C’est merveilleux d’être prêtre


Père Jean Remy
prêtre du diocèse de Cambrai

Çà y est ! Ils sont partis, ceux avec qui je viens de célébrer l’Eucharistie. Pas très nombreux, pas jeunes non plus ! Elles sont parties aussi, ces trois familles qui ont fait baptiser leur petit. Je suis seul dans cette église qu’on va bientôt fermer. Je suis seul, je m’assieds, fatigué et j’ai envie, Seigneur, de prier.

Je veux d’abord te remercier, pour tous ceux que je viens de rencontrer. Ils sont venus, ces “fidèles”, ils ont prié, ils ont chanté. Ils ont communié ! Et tu les as accueillis, tels qu’ils sont, toi qui connais leur vie, leurs joies, leurs peines, leurs espoirs et leurs déceptions. De tout mon cœur je te les confie. Elles sont venues, ces familles. Je sais qu’elles étaient loin de l’Eglise. Aucun de ces couples ne s’y est marié, mais je trouve merveilleux qu’ils aient voulu demander le baptême pour leur bébé. Ah, leurs motivations ne m’ont pas enthousiasmé : « Pour qu’elle soit protégée », « Pour qu’il puisse faire un jour sa communion », « Pour faire plaisir à la famille ». Mais toi, Seigneur, tu les accueilles telles qu’elles sont, ces familles. Tu sais ce qu’il y a au fond de leur cœur. Tu sais qu’il ne faut pas « éteindre la mèche qui fume encore ». De tout mon cœur, je te les confie.

Je suis seul, fatigué, mais j’ai encore envie de te parler. C’est formidable que tu sois là à m’écouter. Je veux te dire merci, merci parce qu’un jour tu m’as choisi, parce qu’un jour tu m’as demandé de tout lâcher pour te suivre à tout jamais. C’était au cours d’une Eucharistie. Tu m’as dit : « Si tu veux que ta vie soit belle, fais-toi prêtre. » Je n’en avais vraiment aucune envie. J’ai lutté, j’ai prié, j’ai consulté, j’ai réfléchi. Et un jour, d’un seul coup, j’ai dit “oui”. Ah, bien sûr, je ne savais pas ce qui m’attendait. Comme tous les autres, je suis passé par des moments difficiles. J’ai même cru que j’allais flancher. Mais tu étais là pour me garder lorsque j’étais découragé dans les périodes d’aridité, écrasé par de trop lourdes responsabilités, effrayé par des épreuves de santé. Aujourd’hui, de tout mon cœur, je te remercie. Elle a été passionnante, ma vie. C’est merveilleux d’être prêtre aujourd’hui. Ah, c’est vrai, notre ministère a bien changé. Ah, c’est vrai, nous ne savons pas ce que sera l’Eglise de demain. Mais ce que je sais, c’est que Toi, tu resteras et que tu trouveras bien le moyen de nous aider à aller plus loin. Donne-moi d’être et de faire aujourd’hui ce que tu attends de moi, ce que tu veux faire en moi et par moi !

Apprends-moi à prier, comme Elisabeth de la Trinité me l’a si bien montré : « Prier, c’est être là, avec toi qui pries en moi, te regarder, t’écouter, te parler, t’aimer et surtout me laisser aimer ! » Et tout cela, bien sûr, c’est « pour la gloire de Dieu et le salut du monde », ces six milliards d’hommes qui m’entourent aujourd’hui. « Dans cette longue oraison de chaque jour, je sais que toute ma vie culmine et trouve sa mystérieuse et universelle fécondité ! »

Apprends-moi à aimer comme tu nous en as montré l’exemple. « Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même. » J’en suis loin, mais je le sais c’est cela qui m’est demandé. Donne-moi d’aimer avec ton cœur à toi parce que « sans toi, je ne peux rien faire ». Tous ceux que je vais rencontrer, Jésus, aide-moi à les écouter comme toi, à les comprendre avec toi, à les aider par toi, à les aimer pour toi…

Jésus, aide-moi à travailler, jamais seul dans mon coin, mais toujours avec les autres, tous les autres, les prêtres bien sûr, mais aussi les religieuses et surtout les laïcs. A chacun, tu as donné une vocation particulière et c’est ensemble qu’il faut y répondre ! Mais ce n’est pas facile de travailler en équipe, ce n’est pas facile de mettre en place des laïcs et, à vrai dire, les prêtres âgés que nous sommes n’y sont guère habitués. Eh bien, Seigneur, raison de plus pour s’y mettre parce que c’est cela aussi que tu promets : « Là où deux ou trois seront réunis en mon nom, je serai au milieu d’eux. »

Ça y est. On vient fermer l’église. Alors, j’arrête, Seigneur. Il faut que je reprenne ma voiture et que j’aille préparer ma “tambouille”. Ensuite je ferai la sieste, et en cet après-midi de dimanche, au lieu de regarder un film à la télé, je me replongerai dans un livre de spiritualité avant de monter dans cet oratoire où nous passerons une heure ensemble, Toi et moi, Jésus, Toi mon amour, mon divin aimé, Toi à qui je suis si content d’avoir donné ma vie, Toi que je suis si heureux de rencontrer chaque jour, comme aujourd’hui, dans ton Eucharistie.

Notes

L’Abbé Jean Rémy a fait paraître sur la bienheureuse Elisabeth de la Trinité Regards d’Amour, Elisabeth de la Trinité - Jean de la Croix, aux éditions du Cerf ; Prier quinze jours avec Elisabeth de la Trinité, aux éditions Nouvelle Cité, et Eucharistie, Soleil de vie, chez Médiaspaul. [ Retour au Texte ]