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Notre prière pour les vocations
Alors qu’il était Recteur Majeur des Salésiens, Don Egidio Viganò publiait cette lettre à l’ensemble de ses confrères. Il la signait à Rome le 26 juin 1992, en la fête du Sacré-Cœur. Il leur explique, dans l’introduction (qui n’est pas reproduite ci-dessous) que l’une des préoccupations les plus vives du conseil supérieur est celle des vocations. Après une lettre sur les vocations (ACG 339) où il insistait déjà sur la prière, il les invite à prendre la peine de réfléchir sur "notre prière pour les vocations".
Salésien de Don Bosco
L’Esprit-Saint est plus puissant que le laïcisme
Dans la société actuelle qui recherche avant tout l’efficience, il reste peu de place pour la prière, comme si c’était improductif et du temps perdu. En réaction contre cette mentalité erronée, il s’est manifesté dans l’Eglise un réveil important de la pratique de la prière. Nous sommes appelés, nous aussi, à réactualiser notre identité de consacrés par un puissant réveil de la prière salésienne.
Nous pouvons affirmer sans hésiter que, sans vraie prière, tout charisme dépérit. Par conséquent la première stratégie à employer pour vaincre le laïcisme, c’est de relancer la prière personnelle et communautaire. Il ne s’agit pas pour nous de cultiver une simple sorte d’intimisme, mais la contemplation réaliste qui nous met en dialogue avec Dieu : objectivement présent dans la création et dans l’histoire, il nous parle dans le contexte de la vie. Dieu n’est jamais muet.
Il s’agit d’être vraiment "croyants", de percevoir l’Esprit du Seigneur dans notre existence et celle des autres, d’être convaincus que méditer les interventions petites et grandes de la "Providence", comme l’appellent avec simplicité les fidèles, ce n’est pas désuet. Il est pénible d’en voir certains sourire et parler d’un "providentialisme" désormais dépassé. Lorsqu’on lit la Bible, on s’aperçoit que le personnage principal de l’histoire est Dieu. La foi tout entière se fonde sur l’existence historique de Jésus-Christ et sur les événements de sa vie ; l’Eglise est, au long des siècles, une réalité de Pentecôte sans cesse renouvelée par l’Esprit Saint qui agit en nous. [...]
Saint Paul nous a dit : "Mon langage, ma proclamation de l’Evangile, n’avaient rien à voir avec le langage d’une sagesse qui veut convaincre ; mais c’est l’Esprit et sa puissance qui se manifestaient, pour que votre foi ne repose pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu" (1Co 2,4-5). Qui de nous ne s’est senti l’instrument de l’Esprit en bien des activités de ministère, largement au-delà de ses capacités personnelles ?
Il est facile de qualifier d’" historiettes " bien des signes - petits et grands - d’interventions discrètes de l’Esprit, pour ne pas se faire taxer de "surnaturalisme" ingénu et déphasé, ce qui est certes à éviter ; mais refuser de prendre en compte telle intervention réelle de la Providence est dangereux et relève d’un orgueil subtil.
L’Esprit-Saint est objectivement actif dans l’histoire ; les méthodes scientifiques ne peuvent certes pas le rejoindre, mais un regard de foi peut y arriver. L’Esprit est présent et agissant ; se peut-il que le croyant ne puisse jamais s’en apercevoir ?
Dieu nous fait connaître sa Providence par l’Esprit : "L’Esprit Saint, dit saint Paul, voit le fond de toutes choses, et même les profondeurs de Dieu. (...) Et nous, l’esprit que nous avons reçu, ce n’est pas celui du monde, c’est celui qui vient de Dieu, et ainsi nous avons conscience des dons que Dieu nous a faits. Et nous proclamons cela avec un langage que nous n’apprenons pas de la sagesse humaine, mais de l’Esprit" (1 Co 2, 10-13).
Si nous sommes convaincus de cette présence constante de Dieu et de l’intervention permanente de sa puissance, même si c’est sous une forme douce et cachée, il sera plus facile de nous sentir poussés au dialogue quotidien de la prière.
Cette prière, par conséquent, ne sera pas un simple repli sur soi, une sorte d’aliénation de l’activité concrète, mais un dialogue suscité par l’Esprit présent et vivant dans les personnes et les événements, une écoute contemplative du réel et un ensemble de requêtes concrètes de tout confrère qui se sent activement responsable d’un travail indispensable projeté en faveur des vocations.
Comment prier pour les vocations
Un des aspects caractéristiques de l’intervention de l’Esprit du Seigneur dans l’histoire est précisément celui des vocations. Car il n’y a pas de vocation authentique sans motions de l’Esprit Saint. [...]
Celui qui a l’initiative, c’est l’Esprit Saint. C’est Lui qui ouvre notre foi pour découvrir les initiatives de Dieu et qui nous apprend à lire la chronique de tous les jours. Il faut d’abord découvrir et écouter ce que Dieu propose, et Il nous plonge ensuite dans le dialogue avec Lui.
La prière en général est un dialogue qui peut avoir mille points de vue différents parce qu’il se réfère à un Dieu admirablement fécond en initiatives dans l’immensité de l’univers comme Créateur, dans la complexité des événements humains comme Sauveur, dans la créativité de la transformation des cœurs comme Sanctificateur.
