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Vie monastique : les étapes du discernement
bénédictine de Pradines
Le lien avec les SDV
Sur une douzaine de sœurs que j’ai pu accompagner, en à peu près dix ans, trois sont passées par le SDV, une autre a pu le rencontrer brièvement.
Pour les autres, la rencontre avec le monastère a pu se faire à travers d’autres services d’Eglise : aumôneries de lycée, d’université, groupe de confirmands, services « vocationnels » comme l’Ecole de l’Evangile ou le Sycomore de Saint-Etienne... ou à travers une recherche personnelle où le « hasard » (?) joue bien son rôle…
Même si la proportion de jeunes sœurs ayant connu le SDV est faible, il s’agit pour elles d’une expérience positive.
• Le SDV a permis un premier discernement au niveau d’une certaine aptitude (ou non) à la vie religieuse ou d’une première découverte de formes de vocation : passage dans des monastères au cours de camps itinérants pour l’une d’elles, dialogue avec un(e) accompagnateur(trice). Mais les sœurs soulignent qu’il leur a été peu parlé de la vie monastique.
• Une première expérience d’accompagnement spirituel.
• Une initiation à la relecture de sa vie dans l’Evangile et par l’approche de la Parole de Dieu.
• Une ouverture sur d’autres formes de vocation, sur l’Eglise (une sœur qui a rejoint le SDV après discernement d’une vocation monastique a pu ainsi approfondir son propre appel en le confrontant à d’autres, découvrir les fondements communs de la vie religieuse dans le respect des vocations personnelles).
Pour toutes le SDV a été :
• un lieu d’écoute, d’échange d’expériences et de questions ;
• un lieu d’encouragement et de soutien ;
• dans un climat de très grand respect et de liberté : la découverte du monastère de Pradines a été pour chacune une démarche personnelle et totalement libre, même si des liens ont pu se poursuivre avec le groupe SDV, accompagnateur, accompagnatrice.
Les étapes de discernement en vue de l’entrée
Une première approche
Elle se fait à l’hôtellerie avec la sœur hôtelière ou une sœur de la communauté, mais pas la maîtresse des novices pour sauvegarder la liberté de part et d’autre.
Cette étape correspond à une première confrontation avec le réel à travers :
• le côtoiement d’une communauté bien précise (sœurs de l’hôtellerie...) ;
• l’approche de la liturgie ;
• la relation aux autres hôtes.
Un premier discernement peut ainsi avoir lieu.Qu’y a-t-il derrière l’attrait ou la question de la vie monastique : une fuite, une approche très intellectuelle ou idéale, un réel attachement à la personne du Christ ?
S’il semble y avoir un désir réel et sérieux, après quelques temps, la jeune femme peut rencontrer la maîtresse des novices pour essayer de mieux discerner l’appel :
• par la relecture de sa vie, de son histoire : comment vit-elle la continuité entre son vécu et la vie monastique ?
• par la relecture de l’appel à travers la Parole de Dieu (récits de vocation...) ;
• par le renvoi à la vie quotidienne, en particulier à un engagement en Eglise. (Peut-être quelques lectures à cette étape, mais peu et surtout pas la Règle de saint Benoît.)
Une deuxième étape, plus essentielle
Il s’agit du stage (des stages) en communauté.Généralement, il y en a plusieurs : un assez court de quelques jours, un autre de plusieurs semaines pour éprouver dans la durée. C’est là l’épreuve du réel :
• la découverte de la vie monastique dans son caractère concret et quotidien ;
• la découverte de ses propres réactions : le stage permet de passer d’un désir, d’une image à une expérience spirituelle ;
• dans un lieu, une histoire ;
• dans une vie concrète (découverte d’un horaire, très occupé... du travail ! etc.) ;
• « avec ces femmes-là » ;
• avec le corps (importance des réactions physiques, de l’adaptation du corps), la personne que je suis... Cela est exprimé par la sagesse et le réalisme de saint Benoît au chapitre 58 de sa Règle : le noviciat est le lieu où les novices mangent, dorment… et méditent – éventuellement ! – ou par la parole d’Enzo Bianchi : « L’Esprit-Saint tombe sur un homme, une femme, pas sur une silhouette monastique. »
Les questions peuvent alors se préciser :
• Ce lieu, cette histoire, cette communauté peuvent-ils devenir pour moi lieu de vie, d’une vie plus vivante, lieu de rencontre avec le Christ Jésus et le monde ?
