Les Guides et Scouts d’Europe


Pierre Boyer
Prêtre Co-responsable du Sénevé

Les scouts d’Europe sont fondés en 1958. L’Association des Guides et Scouts d’Europe que nous connaissons aujourd’hui prend son essor en 1963 en devenant un mouvement catholique d’éducation par le scoutisme, complémentaire de la famille, qui regroupe trente mille membres en France.

Les méthodes pédagogiques pratiquées sont les méthodes traditionnelles du scoutisme telles qu’elles ont été définies par Lord Baden-Powell et le Père Sevin, c’est-à-dire basées sur la prise de responsabilités au sein d’une équipe et sur le principe de l’auto éducation du jeune par le jeune.

L’objectif des Guides et Scouts d’Europe est de donner à chacun les moyens de progresser vers sa vie d’adulte, son unité de vie, par le jeu, l’aventure et la vie d’équipe dans la nature. Le but ultime de ce scoutisme est d’éduquer l’homme en son entier en tant que Personne et permettre ainsi au jeune de trouver sa vocation de chrétien et de pouvoir y répondre. Les textes fondamentaux des Guides est Scouts d’Europe sont la loi scoute, les principes, la charte du Scoutisme européen et le directoire religieux des Guides et Scouts d’Europe.

Le Scoutisme européen se veut un Scoutisme traditionnel quant à la méthode pédagogique en privilégiant la pratique du Livre de la Jungle pour les Louvettes et Louveteaux (8-12 ans), le système des patrouilles pour les Eclaireuses et Eclaireurs (12-17 ans) et la progression personnelle afin de devenir un adulte responsable et ouvert aux autres pour les Guides-Aînées et Routiers (plus de 17 ans).

Les Guides et Scouts d’Europe sont la seule Association française de scoutisme qui dispose de deux sections (guides et scouts) dont les pédagogies ont les mêmes fondements et des applications différentes selon les unités de garçons ou de filles. Ne pas pratiquer la mixité dans les unités est aujourd’hui un choix pédagogique spécifique et apprécié.

A l’heure où la dimension internationale est importante dans l’éducation, les Guides et Scouts d’Europe font partie d’une Union internationale, disposant d’un statut consultatif au Conseil de l’Europe et regroupant soixante-dix mille jeunes de treize pays européens autour des mêmes textes fondateurs.

Enfin, en tant que mouvement catholique, les Guides et Scouts d’Europe se veulent fils de l’Eglise et sont donc missionnaires. L’Association des Guides et Scouts d’Europe est un mouvement d’évangélisation. C’est à ce titre que ses responsables sont en liens réguliers avec la Conférence épiscopale française dans le cadre du Secrétariat pour l’Apostolat des Laïcs. Sept mille cinq cents Scouts et Guides ont été reçus durant l’été 1994 à Rome, par le pape Jean Paul II.

L’Association française des Guides et Scouts d’Europe est également agréée par le Ministère de la Jeunesse et des Sports.

Scoutisme d’Europe et vocations

Dans nombre de séminaires de France on trouvera un ou plusieurs Scouts d’Europe. Dans nombre de communautés religieuses contemplatives ou apostoliques on rencontrera des jeunes consacré(e)s issu(e)s de la Fédération des Guides et Scouts d’Europe.

Leur nombre est important et ne cesse de croître. Serait-ce le résultat d’un effort particulier en faveur de la promotion des vocations ? Pas vraiment, du moins pas directement. Disons plutôt que, par la recherche d’une vie simple et fraternelle, empreinte de confiance réciproque, riche d’expériences personnelles et communautaires au contact de la nature dans un esprit de service et d’engagement, le Scoutisme d’Europe se veut une "bonne terre" dans laquelle la petite graine "vocation" peut grossir et s’épanouir. Mais, ajoutons d’emblée que nous pouvons constater (à de rares exceptions près), que ce sont les familles où la Foi, la vie liturgique et sacramentelle, l’esprit de service à la maison ou à l’extérieur, sont les plus vifs qui fournissent des vocations. Aussi, Scoutisme et famille se veulent très complémentaires pour permettre aux jeunes de développer pleinement leurs potentialités humaines et spirituelles.

Abordons maintenant les bases pédagogiques de chaque branche qui constituent ce que nous avons appelé précédemment "la bonne terre".

Louveteaux et Louvettes (8-12 ans) constituent la Famille heureuse. Ils font l’expérience de la rencontre avec Dieu créateur, puis apprennent à trouver la place qui est la leur dans cette création : par le respect et la maîtrise de soi, l’obéissance et le service, le petit loup apprend à ouvrir ses yeux et ses oreilles en essayant de faire de son mieux.