La prière spécifique pour les vocations porte sur la recherche et la préparation de ceux qui doivent collaborer étroitement avec le Christ à la construction du Royaume. Ce qui nous intéresse surtout, c’est d’être capables de percevoir et d’entretenir les initiatives de l’Esprit pour l’accroissement et la vitalité ecclésiale du charisme de Don Bosco.
Le premier modèle de la prière pour les vocations, nous le trouvons en Jésus-Christ lui-même. "Voyant les foules, il eut pitié d’elles, parce qu’elles étaient fatiguées et abattues comme des brebis sans berger. Il dit alors à ses disciples : "La moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson" " (Mt 9, 35-38).
A plusieurs reprises il nous en a donné l’exemple ; ainsi pour le choix des apôtres : "Jésus s’en alla sur la montagne pour prier, et il passa la nuit à prier Dieu. Le jour venu, il appela ses disciples, en choisit douze, et leur donna le nom d’Apôtres " (Lc 6, 12). Il nous faut souvent penser à cette nuit entière de prière avant un choix de vocation : c’est un fait extrêmement significatif qui souligne l’origine divine de la vocation et son importance pour la mission de l’Eglise.
Notre prière pour les vocations ne relève pas d’une préoccupation plus ou moins mesquine, d’une sorte d’esprit de corps pour la grandeur sociale de la congrégation. Elle est une réponse à l’invitation explicite du Seigneur et la prise en charge convaincue, joyeuse et dévouée de la vaste mission auprès des jeunes et du peuple que l’Esprit a assignée à notre fondateur comme un don apostolique pour toute l’Eglise. Et la prière pour les vocations salésiennes, elle aussi, part de la vision, comme dit l’évangéliste, des foules de jeunes affamés de vérité et d’Evangile errant comme des brebis sans berger.
La prière pour les vocations est, de par sa nature, bien plus vaste que la croissance de notre charisme : elle touche tous les "ouvriers" de l’Eglise. Nous savons que Don Bosco a voulu parmi les finalités particulières de notre congrégation celle d’un engagement constant pour toutes les vocations : "Rappelons-nous, nous a-t-il dit, que nous donnons un grand trésor à l’Eglise, lorsque nous lui procurons une bonne vocation ; que cette vocation aille dans un diocèse, les missions, ou une maison religieuse, peu importe ; c’est toujours un grand trésor pour l’Eglise de Jésus-Christ." Et dans ce but il nous a exhortés à nous sacrifier pour la promotion de toute bonne vocation : "Qu’on ne cesse jamais, faute de moyens, d’accueillir un jeune qui donne de bons espoirs de vocation. Dépensez tout ce que vous avez et, s’il le faut, allez même mendier ; et si après cela vous vous trouvez dans le besoin, ne vous tourmentez pas, car la Sainte Vierge vous viendra en aide d’une manière ou d’une autre, même par un miracle."
La prière salésienne pour les vocations a donc une destination universelle ; sa caractéristique particulière est d’émaner d’une charité pastorale engagée dans l’apostolat ; elle implique que nous partagions et prolongions les sentiments ardents que Jésus nourrissait en lui pour le salut de tous.
Mais voyons quelle prière personnelle et communautaire il nous faut cultiver dans nos maisons. Il est indispensable que la préoccupation des vocations entre explicitement, sous une forme renouvelée et intense, dans les moments de prière que nous avons l’habitude de faire, tant chaque jour qu’en certaines circonstances de notre vie communautaire. Elle doit devenir toujours davantage comme une respiration spirituelle à développer à divers niveaux.
Nous pouvons donner quelques exemples sans prétendre être complets, si nous voulons être concrets et intensifier notre renouveau à ce propos. Dans beaucoup de maisons, on a l’habitude de faire cette prière sous des formes adaptées et variées ; elles nous aident à devenir - dans notre vie personnelle et notre vie communautaire - des propositions vivantes du Seigneur qui appelle à travers notre témoignage : "Etre dans l’Eglise signes et porteurs de l’amour de Dieu pour les jeunes" (cf. Constitutions, n°2).
Au niveau personnel
Chaque confrère est appelé à se sensibiliser aux besoins qui proviennent de l’abondance de la moisson et de la rareté des ouvriers. Le cœur du salésien donnera ainsi plus de place à sa prière pour les vocations en de nombreux moments de sa journée. Ce sera une préoccupation qui accompagnera toute son union à Dieu : dans les moments de plus grande intimité, par exemple la méditation, l’action de grâce après la communion, les moments de dialogue spontané avec le Seigneur, les visites, la récitation du chapelet - je connais plus d’un confrère qui offre chaque jour au moins une dizaine de chapelet explicitement pour les vocations - dans le travail apostolique par les oraisons jaculatoires, l’offrande de ses souffrances et de ses épreuves. Les confrères malades et âgés, qui vivent dans une sorte d’"ermitage personnel", peuvent vraiment faire beaucoup à ce sujet ! Ils constituent une réserve priante, un vrai trésor caché de supplication efficace.
