Le 15 octobre dernier, nous exprimions notre doute quant à
la légitimité d’une guerre contre l’Irak
: "Le régime irakien, si condamnable soit-il pour
ses violations des droits de l’homme à l’intérieur
et du droit international à l’extérieur,
constitue-t-il une menace urgente et immédiate, de
celles qui mettent dans un cas évident de légitime
défense ?" A cette question, aujourd’hui
comme hier, nous répondons par la négative.
Toute la tradition de réflexion morale catholique nous
conduit à redire, comme les évêques allemands
tout récemment, que "le droit de légitime
défense présuppose une attaque réelle
ou imminente, et non la simple possibilité d’une
attaque". Admettre qu’il soit légitime de
mener des "guerres préventives" contre tous
les régimes qui nous déplaisent ou qui oppriment
leur peuple, ce serait mettre le monde à feu et à
sang.
Nos concitoyens et les responsables de notre pays, dans un
très large consensus, se montrent résolus à
ne pas s’engager dans une telle guerre. Nous invitons
à poursuivre avec courage la recherche de voies pacifiques
pour écarter du peuple irakien les malheurs qui l’accablent
déjà et ceux qui le menacent. Nous pensons que
si la guerre était déclenchée, le refus
de participation de quelques pays occidentaux comme le nôtre
serait très important pour éviter que l’affrontement
ne soit présenté – notamment par les extrémistes
– comme un "choc de civilisations", voire
de religions. Musulmans et chrétiens désirent
servir Dieu, le Miséricordieux, le Pacifique. Ayons
le courage de préparer la paix de demain au milieu
des violences d’aujourd’hui.
Contre la tentation de résignation, nous appelons
à garder espoir, avec toutes les Eglises chrétiennes
qui, dans le monde entier, s’expriment ces jours-ci,
et en profonde unité de pensée avec le pape
Jean Paul II, qui multiplie des initiatives pour éviter
la guerre. Avec lui nous disons : "Non à la guerre
! Elle n'est jamais une fatalité. Elle est toujours
une défaite de l'humanité. Le droit international,
le dialogue loyal, la solidarité entre Etats, l'exercice
si noble de la diplomatie, sont les moyens dignes de l'homme
et des nations pour résoudre leurs différends
[…]. La guerre n'est jamais un moyen comme un autre
que l'on peut choisir d'utiliser pour régler des différends
entre nations."
Dans une instante prière, demandons à Dieu
de nous donner force et lumière pour refuser les tentations
illusoires de la violence et pour bâtir la paix.
Au nom de la Conférence des
évêques de France,
Le Conseil permanent :
Le Président : Mgr Jean-Pierre RICARD,
Archevêque de Bordeaux
Le Vice-Président : Mgr Georges PONTIER, Evêque
de La Rochelle
Cardinal Jean-Marie LUSTIGER, Archevêque
de Paris
Mgr Bernard-Nicolas AUBERTIN, Evêque
de Chartres
Mgr Gérard DEFOIS, Archevêque-évêque
de Lille
Mgr Louis DUFAUX, Evêque de Grenoble
Mgr Bernard HOUSSET, Evêque de Montauban
Mgr François-Xavier LOIZEAU, Evêque de Digne
Mgr Yves PATENÔTRE, Evêque de Saint-Claude
Mgr Michel POLLIEN, Evêque auxiliaire de Paris
Mgr Albert ROUET, Archevêque de Poitiers
Mgr Georges SOUBRIER, Evêque de Nantes
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