Logo cef.fr Eglise catholique en France - Conférence des évêques de France Trouver les horaires de messes en France avec MessesInfo
ActualitésParoles d'EgliseGuide de l'EgliseEspace presseAgendaDiocèsesLiens
Vivre en ChrétienPrier   CélébrerArt Culture LoisirsSaint du jourGlossaireForumsRechercher
Actualités
Archives
Dossiers spéciaux
Chroniques
Nominations

A la une
Désolé le fichier n'est pas valide
 
Ecrivez-nous
les sites en .cef.fr
Ajoutez CEF à
   vos favoris
Ouvrez votre navigateur sur cef.fr
Plan du site
Mentions légales
Eglise Catholique
UADF © 1996-2006
 

Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Archives > 2007

Archives Retour à la liste
 
 

Rumeurs sur le tombeau du Christ




 



Produit par le cinéaste James Cameron, l’auteur du film à succès « Titanic », le documentaire « Le tombeau retrouvé du Christ » reprend, sous la forme d’une fiction, le déroulement des recherches qui ont été récemment faites autour d’un tombeau par un réalisateur canadien, Simcha Jacobovici. A l’origine de cette initiative, des rumeurs selon lesquelles ce tombeau, découvert en 1980, renfermerait en particulier une urne sur laquelle est inscrit « Jésus, fils de Joseph ».
Voici quelques éléments de réflexion au sujet de cette découverte.


« L’Eglise n’a pas peur de la vérité »
Mgr Jean-Michel di Falco, évêque de Gap

Il est tout d’abord intéressant de noter que l’intérêt du cinéaste pour ce tombeau coïncide avec le succès commercial de nombreux ouvrages à thème ésotérico-religieux, tels que le Da Vinci Code, alors que le tombeau était connu des archéologues depuis 27 ans. Ces derniers n’avaient apparemment pas jugé nécessaire d’approfondir la présence de l’urne funéraire d’un certain « Jésus, fils de Joseph », cette inscription n’étant pas rare à cet emplacement, à quelques kilomètres de Jérusalem.

La curiosité de Simcha Jacobovici a été suscitée par la présence, dans le même tombeau, d’autres urnes sur lesquelles des graffitis représentent les noms de Joseph, Marie, Marie-Madeleine, Jacques, Matthieu et Judas. La mention de ces prénoms, tous connus dans la Bible, fait ainsi dire au réalisateur qu’il s’agit du tombeau de la famille de Jésus : Jésus, « époux » de Marie-Madeleine, Judas, leur « fils », Jacques, le « frère »… Sur quoi se base-t-il ? La seule analyse ADN a permis de montrer que Jésus et Marie-Madeleine avaient un ADN différent. Simcha Jacobovici en conclut bien rapidement qu’ils sont mari et femme. Or, aucune analyse sur ce Judas, leur prétendu fils…
D'autant que cette conclusion repose sur une statistique douteuse : il y aurait une chance sur 600 pour une telle concordance de prénoms. Mais des archéologues se demandent quelles sources de données ont permis au réalisateur d'établir de telles statistiques puisqu’en Israël, le nombre de tombes non découvertes surpasse des millions de fois le nombre des tombes mises à jour. Par ailleurs, les prénoms de Jésus, Joseph et Marie-Madeleine étaient très fréquents à l'époque. Et même si ces statistiques s'avéraient justes, elles présupposent que Marie-Madeleine et Jésus sont mariés et que Judas est leur fils. Or, aucune indication n’est donnée en ce sens, ni dans la Tradition de l’Eglise, ni dans aucun évangile apocryphe.
D’ailleurs, concernant Marie-Madeleine, un problème survient sur celle qui est ainsi appelée, sans nuance, par le réalisateur. Pour tous les lecteurs du Da Vinci Code et d'autres récits du genre, ce nom de « Marie-Madeleine » fait tilt ; or, sur l'inscription retrouvée, on a le nom « Mariamne », qui pourrait se traduire, d'après les archéologues, « Marie, connue sous le nom de son maître ». Rien ne dit donc qu'il s'agit là de Marie-Madeleine des évangiles, d’autant plus que ce même nom condense la figure de trois femmes : Marie de Magdala, Marie sœur de Lazare et la femme de Béthanie. Autre curiosité, ces tombeaux contiennent des inscriptions en araméen, hébreu et grec ; il est étonnant que, dans une même famille, on ait ainsi des inscriptions de langues différentes.

Enfin, la localisation géographique pose question : si Jésus a été mis au tombeau à Jérusalem puisqu'il y a été crucifié, il n'y a aucune raison à ce que Joseph, père de Jésus, ait été lui aussi enterré (avant Jésus) à Jérusalem et non à Nazareth. De même, si Marie-Madeleine et son prétendu fils Judas ont vécu après la mort de Jésus, on peut supposer qu’ils seraient retournés à Nazareth ou du moins sur les bords du Lac, où ils auraient dû, selon la logique du réalisateur, être enterrés.

En conclusion, la découverte récente de la tombe du roi Hérode, par des archéologues qui ont travaillé dessus pendant une dizaine d’années, paraît plus sérieuse que celle d’un cinéaste et d’un réalisateur dont le premier est particulièrement connu pour ses fictions à succès commerciaux. En outre, l’évangile est passé au feu de la critique depuis 150 ans, et son interprétation dans l'Eglise, reste le meilleur portrait de Jésus qui soit recevable aujourd'hui, le plus crédible et le plus vraisemblable.
Mais pour reprendre les propos du Pape Pie XII qui donnait l’autorisation de faire des fouilles sous la basilique Saint-Pierre où l’on craignait de ne pas retrouver les restes de saint Pierre, « l’Eglise n’a pas peur de la vérité ».