En devenant Eclaireur ou Eclaireuse (12-17 ans) le jeune fait l’apprentissage de la liberté avec ses exigences et ainsi, prenant de plus en plus en charge sa vie chrétienne, il acquiert un style de vie, une manière d’être homme ou femme, et devant tout appel de Dieu (ressenti au camp, au cours de tel pèlerinage, au contact d’un Père spirituel) le Scout (Eclaireur) ou la Guide (Eclaireuse) se sentira tout à fait libre. Cet aspect est important car l’adolescent prend conscience de la personnalité : âme, corps, esprit ; il voit alors qu’il ne faut négliger aucune de ces trois composantes, aidé en cela par l’exercice physique, les conditions de vie parfois rudes au contact de la nature qui tempèrent l’idéalisme ou le romantisme trop naïf souvent propres à l’adolescence. L’expérience du dépouillement, voire la pauvreté, peuvent aider à discerner "l’unique nécessaire". Beaucoup ont pu le percevoir lors de raids ou d’explorations. Il est difficile à un jeune d’aller vers cet oubli de soi, de ses égoïsmes, de son confort. Lorsqu’il y parvient, il cherche alors, la plupart du temps, à aller plus loin.

Cette volonté du maximum personnel prépare à l’engagement pour "un plus haut service". Une religieuse novice s’exprime ainsi : "On m’avait dit : on est Guide chaque jour ou on est rien du tout ! ; cela voulait dire : vivre des principes et de la loi à la maison, à l’école. En résumé : établir le règne du Christ dans toute ma vie et dans le monde qui m’entourait (troisième Principe). Il me semble que c’est cela qui fut le coeur de toute ma vie scoute (et donc par conséquent de ma vie tout court, puisque les deux ne faisaient qu’un) : promettre à Dieu de Le servir toujours, m’en remettre comme Marie à Son bon plaisir. Ainsi donc, quand le Seigneur nous appelle à la vie consacrée, répondre présent ! va de soi ; du moins c’est ainsi que je l’ai ressenti".

A partir de 17 ans, le garçon entre à l’Equipe Pilote et la jeune fille devient Guide Aînée. La plupart du temps ce sont les Chemins de St Jacques de Compostelle qui composent le décor de ce qu’on appelle "la Route". C’est une étape importante dans l’évolution de la personnalité du jeune. Sur la Route les relations deviennent simples, sans artifice, les a priori tombent d’eux-mêmes. Un témoignage vaut bien des explications. Voici celui d’un séminariste : "Je dois au Scoutisme deux découvertes capitales : d’abord la découverte de la prière, grâce à la spiritualité de la Route que nous découvrions tout au long de l’année par des activités inter-maîtrises (chefs et cheftaines), des retraites, des veillées-Route, des services. Je dois précisément à la Route la pratique de la méditation quotidienne : c’est certainement cette fidélité à la prière qui m’a permis d’entendre l’appel de Dieu et d’y répondre, prière toute centrée sur Jésus-Christ par l’intercession de Marie". La Route c’est le temps des projets, mais aussi de l’action concrète au service des autres scouts comme chef, dans des mouvements caritatifs ou éducatifs, dans la vie des paroisses et des aumôneries. C’est le moment d’améliorer ses connaissances dans de nombreux domaines : animation, techniques de toutes sortes, sport, afin d’en faire profiter les autres. La Route c’est le temps des grandes questions, par exemple : "Que vais-je faire de ma vie ?" Le contact régulier avec un Père spirituel aidera au discernement et aux choix.

D’ailleurs, et c’est là un point essentiel sans doute, la présence de prêtres et de religieux (souvent jeunes) issus du scoutisme ou pas, est un facteur favorable à l’épanouissement des vocations. La grande chance du prêtre parmi les Scouts, c’est qu’il peut pratiquer le partage de la vie : on marche ensemble sous le soleil ou la pluie, on mange ou on jeûne ensemble, on se fatigue, on se détend, on prie ensemble, ce qui n’est pas possible ailleurs. Un prêtre ne perd pas son temps parmi les Scouts et les Guides. Le dialogue est profond, naturel, il assure et éveille. De nombreuses vocations sont nées de tels dialogues.

Bien qu’incomplet, ce qui précède donnera un aperçu des moyens que propose le Scoutisme d’Europe pour aider les jeunes à répondre à leur vocation d’homme et de chrétien, à participer d’une manière constructive et responsable à la vie de la société et de l’Eglise, à entendre et à répondre à l’appel du Seigneur à se consacrer totalement à Lui. Mais nous n’oublions pas que tout ceci mûrit, s’exprime et se vit à partir de la Promesse qui demeure le grand engagement suscitant et favorisant tous les autres : "Sur mon honneur, avec la Grâce de Dieu, je m’engage à servir de mon mieux Dieu, l’Eglise, ma Patrie et l’Europe, à aider mon prochain en toutes circonstances, à observer la Loi scoute."

Depuis quelque temps, notre Association a mis sur pied un Réseau qui souhaite susciter, encourager, répondre aux questions, favoriser la prière en faveur des vocations sacerdotales et religieuses. Il veut rappeler, si besoin était, combien cette préoccupation est présente à tous les niveaux du mouvement et que rien ne doit être négligé pour le service du Christ et de l’Eglise. Ce Réseau, appelé "Sénevé" s’appuie sur l’Espérance toute évangélique que même la plus petite graine est capable de devenir un grand arbre. Nous savons que le Seigneur achèvera en nous ce qu’Il a déjà commencé.