Ensemble au service des vocations

Se connaître et faire confiance dans la vérité

Le 10 mai 1981, le pape Jean Paul II disait à la Conférence des responsables du Renouveau Charismatique 1’importance du ministère épiscopal à l’égard du Renouveau Charismatique.

"Par cet exercice de leur responsabilité pastorale, les évêques ont rendu un grand service de manière à assurer au Renouveau un modèle de croissance et de développement pleinement ouvert à toutes les richesses de l’Amour de Dieu dans son Eglise.." et il ajoutait :

"Le prêtre ne peut exercer son service en faveur du Renouveau que s’il adopte une attitude positive à son égard, fondée sur le désir partagé avec chaque chrétien baptisé de croître dans les dons de l’Esprit Saint"
(Doc. Cath. 3/4/1988 - n° 1959)

Ces propos de Jean Paul II s’adressent sans doute aux membres du S.D.V. comme aux responsables des communautés, ainsi qu’aux responsables des groupes de prière, qui sont sûrement appelés à se connaître en vérité et à s’accueillir dans une volonté positive de partage.

Les membres du Renouveau ont-ils connaissance du S.D.V. et des antennes de celui-ci ? Que savent-ils de ce que l’Eglise diocésaine s’efforce de promouvoir au service des vocations ? Comment se sentent-ils concernés par cette mission confiée par l’évêque, signe de la mission de toute l’Eglise diocésaine ?

Le S.D.V. est-il en relation avec le Renouveau charismatique ? Connaît-il les responsables diocésains ou locaux des groupes de prière ? A-t-il pris contact avec le ou les communautés du Renouveau Charismatique vivant dans le diocèse ?

La vocation universelle à la sainteté

Il me semble qu’il n’est pas possible de situer les vocations spécifiques sans la référence fondamentale à la vocation et à la mission de tout baptisé. C’est dans la vocation baptismale que tout s’enracine, nous le savons bien. Toute vocation spécifique exprime à la fois l’épanouissement de la vocation baptismale comme un appel et le don de Dieu fait aux baptisés pour qu’ils puissent réaliser leur vocation et leur mission au service de Dieu et de leurs frères. Dans l’éveil et l’accompagnement des vocations spécifiques, le S.D.V. ne doit pas oublier la vocation première de tout baptisé.

Dans les communautés charismatiques la vocation universelle à la sainteté apparaît de manière nouvelle et particulière. En effet, le fait que des époux et des parents, en gardant leur statut d’époux, puissent faire vœu de pauvreté et de disponibilité et promettent de vivre selon les exigences sacramentelles du mariage, signifie avec plus de force que tout baptisé est appelé à la sainteté, dans l’état qui est le sien.

Je ne pense pas que l’appel à la vie consacrée, ou au ministère sacerdotal ou diaconal, puisse négliger la vocation à la sainteté des baptisés et puisse être entendu sans un effort persévérant et audacieux auprès des foyers et des familles. Qu’il me suffise de citer Jean Paul II dans son exhortation apostolique Christifideles au n° 16 :

"Sur la vocation universelle à la sainteté, le Concile Vatican II s’est exprimé en termes lumineux. On peut affirmer que c’est l’orientation principale qui a été fixée pour les fils et les filles de l’Eglise, par ce Concile voulu pour le renouvellement évangélique de la vie chrétienne (1). Cette orientation n’est pas une simple exhortation morale, mais une exigence incontournable du mystère de l’Eglise"

Le S.N.V. doit bien se retrouver dans cette perspective à travers l’appel qu’il lance à la prochaine session nationale de Lourdes : "Laïcs, serviteurs de l’appel".

Tous appelés

Une première question m’apparaît ressortir de cette prise de conscience de l’appel universel à la sainteté : Comment cette exigence incontournable s’exprime-t-elle dans nos communautés ? Par quels moyens les S.D.V. sont-ils porteurs de cet appel qui est chemin, pour l’appel spécifique au sacerdoce ministériel et à la vie consacrée ?

Les communautés charismatiques et les groupes de prière peuvent interroger nos communautés chrétiennes pas seulement sur "la prière pour les vocations", mais aussi sur la nature de la prière qui est "entretien plein d’amour avec Dieu".

Il n’est peut-être pas inutile de citer le n° 2 de la lettre de Jean-Paul II à l’occasion de la dernière Journée Mondiale de prière pour les Vocations :

"Le chemin de la catéchèse atteint un point particulièrement sensible lorsqu’il devient école de prière, c’est-à-dire formation à l’entretien plein d’amour avec Dieu Créateur et Père, avec le Christ Maître et Sauveur, avec l’Esprit Saint qui donne la Vie. Grâce à cet entretien, ce qu’on écoute et ce qu’on apprend ne reste pas uniquement dans la tête, mais saisit le cœur et cherche à passer dans la vie."

Il n’est pas question de faire un procès quelconque à la catéchèse, ni aux catéchistes ; j’en connais trop l’immense et persévérant dévouement, mais les catéchistes savent combien nombre de réunions de catéchèse ont du mal à intégrer cette dimension de prière, faute de temps.

