Lettre d'information

Eucharistie et partage

aussi ancienne que l’Église ! Le même Paul développe une théologie du repas du Seigneur qui devait avoir par la suite un large et durable écho, aussi bien dans la pratique que dans le discours théologique. « Un seul pain, un seul corps » : telle est l’affirmation de 1 Corinthiens 10, 16-17, qui se répercute tout au long du chapitre 11.

La section de ce dernier chapitre consacrée au repas du Seigneur (v. 17-34) manifeste avec une force singulière le lien intrinsèque qui doit exister entre eucharistie et partage. En effet, dans la première partie (v. 17-22), Paul reproche aux corinthiens leur conduite éthique lors de ce repas : l’absence de partage entre eux constitue un « mépris de l’Église de Dieu ».

On s’attendrait alors à ce que l’Apôtre, dans la deuxième partie (v. 23-26), argumente à partir d’une parole du Christ qui se situerait au même niveau éthique : par exemple, telle ou telle parole de Jésus sur l’amour du prochain. Or, sa réponse à ce problème éthique est d’ordre « sacramentel » : Paul rapporte le récit de la Cène, tel que les corinthiens le connaissent déjà dans leurs eucharisties. La troisième partie (v. 27-34) fait ressortir la conséquence de ce qui précède : pour célébrer en vérité le repas du Seigneur, pour ne pas manger et boire « sa propre condamnation », il faut « discerner le corps du Seigneur » (v. 29). Cet impératif se présente comme la conclusion logique (« c’est pourquoi » v. 27) non seulement, évidemment, de la 2° partie, « sacramentelle », mais aussi de la première, la partie « éthique ».

Le reproche adressé par Paul aux corinthiens ne porte donc pas sur le fait qu’ils méconnaîtraient la présence sacramentelle du Christ dans le repas qu’ils font « en mémoire de » lui (v. 24-25) - attention ici aux anachronismes qui situeraient le problème sur le terrain de la « présence réelle » (2) - mais sur le fait qu’ils se comportent comme s’ils ne voyaient pas le lien indissoluble qui existe entre le Christ comme corps eucharistique et le Christ comme « corps ecclésial ». C’est le « un seul pain, un seul corps » du chapitre précédent qu’ils méconnaissent.

Le Corps du Christ

Dans la tradition théologique, saint Augustin est sans doute celui qui a le plus clairement et le plus profondément développé la problématique paulinienne qui vient d’être rappelée. On connaît, par exemple, ce célèbre passage du Sermon 272 (adressé aux nouveaux baptisés) :

« Si donc vous êtes le corps du Christ et ses membres (1 Corinthiens 12, 27), c’est votre propre mystère [votre propre "sacrement"] qui repose sur la table du Seigneur, c’est votre propre mystère que vous recevez. A ce que vous êtes, vous répondez : "Amen", et cette réponse marque votre adhésion. Tu entends "Le corps du Christ" et tu réponds "Amen". Sois un membre du corps du Christ pour que ton "amen" soit vrai. »

Augustin ne confond nullement le corps personnel

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