Au niveau de la communauté locale
Chaque maison saura trouver des activités à programmer concrètement. Il y a déjà des expériences intéressantes ; par exemple : la fixation d’un jour spécial de la semaine pour introduire l’intention pour les vocations dans toutes les prières communautaires de la journée ; l’adoration eucharistique hebdomadaire ; l’insertion quotidienne d’une supplication pour les vocations dans la louange et l’intercession des Laudes et l’intercession des Vêpres (dans le passé - et les vocations n’étaient pas aussi rares - après la lecture spirituelle communautaire on priait avec l’intention Ut bonos ac dignos operarios... [pour que tu envoies de bons et dignes ouvriers...] ; la célébration mensuelle de la messe votive pour les vocations religieuses et sacerdotales ; des célébrations spéciales de la Parole ; des rencontres particulières de prière avec les jeunes et les fidèles, etc. Ce qui importe, c’est de créer un climat communautaire et de susciter souvent la prière spéciale pour les vocations. Dans les communautés de formation, il faudra accorder un soin particulier à ce point, et donner beaucoup de relief à la prière pour les vocations.
Au niveau de la province
Il faut multiplier les programmations bien préparées pour sensibiliser les communautés locales, les suivre, encourager leurs initiatives, et les pousser vers une convergence commune à certains moments ; par exemple : la journée provinciale des vocations en proposant de la documentation tant pour l’Eucharistie que pour une célébration de la Parole ; la journée annuelle des missions salésiennes, qui offre l’occasion de programmer des engagements communs de prière. A ce niveau également, ce qui est essentiel, c’est la sensibilisation et l’intérêt pour l’animation suscité par un centre dynamique qui rappelle opportunément aux confrères une des finalités de notre mission (cf. Constitutions, n°6 et 28)
Au niveau de la famille salésienne
Il est facile de demander aux divers groupes de s’unir aux activités pour les vocations. Nous pouvons trouver des occasions particulières dans les fêtes de nos saints et de nos bienheureux : Don Bosco et Mère Mazzarello, Dominique Savio et Laure Vicuña, les martyrs Versiglia et Caravario, etc. Il faut entretenir les groupes de prière dans les Associations de Marie Auxiliatrice, des Amis de Dominique Savio, des jeunes engagés dans le Mouvement salésien des jeunes, ainsi que les initiatives spéciales de prière qui apparaissent aussi ça et là chez les parents des salésiens et des FMA, les Coopérateurs et les Coopératrices, et les groupes providentiels d’adoration. Je pense qu’en ce domaine il est possible de faire beaucoup plus.
Au niveau de l’Eglise
Il faudra savoir participer volontiers aux prières organisées pour les vocations dans l’Eglise locale. Il faut aussi rappeler le dimanche du Bon Pasteur (4e dimanche de Pâques), "Journée mondiale de prière pour les vocations" dans l’Eglise entière, qui s’accompagne toujours d’un message du Pape. Et la neuvaine au Saint-Esprit pour accompagner la venue parmi nous de l’auteur principal des vocations, pour faire apprécier la disponibilité à ses motions et savoir les discerner. La journée mondiale des missions constitue une occasion très propice. Ce sont des moments à préparer avec soin pour pouvoir en vivre toute l’intensité favorable aux vocations.
Cet éventail d’exemples nous rappelle que la prière explicite pour les vocations - dans la vie personnelle et communautaire - est nécessaire et à promouvoir avec enthousiasme.
Veiller à associer les jeunes
Il est particulièrement important et efficace d’élargir notre prière pour les vocations au-delà de la communauté religieuse et d’associer d’autres groupes de la famille salésienne et des fidèles, surtout les jeunes. La perspective de la vocation s’adresse en particulier aux jeunes et les intéresse personnellement ; elle les aide admirablement à interpréter la vie même comme une vocation, à découvrir leur place personnelle dans la construction du Royaume et à l’assumer en connaissance de cause et avec générosité. A travers la prière, la Parole de Dieu descend dans leur cœur et les motions de l’Esprit la rendent féconde : "Elle est vivante, la parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’une épée à deux tranchants ; elle pénètre au plus profond de l’âme jusqu’aux jointures et jusqu’aux moelles" (He 4, 12).
Dans la prière, le jeune apprend précisément à accueillir cette Parole et à personnaliser concrètement ses appels. C’est en elle que se vérifie le mot de Don Bosco : " En chaque jeune (...) il y a un point accessible au bien et le premier devoir de l’éducateur est de rechercher ce point, cette corde sensible du cœur, pour en tirer parti."
Ce propos trouve bien souvent des confirmations positives : comme dans l’expérience de maturation qu’est "l’école de prière", dans les rencontres et les journées du Mouvement salésien des jeunes (provinciales et interprovinciales), dans les grands rassemblements de jeunes à caractère spirituel et les journées ecclésiales de la jeunesse instituées par le pape Jean-Paul Il. Ce sont de vrais moments de grâce au cours desquels les jeunes prient volontiers et expriment publiquement leur désir d’un engagement chrétien. Il est certainement indispensable d’associer en particulier dans la prière pour les vocations les jeunes qui font preuve de plus de maturité spirituelle et d’une meilleure disponibilité pour un appel à travailler avec générosité avec le Christ.
Mais dans tout cela, il faudra savoir soigner le style de la prière : une prière vivante, dans l’esprit de l’Eglise d’aujourd’hui, qui souligne la joie de se sentir amis du Christ et la mission historique indispensable de l’Eglise dans le monde, et qui invite à la générosité et à la disponibilité.
