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Témoignage
Demain, quels prêtres ?
"Demain, quels prêtres ?", tel était le titre de la deuxième rencontre sacerdotale organisée par la Communauté de l’Emmanuel à Paray-le-Monial du 12 au 16 octobre 1992. Près de 500 prêtres venus de toute la France se sont retrouvés durant cinq jours pour réfléchir, prier et échanger. Cet événement mérite qu’on en parle !
Il s’agit là en effet d’un rassemblement unique en son genre. Tout d’abord parce qu’il ne se trouve pas d’autre occasion de rassembler un aussi grand nombre de prêtres. Et il faut préciser que les prêtres ainsi rassemblés constituaient un échantillon assez représentatif de l’ensemble du clergé français. Divers par leur âge (moyenne : 58 ans), par leur origine, par leur habit, par leur sensibilité spirituelle et par leur approche pastorale, divers aussi par le type de ministère exercé, ils étaient essentiellement des prêtres diocésains, mais aussi quelques religieux et missionnaires. Majoritairement français, ils accueillaient aussi quelques confrères venus de pays voisins (Belgique, Suisse, Allemagne) , mais aussi de l’Europe de l’Est (polonais, roumains et tchèques), voire d’autre continents (Canada, Afrique, Australie).
Ce qui frappait le plus au cours de ces cinq jours de rencontre, c’était la fraternité vraie et profonde qui régnait entre tous ces prêtres : du jeune au clergyman impeccable au chanoine ensoutané, du prêtre ouvrier à l’aumônier d’hôpital, du vicaire citadin au curé de plusieurs clochers ruraux, tous ont exprimé, dans leurs différences, ce que Guy Gilbert appelait "le 8e sacrement" : la fraternité sacerdotale. Nous étions loin des combats idéologiques et des querelles stériles ! Tous avaient joie à échanger au gré des repas et des allées et venues. Joie aussi à célébrer simplement mais dignement la Liturgie des Heures et l’Eucharistie.
Ce rassemblement était original en ce sens où aujourd’hui rares sont les occasions pour les prêtres de se retrouver strictement entre eux pour aborder les questions qui les touchent. Rares sont les occasions de conforter le corps presbytéral dans son identité et sa mission. Or, dans un contexte culturel et ecclésial difficile, cela constitue une grâce incomparable : où les prêtres s’entendent-ils redire ainsi leur identité profonde ? Où sont-ils ainsi appelés à la conversion pour se ré-enraciner dans la prière, pour se renouveler dans le sacrement de pénitence et de réconciliation ?
C’est dans des lieux symboliquement forts que se déroulait cette rencontre : Paray-le-Monial et Ars. Paray, c’est la cité du Sacré Coeur, le lieu privilégié de proximité de ce Coeur qui a tant aimé le monde... Et puis, il y avait une journée de pèlerinage à Ars, le village du saint patron de tous les curés du monde ! Il est bon pour des pasteurs de méditer sur la fécondité d’une vie livrée, d’une pauvreté évangélique vécue saintement. Et quelle grâce de se voir invité à se confesser en ce haut lieu de la miséricorde ! Il convient d’ajouter qu’en l’un et l’autre lieu, la présence de séminaristes pour la célébration de l’Eucharistie était un signe d’Espérance. Même si les séminaristes sont moins nombreux et bien différents de ce qu’étaient leurs aînés, il y avait la joie de voir la relève, la grâce de contempler l’aventure apostolique qui se poursuit...
Il est bien difficile de rendre compte en quelques lignes des interventions variées et de leur qualité. Mais on peut affirmer sans crainte que la grande majorité a suscité l’intérêt et stimulé la réflexion, conduit à la contemplation et nourri l’espérance. Comment résumer le bel exposé théologique du Père Gustave Martel qui nous a rappelé avec passion la raison d’être de notre ministère enraciné dans le Mystère du Christ ? Comment oublier les paroles sereines du cardinal Danneels, celles d’un pasteur nous resituant sans faux-fuyant devant les exigences de notre mission et nous invitant à la confiance et à l’espérance sans nous cacher les difficultés ? Comment ne pas avoir été marqué par le téloignage de Jean Remy, un frère prêtre s’ouvrant avec simplicité de son chemin de conversion ? Un exemple vivant qui rappelle clairement la configuration au Christ dans son mystère pascal et le primat de la prière. Comment ne pas s’être laissé tocher par les paroles simples et fortes de Jean, de Philippe Maillard et de Guy Gilbert, exprimant chacun avec sa grâce l’importance de l’accueil du pauvre dans notre ministère ?
Il faut rendre hommage à la communauté de l’Emmanuel. Elle a su mettre son expérience et ses moyens au service du plus grand nombre. Restant discrète, elle n’a pas cherché à imposer son style ni à donner des leçons. Mais elle a fourni aux prêtres les moyens d’un "renouveau" pour qu’ils soient confirmés dans leur identité, soutenus dans leur espérance et stimulés pour trouver un nouvel élan missionnaire. Une soixantaine de laïcs venus de toute la France avaient consacré leur semaine pour assurer l’organisation et les services matériels.
A entendre les réflexions des prêtres à l’issue de la semaine, on devine que beaucoup reviendront l’an prochain (du 18 au 22 octobre 1993) et engageront nombre de leurs confrères à les suivre. C’est dire si cette initiative rencontre une attente du clergé et répond à un besoin réel !