Faire l’Europe des vocations ?


RENCONTRE DES RELIGIEUX ET DES RELIGIEUSES d’EUROPE
DÉLÉGUÉS DES C.S.M.- C.S.M.F.
POUR LA PASTORALE DES VOCATIONS AU NIVEAU NATIONAL

Dominique SADOUX
religieuse du Sacré Cœur de Jésus,
membre de l’équipe pastorale du S.N.V.

Le 4ème Congrès européen des vocations s’est tenu cette année à LISBONNE, du 10 au 14 Juin 1991. A la fin de la session les participants ont élaboré le texte suivant destiné à la Conférence des Supérieur(e)s Majeur(e)s d’Europe dont les secrétaires, hélas, étaient absents.

"L’U.C.E.S.M. a célébré son 4ème Congrès européen pour les délégués par les Conférences nationale à la pastorale des vocations d’Europe. Le Congrès s’est déroulé au PORTUGAL, à LINDA PASTORA, près de Lisbonne, du 10 au 14 juin 1991.

Le thème traitait de l’accompagnement au long de l’itinéraire d’une vocation religieuse. Il fut abordé par le Père Luis GARCIA DOMINGUEZ, s.j.

Onze nations étaient représentées .

ALLEMAGNE - ANGLETERRE - ESPAGNE - FRANCE - GRÈCE - ITALIE - MALTE - POLOGNE - PORTUGAL - SUISSE - YOUGOSLAVIE

Il y avait 27 participants.

Le thème, traité à partir d’une approche psycho-spirituelle, fut l’objet de réflexion et de discussion en groupes linguistiques, et de partages en assemblées plénières. On a souligné surtout qu’il y a divers processus d’accompagnements vocationnels, exprimant les situations culturelles différentes dans lesquelles nous travaillons.

Par ailleurs, nous avons constaté différentes manières d’organiser et de remplir le service des vocations dans nos différentes nations. Voici les principales réflexions partagées à ce sujet :

1/ la collaboration entre tous ceux et celles qui travaillent pour les vocations (prêtres, religieux, religieuses, laïcs) reste souvent à l’état de désir sauf dans quelques pays.

2/ Souvent, beaucoup d’initiatives riches et intéressantes demeurent inconnues car elles ne sont pas communiquées. Parfois elles rencontrent l’indifférence et même la résistance d’agents pastoraux.

3/ Dans les pays assez affectés par la sécularisation nous admirons le travail de sensibilisation et les propositions faites. Dans certains de ces pays, il y a une collaboration entre tous.

4/ La richesse de ce Congrès s’exprime surtout par la diversité des pays s’ouvrant largement sur l’Europe d’Ouest en Est..."

J’ai participé à ce Congrès comme déléguée du Service National de France. J’ai aimé les contacts entre nos réalités si différentes.

Nous avons expérimenté ensemble la richesse et la difficulté de notre diversité (spécialement la langue !). Cependant nous avons pu recevoir une information sur la pastorale des vocations religieuses, dans les pays des participants. En voici les comptes rendus :

ALLEMAGNE
Il n’y a pas de délégué(e) religieux(se) au Service National des Vocations. Il y a des retraites, prières, publications proposées, des expériences particulières.

Cependant on offre un programme de formation des formateurs en quatre semaines séparées, organisé par une équipe : un prêtre, une religieuse, un couple.

ANGLETERRE
Une religieuse et une secrétaire assurent tout le "service des vocations".

L’atmosphère du pays n’est pas favorable aux vocations. Cependant on a clarifié nos buts. Nos "images" des vocations commencent à changer. On remarque une soif de Dieu, de l’Évangile. On inclue les laïcs dans nos initiatives. Nous avons sept régions ayant des "promoteurs" de vocation (éducation, formation). Un séminaire sur le discernement. Nous diffusons du matériel dans les paroisses, utilisé dans 50 % des paroisses

Nous sommes en progrès pour la collaboration avec les prêtres.

ESPAGNE
Les délégués de la CSM-CSMF sont séparés des délégués de la Commission épiscopale. Les religieux et les religieuses ont un (e) déléguée) pour la vie apostolique. Nos activités sont dirigées vers les accompagnateurs : formation, sensibilisation des personnes surtout dans les congrégations. Il y a une bonne collaboration inter-instituts et nous avons nos publications.

