Centenaire de la Basilique du Rosaire
Lourdes - 4 novembre 2001
Homélie du Cardinal Louis-Marie Billé
A mesure qu'il s'avance sur la route de Jérusalem,
Jésus annonce le mystère de sa mort et de sa
résurrection, et il en donne des signes. "Le Fils
de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était
perdu." Ce dont il est question dans cet Évangile,
c'est de la mission de Jésus Sauveur, c'est de Jésus,
accomplissant sa Pâque pour arracher à sa perte
notre humanité, appelée à devenir la
demeure de Dieu.
L'aujourd'hui qui, dans le récit de Zachée,
vient par deux fois sur les lèvres de Jésus,
désigne évidemment le jour où eut lieu,
pour le véritable bonheur d'un homme, sa rencontre
avec son sauveur. Mais cet aujourd'hui, c'est l'aujourd'hui
de l'"histoire du Salut, c'est l'aujourd'hui de l'Église,
c'est l'aujourd'hui de notre vie à chacun et à
chacune, quels que soient notre âge et notre condition,
quelles que soient les joies et les peines qui tissent notre
existence. "Aujourd'hui, le salut est arrivé."
Combien de fois, devant les malheurs, les inquiétudes
qui accablent notre monde, combien de fois n'avons-nous pas
entendu, n'avons-nous pas dit : "Mais où allons-nous
? Où va notre terre ?" Dans ces questions, il
ne nous est pas interdit de lire en filigrane la question
qui, au-delà de tous les aléas de l'histoire,
au-delà de toutes les duretés de la vie, traduit
quelque chose du mystère même de notre humanité
: "Ce monde, qui finalement va à sa perte, peut-il
être sauvé ? L'homme peut-il être libéré
de sa capacité à vouloir le mal ?"
Et voilà que ce récit évangélique
de Zachée peut nous faire poser la question autrement,
d'une manière quasi absurde : "Y aurait-il une
relation possible entre les souffrances de notre humanité,
le mal que les hommes se font les uns aux autres, l'obscurité
qui voile notre avenir, et cette petite histoire de Zachée,
le percepteur, sans doute indélicat, pris au jeu de
son heureuse curiosité ? Entre ceci et cela, pourrait-il
exister une relation ? La réponse inimaginable à
cette interrogation est proposée à notre foi
: "Le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce
qui était perdu."
Tout à l'heure, c'était Zachée qui
"cherchait". Il "cherchait à voir qui
était Jésus". Ainsi l'Évangile nous
présente-il souvent un homme, des hommes, les hommes,
à la recherche du Christ. Ainsi l'Évangile nous
donne-t-il toujours à comprendre que ces mêmes
hommes sont d'abord cherchés, cherchés par "le
Fils de l'homme", cherchés par le Père
qui va à la rencontre du fils prodigue, cherchés
par le Maître de la vigne, qui veut embaucher des ouvriers
à toute heure du jour. Depuis qu'au jardin de la Genèse
Dieu, pour la première fois, "appela l'homme et
lui dit : où es-tu ?", il n'a pas cessé
de chercher de tout son amour prévenant, patient, inlassable.
Et "aujourd'hui il faut" que Jésus "aille
demeurer" chez Zachée, car des temps nouveaux
sont là, la recherche a pris un tour totalement neuf
: "Il est venu
"
On comprend l'urgence dans laquelle Jésus interpelle
Zachée : "Vite
Il faut que j'aille demeurer
".
Car là est la place du Fils de Dieu : au cur
des misères et des péchés des hommes.
C'est là que doit demeurer l'amour sauveur. Et la mission
de l'Église commençait chez Zachée :
manifester que demeure cet amour chez tous les Zachée,
de toutes les générations et de toute la terre.
Ici à Lourdes, sous le regard de Marie et guidés
par elle - le centenaire de la Basilique du Rosaire nous le
rappelle - des hommes et des femmes cherchent le Christ parce
que le Christ les cherche.
Ici à Lourdes, nous, les évêques, nous
allons travailler pendant ces jours, en essayant de nous situer
au point de rencontre entre la certitude que le Christ est
en recherche de nos contemporains et de nos compatriotes,
et notre société qui oscille entre l'errance
et la recherche.
Ici à Lourdes, vous qui êtes venus pour chanter
ensemble, ce que vous avez d'abord à chanter, c'est
la joie du Salut, le bonheur de recevoir aujourd'hui Celui
qui est venu loger chez les pécheurs.
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