Lettre d'information

Du corps dans la liturgie


- les laïcs animateurs de la liturgie paraissent spécialement allergiques à la question du vêtement symbolique dans le service liturgique. Peut-être parce qu’ils se voient comme automatiquement avec une "aube" sur le dos et donc "cléricalisés" ou "infantilisés", ce qu’ils ont en effet le droit de refuser. Mais dans les régions où fleurit l’usage du vêtement de fonction liturgique, on constate une grande invention de formes et de couleurs, souvent fort heureuses et fort belles. Manquerions-nous d’imagination ou de talent ? Plutôt de conviction.

De l’immobilité

Toute la célébration est faite pour conduire au silence : plénitude de l’union à Dieu. Le chemin normal de ce silence est une relative immobilité. Immobilité qui n’est pas vide, mais plutôt concentration d’éternité dans l’instant. Non par inertie, mais intense vibration d’univers visible et invisible. Le temps est comme suspendu et l’espace en apesanteur.

Comment cela est-il possible dans une célébration où il y a tant de paroles à dire, tant de chants à chanter, tant de choses à faire ?

Il y a d’abord les temps de silence expressément prévus dans la liturgie après "Prions le Seigneur" ; après une lecture biblique ou l’homélie ; après la communion - à condition que, pendant ces temps de silence, le célébrant ne soit pas en train de tourner les pages du livre pour trouver l’oraison ; que les quêteurs ne quittent pas les rangs pour aller faire la quête ; que le prêtre à la crédence ne soit pas en train de transvaser les ciboires ou de purifier des calices, etc.

Ces temps de silence n’ont pas besoin d’être longs pour être denses. les respecter, c’est mettre dans la célébration des garde-fous contre l’agitation et la superficialité.

Mais il y a aussi et surtout les rites qui ont eux-mêmes à s’emplir de silence et de paix : c’est une lecture lente et dense où on a le sentiment que la "parole écoute" ; c’est un chant qui ne fait pas qu’"exprimer", mais qui "imprime", creuse en profondeur ; c’est un déplacement qui rend présent l’invisible, lui-même immobile.

En un mot, c’est l’onction : la présence agissante de l’Esprit qui remplit tout le corps - individuel et communautaire - et le transfigure. Immobilité vivifiante de qui se laisse transfuser par le divin. (...)

Conclusion

Ces dernières décennies, le corps de l’homme et de la femme s’est "libéré". Grace à cette libération, on peut, dans des groupes de prière, chanter à plein cœur, battre des mains, danser, se prosterner, s’asseoir par terre, etc. La voie est réouverte pour que le corps retrouve sa juste place dans la liturgie.

On ne peut que s’en réjouir. Mais ne croyons pas que la partie soit gagnée ! Nous avons beaucoup à réapprendre. Nous sommes encore gauches, grossiers, malhabiles. Le lien entre nos "expressions" corporelles et l’action de l’Esprit Saint en nous doit faire objet de discernement et de mesure.

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