Message du pape Jean-Paul II pour la Journée Mondiale de prière pour les Vocations


- 10 mai 1992-

Comme chaque année le pape Jean Paul II adresse un message à l’occasion de la Journée Mondiale de prière pour les Vocations.
Cette année, le pape invite à prier spécialement pour les vocations religieuses (apostoliques ou contemplatives). Peut-être n’était-il pas inutile de rappeler que la "J.M.V." est bien une supplication adressée à Dieu, en direction de toutes les vocations spécifiques parmi lesquelles la vocation religieuse car "sans ce signe concret, la charité qui anime l’Eglise tout entière risque de se refroidir..."

Vénérables Frères dans l’épiscopat,
très chers Frères et Sœurs du monde entier !

1. "Les disciples étaient pleins de joie et d’Esprit Saint" (Ac 13, 52). C’est ce que nous lisons dans la liturgie du IVème dimanche de Pâques ; et en effet chaque communauté, en voyant augmenter le nombre de ceux qui découvrent le trésor caché du Royaume des cieux et laissent tout pour se consacrer uniquement aux affaires du Seigneur (cf. Mt 13, 44), se sent remplie de cette joie qui provient de la Parole de Dieu et de la mystérieuse action de son Esprit.

C’est pourquoi, réconfortée par ces paroles du Livre Saint et par cette expérience, l’Eglise célèbre chaque année une Journée spéciale de prière pour les vocations, confiante en la promesse que tout ce qu’elle demandera au Père au nom du Seigneur lui sera donné (cf. Jn 16, 23).

Pour cette circonstance désormais toute proche, je désire cette année vous inviter à prier pour que l’Esprit conduise un nombre croissant de fidèles, spécialement les jeunes, à s’engager "de tout leur cœur, de toute leur âme et de toutes leurs forces" (Dt 6, 5 ; cf. Mc 12, 30 ; Mt 22, 37) dans l’amour de Dieu, pour le servir dans ces formes particulières de vie chrétienne que réalise la consécration religieuse. Cette dernière s’exprime diversement dans l’état sacerdotal, dans la profession et les vœux, dans le choix des monastères ou des communautés apostoliques, ou bien encore dans l’état séculier.

2. Le Concile Vatican II a reconnu que ce "don spécial" est le signe d’un choix, en tant qu’il permet à ceux qui l’accueillent de se conformer plus profondément à "cette vie de virginité et de pauvreté, que le Christ Seigneur a voulue pour lui-même et qu’a embrassée la Vierge sa Mère"(cf. Lumen Gentium, 46)

Mon vénéré prédécesseur Paul VI a pu affirmer que la vie consacrée est le témoignage privilégié d’une recherche constante de Dieu, d’un amour unique et indivis pour le Christ, d’une consécration absolue a la croissance de son Royaume. Sans ce signe concret, la charité qui anime l’Eglise tout entière risque de se refroidir, le paradoxe de l’Evangile de s’émousser, le "sel" de la foi de se diluer dans un monde en phase de sécularisation" (Exhort. apost. Evangelica Testaficatio, 3).

La vocation des consacrés, en effet, comporte la proclamation active de l’Evangile dans des oeuvres apostoliques et dans des services de charité répondant à un mode d’agir authentiquement ecclésial.

L’Eglise au cours de son histoire a toujours été vivifiée et confortée par de nombreux religieux et religieuses, témoins de l’amour sans limite pour le Seigneur Jésus, et, en des temps plus proches de nous, elle a trouvé une aide appréciable en un grand nombre de personnes consacrées qui, tout en vivant dans le monde, ont voulu être pour le monde un levain de sanctification et un ferment pour des initiatives inspirées de l’Evangile.

3. Nous devons affirmer avec force qu’aujourd’hui encore le témoignage de la vie consacrée est nécessaire, pour que l’homme n’oublie pas que sa vraie dimension est l’éternel. L’homme a été destiné à habiter "des cieux nouveaux et une terre nouvelle" (2 P 3, 13), et à proclamer que le bonheur définitif est donné seulement par l’Amour infini de Dieu.

Comme serait appauvrie notre époque si venait à se raréfier la présence des existences consacrées à cet Amour ; comme serait appauvrie notre société si elle n’était poussée à élever le regard là où se trouvent les vraies joies !

Comme serait aussi appauvrie l’Eglise, si venait à manquer ce qui manifeste concrètement et avec force l’actualité éternelle du don de sa propre vie pour le Royaume des Cieux.

Le peuple chrétien a besoin d’hommes et de femmes qui trouvent dans l’offrande d’eux-mêmes au Seigneur la pleine justification de leur existence et assume ainsi le devoir d’être "lumière du monde" et "sel de la terre", constructeurs d’espérance pour tous ceux qui s’interrogent sur la nouveauté éternelle de l’idéal chrétien.

