La vérité du Carême
Billet de Mgr André Dupleix, secrétaire général
adjoint
de la Conférence des Evêques de France
Avec le mercredi des Cendres, les chrétiens sont entrés
dans le temps du Carême et ne doutent pas de son importance,
non seulement dans l’année liturgique et comme
préparation aux fêtes pascales mais comme un
temps fort de la vie spirituelle. Il y a pourtant toujours
– malgré de nombreux efforts, choix ou décisions
personnelles – quelques risques que les rythmes se maintiennent
et que nous arrivions plutôt bousculés au seuil
de la Semaine sainte.
Si nous reprenons l’Évangile
lu à la célébration des Cendres, nous
sommes conduits par les exhortations de Jésus aux disciples
à vivre ce temps privilégié de la foi
dans la vérité du cœur. Il s’agit
d’abord – et ce souhait rassemble un peu tous
les autres - de ne pas agir ou parler pour la galerie mais
davantage par conviction intérieure et en gardant simplicité
et humilité : « Évitez d’agir devant
les hommes pour vous faire remarquer… ». Les trois
séries de conseils donnés par Jésus sont
encadrées par deux images qui reviennent comme un leitmotiv
: le spectacle et le secret. Se donner en spectacle ou agir
dans le secret : « Ne faites pas comme ceux qui se donnent
en spectacle… Ton Père voit ce que tu fais dans
le secret… »
Il y a d’abord l’aumône
– ce mot souvent mal compris… Peut-être
parce que lorsque nous donnons pour venir en aide, la tentation
est grande d’en tirer quelque profit moral ou social.
Ce qui compte pourtant n’est pas de faire savoir que
l’on donne, mais de donner avec le détachement
nécessaire qui fait de cette action un geste vraiment
libre.
Il y a ensuite la prière.
Gardons-nous d’en faire une prière ostentatoire.
Il ne s’agit pas de récuser la prière
publique ou la visibilité inévitable des grandes
liturgies festives, mais tout excès ou médiatisation
excessive qui dénaturerait la dimension intérieure
de la prière et de la célébration. La
prière est, souvent dans le silence et la discrétion,
présence aimante du Christ.
Il y a enfin le jeûne.
Ce jeûne qui n’est ni une compétition avec
notre corps ni une mortification stérile et ne doit
pas être source d’une accablante tristesse mais
plutôt une ouverture à la Parole structurante
de Dieu et au souffle libérant de l’Esprit.
Tout cela, si nous savons le vivre loin des scènes
de la comédie humaine, le Père qui nous voit
et qui est au plus intime de nous-mêmes, nous le revaudra….
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