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3e rencontres européennes entre Juifs et Catholiques
Parution Catholiques en France, mars 2008



   
 

Porteurs de mémoires

Parti suivre des cours sur l’antisémitisme, à Jérusalem, le P. Patrick Desbois découvre l’existence de la Shoah par balles. En visite en Ukraine, avec d’anciens prisonniers de guerre, il se rend compte que l’assassinat des juifs par les Einsatzgruppen (unités mobiles nazies) a laissé très peu de traces. En 2000, il entreprend de les mettre à jour, témoin après témoin, fosse après fosse. À partir de ces témoignages, de la masse des découvertes et du travail à effectuer, le P. Desbois va structurer sa démarche, obtenir l’appui de chercheurs, documentalistes et archivistes, avant d’aller à nouveau à la rencontre de témoins de ces carnages. En août 2006, à la demande du directeur du Mémorial de la Shoah, à Paris, il mène ainsi une recherche archéologique sur le site d’extermination de Bousk, « afin que nul ne puisse objecter que nous n’avons pas de preuves matérielles ».

Outre le travail historique sur ce génocide, estimé à environ 1,5 millions de morts en Ukraine seulement car il a concerné également la Russie occupée, la Biélorussie et les pays baltes l’œuvre du P. Desbois consiste aussi à donner une sépulture à ces personnes.

Ce travail, soutenu par plusieurs associations juives, a reçu les encouragements de Benoit XVI en 2005. Les droits de ce livre sont reversés à l’association Yahad-In unum.

Cette association a été créée en janvier 2004 à l’initiative du cardinal Jean-Marie Lustiger, alors archevêque de Paris, avec le cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, le rabbin Israël Singer, président du directoire du Congrès juif mondial, et Serge Cwajgenbaum, secrétaire général du Congrès juif mondial. Son président en est le P. Patrick Desbois, également directeur du Service national pour les relations avec le judaïsme.

L’objectif de l’association est d’approfondir la connaissance et la coopération entre juifs et catholiques, d’où son nom, « Yahad » et « In unum » signifiant l’un et l’autre « ensemble » en hébreu et en latin. Conscients d’une éthique commune reçue au mont Sinaï par le don des Dix Paroles, les membres de Yahad-In unum soulignent non seulement la nécessité d’un dialogue, mais aussi d’une fraternité religieuse tournée vers le service de la société.

P. Patrick Desbois : Porteurs de mémoires. Un prêtre révèle la Shoah par balles, Éd. Michel Lafon, 330 p., 20, 90 euros. Site Yahad-In Unum

Servir le dialogue entre juifs et chrétiens
Les 8 et 9 mars, le Service national pour les relations avec le judaïsme organise à Écully, près de Lyon, conjointement avec le Service international de documentation judéo-chrétienne (Sidic), une session nationale de formation sur le judaïsme. Intitulée « Église et peuple juif », elle accueillera 150 participants, en particulier les responsables du dialogue avec le judaïsme dans leur diocèse et qui veulent se former, mais aussi des personnes venant d’associations de dialogue telle que les Amitiés judéo-chrétiennes.


L’objectif de cette journée est de mieux comprendre l’histoire des traditions juives orthodoxes et des traditions juives laïques. « Ce type de sessions, organisés une fois par an, accueille tous ceux qui ont envie de se former ou de connaître un peu mieux l’état d’avancement des relations entre juifs et catholiques », souligne Jacqueline Séité, membre du Sidic, qui participe activement à la préparation de ces sessions. Ces formations ont aussi pour objet de faire prendre conscience aux catholiques de la nécessité de se nourrir spirituellement s’ils veulent débattre avec des juifs.

« Ce n’est pas aux marges de la foi et de la pratique que nous pouvons nous rencontrer de la manière la plus féconde, mais désormais, avec précaution et surtout patience, à partir du cœur de notre foi et de notre pratique respectives ».

Cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, Président de la Conférence des évêques de France

Un service national pour les relations avec le judaïsme pour tracer des chemins de rencontre
Le Service national pour les relations avec le judaïsme est né après le concile Vatican II. Fondé par le P. Bernard Dupuy, dominicain, il a ensuite été inséré au sein de la Conférence épiscopale. Son actuel directeur en est le P. Patrick Desbois, qui travaille sous la responsabilité du Conseil pour l’unité des chrétiens et les relations avec le judaïsme, présidé par Mgr Maurice Gardès, archevêque d’Auch.
Au cours de son histoire, le rôle du service a varié. Il a d’abord contribué à résoudre des conflits entre l’Église et le judaïsme : ce fut le cas lors de la polémique engendrée par le carmel d’Auschwitz, puis lors de l’affaire Touvier. Mais « désormais s’ouvre une nouvelle étape, précise le P. Desbois. Nous cherchons plutôt à tracer des chemins de rencontre théologiques ou éthiques, ou à prendre des décisions conjointes sur des questions de société. » Dans le domaine théologique ont ainsi été abordées des questions concernant la théologie de la Création et de la Résurrection, et dans le domaine éthique des réflexions sur la fin de vie.
Par ailleurs, le dialogue s’est démultiplié et ce sont les évêques eux-mêmes qui s’investissent désormais en rencontrant les responsables des communautés juives de leur diocèse. Le Service national pour les relations avec le judaïsme aide alors à la mise en place des événements, assurant le rôle d’un « entre-deux », précise le P. Desbois : « En répondant aux projets des évêques sur leur diocèse et lorsque nous recevons un appel d’une communauté juive. »
L’autre mission du service consiste à former les quarante-huit responsables diocésains des relations avec le judaïsme nommés par les évêques en leur apportant une nourriture intellectuelle et spirituelle afin qu’ils soient plus à même d’exercer leur charge.

Extrait d’un dossier à paraître dans la Revue Catholiques en France N°36, Patrick de Sagazan