La France débat de la famille
A l'heure où le Parlement entame des travaux qui
touchent au droit de la famille et donc aux personnes, il
est normal et souhaitable que tous les citoyens s'intéressent
aux débats qui les concernent et que les professions
et corps constitués concernés y prennent leur
part. La législation française est indéniablement
perfectible, elle se réfère à des textes
de portée universelle comme la "Déclaration
des Droits de l'Homme", à laquelle s'ajoute
maintenant la "Déclaration des droits de l'Enfant".
Sur ces graves questions les catholiques, et d'autres avec
eux, attendent des responsables de l'Église une parole
claire puisée à la source de l'Évangile.
Pour cette raison, une fois de plus, et le propos est trop
grave pour ne pas essayer d'aller au fond des choses, nous
estimons nécessaire de réaffirmer quelques
données fondamentales auxquelles nous tenons, sans
prétendre tout dire sur le droit de la famille et
sa cohérence : d'autres compétences ont à
se faire entendre.
Dans toutes les cultures, la fondation d'une famille revêt
un caractère social. L'histoire législative
en France place la vie du couple au coeur de la citoyenneté.
N'est-ce pas pour cette raison que l'État a retiré
à l'Église la responsabilité de l'état
civil ?
L'Église catholique tient fermement que la famille
est, pour tout être humain, de droit naturel, le premier
lieu du vivre ensemble, et donc la cellule fondatrice de
la vie en société. Elle attend des gouvernements
et de l'État que, dans l'exercice de leurs responsabilités,
ils s'emploient à favoriser la stabilité et
l'épanouissement de la vie familiale et à
procurer à celle-ci les conditions matérielles
nécessaires. L'Église attache en outre le
plus grand prix au respect du droit de l'enfant à
avoir un père et une mère, qui veillent sur
lui et remplissent leur mission de parents et d'éducateurs.
L'Église non seulement ne se résigne pas à
la fragilité des couples, mais elle préconise
le développement d'une véritable éducation
à l'amour, le soutien aux parents dans l'éducation,
l'encouragement à une réelle préparation
au mariage.
Ceux qui exercent le pouvoir législatif et le Gouvernement
ont le grave devoir de vérifier, dans les différents
projets de lois relatifs au droit de la famille qui sont
ou seront examinés, que rien ne vienne brouiller
les repères dont les jeunes qui veulent fonder un
foyer ont absolument besoin. Le mariage n'est pas seulement
un contrat, il est au sens fort une institution, car les
époux en s'engageant l'un envers l'autre acceptent
des droits et des devoirs dont la détermination préexiste
à leur décision. Ils souscrivent aux exigences
du code de la Famille que leur rappelle l'officier d'état
civil.
Si, indépendamment du droit de la famille, le Gouvernement
estime devoir répondre par mode législatif
à des demandes, dont certaines peuvent être
légitimes, concernant des intérêts communs
entre personnes non mariées, que l'on s'oriente vers
des solutions juridiques appropriées. Rien n'empêche
d'établir des formes de contrat d'union de biens
qui ne trouvent pas leur origine dans l'union des personnes.
Nous redisons clairement qu'il serait grave, sous prétexte
de résoudre des problèmes matériels
ou pour simplifier les actuelles procédures de divorces,
de relativiser l'institution du mariage.
L'heure est venue, puisque le Gouvernement se saisit à
nouveau de ces questions, de consolider l'institution familiale,
véritable "service public" de la vie en
société et de la promotion d'une civilisation
de l'amour. De nombreux enfants dérivent de façon
précoce vers une violence désespérée
dont la cause première est souvent la déficience
ou l'inexistence de la cellule familiale. Puissent les gouvernants
et les parlementaires ne pas l'oublier et remplir avec hauteur
de vue leur mission de garder et d'améliorer les
points d'ancrage d'un droit familial dont les claires précisions
soient au service de tous les citoyens !
Guy THOMAZEAU
Président de la Commission épiscopale
de la Famille
le 5 mai 1998
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