Dans l’Eglise protestante
Le pasteur Bernard Sturny, Secrétaire général du Directoire de l’Eglise de la Confession d’Augsbourg, apporte ici l’éclairage de sa propre Eglise sur l’apprentissage du ministère pastoral. Un parcours qui vise à donner un certain professionnalisme aux futurs pasteurs.
Ces trois termes, ces trois réalités              s’appellent l’une l’autre et ont à s’enrichir mutuellement.              Il ne peut y avoir exercice d’un ministère sans que celui-ci              ne repose sur des compétences professionnelles, sur des savoir-faire,              et donc sur l’acquisition d’un métier. Cependant, le ministère              pastoral ne saurait se réduire à un métier qui              répondrait à des besoins repérables à              satisfaire. Le pasteur est un témoin appelé d’ailleurs,              appelé par Dieu, pour être ici et maintenant reflet et              signe de l’accompagnement par Dieu de tous les hommes et de chacun              d’entre eux. Le ministère pastoral n’appartient ni à              la communauté, ni à celui qui l’exerce, il appartient              à Dieu qui appelle ceux dont il a besoin. En l’exerçant,              le ministre répond à un appel, à une vocation.
Pour nous, l’Eglise de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine (220 000 membres - 250 pasteurs), l’exercice du ministère pastoral est la résultante à la fois d’un métier et d’une vocation.
La vocation
Elle ne se situe pas forcément              au moment où un jeune décide de s’engager dans des études              de théologie, elle précède celles-ci parfois              de quelques années. Elle naît aussi au fil des études              universitaires. De plus en plus nombreux sont ceux qui se sentent              appelés à l’exercer alors qu’ils ont déjà              un métier tout différent et qu’ils l’exercent avec compétence              et passion.
La vocation naît de l’appel de              Dieu et est en conséquence forcément incontrôlable.              Par contre, la réalité de la vocation nous semble quelque              peu vérifiable et nous tenons, avant l’embauche d’un pasteur,              à en repérer suffisamment de signes pour la reconnaître              et pouvoir affirmer au moment de son ordination au ministère              qu’il y a appel de Dieu.
Si faire naître une vocation ne nous appartient pas, nous avons tout à faire pour qu’elle puisse naître. Tout au long de la catéchèse des enfants, dans l’animation de groupes de jeunes, de mouvements, nous essayons de sensibiliser au ministère, nous mettons les jeunes en contact avec des personnes l’exerçant pour qu’ils puissent aussi en voir la pluralité des aspects et les particularités de ceux qui habitent le ministère.
Le métier
L’exercice du ministère pastoral              requiert des compétences professionnelles. Dans un monde où              la sécularisation est une réalité et où              l’attente envers l’Eglise est grande, il nous faut être exigeants              sur le professionnalisme de ceux qui sont chargés d’exercer              le ministère.
La formation dispensée à              la Faculté de Théologie l’est de manière totalement              indépendante par rapport à nos Eglises en Alsace-Lorraine              (l’Eglise Réformée et l’Eglise de la Confession d’Augsbourg)              et c’est très bien ainsi. Tout pasteur dans notre région,              pour exercer un ministère, doit être, en principe, titulaire              d’une maîtrise en théologie de la Faculté de Strasbourg.              Un stage de trois semaines en paroisse, après le DEUG, lui              permet d’entrer dans la réalité paroissiale et de voir              de près les différents aspects du ministère pastoral.              Ce stage est sans doute tout à fait insuffisant d’autant que              de plus en plus d’étudiants en théologie n’ont ni une              grande culture, ni une grande pratique ecclésiale. Nous les              encourageons, durant les deux années qui suivent, à              se confronter à la réalité du ministère              par des remplacements d’été ou des contacts dans la              durée avec tel ou tel groupe paroissial.