Dans ce but il sera bon de réentendre ensemble quelques affirmations du dernier Chapitre général : "La prière est le langage qui nous est donné par l’Esprit pour nous adresser au Père (...). Elle a pris dans le passé des formes pédagogiques qui s’accordaient à la condition des jeunes d’alors. Pour nous aujourd’hui, il faut repenser des moments et des formes d’initiation adaptées." Sur la route à parcourir pour faire mûrir la foi, "la participation la plus intense au mystère de l’Eglise se réalise à travers la prière, l’écoute de la Parole et la célébration du salut." C’est au cours de ces moments d’intériorité que le jeune peut percevoir l’action de l’Esprit qui s’adresse précisément à lui ; car "la prière-méditation fait passer de la surface de la vie au cœur de celle-ci ; la personne se rencontre elle-même et entend plus facilement l’appel que Dieu lui adresse." Il faudra donc savoir donner à la prière avec les jeunes des formes pédagogiquement adaptées et profondément authentiques, qui touchent le cœur ; le Chapitre souligne précisément que "la prière salésienne sait accepter les nouvelles modalités qui aident les jeunes à rencontrer le Seigneur dans la vie quotidienne. Elle est donc souple et créative, et tient compte des orientations de l’Eglise pour le renouveau."
Les animateurs et les communautés qui ont fait l’expérience d’associer ainsi les jeunes savent que cela leur plaît et les touche en profondeur, surtout les plus engagés. Si l’Eglise a enregistré ces dernières années un retour des jeunes à la prière, il sera urgent pour nous de savoir programmer sans cesse des activités pour la promouvoir. Dans la ferveur de la prière, on fait vraiment l’expérience que l’Esprit du Seigneur est le grand auteur des vocations et que sa présence se manifeste dans le "mystère de la vocation", ce dialogue ineffable entre Dieu et le jeune qui le fait sortir de l’anonymat superficiel et des égoïsmes éphémères.
Thèmes a introduire dans notre prière
La prière salésienne ne peut se passer des activités qui viennent d’être énumérées. Mais la charité pastorale dont elle émane nous pousse plus loin. Car, nous l’avons vu, elle mûrit et se perfectionne dans cette union avec Dieu qui nous porte à vivre la charité pastorale comme des témoins actifs pour le Royaume. Elle élargit donc ses horizons sur nous et sur nos activités.
Que signifie concrètement pour nous la prière pour les vocations ? Puisque nous sommes des apôtres pour les vocations, nous avons à pratiquer une méthode pastorale et pédagogique en conséquence. La lettre circulaire Il y a encore de la bonne terre à ensemencer a proposé diverses réflexions dans ce sens. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous contenter d’exercices de piété -ils ont cependant leur valeur - mais il nous faut viser des objectifs concrets, qui supposent tout un engagement personnel et communautaire à traduire en actes. Il ne s’agira pas seulement de prier pour avoir de nouvelles vocations, mais aussi de prier et de travailler pour obtenir l’accroissement et la persévérance des vocations déjà mûries, à commencer par celles des confrères de chaque communauté, et de nous engager dans la formation permanente pour renouveler notre docilité à l’Esprit du Seigneur. [...]
Voici quelques thèmes particulièrement engageants à introduire dans notre dialogue avec le Seigneur.
Etre une communauté qui propose
Prier pour que la communauté soit un "signe" et une "école de foi", cela englobe la vitalité spirituelle de toute la pastorale des jeunes et souligne qu’elle ne peut se passer de travailler pour les vocations. Ce thème nourrira notre prière personnelle et communautaire, par exemple dans les temps forts, et suscitera même chez les confrères une véritable conversion.
Personnaliser l’itinéraire de la foi
Ici, la prière oriente notre regard et nos préoccupations vers chacun de nos destinataires, un par un ; elle rappelle que les contacts apostoliques personnels et la direction spirituelle sont nécessaires, que le sacrement de Pénitence soutient les vocations, qu’il faut amener la liberté du jeune à développer une spiritualité apostolique sentie, en travaillant le quatrième domaine du cheminement (Actes du Chapitre Général, n° 23) " vers un engagement pour le Royaume ".
Susciter des expériences qui font mûrir
Ici, la prière sollicite notre esprit d’initiative et accompagne les programmations concrètes qui aident le jeune à renforcer sa foi, son option pour Dieu, ses engagements apostoliques et missionnaires, ses expériences de groupe, en renouvelant par la prière notre mission "oratorienne ".
Savoir appeler et accompagner
Il est certain que la prière renforce tout d’abord en nous le courage d’appeler avec délicatesse et persuasion, parce que cela fait partie de la touche personnelle qu’il nous faut donner à l’éducation à la foi ; elle nous aide aussi à rester constants dans notre accompagnement amical, tant pour surmonter les diverses difficultés qui se présentent que pour développer peu à peu l’idéal chrétien de l’existence.
Les premiers responsables
Prier pour ceux qui sont appelés à exercer une action éducative particulière sur les jeunes susceptibles d’être appelés : pour leurs parents, le directeur, le provincial et ceux qui suivent personnellement les candidats.