Nous savons bien le reproche d’émotivité et de trop forte sensibilité fait parfois aux charismatiques. Mais les jeunes ne trouvent-ils pas là un chemin -qu’il faudra sans doute purifier- vers Dieu ? N’est-ce pas à partir de cette joie de la rencontre aimante avec Dieu que certains et certaines veulent lui donner une réponse d’amour ? Osons-nous, dans nos mouvements, dans nos rencontres de jeunes, dans les journées du S.D.V., dans la préparation à la confirmation, ouvrir à cette prière qui est réponse à Dieu ? Il n’est guère de groupe de confirmands qui ne me dise leur joie d’avoir pu passer quelques heures de silence, de prière et d’échanges dans un monastère de moines ou de moniales.

Discernement

Je comprends bien le cheminement long, persévérant, respectueux des S.D.V. à l’égard de jeunes et de moins jeunes, dans l’interpellation à propos de la vocation spécifique. En effet, il me semble nécessaire de croire aux médiations humaines ordinaires, souvent lentes, parfois chaotiques, et non exemptes de déception. Certes, il nous faut respecter la liberté des uns et des autres. Pourtant, le Renouveau Charismatique remet en lumière le fait que Dieu peut être "pressé" et qu’il peut appeler sans beaucoup de préparation. "Zachée, descends vite : aujourd’hui, il faut que j’aille chez toi.Vite il descendit et reçut Jésus avec joie."

Avons-nous l’audace de l’appel ? Croyons-nous que Dieu est toujours capable d’appeler et de transformer le cœur ? "L’immédiateté" de Dieu que le Renouveau Charismatique remet parfois en valeur, un peu trop rapide et assuré à notre gré, ne nous interpelle-t-elle pas ? Que faisons-nous au S.D.V., en communauté, dans les rencontres, pour faire entendre l’appel et pour accueillir ceux qui se disent appelés ?

Par contre, le Renouveau Charismatique n’a-t-il pas à considérer la démarche prudente et respectueuse de beaucoup de membres du S.D.V. et de nos communautés ? Le discernement de toute vocation ne demande-t-il pas du temps ?

J’ai assisté du Châtelard à une rencontre bénéfique entre religieux et membres du Renouveau Charismatique sur le discernement à l’égard des jeunes en formation. En ce domaine, les échanges entre les uns et les autres ne pourraient être que bénéfiques s’ils se font dans un climat ecclésial de communion.

En effet, il me semble que le Renouveau Charismatique a besoin de se laisser interroger par la démarche lente, sérieuse de 1’accompagnement qui a pour lui une tradition éprouvée. Mais les S.D.V. n’ont-ils pas à se laisser quelque peu bousculer et interpeller par la nouveauté de l’Esprit ? Il est vrai que dans l’un et l’autre cas, il s’agit de ne rien ménager ni du sens spirituel ni de la psychologie pour accompagner ceux et celles à qui s’adresse ou s’est adressé l’appel.

Susciter et accompagner les vocations spécifiques

C’est une évidence, les vocations spécifiques dans le Renouveau Charismatique sont proportionnellement beaucoup plus nombreuses que dans le reste du peuple de Dieu. C’est vrai en France et c’est vrai dans les autres pays. "C’est ce que déclaraient en 1987, cent neuf évêques d’Amérique latine, réunis en Colombie (Doc. Cath. 3/4/1988 n°1959) :

"Un fait toujours plus palpable, disaient-ils, est l’augmentation au sacerdoce et à la vie religieuse dans tous les pays où sont apparus les différents mouvements spirituels. Cette floraison de vocations est l’un des fruits les meilleurs et les plus prometteurs du Renouveau dans l’Esprit".

Le nombre des séminaristes issus du Renouveau Charismatique en France et actuellement en formation, correspond, semble-t-il, à 12 % de l’ensemble des séminaristes en formation pour nos diocèses de France. Certes, ce n’est pas le raz de marée, mais c’est très significatif et donc interrogateur. Il est vrai que toutes les communautés du Renouveau Charismatiques ne suscitent pas autant de vocations spécifiques. Telle ou telle d’entre elles appelle bien davantage des permanents laïcs en nombre.

Voilà une question qui interroge très fort notre Eglise, le peuple chrétien, le S.D.V. Ne se crée-t-il pas une mentalité qui sans trop de difficultés accepte ou accepterait une Eglise avec un minimum de prêtres, de diacres, de religieux et de religieuses, de membres d’Instituts séculiers ?

Le Concile Vatican II a remis en lumière ce qu’est essentiellement l’Eglise, à savoir mystère, Corps du Christ, peuple de Dieu appelé par grâce et par don.

A coup sûr, le Renouveau Charismatique s’attache davantage à vivre du mystère de l’Eglise sans oublier pourtant l’importance de l’Institution. Peut-être est-il ainsi plus immédiatement accueillant aux ministères qui manifestent les dons de Dieu pour le bien de tous et de toutes, comme aux charismes donnés par l’Esprit à l’Eglise.

