Depuis quelques jours la France est traumatisée. À
l'insouciance ou l'indifférence des nombreuses abstentions
succède l'inquiétude et la honte : on n'aurait
jamais cru qu'un candidat de l'extrême droite arrive
au second tour des élections présidentielles
en France.
20 % des Français seraient-ils fascistes ? Non. Mais
presque le tiers des Français ont protesté et
manifesté leur mécontentement et leurs frustrations
: car il faut rajouter à ces 20 % de voix pour l'extrême
droite les voix de l'extrême gauche (10 %)
Ces votes manifestent une déstabilisation profonde
de la société française, avec les sentiments
d'impuissance et les peurs qu'elle génère.
Dans les périodes de graves mutations ou de troubles
des valeurs, les partis extrémistes attirent en désignant
du doigt des coupables, en distinguant de manière trop
simpliste pour être vrai le camp des bons et le camp
des méchants, en diabolisant des projets de coopération
internationale et en dénonçant de façon
tendancieuse le pluralisme religieux et culturel au sein de
notre société. Chacun sait que ces partis ont
toujours été incapables de gouverner, car leur
idéologie est irréaliste.
À l'origine de cette crise de société,
on peut essayer de nommer un certain nombre de phénomènes
ou de situations qui se conjuguent entre eux pour produire
un sentiment diffus non seulement de désespérance,
mais aussi de perte d'identité. Parmi ces causes :
la perte du sens de Dieu et de la Vérité transcendante
et permanente ; l'instabilité familiale liée
à la grande fragilité du couple et à
la crise de l'éducation ; l'instabilité professionnelle
qui oblige à de nombreux déplacements et qui
conduit au chômage ; la perte de confiance dans les
hommes politiques; enfin l'insécurité dont on
parle tant, liée aux phénomènes précédents
et aux peurs qu'ils provoquent.
Autant de vraies questions auxquelles nous avons répondues
au nom de notre foi au Dieu Unique dans notre déclaration
commune publiée le 12 septembre 2000 et qui demeure
plus que jamais d'actualité.
Pour sortir de la crise, il ne nous suffit pas de dénoncer
les extrêmes, il faut chercher les valeurs à
promouvoir pour redonner confiance aux Français. Très
certainement, il est nécessaire de repartir de la personne
humaine :
- Qu'est-ce que l'homme ? De quoi a-t-il besoin pour s'épanouir
et retrouver son identité ?
- Qu'est-ce qu'un Français aujourd'hui ?
- Qu'est-ce qui peut conduire à une société
plus humaine ?
- Comment retisser le lien social, reconstruire des relations
stables, cultiver le respect mutuel et le prix de la vie ?
Cela passe certainement par une politique familiale saine
et rigoureuse.
- Comment redonner le sens du bien commun, le sens de la responsabilité
commune à l'égard de la " chose publique
"?
Nous appelons à un sursaut de conscience et de responsabilité
civique, à un élan de générosité,
à un effort de discernement et de clairvoyance, à
une espérance sereine dans un avenir qu'ensemble nous
avons à construire..
À Nice, le 25 avril 2002.
M. le grand rabbin Bensoussan
Mgr Jean Bonfils, évêque de Nice
M. Mohamed Djadi, président de la Commission interreligieuse
de la coordination musulmane azuréenne
Mgr Guy de Kerimel, évêque auxiliaire de Nice
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