Notre dialogue avec le Seigneur en réponse à son appel à prier pour les vocations s’enrichit, du coup, de bien des thèmes concrets. Ceux-ci élargissent le contenu de notre prière pour les vocations ; ils servent aussi à montrer que, pour nous, la prière doit se rattacher à notre activité pour les vocations, en sorte que l’une et l’autre ne fassent qu’un pour proclamer la vérité d’une union à Dieu qui explose en charité pastorale.
Mais il faut pour tout cela acquérir une nouvelle sensibilité, laisser tomber certaines habitudes devenues en fait superficielles, repenser tout en profondeur, relancer notre charisme : il faut, en un mot, opérer une conversion spirituelle et apostolique.
"La Parole de Dieu, affirment les Constitutions, nous appelle à une conversion permanente ", et la pratique du sacrement de la Réconciliation devient une exigence de notre vocation : il "nous donne la joie du pardon du Père, reconstruit notre communion fraternelle et purifie nos intentions apostoliques." Si bien que notre prière pour les vocations, projetée dans le concret d’une pastorale des jeunes féconde, nous porte vraiment, si nous sommes convertis, "à célébrer la liturgie de la vie", à faire en sorte que notre travail pour les vocations soit vraiment la prière salésienne complète.
A la prière s’ajoute encore l’esprit de mortification qui accompagne la fidélité au travail ; c’est dans le sacrifice apostolique que se reflète la vérité de la prière. A propos de cette nécessité de la mortification, le Père Albera assurait qu’elle confère de la validité à nos demandes, parce que " les désirs qui se limitent à de simples paroles coûtent peu et n’ont pas de valeur. " Il est sans doute bon de parler de théologie de la Création et de théologie de l’Incarnation, mais il est indispensable d’y joindre aussi la théologie de la croix. Nous sommes invités à comprendre avec toujours plus de profondeur la valeur, l’importance et la place centrale de la passion et de la mort de Jésus-Christ. C’est un point que Don Bosco a vécu avec générosité.
Le vieillissement, les maladies, les nombreuses souffrances, pourraient devenir des trésors très féconds s’ils étaient vécus dans une attitude de prière. Par conséquent, la relation entre la théologie de l’Incarnation et l’histoire du salut est à contempler à la lumière du mystère pascal. Parler de la mortification et de la croix n’entraîne ni le pessimisme ni la perte de la joie : c’est imiter et partager la prière de Jésus imprégnée du réalisme de l’espérance qui l’a porté à se donner tout entier lui-même sur la croix.
Le salésien en prière à la lumière de Pastores dabo vobis
Don Bosco disait que la prière est "l’œuvre des œuvres" ; elle porte à l’union à Dieu, source de charité pastorale intense et du don vital de la "grâce d’unité". Sans la prière, la synthèse entre la foi et la vie devient impossible. La prière, en effet, est une expérience personnelle de Dieu ; elle fait passer de l’écoute au partage, de la méditation à la contemplation ; elle déclenche un mouvement intérieur qui donne la première place à l’amour et nous fait entrer directement dans le cœur de Dieu, au-delà du dialogue pour devenir "amour unitif".
Nous avons vu comment saint François de Sales enseignait que la prière conduit celui qui prie à la liturgie de la vie. L’amour unitif se situe dans l’intimité de la personne et imprègne tout son être de sa capacité intrinsèque d’agir ; elle engendre dans le cœur une manière spirituelle d’être dynamique, une " participation consciente à l’amour même de Dieu à travers la donation de soi, dans la disponibilité pratique à l’œuvre du salut. Elle est une attitude intérieure de charité, tendue vers l’action apostolique, dans laquelle elle se concrétise, se manifeste, grandit et se perfectionne. " Notre prière pour les vocations devrait atteindre ce niveau-là, celui de la prière salésienne qui aboutit à l’extase de la vie et de l’action.
Les Constitutions nous disent que l’esprit salésien a comme "centre" et "synthèse" la charité pastorale et que celle-ci porte en elle un dynamisme unitif capable de transformer notre travail en prière. Don Bosco nous a enseigné à l’exprimer par le mot d’ordre Da mihi animas et le Père Rinaldi l’a magistralement traduite par l’expression " respiration pour les âmes. " C’est à cette "respiration " que doit aboutir notre prière pour les vocations, en vivant en nous les sentiments mêmes du Christ. [...]
Chers confrères, je vous invite à prendre en mains l’exhortation apostolique Pastores dabo vobis pour lire avec attention ce qu’elle affirme à propos de la charité pastorale. Les numéros 21 et suivants nous offrent un enseignement précieux et qualifié sur la "configuration à Jésus Christ Pasteur", qui constitue précisément l’idéal et l’âme de l’esprit salésien de Don Bosco.
Il est beau, et encourageant pour nous, de voir que la vie spirituelle (et par conséquent l’exercice de la prière) se situe au cœur même de l’engagement apostolique, et d’entendre affirmer que la consécration et la mission (la prière et le travail) se compénètrent essentiellement : "La mission n’est pas un élément extérieur et parallèle à la consécration, mais elle en constitue le but intrinsèque et vital : la consécration est pour la mission. De cette façon, non seulement la consécration, mais aussi la mission se trouvent sous le signe et la force sanctificatrice de l’Esprit. Il en a été ainsi de Jésus. Il en a été ainsi des Apôtres et de leurs successeurs."