GRECE
La situation : 40 000 catholiques pour dix millions d’habitants !
(20 000 à ATHÈNES -10 000 dans les deux îles - 10 000 pour tout le reste de la Grèce)

Il y a cependant un comité de quatre personnes pour les vocations une religieuse, un religieux, un prêtre séculier, un prêtre religieux. Chaque Institut a son responsable. On collabore pour certaines initiatives, par exemple pour amener des jeunes en France rencontrer un "peuple chrétien" !

Dans un groupe "vocation" on reçoit tout le monde. En ce moment il y a trois séminaristes à ROME, une ordination, pas de demande d’entrée dans la vie religieuse.

ITALIE
La crise a réveillé les Instituts ! la pastorale des vocations est pourtant encore en crise pour la vie religieuse. Ce qui est positif : on est passé d’une pastorale des vocations de quelques-uns à tous les religieux.

On assiste à un réveil des groupes ou mouvements qui donnent un sens d’appartenance.

Au Service National : il y a des initiatives d’animation, de formation (JMV - revue bimensuelle - Congrès ou Séminaires pour la formation des accompagnateurs, y compris des laïcs).

Il y a des communautés d’accueil de jeunes. Et le Service National organise un Congrès pour les jeunes eux-mêmes, pour être en prise avec eux.

MALTE
Il y a un SNV collaborant (prêtres, religieux et religieuses). C’est un Conseil inter diocésain (12 Instituts religieux ; 18 Congrégations féminines). Le but est d’accompagner les accompagnateurs (prière, formation). On prend pour cela de bonnes initiatives de formation (famille et vocations), une mobilisation à la prière.

Deux semaines avant la JMV les monastères sont mobilisés pour la prière, tous les groupes vocationnels pour jeunes de 16 ans et plus se retrouvent la veille et le dimanche rassemble tous les groupes de chrétiens. On fait des expositions dans les écoles. Chaque promoteur doit animer une école, y faire une activité dans l’année. Nous avons nos publications.

POLOGNE
Nous sommes encore en contexte anté-conciliaire clérical et légaliste par certains côtés. Notre modèle d’Église est pré-conciliaire. La démocratie apporte un changement. Les vocations ont diminué. Les laïcs sont encore trop "objets" plutôt que "sujets" de la pastorale. Il y a trop de travail de "chapelles". On donne plus d’information que de formation. Nous sommes en crise religieuse et économique.

Nous manquons de formateurs (2 % dans les séminaires).

Pourtant dans certaines familles religieuses il y a plus de vocations ces dernières années. La collaboration inter-instituts a besoin de progresser.

Peu à peu on commence à s’ouvrir au partage de vie, à la formation plus qu’à l’information. On se prépare à faire face à la crise que l’Europe de l’Ouest a connu il y a 20 ans !

PORTUGAL
Nous avons 30 Ordres masculins, 90 féminins. La CSM-CSMF a une Commission exécutive mixte (4 femmes, 4 hommes) pour les vocations. Tous les ans on organise des sessions pour animateurs. Chaque Institut fait sa pastorale mais il y a des repères pour les étapes.

1ère étape  : faire comprendre, assumer les valeurs de la vie religieuse (être chrétien, être disciple), réfléchir sur la vocation, prier , dialogue voir les problèmes personnels, donner une orientation spirituelle.

2ème étape  : amener à clarifier les motifs, discernement, expérience de missions communautaires, camps d’évangélisation

3ème étape  : on a une intuition plus forte de la vocation vers un Institut

4ème étape : formation dans l’Institut. La dynamique est la suivante :

1) une option pour Jésus-Christ / dans l’Eglise / au service des pauvres,

2) passer de l"’idée" à la vie consacrée : un style de vie, celui de tout consacré et une donation définitive pour les autres.

SUISSE ALLEMANDE
Rappelons le contexte : 47 % de catholiques ; trois langues ; trois Centres des Vocations ; 4.900 religieuses apostoliques en Suisse Alémanique (ZURICH).

La Suisse est en crise religieuse : 25 % de pratiquants dans le rural ; 12 % dans les villes.

La Suisse Romande (LAUSANNE) est plus organisée pour la pastorale des vocations.

A ZURICH on commence à se structurer en équipe et à faire des choses ensemble (bulletin - prière pour les vocations).

I1 y a cependant des initiatives intéressantes comme des camps vocation pour les jeunes de 10 à 18 ans.

YOUGOSLAVIE
La situation politique tendue... confédération de six Républiques ! Quatre langues, trois religions, deux Eglises.

Dans l’Église on n’est pas encore prêts à affronter les problèmes, surtout socialement (écoles, catéchisme). On ne peut faire beaucoup de pastorale vocationnelle sauf en paroisse (on emmène 700 à 800 garçons en colonies salésiennes) et pour les filles, la même chose.

