L’éducation au choix en école catholique


sœur Marie-Solange Montel
de la Direction diocésaine de l’enseignement catholique de Reims

Quelques rappels

Un établissement scolaire catholique est d’abord un établissement scolaire. Ce n’est ni un "petit séminaire", comme l’on disait autrefois, ni un pré-noviciat, ni au sens strict de l’expression, une "structure d’accueil" pour jeunes en recherche de vocation.

Un établissement scolaire catholique est un lieu de formation humaine, comme toute autre institution scolaire mais qui prend en compte la dimension spirituelle de tout l’être humain. C’est un lieu d’annonce et de proposition de la foi dans une atmosphère de liberté et de charité où les jeunes peuvent et doivent rencontrer des témoins compétents, convaincus et heureux, capables de travailler ensemble pour aider chaque jeune à construire jour après jour, année après année son projet scolaire, sons projet professionnel, son projet de vie. (Bien noter la progression.)

Dans la perspective d’une pastorale des vocations, étant donné l’âge des jeunes qui sont scolarisés, on ne peut parler que d’une préparation lointaine. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne soit pas fondamentale. On éduque des jeunes pour qu’ils deviennent des adultes, hommes et femmes responsables, si possible des chrétiens, des catholiques ouverts et engagés et, s’ils entendent un appel du Seigneur, des prêtres ou des religieux et religieuses. Dans cette ligne, je crois sincèrement qu’un établissement catholique manquerait à sa mission si, d’une façon ou d’une autre, il ne se sentait pas responsable d’être un lieu d’appel. Mais comment ?

Quelle pédagogie ?
Quelle éducation au choix ?

Une pédagogie à l’attention de la personne : chacun est unique. Une pédagogie de l’écoute ; une pédagogie du respect de la liberté de l’autre ; une pédagogie de la responsabilité ; une pédagogie de l’ouverture au monde ; une pédagogie du service ; une pédagogie de l’intériorité.

Tout ce que nous disons et faisons qui favorise cette formation est une base fondamentale pour la construction humaine d’un adulte. Ceci n’est pas de l’unique ressort des catéchistes ou des animateurs en pastorale. C’est le travail de "préparation lointaine" auquel tout professeur, éducateur digne de ce nom contribue. C’est bien, globalement, le souci des établissements catholiques.

Mais il me semble que nous avons à exploiter davantage aujourd’hui certains moyens mis à notre disposition par l’Education Nationale elle-même. Je veux parler de la loi d’orientation du 10 juillet 89. Certes, nous avons toujours eu le souci de renseigner, de guider les élèves par une information collective ou/et par un accompagnement individualisé. Nous avons eu des confidences de jeunes envisageant le sacerdoce, mais nous avons eu moins d’occasions, à ma connaissance, d’aborder le sujet de la vocation sacerdotale autrement que dans la catéchèse, dans des temps forts - récollection ou retraite - ou, quand on est prêtre, dans une homélie ou un dialogue interpersonnel.

Or, la nouveauté réside :

  • dans la dotation horaire (une demi-heure hebdomadaire ou une heure tous les quinze jours) consacrée à ce que l’on appelle le "projet de l’élève" ;
  • dans la progression de cette éducation au choix qui peut s’étendre de la 6e à la 3e. Je précise tout de suite que tous les établissements n’ont pas la possibilité de le faire. Mais là où cela peut se pratiquer, c’est une chance pour le jeune, humainement parlant ; c’est un lieu possible pour aborder la question de la vocation en général, de la prêtrise en particulier. C’est, de toute façon, pour le jeune, la certitude d’avoir un temps qui lui soit spécifiquement consacré et pendant lequel il sera écouté, aidé et conseillé.

L’objectif est clairement exprimé :

  • prendre conscience que l’on a un pouvoir sur sa destinée ;
  • s’orienter et non être orienté, passer d’une attitude passive à une attitude active. Que l’élève soit acteur de son devenir.

"Le sens de l’orientation, c’est que l’orientation ait un sens pour l’élève" (M. Revin).

Les méthodes

Des tests sur la connaissance de soi, des moyens de développer son autonomie par l’auto-évaluation, une documentation pour apprendre à s’informer, identifier son environnement social et professionnel (études de milieu, stages en entreprises).

Il s’agit des textes officiels, et j’ai bien conscience du décalage qui existe entre la théorie et la pratique. Mais ce qu’il me semble important de souligner, c’est que nous avons des "entrées " à notre disposition et que nous ne savons peut-être pas assez les utiliser.