4. Nous ne pouvons oublier qu’en certaines régions le nombre de ceux qui acceptent de se consacrer au Christ est en train de diminuer. D’où la nécessité de susciter de façon croissante l’engagement de prière et les initiatives adéquates pour empêcher que cette conjoncture ait des conséquences graves pour le peuple de Dieu.

J’invite donc mes Frères dans l’épiscopat à promouvoir spécialement parmi le clergé et les laïcs la connaissance et l’estime pour la vie consacrée. Qu’ils fassent en sorte que, dans les séminaires, surtout, ne manquent jamais des cours et des instructions sur la valeur de la vie religieuse.

J’exhorte ensuite les prêtres à ne jamais renoncer de proposer aux jeunes ce haut et noble idéal. Nous savons tous combien est importante l’action du guide spirituel pour que les germes de vocation semés "à pleine main" par la grâce puissent se développer et parvenir à maturité.

Aux catéchistes, je recommande de présenter avec solidarité et cohérence dans la doctrine ce don divin que le Seigneur a fait à son Eglise.

Aux parents je dis, en faisant confiance à leur sensibilité chrétienne alimentée d’une foi vive, qu’ils pourront goûter la joie du don de Dieu, qui entrera dans leur maison, si un fils ou une fille est appelé au service du Seigneur.

Aux théologiens et aux auteurs des disciplines religieuses, j’adresse une fervente invitation, pour qu’ils s’engagent à mettre en lumière selon la tradition catholique la signification théologique de la vie consacrée.

Aux éducateurs, je recommande de présenter fréquemment les grandes figures de consacrés, religieux et séculiers, qui ont servi l’Eglise et la société dans les domaines les plus variés.

Aux Familles religieuses et aux Instituts de vie séculiers, je rappelle que la première et la plus efficace pastorale des vocations est le témoignage, quand celui-ci s’exprime par une vie pleine de joie dans le service du Seigneur.

J’exhorte, de même, les membres des Instituts de vie contemplative, à considérer que le vrai secret du renouvellement spirituel et de la fécondité apostolique de la vie consacrée a ses racines dans leur prière. Riche est le patrimoine spirituel et doctrinal que possèdent les contemplatifs, et le monde cherche précisément en cette richesse une réponse aux interrogations que suscite constamment notre époque.

Mais je me tourne surtout vers les jeunes d’aujourd’hui, et je leur dis : "Laissez-vous séduire par l’Eternel", en répétant la parole du prophète : "tu m’as séduit, Seigneur... Tu m’a maîtrisé et tu as été le plus fort" (Jr 20, 7)

Laissez-vous fasciner par le Christ, l’infini apparu parmi vous sous forme visible et imitable. Laissez-vous attirer par son exemple, qui a changé l’histoire du monde en l’orientant vers une fin exaltante. Laissez-vous aimer de l’amour de l’Esprit, qui veut détourner vos yeux des modèles terrestres, pour inaugurer en vous la vie de l’homme nouveau, créé selon Dieu dans la justice et la vraie sainteté (cf. Ep 4, 24).

Devenez amoureux de Jésus-Christ, pour vivre de sa vie, afin que notre monde puisse avoir la vie dans la lumière de l’Evangile.

5. Nous confions à la Vierge Marie la grande cause de la vie consacrée. A Elle, la Mère des Vocations, comme nous y invite sa parole "faites ce qu’il vous dira" (Jn 2, 5) nous demandons :

"O Vierge Marie, nous te recommandons notre jeunesse, spécialement les jeunes appelés à suivre de plus près ton Fils.
Tu connais toutes les difficultés qu’ils doivent affronter, toutes les luttes, tous les obstacles.
Aide-les à prononcer eux-aussi leur "oui" à l’appel divin, comme tu as fait à l’invitation de l’Ange.
Attire-les près de ton cœur, pour qu’ils puissent comprendre avec toi la beauté et la joie qui les attend, quand le Tout-Puissant les appellera a son intimité, pour les constituer témoins de son Amour et les rendre capables de réjouir l’Eglise par leur consécration.
O Vierge Marie, obtiens-nous de pouvoir nous réjouir avec toi, en voyant que l’amour de ton Fils suscite accueil, acceptation profonde et réponse. Obtiens-nous de voir aussi se réaliser chez nos jeunes les merveilles de la mystérieuse action de l’Esprit Saint.

Avec ma bénédiction.

Du Vatican, le 1er novembre 1991, en la Solennité de tous les Saints, la quatorzième année de mon Pontificat.

Jean Paul II