Et l’exigence essentielle et permanente d’unité entre la vie intérieure et les nombreuses actions et responsabilités de l’apostolat trouve sa réponse totale et adéquate précisément dans l’énergie de la charité pastorale, à laquelle tend par elle-même notre prière.
Voyons comment le document présente cette charité pastorale. Le modèle à regarder pour en trouver les caractéristiques est le Christ Bon Pasteur, qui nous révèle l’amour de Dieu dont Il a témoigné jusqu’à ses conséquences extrêmes par le don total de lui-même dans le service, dans l’humilité et la solidarité la plus généreuse.
La charité pastorale est une participation vivante de l’intense amour sauveur du Christ : "don gratuit de l’Esprit Saint et, en même temps, engagement et appel à une réponse libre et responsable."
En regardant le mystère du Christ, on perçoit clairement que son contenu essentiel est le don total de soi dans la mission, un don sans limite, un don fait avec joie et de bon cœur, un don qui s’exprime dans la sympathie et l’amabilité parce qu’il aime ses destinataires " avec un cœur nouveau, grand et pur, avec un authentique détachement de lui-même, dans un don de soi total, continu et fidèle. Et il en éprouvera comme une "jalousie divine(cf. 2 Co 11, 2), avec une tendresse qui se pare même des nuances de l’affection maternelle ". Rappelons le mot de Don Bosco : "Il suffit que vous soyez jeunes pour que je vous aime beaucoup. Pour vous j’étudie, pour vous je travaille, pour vous je vis, pour vous je suis disposé à donner jusqu’à ma vie. "
La charité pastorale, affirme le Pape, " n’est pas seulement ce que nous faisons, mais c’est le don de nous-mêmes qui manifeste l’amour du Christ pour son troupeau. La charité pastorale détermine notre façon de penser et d’agir, notre mode de relation avec les gens. Cela devient particulièrement exigeant pour nous. " Nous pouvons dire qu’elle connote le sacrifice de toute notre existence de consacrés pour la mission salésienne ; elle trouve ainsi son aboutissement et sa source, le don de soi et la capacité de le vivre, dans l’Eucharistie qui est l’expression sacramentelle de notre incorporation existentielle au Christ.
Par conséquent, si notre prière pour les vocations tend à s’épanouir en charité pastorale, cela veut dire qu’elle doit s’étendre bien au-delà des exercices de piété. Elle nous porte à travailler pour les vocations dans toutes sortes d’activités (à commencer par celles qui ont été mentionnées plus haut) ; il s’agit de les rattacher à une authentique charité pastorale en réponse à l’appel adressé par Jésus pour les ouvriers de la moisson.
C’est ainsi que chaque confrère et chaque communauté sont appelés à donner une plus grande intériorité apostolique à leur activité et à leurs projets pour les vocations : "L’orientation des vocations, en effet, constitue le sommet et le "couronnement de notre action éducative et pastorale". Elle ne marque cependant pas le terme du cheminement dans la foi, mais une donnée présente partout, qui caractérise chaque domaine où nous intervenons et chaque étape. "
Si la prière salésienne conduit à la charité pastorale et si celle-ci se traduit, par la force de l’Esprit-Saint, en vie et en action, cela veut dire que c’est à la qualité éducative et pastorale de notre vie et à nos activités que se mesure l’authenticité de notre prière pour les vocations.
Oui, l’authenticité de la prière pour les vocations a besoin de se confirmer par notre témoignage quotidien. Et notre travail pour les vocations, pour sa part, ne sera authentique et fécond que s’il dérive vraiment d’une prière vivante, personnelle et communautaire, qui le nourrit sans cesse de sa sève.
Je pense que c’est à cela que nous pouvons mesurer la sincérité de notre prière pour les vocations. C’est une application de l’affirmation de l’apôtre Jacques : " La supplication du juste agit avec beaucoup de puissance. Le prophète Elie n’était qu’un homme comme nous ; pourtant, lorsqu’il a prié avec insistance pour qu’il ne pleuve pas, il n’a pas plu pendant trois ans et demi ; puis il pria encore une fois, et le ciel donna la pluie, et la terre produisit sa récolte " (Jc 5,16-18).
Sans prière, pas de pastorale féconde des vocations. Mais pour mener à la charité pastorale qui anime les trois pôles de la "personne", de la "communauté" et de la "présence ministérielle", la prière doit devenir un engagement quotidien de vie et d’action.
Il est symptomatique que Don Bosco ait dit avoir donné le nom d’"Oratoire" à son œuvre pour indiquer clairement que la prière est la seule puissance à laquelle nous devions faire confiance : son union à Dieu s’est manifestée en faisant l’Oratoire !
La prière de Don Bosco pour les vocations
Quand Don Bosco priait-il pour les vocations ? Il est possible de répondre à cette question par la fameuse affirmation de Pie XI au cours du procès de canonisation de notre Père. A l’objection : "Quand priait-il vu l’énorme quantité de ses occupations", le Pape a répondu : "Et quand ne priait-il pas ?" Oui : l’activité de Don Bosco pour les vocations est la mesure de sa prière pour les vocations.
