sur ce que vit notre société pour le confronter à l’Evangile ; alors nous pourrons prononcer une parole, alors nous pourrons entrer en débat avec les gens (et pas seulement les chrétiens) sur des questions qui les concernent, alors nous pourrons proposer quelque chose de la foi. Je crois qu’on n’a pas accordé assez d’importance à cette question du discernement pourtant très présente dans le décret Ministère et vie des prêtres. Le discernement est la médiation nécessaire d’une annonce de l’Evangile adaptée aux conditions concrètes de notre société. Il est aussi un moyen nécessaire pour que soit maintenu dans les communautés chrétiennes un esprit missionnaire qui tienne compte des conditions concrètes dans lesquelles vivent nos contemporains les plus proches.

Je me permets d’insister sur ce point aussi parce qu’il conditionne à mon sens, pour une part, le type de prêtre dont nous avons besoin pour aujourd’hui et demain. J’y reviendrai tout à l’heure. Mais nous savons bien que réorganiser ne suffit pas. Encore faut-il que, dans cette réorganisation, nous soyons capables d’aller au cœur du mystère de l’Eglise. Et qu’est-ce que cela veut dire « aller au cœur du mystère de l’Eglise », sinon faire œuvre de révélation, c’est-à-dire dévoiler le mystère du salut présent au cœur du monde en Jésus-Christ, montrer la pertinence de ce mystère aujourd’hui, montrer comment il nous rejoint au cœur de notre existence partagée avec nos contemporains. Cela suppose que nous en vivions assez pour le proposer au monde, mais cela suppose aussi que nous accueillions ce monde avec assez d’ouverture critique pour le lui dire avec justesse. Le discernement, interprété comme nous y invite Vatican II comme le fait de « lire dans les événements petits ou grands » ce que Dieu attend de nous, prend donc la forme d’une clef théologique de la pastorale, car il permet à celle-ci non pas seulement d’organiser au mieux la vie de l’Eglise, mais de proposer la foi par une parole et une attitude adaptées. A ce niveau, nous vivrons l’Eglise dans son mystère, et qui que nous soyons, laïcs, diacres, prêtres, ou dans un état de vie consacrée, nous répondrons à l’appel à vivre l’Evangile au milieu de ce monde pour l’annoncer. C’est un enjeu essentiel pour la mission de l’Eglise.

2. Un appel à la foi

La seconde orientation est un appel à la foi. La vie consacrée et le ministère presbytéral sont chacun, au titre qui leur est propre, essentiels à la vie de l’Eglise, mais pas sous le même rapport.

Le ministère presbytéral est essentiel à la vie de l’Eglise, parce qu’il appartient à la structure sacramentelle de l’Eglise ; il est reçu dans un sacrement particulier, le sacrement de l’Ordre. Son rôle est de rendre visible pour nous (avec l’épiscopat et le diaconat) la présence du Christ Pasteur qui rassemble, fait vivre et grandir son Eglise. On peut suppléer provisoirement à un manque de prêtres, on ne peut pas remplacer les prêtres. Une Eglise sans prêtres n’est pas envisageable, non pas parce qu’il faut des permanents à toute organisation durable, mais parce que le Christ Pasteur, selon l’économie sacramentelle qui fait partie de la foi catholique, doit être représenté. En ce sens le ministère ordonné est un donné de la foi.

Pour la vie consacrée, sous ses différentes formes, et en particulier la vie religieuse, il s’agit évidemment d’autre chose, puisque la vie consacrée est un des modes de réalisation de la vie baptismale. Mais ici encore, c’est l’expérience ecclésiale qui nous guide : assez rapidement, des chrétiens sont apparus qui ont décidés de vivre un certain type de rapport aux biens, au corps, et à la maîtrise de leur vie. Non seulement, ils ont décidé de posséder comme ne possédant pas, ce qui est le statut de tout chrétien, mais ils ont décidé de ne pas posséder, comme pour manifester dans leur vie que l’appel adressé à tout chrétien est radical, c’est-à-dire que dans l’état de ressuscité, notre seul bien est Dieu. Ils ont donc cherché à anticiper le Royaume à venir, dans les limites de notre condition terrestre. Non seulement ils ont décidé de se soumettre à Dieu dans les événements de leur existence et dans la rencontre des autres, mais ils ont voulu abandonner la maîtrise de leur vie au sein d’une communauté. Non seulement ils ont décidé de respecter l’autre, de ne pas le posséder dans la relation conjugale, chasteté à laquelle sont appelés les gens mariés, mais ils ont voulu vivre dans le célibat, ne pas avoir de descendance charnelle, parce que dans la vie de ressuscité il n’y a pas de relation conjugale. Bref, il s’agit de manifester dans une vie ordinaire d’hommes et de femmes la puissance de la résurrection du Christ d’une autre manière que le manifestent la plupart des chrétiens.