Pendant plusieurs années, j’ai pratiqué en 3e ce projet de l’élève et j’ai fait des découvertes. Il existe, en effet, des ouvrages très bien faits dont les titres sont tout un programme (exemple : Jérôme et le choix de la vie, Ta vie tu la construis, collection "Education des choix").

Dans ce dernier, à la table des matières niveau 6e, page 131, dans le répertoire des professions proposées par l’Onisep, à la lettre P, au milieu du pompiste, du potier, du préparateur en pharmacie et du professeur certifié, se trouve le prêtre.

Première remarque : il est important pour les jeunes de constater de visu que c’est une possibilité d’orientation. Il faut saisir l’occasion pour le souligner.

Deuxième remarque : le sacerdoce n’est pas un métier au sens strict du terme. Mais il requiert des compétences, une formation. C’est l’occasion d’un échange avec les jeunes.

Troisième remarque, la définition : " Prêtre : personne qui aide les gens dans leur éducation morale et spirituelle, leur donne les sacrements, dirige les offices, prononce les homélies et participe aux activité humaines de la communauté religieuse." Si cette définition n’est pas parfaite, je ne la trouve pas si mal. Et j’ai découvert qu’au niveau 5e, cette définition était complétée de la manière suivante : "Il a le souci de motiver les membres de la communauté à maintenir les traditions religieuses et de leur apporter l’aide nécessaire (malades, vieillards convalescents, groupes de jeunes, couples, etc.) Au niveau 4e-3e, trois lettres de référence sont ajoutées : A (artiste), S (social), E (entreprenant). Il y a aussi réaliste, investigateur, conventionnel.

Quatrième remarque : c’est une occasion de faire venir un prêtre pour parler de sa vocation comme on fait bien venir une infirmière, un architecte, un étudiant en pharmacie, etc.

Ayant demandé à mes élèves de constituer un dossier sur une profession qu’ils envisageaient d’exercer plus tard en présentant leurs motivations, les études à entreprendre, les débouchés et un compte rendu d’interview, j’ai eu deux fois l’heureuse surprise d’avoir un dossier sur le prêtre. Ceci avant la consultation des ouvrages dont je viens de parler. Donc, si nous le voulons, nous pouvons trouver des occasions de parler de la vocation. Voilà pour le niveau collège.

Dans le primaire, il me semble que la priorité à donner réside dans l’éveil à la prière, à l’intériorité. C’est aussi le moment le plus favorable pour informer les parents sur cette question simple et vraie. A cette période, les jeunes parents sont particulièrement réceptifs. La rencontre de témoins est également importante : qu’ils voient des prêtres et des religieuses. Je suis allée récemment, à l’invitation de l’institutrice, dans deux classes de CE2. Des questions très simples révèlent une ignorance sur le simple plan de la vie chrétienne ou, déjà, des réponses toutes faites. En vacances, un enfant de CM2 que je ne connaissais pas m’a demandé à quel âge j’avais pensé à être religieuse. Je lui réponds que j’y ai pensé très tôt, à ma première communion. Il me dit alors avec un regard pétillant, plein d’enthousiasme : "C’est comme moi, je veux être prêtre et vous savez, je prépare déjà mes sermons !"

Au niveau lycée, l’organisation de retraites, de temps forts dans un monastère est une possibilité qu’il faut avoir le courage de proposer. Avoir le souci de procurer aux jeunes des occasions d’engagement, de service des autres est important, de préférence en favorisant le "faire avec" plutôt que faire "pour" les jeunes. En plusieurs villes, ces dernières années, un stand vocation a trouvé sa place au forum des métiers. Il est bon de donner aussi l’occasion de vivre une expérience d’Eglise lors de grands rassemblements.

Je n’ai pas parlé des temps spécifiques de préparation au sacrement de confirmation, soit en 3e, soit au second cycle, mais c’est évidemment un moment privilégié. La démarche du jeune est un choix qui a été préparé.

En conclusion

Je crois que l’éducation au choix est une priorité qui doit nous habiter et qui s’apprend et s’expérimente dans le quotidien. Savoir valoriser un bon choix, faire ressortir la joie qui en résulte même si cela va de pair avec l’effort.

Je crois à la valeur du témoignage irremplaçable de l’adulte qui manifeste, qu’il le veuille ou non, s’il est lui-même heureux dans son choix de vie. Appelés, nous avons à devenir des appelants.

Je crois en l’Esprit-Saint, esprit de sagesse et de discernement, de conseil et de force, seul capable d’éduquer finalement les jeunes à faire de vrais et bons choix !