Porteurs de mémoires
Parti suivre des cours sur l’antisémitisme, à
Jérusalem, le P. Patrick Desbois
découvre l’existence de la Shoah par balles.
En visite en Ukraine, avec d’anciens prisonniers de
guerre, il se rend compte que l’assassinat des juifs
par les Einsatzgruppen (unités mobiles nazies) a laissé
très peu de traces. En 2000, il entreprend de les mettre
à jour, témoin après témoin, fosse
après fosse. À partir de ces témoignages,
de la masse des découvertes et du travail à
effectuer, le P. Desbois va structurer sa démarche,
obtenir l’appui de chercheurs, documentalistes et archivistes,
avant d’aller à nouveau à la rencontre
de témoins de ces carnages. En août 2006, à
la demande du directeur du Mémorial de la Shoah, à
Paris, il mène ainsi une recherche archéologique
sur le site d’extermination de Bousk, « afin que
nul ne puisse objecter que nous n’avons pas de preuves
matérielles ».
Outre le travail historique sur ce génocide, estimé
à environ 1,5 millions de morts en Ukraine seulement
car il a concerné également la Russie occupée,
la Biélorussie et les pays baltes l’œuvre
du P. Desbois consiste aussi à donner une sépulture
à ces personnes.
Ce travail, soutenu par plusieurs associations juives, a reçu
les encouragements de Benoit XVI en 2005. Les droits de ce
livre sont reversés à l’association Yahad-In
unum.
Cette association a été créée
en janvier 2004 à l’initiative du cardinal Jean-Marie
Lustiger, alors archevêque de Paris, avec le cardinal
Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, le cardinal Jean-Pierre
Ricard, archevêque de Bordeaux, le rabbin Israël
Singer, président du directoire du Congrès juif
mondial, et Serge Cwajgenbaum, secrétaire général
du Congrès juif mondial. Son président en est
le P. Patrick Desbois, également directeur du Service
national pour les relations avec le judaïsme.
L’objectif de l’association est d’approfondir
la connaissance et la coopération entre juifs et catholiques,
d’où son nom, « Yahad » et «
In unum » signifiant l’un et l’autre «
ensemble » en hébreu et en latin. Conscients
d’une éthique commune reçue au mont Sinaï
par le don des Dix Paroles, les membres de Yahad-In unum soulignent
non seulement la nécessité d’un dialogue,
mais aussi d’une fraternité religieuse tournée
vers le service de la société.
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P. Patrick Desbois : Porteurs de mémoires.
Un prêtre révèle la Shoah par balles,
Éd. Michel Lafon, 330 p., 20, 90 euros. Site Yahad-In
Unum |
Servir le dialogue entre juifs et
chrétiens
Les 8 et 9 mars, le Service national pour les relations avec
le judaïsme organise à Écully, près
de Lyon, conjointement avec le Service international de documentation
judéo-chrétienne (Sidic), une session nationale
de formation sur le judaïsme. Intitulée «
Église et peuple juif », elle accueillera 150
participants, en particulier les responsables du dialogue
avec le judaïsme dans leur diocèse et qui veulent
se former, mais aussi des personnes venant d’associations
de dialogue telle que les Amitiés judéo-chrétiennes.
L’objectif de cette journée est de mieux comprendre
l’histoire des traditions juives orthodoxes et des traditions
juives laïques. « Ce type de sessions, organisés
une fois par an, accueille tous ceux qui ont envie de se former
ou de connaître un peu mieux l’état d’avancement
des relations entre juifs et catholiques », souligne
Jacqueline Séité, membre du Sidic, qui participe
activement à la préparation de ces sessions.
Ces formations ont aussi pour objet de faire prendre conscience
aux catholiques de la nécessité de se nourrir
spirituellement s’ils veulent débattre avec des
juifs.
« Ce n’est pas aux marges de la foi et de la
pratique que nous pouvons nous rencontrer de la manière
la plus féconde, mais désormais, avec précaution
et surtout patience, à partir du cœur de notre
foi et de notre pratique respectives ».
Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de
Paris, Président de la Conférence des évêques
de France
Un service national pour
les relations avec le judaïsme pour tracer des
chemins de rencontre
Le Service national pour les relations avec le judaïsme
est né après le concile Vatican II.
Fondé par le P. Bernard Dupuy, dominicain,
il a ensuite été inséré
au sein de la Conférence épiscopale.
Son actuel directeur en est le P. Patrick Desbois,
qui travaille sous la responsabilité du Conseil
pour l’unité des chrétiens et
les relations avec le judaïsme, présidé
par Mgr Maurice Gardès, archevêque d’Auch.
Au cours de son histoire, le rôle du service
a varié. Il a d’abord contribué
à résoudre des conflits entre l’Église
et le judaïsme : ce fut le cas lors de la polémique
engendrée par le carmel d’Auschwitz,
puis lors de l’affaire Touvier. Mais «
désormais s’ouvre une nouvelle étape,
précise le P. Desbois. Nous cherchons plutôt
à tracer des chemins de rencontre théologiques
ou éthiques, ou à prendre des décisions
conjointes sur des questions de société.
» Dans le domaine théologique ont ainsi
été abordées des questions concernant
la théologie de la Création et de la
Résurrection, et dans le domaine éthique
des réflexions sur la fin de vie.
Par ailleurs, le dialogue s’est démultiplié
et ce sont les évêques eux-mêmes
qui s’investissent désormais en rencontrant
les responsables des communautés juives de
leur diocèse. Le Service national pour les
relations avec le judaïsme aide alors à
la mise en place des événements, assurant
le rôle d’un « entre-deux »,
précise le P. Desbois : « En répondant
aux projets des évêques sur leur diocèse
et lorsque nous recevons un appel d’une communauté
juive. »
L’autre mission du service consiste à
former les quarante-huit responsables diocésains
des relations avec le judaïsme nommés
par les évêques en leur apportant une
nourriture intellectuelle et spirituelle afin qu’ils
soient plus à même d’exercer leur
charge.
Extrait d’un dossier à
paraître dans la Revue Catholiques en France
N°36, Patrick de Sagazan
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