Lettre d'information

De l’autel comme « seuil »

pour traiter de la signification de l’autel. Le repas est impossible sans le cheminement qui y conduit. Et l’autel doit donc être encore à sa manière le signe de ce cheminement.

Frontière

Si l’autel est seuil, c’est en tant qu’il revêt une double signification : il est à la fois une frontière et un franchissement : « Comme seuil, l’autel forme d’abord une frontière ; la frontière stricte entre l’espace du monde et l’espace de Dieu, entre l’immédiateté de l’humain et la transcendance du divin » (2).

Parler de l’autel comme frontière pourrait susciter des réserves, et cela surtout dans un monde qui tend à refuser les limites et caresse le rêve d’abolir les frontières. De plus, on a souvent souligné que le christianisme rompt avec une géographie sacrale qui a ffecte à certains des espaces réservés. Contrairement au temple païen, l’église chrétienne n’est pas un lieu réservé aux dieux et à ses prêtres, mais le lieu de l’assemblée. Toutefois, dans cette symbolique où les espaces s’offrent comme structures de relation (on pense ici à l’image de l’assemblée comme corps articulé à une tête), la thématique de « l’autel-seuil » est de grande portée. En effet, c’est en inscrivant une frontière et en créant ainsi l’espace spécifique du sanctuaire, que l’autel apporte quelque chose d’essentiel à la liturgie chrétienne. Il porte par sa présence et par la séparation qu’il soutient une économie de la relation à Dieu, une invitation au respect et à la distance nécessaire à la célébration des saints mystères (3).

En soulignant le fait que l’autel délimite l’espace, qu’il le fait en inscrivant une véritable césure et donc une respiration de l’espace, la notion de frontière permet donc de penser la dimension latreutique de la liturgie chrétienne. L’adoration requiert une mise à distance que l’autel produit par son épaisseur même. La densité est donc une qualité essentielle de l’autel chrétien : par elle, l’espace se trouve offert comme un lieu de vie, un lieu où chacun peut recevoir sa place au festin, celle que le maître donne à des invités qu’il veut honorer : « (…) quand tu esinvité, va temettre àla d e rn i è re place, afin qu’à son arrivée celui qui t’a invité te dise : “Mon ami, avance plus haut” » (Lc 14,10).

Passage

« Le seuil n’est pas seulement la limite, mais il est encore son franchissement. Franchir le seuil, c’est passer dans l’autre pièce. Rester sur le seuil, c’est pouvoir accueillir celui qui vient du dehors. De la

sorte, le seuil crée de l’unité, il est le lieu de la liaison et de la rencontre »(4).

Evoquer l’autel à partir de l’idée de « franchissement » ou de « passage » ne va pas de soi. En effet, l’autel est le centre de l’action eucharistique. Il

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