Son deuxième successeur, le Père Albera, nous a laissé deux importantes lettres circulaires sur notre sujet : l’une au début de son rectorat en mai 1911 Sur l’esprit de piété, et l’autre, presque à la fin, Sur les vocations, en la solennité de Pentecôte du 15 mai 1921. On peut y voir tout le cœur de Don Bosco priant pour les vocations : "Il semblait, écrit le Père Albera, que Don Bosco était une prière continuelle, une union à Dieu jamais interrompue. A quelque moment que nous recourions à lui pour un conseil, on aurait dit qu’il interrompait ses entretiens avec Dieu pour nous écouter, et que c’était Dieu qui lui inspirait les pensées et les encouragements qu’il nous donnait."
Elle est significative, la formule "Don Bosco était une prière continuelle". Il est certain que le Seigneur écoute volontiers la prière qui se traduit par le don de soi dans la vie et l’activité de la vie ; celui qui prie participe ainsi au mystère du Christ, qui s’est fait prêtre et hostie dans le réalisme concret de son existence humaine. Chez Don Bosco, pas de fossé entre la prière et l’action : l’une et l’autre constituent les battements de son cœur ; mais la source, c’est sa prière qui a mûri en amour unitif. Il démontre son amour pour l’Eglise en se consacrant sans cesse, entre autres, à la recherche et à la formation de vocations. Il en a préparé chaque année par dizaines et a atteint un total de plusieurs milliers.
En rappelant son exemple, le Père Albera écrit : " Nous nous ferons une gloire d’être appelés chez tous les peuples, des quêteurs ou des mendiants de vocations." Il a vécu avec les jeunes en créant un milieu favorable aux vocations ; en les examinant un par un avec la préoccupation de promouvoir une vocation ; il a invoqué les lumières du Saint Esprit pour les discerner ; il a consacré un nombre infini d’heures au ministère du sacrement de la Réconciliation et guidé spirituellement bien des jeunes vers l’idéal du don de soi ; il les a enthousiasmés par la grande perspective des missions et les a associés dans des activités apostoliques concrètes. Et même dans ses fameuses excursions d’automne, il était toujours attentif à découvrir et à encourager des vocations. Il les recherchait surtout parmi les familles chrétiennes populaires, où la pratique de la foi était quotidienne.
Il accorda de l’importance au climat de piété, eut le réalisme d’éviter certains dangers du monde et de prendre soin de la pureté du cœur : il considéra la moralité comme une véritable pépinière de vocations. Il poussa Dominique Savio à fonder et à développer la Compagnie de l’Immaculée. Il orienta toute la pratique du " système préventif " vers la pastorale des vocations. Il y a toujours travaillé, sans se décourager et avec beaucoup de sollicitude, dans la conviction que le Seigneur proportionne les vocations aux besoins des temps. Nous l’avons vu, il n’accepta jamais de repousser une vocation à cause de la pauvreté du candidat et de sa famille ; il chercha toujours les moyens pour l’aider. Quand il écrivait à ses missionnaires, il insistait pour qu’ils recherchent les vocations et qu’ils en prennent soin.
L’activité qui manifeste peut-être le plus le dynamisme de sa prière pour les vocations est l’" Œuvre de Marie Auxiliatrice " pour ce qu’on appelait alors les vocations " tardives ". [...]
Les jeunes gens d’âge mûr furent des centaines. Il les appela " Fils de Marie ". Ils firent la joie des dernières années de sa vie. Le Père Philippe Rinaldi, qui avait été l’un des premiers d’entre eux et qui était devenu leur directeur peu après, l’informait périodiquement de leurs progrès.
Cette initiative avait constitué une nouveauté audacieuse dans la pastorale des vocations de l’époque : nouveauté d’âge, nouveauté d’origine ("entre la pioche et le marteau ", disait-il), nouveauté de cours adaptés, nouveauté de style de formation. Un centre qui donna des prêtres excellents et de nombreux missionnaires : "Dès que ces jeunes adultes et pleins de bon sens, deviennent prêtres affirmait-il, ils donnent beaucoup de fruit." [...]
Tout cela montre bien que l’amour de Don Bosco pour l’Eglise et le zèle de sa charité pastorale étaient très concrets : " Le Seigneur nous viendra en aide, répétait-il, si nous faisons tout ce que nous pouvons pour les vocations. "
Si dans l’union à Dieu, source de la charité pastorale, la tâche personnelle la plus intime et la plus féconde est la prière, il faut reconnaître que tout ce que notre Père a fait en faveur des vocations est la preuve la plus incontestable que vibrait sans cesse en lui une prière toute spéciale pour les vocations.
Intensifier la prière explicite
Il faut sans aucun doute retrouver aujourd’hui dans la Congrégation une prière plus intense et plus authentique pour les vocations. Il est indispensable et excellent pour l’identité de notre charisme d’insister sur la caractéristique salésienne de cette prière qui conduit à la vie.
Mais il ne suffit pas d’avoir conscience de cette valeur : il faut encore en fait vivre le charisme avec ferveur et profondeur dans les communautés.
