Y a-t-il des laïcs dans l’avion des vocations ?


Père Gérard COLICHE
Vicaire Episcopal de Dunkerque

Regardons-y de plus près ! Richard et Jimmy, séminaristes en insertion pastorale sur le littoral, ont été ordonnés diacres en vue du presbytérat le 26 juin dernier à Dunkerque. Chacun réfléchit régulièrement avec son équipe d’accompagnement composée de laïcs, d’un prêtre, d’un diacre et d’une religieuse.

Nicolas, qui les suit deux ans après, est également en insertion pastorale à Grande-Synthe. Une équipe d’accompagnement va se mettre en place avec lui pour cheminer de la même manière. Marie-Paule et deux autres religieuses vivent en communauté dans le quartier populaire du Jeu de Mail. La santé de l’une, la profession de l’autre, les besoins de la congrégation, les conduisent à quitter cette présence discrète et très relationnelle qu’elles affectionnent au milieu des " plus petits ". Les manifestations de sympathie et de remerciements des habitants du quartier se multiplient à l’occasion de leur départ.

Béatrice, religieuse en lien avec le " Sappel " qui propose aux personnes du quart-monde de se retrouver entre croyants, va occuper leur appartement du Jeu de Mail. Elle prend des contacts, des liens nouveaux se créent.

Jean-Pierre, de Fort-Mardyck, travaillant à la mairie de Dunkerque, vient d’être ordonné diacre à Lille avec trois autres diacres permanents. Son équipe d’accompagnement est intervenue dans la célébration de l’ordination pour raconter leur cheminement.

Les séminaristes du diocèse viennent d’organiser une veillée dans les Flandres pour la Journée mondiale des vocations. Une trentaine de jeunes du littoral y ont participé, dynamisés par Jimmy, Richard et Nicolas.

La béatification de Nicolas Barré le sept mars dernier à Rome a mobilisé quatre écoles et trois collèges du secteur qui sont sous la tutelle de " La Providence " de Rouen. Cela leur a permis de vivre des temps forts de fête et de célébration autour de la vocation…

Autant d’occasions pour les habitants du littoral dunkerquois et les communautés chrétiennes de prendre conscience que Dieu continue d’appeler et que des jeunes adultes, des hommes, des femmes, répondent à cet appel.

Autant d’occasions qui font apparaître de nombreux laïcs engagés à un moment ou à un autre autour d’un Service des vocations.

Une équipe réunit laïcs, religieuse, diacre. C’est " l’Antenne des vocations " du SDV de Lille. Elle rame depuis des années pour sensibiliser à l’éveil des vocations : rencontres de jeunes autour du thème de l’appel, temps-forts proposés aux écoliers, aux collégiens, aux lycéens du littoral par les aumôneries de l’Enseignement Public, les écoles catholiques… Un essoufflement se fait sentir dans l’équipe depuis quelques temps. Besoin de renouvellement de personnes ? Impression d’être seuls à soutenir ces efforts ? Interrogation sur l’efficacité des relais et de leur impact sur les différentes communautés ?

Or, comme responsable pastoral du littoral, je dois constater que des événements surviennent, des personnes bougent. L’énumération ci-dessus en est la preuve. Et la question m’est renvoyée : de quelle manière favoriser une pastorale renouvelée des vocations ?

La conviction que c’est toute une Eglise qui doit soutenir un tel effort n’est pas nouvelle. Les modalités sont peut-être à renouveler.

Nous avons la chance, dans notre région, de vivre avec de nombreuses équipes de croyants laïcs qui prennent des responsabilités ecclésiales dans les groupes, les mouvements, les services, les aumôneries… Même si nous trouvons que le nombre diminue, cela crée un tissu ecclésial qui ne peut que nous réjouir et nous inviter à rendre grâce au Seigneur. Les mêmes questions se posent comme partout ailleurs.

La richesse et la diversité ecclésiale amènent chacun à assumer la responsabilité qu’il a acceptée dans son domaine… et à compter sur les autres pour le reste.

Du coup, les membres de l’antenne du SDV qui attendent soutien et émulation de tous, peuvent avoir l’impression de se retrouver isolés dans la responsabilité qu’ils ont prise.

Comment articuler le souci de quelques-uns avec la responsabilité de tous quant à l’éveil dans les communautés de croyants où ils sont insérés ?

Le temps n’est plus où une instance peut décider d’en haut que les autres appliqueront ce qu’elle a concocté, même si c’est très valable. Comment inventer une nouvelle manière de vivre, de réfléchir, de partager un souci qui puisse se transmettre par capillarité entre équipes de baptisés ?

Une question me trouble car je ne sais pas très bien comment la poser et donc en parler avec d’autres : la vocation est-elle une question qui concerne les adultes ou les enfants ? Certes, le Seigneur appelle à tout âge et nous avons à être les porte-paroles " diplomatiques " de cet appel auprès des enfants. Mais, dans une société où la transmission de la foi par les parents aux enfants rencontre nombre d’obstacles, comment faire entendre et apprécier cette question de l’appel aux jeunes et aux jeunes adultes ? Je rêve du jour où le mot " vocation " fera penser instinctivement aux jeunes adultes et donnera conséquemment envie aux enfants.

Les paroisses, les mouvements, les services appellent de nombreuses personnes à prendre des responsabilités. Comment inscrire dans nos mentalités que nous exprimons un même appel à deux niveaux différents : " Nous t’appelons à prendre telle responsabilité à travers telle tâche " et, en même temps, " C’est au nom de toute l’Eglise que nous t’appelons. Pour permettre à l’Eglise de mieux vivre sa mission, de témoigner de la Bonne Nouvelle à travers la responsabilité que nous te confions. "

Tout croyant qui prend une responsabilité, fût-ce la plus petite, la plus humble et la plus cachée, devrait pouvoir se sentir reconnu comme étant porteur du zèle missionnaire qui dévore l’Eglise universelle. Loin de l’écraser, cela pourrait lui donner des ailes !