Lettre d'information

L’Art, le lieu d’une rencontre

bien souvent menacé, d’une nature blessée et d’un homme souffrant. Ce regard neuf empreint de bienveillante contemplation pourrait répondre à l’appel pressant d’une humanité lourde d’angoisse et qui attend dans la patience de trouver le sens et la vraie Beauté, afin d’être accueillie, reconnue, pour exister. Il est vrai que l’aspiration à la beauté coïncide avec la recherche de l’Absolu. Les artistes qui parlent souvent d’un dépassement de la figure, de la lumière, de nécessité intérieure, de sens, le savent bien, et souvent, même sans le reconnaître, témoignent de l’unité secrète qui existe entre l’art et la foi. Malgré les impasses, demeure l’inextinguible désir de l’harmonie et de la plénitude. La Bible nomme cette beauté "l’Esprit de Vie", les philosophes parlent d’esthétique. Ne serait-ce pas tout simplement la recherche de Dieu ?

L’art a peut-être une vocation et une fonction qui est celle de réconcilier l’homme avec lui-même, de l’humaniser en l’ouvrant à la Beauté. Il faut entrer à pas lent dans ce dialogue avec l’oeuvre d’art, pour découvrir le temps du recueillement, temps de la découverte qui devient celui de la rencontre. C’est le temps où il faut être assis entre ciel et terre, afin de lier et de délier, de donner à entendre et à vivre ce que l’on a reçu en étant forgé, façonné, sculpté par la matière. Le recueillement, c’est le temps de la patience et de l’estime. Estimer, c’est prendre le temps de se vider de soi-même, de savoir ce dont l’autre est fait, comment il est fait. Cette distance nous permettant d’accueillir également l’art comme une fracture et une blessure. Apprendre à rechercher, comme à l’intérieur d’un cloître, le temps du passage, afin que nous puissions devenir des passeurs, des passeurs d’hommes, découvrant le sentiment du dépouillement et la force de l’attente.

Témoigner de la beauté est une mission de l’Église afin de susciter un regard lumineux et libérateur. Rechercher, chercher à devenir libres parce que disponibles à la connaissance du monde et à l’expérience spirituelle. L’art vise le sens, la signification, le pourquoi. La science cherche le comment, l’art est révélateur d’une attente.

Le philosophe Schopenhauer écrit : "Face à l’ouvre d’art, vous devez vous comporter comme si vous étiez publiquement reçu par un grand seigneur, vous devez attendre qu’elle vous parle". Autant dire qu’une attention dépouillée d’impatience, exempte de la prétention de savoir ou d’assurer sa maîtrise, est la meilleure condition pour entrer en communication avec les œuvres d’art. Il faut leur laisser l’initiative, le temps d’apparaître et, comme l’oiseau de Prévert, elles apparaissent quand elles le veulent et comme elles le veulent. Il faut savoir attendre et leur laisser le loisir de venir librement vers nous.

La présence de l’Autre

Si nous abordons l’oeuvre de Fra Angelico du couvent San Marco de Florence et en particulier la

<< 1 2 3 4 5 >>

Enregistrer au format PDF  Version imprimable de cet article

Sur le même thème :