Pourquoi avons-nous, ces dernières années, déclaré la guerre à la superficialité ? Pourquoi le Concile nous rappelle-t-il que la vie consacrée a pour but d’aider ses membres à suivre le Christ et à s’unir à Dieu ? Et que c’est pour cela qu’ils sont appelés aujourd’hui à un vigoureux renouvellement spirituel, qui doit avoir la première place même dans les œuvres extérieures d’apostolat ? N’est-ce pas parce que nous courons le risque de nous retrancher dans le travail et l’action et d’accorder plus d’attention aux activités des mains qu’à la vitalité du cœur ? L’" extase de l’action " et l’" excuse de l’action " ne sont pas synonymes. L’"excuse de l’action " peut être un piège néfaste : une caricature de l’" extase de l’action " décrite par saint François de Sales et vécue par Don Bosco.
Aujourd’hui, les temps exigent un retour plus explicite à la prière. Il s’en observe une relance authentique dans toute l’Eglise parmi les jeunes également, comme je l’ai fait remarquer. C’est une prière qui s’accorde au réveil de la foi : être des croyants engagés et pas simplement des fidèles habitudinaires, cela comporte un dialogue plus explicite, plus intense et plus fréquent avec le Seigneur. Lorsqu’on vit en climat de sécularisation, on ressent fortement la nécessité de méditer et d’approfondir la foi ; un bon nombre de fidèles - des jeunes également - sont portés à mieux écouter la Parole de Dieu et à établir un dialogue plus profond avec le Seigneur. Les religieux, qui, selon Paul VI, sont appelés à être des " spécialistes de la prière ", doivent travailler à développer cette compétence qui est la leur : "La mission, en effet, exige de tous ceux qui sont envoyés de perfectionner leur charité dans le dialogue de la prière." Le bienheureux Louis Versiglia, évêque et martyr, a écrit avec bonheur : "Le missionnaire qui n’est pas uni à Dieu est un canal coupé de sa source ; s’il prie beaucoup, il fera aussi beaucoup. " [...]
C’est précisément parce que notre prière conduit au témoignage de vie et à l’action apostolique que nous devons veiller à ce qu’elle soit authentique, renouvelée, fréquente et mobilisatrice. [...]
Nous nous confions à Marie
Don Bosco a fait l’expérience de l’efficacité maternelle de la Vierge Marie dans la recherche des vocations, dans leur discernement et leur maturation. Il a toujours gardé une confiance extraordinaire en son intercession pleine de sollicitude spécialement dans les temps difficiles pour les vocations.
Il faudra sans cesse faire revivre dans la Congrégation l’acte solennel de confiance dans lequel nous lui avons confié aussi "la fécondité en vocations ", dans la conviction qu’avec elle, nous pouvons " entreprendre de grandes choses " pour le bien de la jeunesse. En effet, comme disent les Constitutions, " nous croyons que Marie est présente parmi nous et qu’elle continue sa " mission de Mère de l’Eglise et d’Auxiliatrice des chrétiens."
Nous sommes en particulier convaincus que la Vierge, intimement unie au Saint-Esprit, est dans l’histoire " mère et éducatrice " des vocations.
Marie est définie par le Pape " la personne humaine qui, plus que toute autre, a répondu à l’appel de Dieu " ; elle a nourri et éduqué Jésus qui a été, pour ainsi dire, la " vocation suprême ". Lorsque, au temple de Jérusalem, elle retrouve son Fils de douze ans et lui exprime la peine de Joseph et la sienne au cours de ces trois journées employés à le chercher, Marie s’entend répondre : "Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne le saviez-vous pas ? C’est chez mon Père que je dois être " (Lc 2, 49). Nous pouvons considérer cette réponse comme la confidence du fils adolescent qui révèle sa vocation à ses parents. Comme Marie aura médité sur la vocation de Jésus et la sienne propre ! J’y songeais un jour en entendant les jeunes d’un oratoire chanter avec ferveur un cantique marial : "Je voudrais tant te parler (Marie) du Fils que tu as aimé : je voudrais tant t’entendre dire ce que tu as pensé lorsque tu appris que tu ne t’appartiendrais plus et que ce Fils que tu n’avais pas attendu n’était pas pour toi... "
L’acceptation généreuse et la réalisation totale de sa vocation personnelle a rendu Marie heureuse (beata !) dans son cœur et lui a donné le premier rôle dans l’histoire de l’humanité, plus important et bienfaisant que tous les autres personnages puissants et sages.
Son chant du Magnificat nous révèle la joie personnelle et l’importance historique qu’apporte la vocation : elle est la réalisation d’un projet de Dieu. Les projets de Dieu expriment tous son amour personnel pour ceux qu’il appelle et ils poussent à travailler pour la fraternité et le salut des autres. Lorsque dans le " Notre Père " nous disons : "Que ton règne vienne ", nous demandons au Seigneur d’être des collaborateurs de ses projets, comme Marie l’a été en plénitude. Nous apprenons d’elle à considérer la vocation comme un vrai trésor : trésor à apprécier, à proposer, à défendre, à faire fructifier en chaque jeune qui nous approche.
Supplions la Vierge Marie de nous accompagner comme une mère attentive, spécialement pour que nous puissions intensifier et vivifier notre prière pour les vocations, et la vivre avec les sentiments mêmes du cœur de Jésus-Christ, son Fils.
Don Bosco nous rappelle que, lorsque nous nous confions à elle, nous pouvons " entreprendre de grandes choses ".
Renouvelons notre prière pour les ouvriers de la moisson ; elle nous aidera à témoigner chaque jour avec joie de notre vocation.