Quand l’Esprit se manifeste


Que retenir de tant de visages, de tant de rencontres ? Marie-Joseph Seiller, accompagnateur à "L’Eglise des Vocations" et Responsable SDV de Luçon tient à laisser la porte ouverte au travail de l’Esprit qui va continuer. Aidé par notre prière.

Marie-Joseph Seiller
Accompagnateur à "L’Eglise des Vocations"
Responsable SDV de Luçon

Chaque jour depuis deux mois, en France, nous parviennent les suites des Journées Mondiales de la Jeunesse. Dans l’abondance des témoignages, soyons attentifs au "ferment" qui soulève individus, groupes, diocèses ! Pour ma part, je perçois, au-delà de l’émotion, une manifestation de l’Esprit destinée à tous.

A toute l’Eglise, à la société même. Mgr Billé disait : "Le premier changement est d’admettre que l’Eglise est faite de tous les baptisés. Et que l’avenir de l’Eglise et de la société ne peut se construire sans qu’on donne aux jeunes leur vraie place."

J’ose tenter un rapprochement avec le Concile Vatican II. C’était un temps réservé aux évêques du monde entier, à leurs collaborateurs et à des invités d’autres religions. De l’extérieur, nous étions attentifs aux sujets retenus, aux tensions, aux décisions prises. Peu à peu, les évêques ont fait découvrir que la grande force du Concile résidait dans l’expérience spirituelle de docilité à l’Esprit, manifestée à travers le dialogue entre frères qui se laissaient convertir par la Parole de Dieu. Cette même expérience, les chrétiens l’ont partagée et ainsi ont commencé à "recevoir" le Concile et à redécouvrir l’Eglise.

Voilà un peu ce qui nous est arrivé avec les JMJ. L’élan reçu peut atteindre nos communautés, notre société. Continuons donc notre mission ordinaire, faisons confiance aux moyens existants souvent inexploités, osons innover avec les jeunes, avec les chrétiens de tous courants, mais toujours dans la certitude que "le Christ habite son Eglise".

Saint Germain-des-Prés, l’église des vocations

Les jeunes du monde ont envahi le parvis de l’église Saint Germain-des-Prés. Les jeunes parisiens ne sont pas étrangers à ce lieu, car cette paroisse accueille toute l’année les étudiants du Quartier Latin. Aujourd’hui, c’est autre chose, les passants découvrent une Église jeune dans la rue. Oui, ce parvis est grouillant de monde ; il est devenu lieu de rendez-vous : j’ai la surprise de reconnaître des vendéennes qui attendent des amies. On rencontre surtout des italiens, en grand nombre, des allemands, des slovaques, accueillis dans le quartier. Chaque midi, chaque soir, à droite du haut clocher du XIe et XIIe siècle, l’on distribue de mille à mille cinq cents repas. Dans une attente patiente, les repas conviviaux sont pris à même le trottoir et dans le square attenant à l’ancienne église, les familles en difficulté et des errants viennent en partager le surplus.

Sur la grille du square, une banderole : "Eglise des vocations". Pourquoi donc ? On apprend un peu plus loin que tous les séminaristes du monde vont se réunir le mercredi 20 août. Déjà, depuis le début de la semaine, ils passent et font connaissance. Quel mystère que de se retrouver en marche à la suite d’un même appel dans des univers si différents. Les échanges spontanés ont du mal à se conclure, les adresses s’échangent ! .. "Que chacun marche selon l’appel qu’il a reçu de Dieu ! " 1 Co 7, 17 .

Dans la nuit du jeudi, l’ancienne abbaye Saint Germain semble retrouver sa vie d’antan : des centaines de jeunes, cierge à la main, arrivent de Notre-Dame, à pied. Là-bas, ils ont vécu l’oratorio des Vocations ; la façade illuminée s’est animée et leur a parlé :
"Je suis l’Église, le Seigneur m’a dressée au cœur de cette ville que j’aime... Je suis habillée de pierres, tu es l’une de ces pierres ; tu es l’espace sacré où Dieu prend la parole. N’aie pas peur, le Seigneur t’appelle à poser ta pierre en moi."

Chacun d’eux a prêté attention, et s’est laissé interroger au plus profond de lui-même. Ils ont murmuré dans le silence du soir : "Jésus, lumière intérieure, aide-moi à trouver mon chemin pour aimer. " Ils sont arrivés de là-bas, derrière la croix de l’année sainte, suivant Celui qui est "venu pour que les hommes aient la Vie et qu’il l’aient en abondance" Jn 10, 10 .

Stéphane, Emmanuelle, Anna... et d’autres sont restés là en prière tout la nuit. "Une fois par an environ, je trouve l’occasion de vivre une nuit de prière. J’y tiens, même si je suis un peu fatigué. C’est un grand moment pour faire le point et entendre le Christ", me dit Stéphane. Des séminaristes se sont relayés pour animer la prière ; les prêtres ont pu célébrer le sacrement de la réconciliation avec une centaine d’entre eux !

Le lendemain de ce jour, le vendredi, une cinquantaine de personnes ayant une expérience d’accompagnement spirituel, prêtres, diacres et laïcs, religieux et religieuses, sont restés disponibles pour l’écoute et le conseil dans différentes langues. Ils étaient présents depuis le mardi, mais, ce jour-là, il ont été bien occupés : jeunes et jeunes adultes sont venus exposer soit une épreuve, soit un projet de vocation qu’ils portaient en secret ; les uns voulaient sortir d’une vie trop superficielle, d’autres d’une peur paralysante ; certains parlaient de la contradiction entre un appel entrevu et leur vie actuelle.

J’ai été surpris par leur volonté de faire des pas et, le premier d’eux, celui de faire confiance à la personne qui les écoutait... Nous avons prié ensemble, repéré quelques appuis pour les mois à venir, nous leur avons fourni des adresses, même dans des pays lointains...

Vous qui lisez cet article, croyez que vous pouvez soutenir leur foi en les portant dans votre prière. Chaque marche est haute pour ceux qui envisagent une vocation religieuse ou bien sacerdotale. Le chemin est inconnu pour ceux et celles qui n’ont pas proches d’eux, des témoins de ces vocations originales ; ils n’imaginent pas les diverses manières de vivre à la suite du Christ. Pourtant, ils les pressentent.

Pour terminer, une anecdote : je me souviendrai longtemps de cette jeune religieuse qui a voulu être si proche des jeunes et familles en grandes difficultés, qu’elle est entrée dans un ordre mendiant ; elle ne mange chaque jour que ce qu’elle a reçu gracieusement et, de plus, avant de manger, elle le partage ! Sourire et détachement faisaient bon ménage.

"Mais comment vivre cela tous les jours ? lui demandais-je.

- Ce n’est pas un problème. Notre récompense, c’est d’être vraiment proches de ces personnes à l’écart de la vie des gens surchargés. Notre amitié est forte. Nous vivons cela au nom de Jésus, et quand ces pauvres s’ouvrent à sa présence, nous pouvons partager aussi notre vrai trésor, la connaissance de Jésus. "

Je suis fier de cette sœur, ma sœur dans la foi ; je la soutiens depuis, dans la prière et dans mon action auprès des jeunes en difficulté. Heureuses vocations si diverses qui, liées ensemble, donnent le visage d’une Église servante, signe de l’Amour du seul Sauveur !