Après la maîtrise, le candidat              au ministère fait un DESS (Diplôme d’Etudes Supérieures              Spécialisées) qui consiste en deux stages en entreprise              à raison de vingt heures par semaine, en une douzaine de sessions              de deux jours réparties sur l’année universitaire, où              le groupe se retrouve avec un coordonnateur des stages DESS mandaté              par nos Eglises (à mi-temps) et un directeur du DESS qui est              un enseignant de la Faculté. Ces sessions permettent une reprise              théologique de la pratique et un approfondissement de certains              thèmes laissés au libre choix des étudiants.              Les rapports de stage doivent être construits en deux parties,              l’une présentant le vécu, l’autre faisant l’objet d’une              réflexion en relation avec ce vécu.
Quatre ou cinq unités de formation,              d’une vingtaine d’heures chacune, donnent une formation dans le domaine              de l’animation, de la relation à autrui, complètent,              le cas échéant, la formation universitaire dans le domaine              catéchétique ou homilétique.
Le jury du DESS, diplôme universitaire,              est composé de représentants des Eglises et de la Faculté.              Après l’année du DESS, le candidat au ministère              pastoral passe une année de stage auprès d’un pasteur              expérimenté ayant pour mission de l’introduire peu à              peu dans toutes les tâches du ministère pastoral, en              principe paroissial. Après une phase d’observation, il est              invité à prendre en charge un certain nombre d’activités,              de s’y engager... en dialogue constant avec son directeur de stage.              A l’issue de cette année, la direction de l’Eglise lui confie              une paroisse (très rarement un ministère spécialisé)              pour deux années probatoires qui aboutissent à l’obtention              du certificat d’aptitude aux fonctions pastorales avec possibilité              de quitter la paroisse ou d’y rester selon le choix du pasteur et              des responsables locaux. 
Au long de ces trois années de              formation initiale, les pasteurs-stagiaires, puis probants, participent              à une dizaine de sessions de formation professionnelle d’une              semaine chacune. Elles portent directement sur des questions ayant              trait à l’exercice du ministère pastoral (connaissance              des règles de fonctionnement de l’Eglise - gestion - travail              en équipe - l’enterrement...), mais qui sont aussi l’occasion              de moments de partage, d’échange et de réflexion théologique.
L’ordination au ministère pastoral              se place avant l’entrée en années probatoires, après              l’année de stage. Elle est à la fois invocation de l’Esprit              pour l’exercice du ministère et reconnaissance de la compétence              et de la vocation. Le ministère pastoral est exercé              dans une Eglise à qui il n’appartient pas, mais à qui              il appartient de le gérer, c’est un de ces dons que Dieu lui              confie. Elle doit le faire avec sérieux et exigence, mais aussi              attention à l’autre, profond respect de sa vocation.
Les responsables de notre Eglise cherchent              à être attentifs à l’évolution des ministères,              aux charismes des uns et des autres qui s’expriment souvent seulement              chemin faisant, à permettre aux ministres d’évoluer              vers d’autres ministères... La formation permanente est un              outil à cette fin.
Depuis quelques temps déjà, nous              sommes attentifs à la diversification des ministères,              non seulement entre laïcs et pasteurs, mais aussi à l’intérieur              du ministère pastoral. Ainsi une cinquantaine de collègues              exercent un ministère spécialisé à temps              plein ou à temps partiel, souvent en plus d’un ministère              paroissial. Des voies nouvelles s’ouvrent et sont encore à              explorer ; par exemple la création d’un ministère de              formateur pour les musiciens d’Eglise, la mise en place de plusieurs              aumôneries scolaires et universitaires, la prise en compte des              situations de précarité par l’orientation plus diaconale              de certains ministères paroissiaux...
Le ministère pastoral est au service de Dieu et des hommes. C’est dans l’écoute attentive de l’un et de l’autre qu’il a à prendre forme, à s’incarner pour être l’œuvre de Dieu au service des hommes.
Pasteur Bernard Sturny
Secrétaire général du Directoire de l’Eglise              de la Confession d’Augsbourg