 

Faire une place, dans nos vies, à l’intelligence de la foi
P. Alain Marchadour*

Dans quel contexte cet ossuaire a-t-il été trouvé ?
L’ossuaire qui fait tant de bruit a été découvert par hasard la veille d’un sabbat, en 1980 à l’occasion de travaux. Le lieu est situé dans le quartier de Talpiot, distant à peu près de cinq Kilomètres du Golgotha. Le tombeau contenait 10 ossuaires et trois crânes. Sur six de ces ossuaires il y avait des noms gravés tels que Jésus, fils de Joseph, Judas fils de Jésus, Joseph et Matthieu, Maria, Mariamenè et Mara. A cette époque ce quartier était en pleine construction et les découvertes de tombes étaient fréquentes. L’urgence des constructions fit que les archéologues ne disposèrent que de trois jours pour conduire une fouille de sauvetage.

Quelles furent les suites de cette découverte ?
Quand cette découverte fut connue, Il n’y eut pas d’émoi particulier dans la communauté des archéologues. Beaucoup d’ossuaires ont été découverts, parfois dans des fouilles sauvages qui rendent difficile l’interprétation des spécialistes. Depuis quelques années il est apparu que des découvertes ont été objet de manipulations, comme ce fut le cas, semble-t-il, pour le fameux ossuaire portant l’inscription « Jacques fils de Joseph, frère de Jésus ». Son propriétaire, Oded Golan a été arrêté pour fabrication de faux.
De fait il n’existe pas d’éléments susceptibles d’être mis en rapport directement avec Jésus et sa famille. Les noms trouvés sur les ossuaires sont parmi les plus fréquents dans le monde juif du premier siècle. Ce n’est qu’en 1995, quinze ans après la découverte, que certains commencent à chercher des informations cachés dans ces ossuaires, avec en particulier l’inscription « Juda fils de Jésus », que l’on voudrait relier à Jésus avec. Et si Jésus avait un enfant caché ? Et si cette tombe était la tombe de la famille de Jésus ? On pourrait se contenter d’en rire, s’il n’y avait la force des images et des constructions imaginaires, toujours capables de séduire les gens peu informés. Evoquant le film sur la tombe de Jésus, Amos Kloner, un professeur à l’Université religieuse de Bar Ilan (Israël) résumait ainsi cet événement : « Belle histoire, mais sans la moindre preuve ! ».

Sur quels éléments cette réponse repose-t-elle ?
Prenons tout d’abord les noms des ossuaires. Ils posent plusieurs problèmes. Un des noms est hébreu, plusieurs sont araméens. Les noms qui aujourd’hui sont les plus exploités sont « Mariamenè et Mara ». Peut-il s’agir, dans la première, de Marie de Magdala ? Or ce nom est écrit en grec, alors que Marie de Magdala, la figure de l’évangile, a grandi dans un village de pécheur appelé Migdal où la langue utilisée était l’araméen et non le grec. Cela a conduit les archéologues à penser que ces tombeaux pourraient contenir les restes de plusieurs générations d’une même famille, certaines pouvant se situer à la fin du premier siècle. Avant de proclamer qu’il s’agit de Jésus et de sa femme secrète, il faudrait expliquer pourquoi l’une est transcrite en grec et l’autre en araméen. Notons aussi que dans le Nouveau Testament Marie de Magdala n’est jamais appelée « Mariamenè » comme dans l’ossuaire en question. De même l’appellation « Jésus fils de Joseph » ne se trouve pas dans la bouche des amis de Jésus mais de ses adversaires (Jn 6,42). On imagine mal que la famille de Jésus ait inscrit sur l’ossuaire une telle appellation.

Rappelons ensuite les données évangéliques : elles racontent que Jésus est mort en croix, qu’il a été déposé dans un tombeau tout proche. Comment expliquer que ses restes aient été ensevelis à plus de 5 kilomètres du lieu de sa mort. Émile Puech, épigraphiste mondialement connu, me signale que les lois interdisaient de déposer un condamné à mort dans le tombeau familial avant un long délai. On le voit : toute cette histoire ne résiste pas à l’examen

Comment expliquez-vous le succès de cette histoire ?
Depuis la découverte en 1980 de ces ossuaires, beaucoup d’évènements sont survenus. Il y a eu d’abord le roman créé par quelques originaux selon lequel les dominicains de l’Ecole Biblique auraient, sur ordre du Vatican, tenu secrètes certaines informations gênantes pour Jésus. Aujourd’hui aucun savant ne prend cela au sérieux, mais la rumeur est tenace. il y a surtout eu la légende de ‘Da Vinci Code’ et tous ces romans autour des amours entre Marie de Magdala et Jésus et leur progéniture secrète.

Que conclure sinon inviter les hommes, qu’ils soient croyants ou non, à résister aux pressions médiatiques qui cherchent à imposer sur Jésus des contrevérités ridicules et malheureusement troublantes pour les plus pauvres. Raison de plus pour faire une place dans nos vies à l’intelligence de la foi.

*Le Père Alain Marchadour, assomptionniste, fut longtemps professeur à l'institut catholique de Toulouse. Il poursuit depuis quelques années sa recherche biblique à Jérusalem. Auteur de nombreux ouvrages, il a aussi dirigé plusieurs publications.