• Le désir que je porte en moi rejoint-il celui qui est vécu par cette communauté, pourra-t-il grandir et s’épanouir ?
• Le stage est généralement pour les jeunes femmes que nous accueillons une « épreuve » (dans tous les sens du terme) : temps où tombent les images et illusions, temps des peurs aussi (peur de la clôture, du silence, de la monotonie, etc.), temps d’un déplacement spirituel (une perte de maîtrise, passer de : « Je fais, je conduis... » à « se laisser faire », qui n’empêche pas la paix, la joie).
Ce temps où le ressenti, l’émotionnel peuvent jouer un grand rôle n’est pas le temps de la décision.
La maturation de la vocation : vers la décision d’entrer
Il est important de ne pas prendre de décision « à chaud » mais de renvoyer à la vie ordinaire en proposant un engagement ecclésial, un approfondissement de la foi ou le passage dans des lieux de maturation (par exemple un stage à l’Arche de Jean Vanier, pour l’apprentissage de la vie commune).
Dans cette étape (mais déjà auparavant) il faut entrer dans l’acceptation des délais, remettre en cause des projets, accepter de recevoir « sa » vocation dans le dialogue avec un autre, avec une communauté. Pourront se vérifier et se confirmer plusieurs aptitudes fondamentales (déjà présentes au cours du stage) :
• remettre sa vie entre les mains d’un autre, c’est-à-dire pouvoir faire confiance : c’est l’attitude essentielle du disciple, du fils ;
• passer de « ma vocation personnelle », celle que je « ressens » à l’appel que je reçois dans l’Eglise et pour l’Eglise à travers une communauté déterminée ;
• prendre une décision personnelle où j’engage librement ma personne (et non : « Dites-moi si j’ai la vocation… »), où je vais prendre un risque – risque au niveau du travail, de l’entourage – et où je pose un choix qui implique de me séparer d’autres possibilités bonnes et justes afin de « ne pas rester au carrefour des possibles », comme le dit la Règle de Reuilly.
Dans tout ce contexte, la démarche personnelle de demande d’entrée à la mère abbesse est particulièrement importante : sa réponse au nom de la communauté situe bien le projet dans l’Eglise, à travers cette petite Eglise locale.
Quelques critères de discernement
Ils peuvent être utiles tout au long du noviciat (qui est une longue étape de discernement) et rejoignent ceux que l’on trouve dans la Règle de saint Benoît au chapitre 58 (« la manière de recevoir les frères »).
• La durée et les obstacles (qui viennent d’eux mêmes et qui ne sont pas à ajouter…) permettent de sortir du « tout tout de suite », de l’immédiat, du « ressenti » et de l’émotionnel. Il faut entrer dans un long cheminement, une histoire qui comporte sa part d’obscurité, d’impuissance. Quelle est la force du désir, de l’attachement au Christ ? Quelle est la capacité de durer dans les difficultés, de les relativiser, de les vivre, de les porter à cause du Christ ?
• La vie quotidienne et commune dans ses composantes les plus concrètes. Pouvoir vivre l’altérité sans peur de la différence, des faiblesses (les siennes et celles des autres), de la solitude. Cette vie quotidienne fraternelle peut-elle être le lieu d’une authentique expérience spirituelle et d’une croissance ? C’est là que se joue la vérification la plus sûre d’un appel à la vie monastique.
• L’entrée dans une tradition sans cesse confrontée avec le vécu dans un dialogue avec un « ancien ».C’est l’apprentissage de la remise de soi, de la confiance pour entrer dans un projet commun où je me reconnais et dont peu à peu je me veux solidaire et responsable (consortes), ainsi que la découverte et l’apprentissage des outils de la tradition dans laquelle j’entre : office divin, lectio… sont-ils pour moi lieux de vie, de ressourcement ?
Conclusion très pratique sur les liens entre le monastère de Pradines et le SDV… Avec proposition et invitation : « Venez et voyez ! »