L’expérience montre que le rapport entre ces diverses manières de manifester la puissance de la résurrection du Christ est fécond. Elles s’interpellent mutuellement. Elles s’entraident mutuellement. En ce sens là, les chrétiens qui ont choisi de mener la vie consacrée aident les autres à mieux entendre l’appel de l’Evangile, et vice versa. C’est pourquoi, la vie consacrée, sous ses différentes formes, doit se maintenir dans l’Eglise pour que l’appel évangélique soit entendu dans toute sa force.

Tout cela pour dire que, à des titres divers, nous ne pouvons pas baisser les bras devant la crise des vocations. C’est pourquoi je parlais d’appel à la foi. Il revient aux communautés chrétiennes de se rapproprier cette nécessité du ministère presbytéral et cette importance majeure de la vie consacrée pour que l’appel soit porté et entendu. Je dis bien « aux communautés chrétiennes » ; pas seulement aux prêtres, pas seulement aux congrégations religieuses, mais à tous les chrétiens, parce que ce sont tous les chrétiens qui sont concernés par l’existence de la vie consacrée et du ministère presbytéral. Il y va de la vie et de la mission de l’Eglise.

3. L’articulation des différents ministères

Ici, il convient de nous entendre sur les mots. Il y a deux tendances aujourd’hui dans l’Eglise de France au sujet du mot ministère : une tendance qui souhaiterait le réserver aux ministères ordonnés, de façon à mieux marquer la spécificité de ces derniers. Une autre tendance représentée entre autres par l’ouvrage publié récemment sous la responsabilité de Mgr Doré et du Père Maurice Vidal, Les ministères dans l’Eglise, préfère parler des ministères en général pour distinguer : les ministères de laïcs et les ministères accomplis par les ministres ordonnés, au titre de leur ordination, épiscopale, presbytérale, diaconale. C’est ici qu’est posée la question de la spécificité des ministères ordonnés. Dans la mesure où les ministres ordonnés exercent le pastorat, on peut dire, en reprenant une expression désormais admise, qu’ils sont « responsables de la responsabilité de tous ». C’est une donnée de base dans la pratique ecclésiale : il y a toujours une tension entre tous et quelques-uns. Tous sont responsables. Quelques-uns sont responsables de la responsabilité de tous.

Les prêtres, collaborateurs des évêques, président à la communauté (c’est pourquoi ils président à l’Eucharistie qui rassemble et constitue la communauté comme communauté chrétienne), la question étant de savoir quelles formes particulières peut revêtir aujourd’hui cette présidence, (en entendant ce mot présidence au sens de responsabilité globale de la communauté).

Pour ma part, je pense que nous avons besoin de prêtres qui soient capables d’une part d’aider les chrétiens à opérer ce discernement dont je parlais plus haut, avec sa dimension missionnaire, et d’autre part de favoriser la communion au sein de la communauté (communion interne, et communion externe, c’est-à-dire ouverture au diocèse et à l’Eglise universelle). Je ne dis pas que c’est le seul type de prêtres possible, je ne dis pas non plus que tous les prêtres doivent avoir ces aptitudes immédiatement au sortir du séminaire ; je dis qu’il faudrait tendre dans cette direction, car cela me paraît une des conditions pour la vitalité des communautés chrétiennes demain. Je ne pense pas que nous ayons d’abord besoin de célébrants qui soient uniquement des célébrants (même si cette question de la célébration de l’Eucharistie n’est évidemment pas à minimiser) ; la célébration de l’Eucharistie est liée à l’ensemble de la vie de l’Eglise et de son témoignage, et il me semble que nous avons besoin de prêtres qui célèbrent l’Eucharistie en intégrant les dimensions que je viens d’évoquer.

Mais vous voyez que, si les communautés ne peuvent pas déployer leur vie chrétienne sans les prêtres, ceux-ci ne pourront pas exprimer leur ministère sans les chrétiens. S’ils doivent stimuler le discernement missionnaire et l’esprit de communion, ils seront aussi stimulés par ce que les chrétiens vivront de ce discernement, de cet esprit apostolique et de cette communion. Le ministère des prêtres est nourri de la Parole et de l’Eucharistie ; il est nourri également de l’œuvre de l’Esprit qui agit dans les chrétiens.