Il y a un congrès annuel de formateurs, une action diocésaine aussi. Des groupes, des week-ends, etc.

Les jeunes ont besoin de Foi, devant le réveil de la liberté et d’autres influences non chrétiennes, surtout des religions asiatiques, sectes...

Sur 22 millions d’habitants, il y a 7 millions de catholiques.

Ces quelques aperçus sont limités et traduits à partir de langues parfois non maternelles ! (Yougoslavie, etc.) Ils nous donnent pourtant une idée de notre diversité et de ses conséquences :

Certains pays ont un Service National (ou un Centre National) des Vocations où prêtres, religieux, laïcs sont participants et actifs.

D’autres s’organisent autrement. Les religieux travaillent à part. Mais tous souhaitent une pastorale concertée et ouverte. Nous pouvons sûrement nous aider par la communication de nos initiatives.

Par ailleurs nous avons pu élargir notre horizon à la dimension du monde en écoutant la communication du Père Rafaele SACCO (Congrégation pour l’Éducation Catholique au Vatican). Il a insisté sur le besoin de travailler la question "langage, culture et vocations" et il nous a donné les informations suivantes :

1) une enquête internationale sur la pastorale des vocations dans les Eglises particulières sera bientôt publiée

2) La publication sur la vie religieuse est 60 % moins abondante que par le passé. Dans beaucoup d’universités on ne parle plus de la vie consacrée... La responsabilité des évêques pour toutes les vocations est ré-affirmée

3) Globalement, les pays ayant le plus grand nombre de consacrés (en général) sont : l’EUROPE, les U.S.A., l’AUSTRALIE. Mais les vocations sont en lente reprise.

En AFRIQUE ET SUD-EST ASIATIQUE, le nombre des vocations augmente mais les besoins en structures et en personnes sont immenses.

En AMÉRIQUE CENTRALE ET DU SUD les problèmes pastoraux sont grands, les charges trop lourdes. On manque de personnel.

Au cours de nos échanges, de manière concrète, des méthodes variées d’accompagnement de groupe ont été partagées.

En voici quelques flashes :

1/ DANS L’ACCOMPAGNEMENT DU GROUPE DE RECHERCHE, VEILLER AUX POINTS SUIVANTS

Les relations sont fondamentales pour la connaissance de soi et pour la pratique de la Charité

Donner au groupe les conditions indispensables pour faire une réelle expérience de Dieu

La vie de groupe est source de réalisme sur soi, sur les autres.

Elle peut être lieu d’éducation au don de soi, à la mission, à la responsabilité personnelle.

2/ QUELQUES ÉTAPES D’UN CHEMINEMENT POSSIBLE EN GROUPE

1ère étape : "VENEZ ET VOYEZ !"

2ème étape : AU THABOR (expérience de prière)

3ème étape : EN GALILÉE (expérience avec les pauvres)

4ème étape : EN COMMUNAUTÉ (le groupe fait une expérience communautaire)

3/ DANS LE CHEMINEMENT DES PERSONNES ET DES GROUPES, il est important d’être attentif simultanément aux domaines suivants la Foi - les relatons - l’affectivité - le sens missionnaire

ou encore : avoir une approche "wholistic" (globale) c’est-à-dire susciter la triple question : qui suis-je ? qui suis-je socialement ? qui suis-je spirituellement ?

Pédagogiquement, il convient de tenir ensemble

- la recherche de l’authenticité

- la découverte de la vocation non seulement comme choix mais d’abord comme Don, Appel

- le rôle de la prière

- la nécessité de la "mise à l’épreuve" (parfois être l’avocat du diable !)

En conclusion, nous pouvions nous formuler cette conviction, quelle que soit notre situation :

En pastorale des vocations, toute la personne est importante, mais une personne en relation (importance des groupes) et le temps est nécessaire pour un "processus", un cheminement progressif - servant les libertés -.

Avant de nous séparer, nous avons formulé le souhait que les délégué(e)s des Conférences nationales de religieux et de religieuses aux Services Nationaux des Vocations, se retrouvent dans deux ans. Mais que les secrétaires de ces Conférences y participent non sans l’aide de la traduction simultanée !. Le lieu souhaité : la YOUGOSLAVIE. La situation dans ce pays ne peut que stimuler notre prière.

En tout cas la présence de religieux et de religieuses venant de l’Europe de l’Est était une grande ouverture élargissant notre pastorale à des dimensions nouvelles.