Dietrich Bonffer, pasteur, théologien
allemand, mort au camp de concentration de Sachsenhausen
en 1945.
En 1933, à larrivée de Hitler au pouvoir,
il sengage dans le combat de lÉglise
confessante face au « christianisme positif »
de lidéologie nazie et publie alore « Le
prix de la Grâce » (1937) et la « Vie
Communautaire » (1938), où il affirme
lexigence de la foi et la responsabilité de
lÉglise dans le monde. Après un bref
séjour aux États-Unis, il fut arrêté
en avril 1943 pour avoir participé au mouvement dopposition
à Hitler dirigé par von Stauffenberg, et pendu
deux ans plus tard, laisant une « Éthique »
(inachevée) et des lettres de prison « Résistance
et soumission », 1951, traduites en français
en 1963 et rééditées en février
1970, éd. Labor et Fides, diffusion Librairie protestante,
140 bd Saint-Germain paris 75006.
Extraits de « Résistance et soumission,
Lettres et notes de captivité »
Deux poèmes envoyés depuis Tegel à
son ami Ebehard Bethge,dans sa lettre du 8 Juillet 1944.
Qui suis-je ?
Qui suis-je ? Souvent ils me disent
Que de ma cellule je sors
Détendu, ferme et serein,
Tel un gentilhomme de son château.
Qui suis-je ? Souvent ils me disent
Quavec mes gardiens je parle
Aussi librement, amicalement et franchement
Que si javais à leur donner des ordres.
Qui suis-je ? De même ils me disent
Que je supporte les jours de lépreuve,
Impassible, souriant et fier,
Ainsi quun homme accoutumé à vaincre.
Suis-je vraiment celui quils disent ?
Ou seulement cet homme que moi seul connais,
Inquiet, malade de nostalgie, pareil à un oiseau
en cage,
Cherchant mon souffle comme si on métranglait,
Avide de couleurs, de fleurs, de chants doiseaux,
Assoifé dune bonne parole et dune espérance
humaine,
Tremblant de colère au spectacle de larbitraire
et de loffense la plus mesquine,
Agité par lattente de grandes choses,
craignant et ne pouvant rien faire pour des amis infiniment
lointains,
Si las, si vide que je ne puis prier, penser, créer,
Nen pouvant plus et prêt à labandon.
Qui suis-je ? Celui-là ou celui-ci ?
Aujourdhui cet homme et demain cet autre ?
Suis-je les deux à la fois ?
Un hypocrite devant les hommes
Et devant moi un faible, méprisable et piteux ?
Ou bien ce qui est encore en moi ressemble-t-il à
larmée vaincue
Qui se retire en désordre devant la victoire déjà
remportée ?
Qui suis-je ? Dérision que ce monologue !
Qui que je sois, tu me connais :
Tu sais que je suis tien, Ô Dieu !
Chrétiens et païens
Les hommes vont à Dieu dans leur misère
Et demandent du secours, du bonheur et du pain,
Demandent dêtre sauvés de la maladie,
de la faute et de la mort,
Tous font cela, tous, chrétiens et païens.
Des hommes vont à Dieu dans sa misère,
Le trouvent pauvre et méprisé, sans asile
et sans pain
Le voient abîmé sous le péché,
la faiblesse et la mort.
Les chrétiens sont avec Dieu dans sa Passion.
Dieu va vers tous les hommes dans leur misère,
Dieu rassasie leurs corps et leur âme de son Pain.
Pour les chrétiens et les païens, Dieu souffre
la mort de la croix
Et son pardon est pour tous, chrétiens et païens.
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