Alors qu’un projet
de loi relatif à « la maîtrise de l’immigration,
à l’intégration et à l’asile
» a été présenté à
l’Assemblée nationale le 18 septembre, le père
Stéphane Joulain, Directeur adjoint du service de la
pastorale des migrants et des personnes itinérantes,
apporte son éclairage sur un des points du projet :
les conditions du regroupement familial
Dans un entretien accordé à l'agence Imedia
(Rome) et la Revue Famille Chrétienne, Mgr Agostino
Marchetto, secrétaire du Conseil pontifical de la pastorale
pour les migrants et les personnes en déplacement,
fait part de ses craintes concernant ce projet, notamment
sur les conditions du regroupement familial.
Pouvez-vous nous éclairer
sur ce point ?
Stéphane Joulain:
Mgr Agostino Marchetto rappelle effectivement qu’il
« appartient à l’Etat de savoir s’il
s’agit réellement de regroupement familial, mais
qu’il ne faut pas entraver systématiquement la
réunion des véritables familles ». Cette
remarque tient compte du fait que l’Eglise a toujours
considéré la famille comme la structure fondamentale
de la vie en société, le lieu de l’épanouissement
de la personne et de son apprentissage à la vie en
société. Les convictions profondes de l'Eglise
affirmées par son long enseignement social ne peuvent
pas accepter des pratiques discriminatoires visant les personnes
les plus précarisées de la société.
Nous considérons, par ailleurs, que toute entrave à
la vie en famille est une atteinte aux droits fondamentaux
de la personne humaine à vivre en famille tel qu'il
est stipulé dans la déclaration universelle
de droits de l’homme ainsi que la constitution française. Si
l'objectif du projet de loi est de favoriser l'intégration
des étrangers en France, il est mis à mal par
des propositions de ce projet ; elles amènent à
la privation d'un levier important à l’intégration
à savoir la vie de famille. Les enfants et les femmes,
privés ainsi de leur père ou mari, sont parmi
les plus vulnérables et les premières victimes
prévisibles.
Quelles sont ces propositions ?
Stéphane Joulain: Le projet de loi prévoit
que, selon la taille de la famille à regrouper, l’étranger
doit justifier de ressources de 100 à 120% du Smic,
hors prestations familiales ou sociales. Cette exigence de
ressources (article 2 du projet), nous semble introduire une
discrimination par rapport à la population générale.
Pourquoi demander davantage de ressources aux étrangers
pour qu'ils puissent vivre en famille, en l'occurrence faire
venir femme et enfants ?Ne va-t-on pas vers une discrimination
des plus pauvres, des travailleurs immigrés qui sont
privés de leurs familles ?
Autre point : l'obtention d'un visa de «long séjour»
qui présente une difficulté croissante pour
beaucoup d'étrangers, notamment ceux qui veulent vivre
en famille. Une nouvelle contrainte est introduite pour l'obtention
de ce visa, à savoir un test de connaissance de la
langue ou l'attestation de suivi d'une formation d'apprentissage
du français, pour les étrangers qui ne réussiraient
pas ce test. Si l'objectif de cette exigence est de favoriser
l'intégration future de la famille, les conditions
de sa mise en place nous interrogent quant à leur faisabilité
sur le terrain. Dans de nombreux pays il est à craindre
que les conditions de vie des familles et la localisation
des consulats ainsi que les moyens à leur disposition
soient trop contraignants ou insuffisants pour suivre une
telle formation sur deux mois.
Utilisation des tests ADN prévus
dans la nouvelle loi sur l'immigration
« Je comprends leur utilisation pour des crimes.
Mais peut-on les appliquer à d’autres
domaines ? Lors des dernières discussions sur
les lois bioéthique, on avait dit qu’il
n’y aurait pas de tests ADN en dehors des raisons
médicales. Il ne faudrait pas ouvrir la boîte
de Pandore et aller vers une utilisation délétère
des tests. »
Le Cardinal Ricard, lors d'une
conférence à Montpellier sur les relations
Eglise-Etat le 19 septembre
Source : La
Croix.com
Immigration professionnelle et
bien commun universel
« En choisissant seulement certains candidats,
en pratiquant ce type d’exclusion, on ne tient
pas compte du bien commun universel. Bien sûr,
on doit regarder le bien de la France, mais il faut
savoir s’ouvrir à l’universalité
des besoins et à la réalité de
ceux qui cherchent quelque chose de juste, même
s’ils ne sont pas qualifiés. Il reste
cependant à savoir ce que font ou non les pays
d’origine pour ces candidats à l’émigration.
Ces pays doivent s’investir dans leur formation
».
Mgr Agostino Marchetto,
secrétaire du Conseil pontifical de la pastorale
pour les migrants et les personnes en déplacement.
Extrait de l’interview accordée à
I.MEDIA et à l’hebdomadaire Famille Chrétienne
(parution le 22 septembre 2007)
|
|
|