Editorial : L’espérance oecuménique en fête !
Le Conseil oecuménique des Eglises a-t-il encore un avenir ? La question peut sembler impertinente à l’égard de cette vénérable institution qui a porté la quête de l’unité des chrétiens depuis plus d’un demi-siècle, et accompagné ses mutations.
Et pourtant ! Le très faible écho donné à cet événement dans les médias occidentaux n’est-il pas le signe d’un déclin ? Interrogé par un journaliste allemand sur cette discrétion, Aram Ier eut sans doute beau jeu de répondre qu’il préférait que l’on parlât de Jésus. Il n’empêche : le silence des médias est inquiétant, et semble relayer les critiques des déçus de l’oecuménisme qui fustigent le “machin”.
Lorsqu’en 1920 le Patriarcat de Constantinople invitait les chrétiens à mettre en place, pour leurs Eglises, une instance semblable à la Société des Nations, il portait un regard prophétique sur le développement du mouvement oecuménique. Mais précisément, la SDN a vite sombré, et son héritière, l’ONU, est bien malade. En appelant au soutien de la réforme de cette dernière, le COE ne regarderait-il pas avec inquiétude son propre dépérissement ?
De fait, les grosses institutions sont en crise, et le Conseil oecuménique n’échappe pas à la règle. Bien plus, en soutenant le processus bien timide d’un Forum susceptible de mettre enfin à la même table ses membres, l’Eglise catholique et les réseaux pentecôtistes, il reconnaît au fond qu’il n’a pas pu fédérer l’ensemble de la famille chrétienne.
S’arrêter à un tel constat serait pourtant injuste. L’Assemblée de Porto Alegre fut une incontestable réussite : aussi bien du point de vue de l’organisation, remarquable, que de l’ambiance qui y régna. Ce fut en particulier l’avis des orthodoxes. Comme y invitait le secrétaire général, Samuel Kobia, dans son rapport, ce fut une fête : la fête de la vie !
Une fête où, certes, l’on évita les sujets qui fâchent. On regrettera incontestablement à cet égard que le travail de Foi et Constitution soit resté une fois de plus dans l’ombre des questions d’actualité, malgré l’affirmation presque incantatoire que la recherche de l’unité visible est au centre de la vocation du COE.
Une fête où la dénonciation des “méchants” et les témoignages émouvants appelaient parfois trop facilement les applaudissements. On critiquera aussi certaines analyses superficielles des grands problèmes économiques et sociaux de notre temps.
Peut-être rien d’extraordinaire. Ni rupture spectaculaire, ni avancée significative. Et c’est sans doute ce qui explique le silence de nos grands médias séculiers sur un événement où l’absence de drame semble indigne de faire la une !
Mais une fête où des participants, fort nombreux, étaient heureux de prier et de réfléchir ensemble pendant près de deux semaines, s’émerveillant d’une communion sur l’essentiel malgré leur très grande diversité culturelle et confessionnelle. Pour cette grâce, celle du mouvement oecuménique, qu’il a incarné depuis tant d’assemblées, pour l’espérance qu’il continue de porter, le COE mérite bien d’être soutenu. C’est à ce soutien que vous invite ce numéro.
Fr. M. Mallèvre
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