Comment le S.D.V. peut-il aider les chrétiens à mieux saisir la nécessité du ministère ordonné pour que l’Eglise soit l’Eglise donnée et envoyée par Dieu ? Comment a-t-il conscience de sa mission d’aider l’Eglise diocésaine à demander, à estimer, à accueillir le don du ministère presbytéral et diaconal et celui de la vie religieuse ?

Comment s’aider mutuellement à découvrir que le mystère de l’Eglise se vit dans l’Eglise particulière, autour de l’évêque qui en est le Pasteur et le signe de l’unité, en lien, bien sûr, avec l’Eglise universelle ?

Le S.D.V. et le Renouveau Charismatique peuvent s’aider à porter attention aux jeunes afin que chacun puisse discerner l’appel de Dieu sur lui. Ils peuvent s’éclairer mutuellement sur les motivations des jeunes, les aider à s’ouvrir en vérité aux besoins d’une Eglise diocésaine et aux réalités de la vie et de la mission des communautés.

S.D.V. et Renouveau ne doivent-ils pas essentiellement en ce domaine, porter le souci d’accompagner les jeunes pour qu’ils trouvent avec la grâce de Dieu, leur propre chemin ?

N’est-il pas nécessaire que le S.D.V. et le Renouveau Charismatique échangent sur les raisons qui conduisent les jeunes à accueillir l’appel spécifique au presbytérat ou à la vie consacrée ? Qu’est-ce qui fait choisir une communauté ? Qu’est-ce qui fait craindre de devenir prêtre diocésain ? Qu’est-ce qui, au contraire, conduit à ce choix ?

"L’Esprit-Saint, protagoniste de la Mission"

C’est là le titre du chapitre III de l’Encyclique "Redemptoris missio".

J’y vois pour ma part un appel à approfondir et à mieux accueillir dans la Foi l’œuvre de l’Esprit Saint et de Marie dans l’appel vocationnel en Eglise.

Puis-je dire que le Renouveau Charismatique est sans doute appelé à "réveiller" cette prise de conscience dans l’Eglise ?

Ce n’est pas sans agacement parfois que l’on entend parler, sans bien la définir, de "nouvelle évangélisation"... , mais n’y a-t-il pas à la source des vocations spécifiques en particulier, l’urgence de l’annonce de la "Bonne Nouvelle" au monde entier et à tous les hommes ?

On parle de plus de trois millions de Français frappés "d’illettrisme" et on s’en émeut avec raison, sans prendre toujours les vrais moyens d’y remédier. A la source des vocations spécifiques n’y a-t-il pas cette prise de conscience du manque de foi et de l’ignorance de l’Evangile de tant et tant de nos frères et sœurs dans le monde d’aujourd’hui ?

"Qui enverrai-je ?" dit Dieu par son prophète.

"Toute la portée missionnaire de l’Evangile de Jean se trouve exprimée dans la ’prière sacerdotale’ : « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ ». (Jn 17, 3). Le but dernier de la mission est de faire participer à la communion qui existe entre le Père et le Fils : les disciples doivent vivre l’unité, demeurant dans le Père et le Fils, afin que le monde croie (cf. Jn 17, 21-23). C’est là un texte missionnaire significatif. Il fait comprendre qu’on est missionnaire avant tout par ce que l’on est, en tant que membre de l’Eglise qui vit profondément l’unité dans l’amour, avant de l’être par ce que l’on dit ou par ce que l’on fait."
(Redemptoris missio n° 23 in fine)

Comment rendre nos communautés missionnaires ?

Est-il nécessaire de conclure ? Je le ferai en redisant que je serais heureux si mon "témoignage" pouvait contribuer quelque peu à ce qui est si essentiel à l’Eglise et à sa mission : l’éveil, l’accompagnement, le soutien de toutes les vocations et en particulier des vocations dites spécifiques.

NOTES : ------------------------------------------

(1) Peut-être n’est-il pas inutile de rappeler ce que l’Exhortation
Christifideles, au n° 16, dit de "la vie dans l’Esprit, dont le fruit est la sanctification" :
"La vie selon l’Esprit, dont le fruit est la sanctification (Rm 6,22 ; cf. Ga 5,22), suscite en tous les baptisés et en chacun d’eux le désir et l’exigence de suivre et d’imiter Jésus-Christ, en accueillant ses Béatitudes, en écoutant et méditant la parole de Dieu, en participant de façon consciente et active à la vie liturgique et sacramentelle de l’Eglise, en s’adonnant à la prière individuelle, familiale et communautaire, er- s’ouvrant à la faim et à la soif de justice, en pratiquant le commandement de l’amour dans toutes les circonstance de la vie et dans le service auprès de leurs frères, spécialement de ceux qui sont humbles, pauvres et souffrants." [ Retour au Texte ]